TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1] Copie conforme délivrée
le : 11/07/2024
à : Maitre Corinne ARDOUIN
Maitre Philippe RIGLET
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Pôle civil de proximité
PCP JTJ proxi référé
N° RG 24/01731
N° Portalis 352J-W-B7I-C4LD6
N° MINUTE : 1/2024
ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 11 juillet 2024
DEMANDEURS
Monsieur [J] [C], demeurant [Adresse 1]
Madame [O] [W] épouse [C], demeurant [Adresse 1]
représentés par Maitre Corinne ARDOUIN, avocate au barreau de PARIS, vestiaire : #A0549
DÉFENDERESSE
La S.A.S. CP RESORTS EXPLOITATION FRANCE, dont le siège social est sis [Adresse 4]
représentée par Maitre Philippe RIGLET, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #P0008 substitué par Maître Christelle LE CALVEZ de la SELAFA CMS FRANCIS LEFEBVRE AVOCATS, avocate au barreau de HAUTS-DE-SEINE,
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Marie-Laure KESSLER, Vice-Présidente, statuant en juge unique
assistée de Delphine VANHOVE, Greffier,
DATE DES DÉBATS
Audience publique du 30 mai 2024
ORDONNANCE
contradictoire et en premier ressort prononcée par mise à disposition le 11 juillet 2024 par Marie-Laure KESSLER, Vice-Présidente, juge des contentieux de la protection assistée de Delphine VANHOVE, Greffier
Décision du 11 juillet 2024
PCP JTJ proxi référé - N° RG 24/01731 - N° Portalis 352J-W-B7I-C4LD6
EXPOSÉ DU LITIGE
M. [J] [C] et Mme [O] [W] épouse [C] sont propriétaires du lot n°1069 correspondant à un cottage dans un ensemble immobilier à usage de résidence de tourisme exploité sous l’enseigne [2], situé à [Localité 3] (41) dans la région naturelle forestière de Sologne.
Par acte sous seing privé à effet au 19 décembre 2011, M. [J] [C] et Mme [O] [W] épouse [C] ont consenti un bail commercial portant sur leur lot à la société PV-CP RESORT France, devenue CP HOLDING, aux droits de laquelle vient désormais la société CP RESORTS EXPLOITATION FRANCE, appartenant au groupe PIERRE & VACANCES CENTER PARCS.
Par acte de commissaire de justice signifié le 20 février 2024, M. [J] [C] et Mme [O] [W] épouse [C] ont fait assigner la société CP RESORTS EXPLOITATION FRANCE devant le juge des référés du pôle civil de proximité du tribunal judiciaire de Paris, lui demandant, au visa des articles 834 et 835 du code de procédure civile et 1134 ancien, 1217, 1728, 1741, 1218, 1709, 1719 ainsi que 1722 du code civil, de :
- condamner la société CP RESORTS EXPLOITATION FRANCE à leur verser la somme provisionnelle de 9.152,28 euros ;
- condamner la société CP RESORTS EXPLOITATION FRANCE à lui verser la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
L’affaire a été appelée à l’audience du 4 avril 2024 et a été renvoyée à la demande des parties à l’audience du 30 mai 2024.
M. [J] [C] et Mme [O] [W] épouse [C], représentés par leur conseil, ont déposé des conclusions au titre desquelles ils maintiennent les demandes formées dans leur acte introductif d’instance et sollicitent le débouté des exceptions d’incompétence et fins de non-recevoir formulées par la société CP RESORTS EXPLOITATION FRANCE.
Au soutien de leurs demandes et en réponse à l’exception d’incompétence soulevée par la société CP RESORTS EXPLOITATION FRANCE, M. [J] [C] et Mme [O] [W] épouse [C] exposent que leur demande étant une demande en paiement de loyers impayés et non une demande ayant trait au statut des baux commerciaux et que cette demande étant inférieure à 10.000 euros, le juge des référés du pôle civil de proximité est compétent pour en connaître en application du tableau IV-II visé à l’article D.212-19-1 du code de l’organisation judiciaire. Elle ajoute que l’article 145-23 du code de commerce donnant compétence au tribunal judiciaire du lieu de situation de l’immeuble ne s’applique qu’aux contestations relatives au bail commercial et non au recouvrement de loyers impayés.
La société CP RESORTS EXPLOITATION FRANCE, représentée par son conseil, a déposé des conclusions soutenues oralement à l’audience au titre desquelles elle forme les demandes suivantes :
Se déclarer incompétent pour connaître des demandes de M. et Mme [C],En conséquence, renvoyer l’affaire devant la juridiction compétente,A titre principal,Juger irrecevables les demandes de M. et Mme [C],En tout état de cause,Débouter les demandeurs de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions à l’encontre de la société CP RESORTS EXPLOITATION FRANCE,Condamner in solidum les demandeurs à lui verser la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Décision du 11 juillet 2024
PCP JTJ proxi référé - N° RG 24/01731 - N° Portalis 352J-W-B7I-C4LD6
La société CP RESORTS EXPLOITATION FRANCE expose que l’article L.212-8 du code de l’organisation judiciaire donne compétence exclusive au tribunal judiciaire en matière de baux commerciaux, qu’en application de l’article R.145-23 du code de commerce, les contestations autres que celles relatives à la fixation du prix du bail révisé ou renouvelé sont de la compétence du tribunal judiciaire sans que l’on doive distinguer entre les litiges relatifs à l’interprétation du statut des baux commerciaux et les litiges faisant application des règles de droit commun. La défenderesse ajoute que les tableaux IV-II et IV-III ne mentionnent aucune compétence des tribunaux de proximité en matière de baux commerciaux. Elle ajoute qu’en application de l’article 145-23 du code de commerce, le tribunal compétent est celui du lieu de situation de l’immeuble, soit le tribunal judiciaire de Blois.
Pour l'exposé des moyens de fond développés par chacune des parties, il sera renvoyé aux conclusions qu'elles ont soutenues oralement à l'audience du 30 mai 2024, conformément aux dispositions de l'article 455 alinéa 1 du code de procédure civile.
Après les débats, l'affaire a été mise en délibéré au 11 juillet 2024 par mise à disposition au greffe.
MOTIFS DE LA DÉCISION
SUR LES EXCEPTIONS D’INCOMPETENCE MATERIELLE ET TERRITORIALE SOULEVEES PAR LA SOCIETE CP RESORTS EXPLOITATION FRANCE
Selon l'article L.211-3 du code de l'organisation judiciaire, le tribunal judiciaire connaît de toutes les affaires civiles et commerciales pour lesquelles compétence n'est pas attribuée, en raison de la nature de la demande, à une autre juridiction.
Selon l'article L.211-4 du même code, le tribunal judiciaire a par ailleurs compétence exclusive dans les matières déterminées par les lois et règlements. Parmi celles-ci, l'article R.211-3-26 11° vise les baux commerciaux, à l'exception des contestations relatives à la fixation du prix du bail révisé ou renouvelé, baux professionnels et conventions d'occupation précaire en matière commerciale.
Par ailleurs, en application de l'article 761 du code de procédure civile, les parties sont dispensées de constituer avocat dans les cas prévus par la loi ou le règlement et dans les cas suivants : 1° Dans les matières relevant de la compétence du juge des contentieux de la protection ; 2° Dans les matières énumérées par les articles R. 211-3-13 à R. 211-3-16, R. 211-3-18 à R. 211-3-21, R.211-3-23 du code de l'organisation judiciaire et dans les matières énumérées au tableau IV-II annexé au code de l'organisation judiciaire ; 3° A l'exclusion des matières relevant de la compétence exclusive du tribunal judiciaire, lorsque la demande porte sur un montant inférieur ou égal à 10 000 euros ou a pour objet une demande indéterminée ayant pour origine l'exécution d'une obligation dont le montant n'excède pas 10 000 euros. Le montant de la demande est apprécié conformément aux dispositions des articles 35 à 37. Lorsqu'une demande incidente a pour effet de rendre applicable la procédure écrite ou de rendre obligatoire la représentation par avocat, le juge peut, d'office ou si une partie en fait état, renvoyer l'affaire à une prochaine audience tenue conformément à la procédure applicable et invite les parties à constituer avocat. Dans les matières relevant de la compétence exclusive du tribunal judiciaire, les parties sont tenues de constituer avocat, quel que soit le montant de leur demande.
Enfin, l'article 775 du code de procédure civile dispose que la procédure est écrite sauf disposition contraire.
Décision du 11 juillet 2024
PCP JTJ proxi référé - N° RG 24/01731 - N° Portalis 352J-W-B7I-C4LD6
Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que la matière des baux commerciaux relève, sauf exceptions rappelées ci-dessus, de la compétence exclusive du tribunal judiciaire, et qu'elle voit s'appliquer la procédure écrite avec représentation obligatoire.
En l'espèce, il ressort des éléments du dossier que M. et Mme [C] se trouvent liés à la société CP RESORTS EXPLOITATION FRANCE par un bail commercial conclu le 19 décembre 2011.
Il importe peu à cet égard, d'une part que les demandeurs invoquent au soutien de leurs prétentions les dispositions du code civil et non les articles du code du commerce propres aux baux commerciaux. En effet, dès lors que les parties au litige se trouvent liées par un bail commercial – dont la qualification au demeurant ne se trouve pas contestée –, l'affaire ressort bien de « la matière » des baux commerciaux selon la formulation retenue par l'article R.211-3-26 11°, de sorte qu'elle relève de la compétence exclusive du tribunal judiciaire et voit s'appliquer la procédure avec représentation obligatoire.
De plus l’article R.145-23 du code de commerce dispose :
« les contestations relatives à la fixation du prix du bail révisé ou renouvelé sont portées, quel que soit le montant du loyer, devant le président du tribunal judiciaire ou le juge qui le remplace. Il est statué sur mémoire.
Les autres contestations sont portées devant le tribunal judiciaire qui peut, accessoirement, se prononcer sur les demandes mentionnées à l'alinéa précédent.
La juridiction territorialement compétente est celle du lieu de la situation de l'immeuble. »
La juridiction territorialement compétente en matière de baux commerciaux étant celle du lieu de situation de l’immeuble et le bien objet du bail commercial se situant à [Localité 3], le tribunal territorialement compétent pour connaître du litige est le tribunal judiciaire de Blois.
En conséquence, il y a lieu de faire droit à l'exception d'incompétence soulevée par la société CP RESORTS EXPLOITATION FRANCE et de se déclarer incompétent au profit du Président du tribunal judiciaire de Blois.
L'instance se poursuivant devant le tribunal judiciaire de Blois, il n'y a pas lieu de statuer au fond ni sur les demandes fondées sur les articles 700 et 696 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
Le tribunal judiciaire, statuant en référé, par mise à disposition au greffe, par ordonnance contradictoire, et en premier ressort ;
Au principal, RENVOYONS les parties à se pourvoir au fond ainsi qu’elles aviseront, mais, dès à présent,
Nous DECLARONS incompétent au profit du Président du tribunal judiciaire de Blois, statuant en référé ;
ORDONNONS la transmission du dossier, à l’expiration du délai d'appel de 15 jours prévu par l’article 82 du code de procédure civile, greffe du service des référés du tribunal judiciaire de Blois, qui se chargera à réception du dossier de fixer une date d'audience et de convoquer les parties et/ou leurs conseils ;
RESERVONS les dépens et les demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition les jour, mois et an susdits par la Présidente et la Greffière susnommées.
La greffière La présidente