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05/07/2024 | FRANCE | N°24/01393

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp fond, 05 juillet 2024, 24/01393


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à : Monsieur [L] [H]


Copie exécutoire délivrée
le :
à : Maître Maxime TONDI

Pôle civil de proximité


PCP JCP fond

N° RG 24/01393 - N° Portalis 352J-W-B7I-C35UB

N° MINUTE :







JUGEMENT
rendu le vendredi 05 juillet 2024


DEMANDERESSE
Madame [F] [J],
demeurant [Adresse 2]
représentée par Maître Maxime TONDI de la SELARL TONDI MAXIME, avocats au barreau de VAL-DE-MARNE,


DÉFENDEU

R
Monsieur [L] [H],
demeurant [Adresse 1]
non comparant, ni représenté



COMPOSITION DU TRIBUNAL
Frédéric GICQUEL, Juge des contentieux de la protection
assisté de Jean-François ...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à : Monsieur [L] [H]

Copie exécutoire délivrée
le :
à : Maître Maxime TONDI

Pôle civil de proximité

PCP JCP fond

N° RG 24/01393 - N° Portalis 352J-W-B7I-C35UB

N° MINUTE :

JUGEMENT
rendu le vendredi 05 juillet 2024

DEMANDERESSE
Madame [F] [J],
demeurant [Adresse 2]
représentée par Maître Maxime TONDI de la SELARL TONDI MAXIME, avocats au barreau de VAL-DE-MARNE,

DÉFENDEUR
Monsieur [L] [H],
demeurant [Adresse 1]
non comparant, ni représenté

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Frédéric GICQUEL, Juge des contentieux de la protection
assisté de Jean-François SEGOURA, Greffier,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 03 avril 2024

JUGEMENT
réputé contradictoire, en premier ressort, prononcé par mise à disposition le 05 juillet 2024 par Frédéric GICQUEL, Juge assisté de Jean-François SEGOURA, Greffier

Décision du 05 juillet 2024
PCP JCP fond - N° RG 24/01393 - N° Portalis 352J-W-B7I-C35UB

EXPOSÉ DU LITIGE

Madame [F] [J] est propriétaire d'un studio situé [Adresse 1] à [Localité 3] dont elle a hérité de Monsieur [N] [P] décédé le 4 mai 2022 et qui est actuellement occupé par Monsieur [L] [H].

Par acte de commissaire de justice du 14 novembre 2023, Madame [F] [J] a fait sommation à Monsieur [L] [H] de quitter les lieux pour le 30 novembre 2023.

Puis par acte de commissaire de justice du 22 décembre 2023, Madame [F] [J] a fait assigner Monsieur [L] [H] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris aux fins d'obtenir avec exécution provisoire son expulsion sans délai sous astreinte de 75 euros par jour à compter du jugement à intervenir, la suppression du délai de deux mois prévu à l'article L.412-1 du code des procédures civiles d'exécution et sa condamnation au paiement d'une indemnité mensuelle d'occupation de 1 000 euros à compter du 1er décembre 2023 ainsi qu'aux charges du logement, outre 8 000 euros de dommages et intérêts et 3 000 euros au titre des frais irrépétibles et aux dépens comprenant le coût de la sommation de quitter les lieux.

Au soutien de ses prétentions, Madame [F] [J] fait valoir en application des articles 1815 et suivants du code civil que Monsieur [N] [P] a prêté le logement litigieux à titre temporaire à Monsieur [L] [H] et qu'à la suite de la délivrance de la sommation de quitter les lieux il se trouve déchu de tout droit d'occupation. Elle estime par ailleurs que son refus de partir constitue un abus de droit et lui cause un préjudice dont elle demande réparation.

À l'audience du 3 avril 2024, Madame [F] [J], représentée par son conseil, a maintenu ses demandes.

Assigné selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile, faute pour le commissaire de justice d'avoir pu déterminer son domicile actuel, Monsieur [L] [H] n'a pas comparu et ne s'est pas fait représenter. La lettre recommandée a été retournée au commissaire de justice avec la mention "pli avisé et non réclamé ".

En application de l'article 473 du code de procédure civile, la décision étant susceptible d'appel, il sera statué par jugement réputé contradictoire.

La décision a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 5 juillet 2024.

MOTIFS

Aux termes de l'article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

Sur l'expulsion en raison de l'occupation devenue sans droit ni titre du logement

En vertu de l'article 544 du code civil, la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements.

En application des dispositions des articles 1875, 1876 du code civil, le prêt à usage est un contrat, essentiellement à titre gratuit, par lequel l'une des parties livre une chose à l'autre pour s'en servir, à la charge pour le preneur de la rendre après s'en être servi.

Il résulte des dispositions de l'article 1888 du code civil que lorsqu'aucun terme n'a été convenu pour le prêt d'une chose à usage permanent, sans qu'aucun terme naturel ne soit prévisible, le prêteur est en droit d'y mettre fin à tout moment en respectant un préavis raisonnable.

En l'espèce, il ressort du procès-verbal de constat établi le 13 décembre 2022 que Monsieur [L] [H] occupe les lieux et que Madame [F] [J] devenue propriétaire du bien à la suite du décès de Monsieur [N] [P] a entendu mettre fin au prêt à usage consenti à l’occupant en lui faisant délivrer une sommation de quitter les lieux le 14 novembre 2023.

Le défendeur, non comparant, n'apporte par définition aucun élément de nature à remettre en cause le principe de ce prêt à usage notamment aucun justificatif de règlement d'un loyer de nature à caractériser l'existence d'un bail verbal.

Enfin, il sera relevé que si le délai initialement imparti pour quitter les lieux est bref puisque limité seulement à 15 jours, Monsieur [L] [H] a de fait bénéficié depuis la délivrance de la sommation de quitter les lieux d'un délai de plus de six mois pour libérer le logement, ce qui constitue un délai raisonnable.

Dès lors, l'occupation des lieux de manière illicite est établie et justifie de faire droit à la demande d'expulsion. Il convient donc d'ordonner l'expulsion de Monsieur [L] [H], selon les modalités détaillées dans le dispositif de la présente décision.

Il n'est pas contesté que Monsieur [L] [H] n'est pas entré par voie de fait dans le logement litigieux qu'il occupe manifestement depuis plusieurs années. Dès lors qu'aucune circonstance particulière de l'espèce ne justifiant que le délai de deux mois prévu par les dispositions des articles L. 412-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution soit réduit ou supprimé, il convient donc d'indiquer que passé le délai de deux mois suivant la signification du commandement d'avoir à libérer les lieux, il pourra être procédé à cette expulsion, avec le concours de la force publique.

Il n'apparaît pas non plus nécessaire d'assortir l'obligation de quitter les lieux d'une astreinte. En effet, la condamnation au paiement d'une indemnité mensuelle d'occupation (voir ci-après), de nature à réparer le préjudice subi par la propriétaire satisfait déjà l'objectif assigné à l'astreinte en cette matière par l'article L.421-2 du code des procédures civiles d'exécution.

Il sera rappelé enfin que le sort du mobilier garnissant le logement est prévu par les articles L.433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution dont l'application relève, en cas de difficulté -laquelle n'est à ce stade que purement hypothétique-, de la compétence du juge de l'exécution et non de la présente juridiction.

Sur la demande d'indemnité d'occupation

La mise à disposition du bien ayant été qualifiée de prêt, aucune indemnité d'occupation ne saurait être mise à la charge de l'emprunteur pour la durée du prêt. Toutefois, en ce que le prêt est désormais terminé, une indemnité d'occupation pourra être mise à la charge du défendeur à compter de ce jour.

En effet, le maintien dans des lieux malgré la déchéance du droit d'occupation constitue une faute civile de nature quasi délictuelle ouvrant droit à réparation en ce qu'elle cause un préjudice certain pour le propriétaire dont l'occupation indue de son bien l'a privé de sa jouissance. Au-delà de cet aspect indemnitaire, l'indemnité d'occupation, qui est également de nature compensatoire, constitue une dette de jouissance correspondant à la valeur équitable des locaux.

En l'espèce, Madame [F] [J] ne fournit aucun justificatif sur les caractéristiques des lieux occupés ni de simulation de location dans le quartier. Toutefois, au regard de la nécessité de rendre dissuasive l'occupation tout en compensant le préjudice subi par la propriétaire des lieux, l'indemnité d'occupation peut être fixée à 500 euros par mois.

Ainsi afin de respecter le délai de préavis raisonnable précédemment évoqué Monsieur [N] [P] sera condamné au paiement de cette somme à compter de la présente décision et jusqu'à libération effective des lieux. Le défendeur sera en outre tenu au règlement des charges locatives sur présentation des justificatifs des charges dûment acquittées.

Sur la demande de dommages et intérêts

L'article 1231-6 du code civil dispose en son alinéa 1er que les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure.

Aux termes de l'alinéa 3, le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts de l'intérêt moratoire.

Dans la mesure où il ressort des éléments ci-dessus mentionnés que Monsieur [L] [H] disposait d'un prêt à usage lui permettant d'occuper les lieux, aucune résistance abusive ne saurait lui être reprochée.

L'abus n'étant pas caractérisé par des circonstances particulières et la mauvaise foi du défendeur n'étant pas suffisamment spécifiés au dossier de la propriétaire, la demande indemnitaire au titre d'une résistance abusive sera écartée.

Sur les mesures accessoires

Monsieur [L] [H], qui perd le procès, sera condamné aux dépens.

Il est rappelé que la sommation de quitter les lieux, non requis pour l'instance, ne relève pas des dépens (cf. énumération de l’article 695 du code de procédure civile) . La demande formulée à ce titre sera rejetée.

Il serait par ailleurs inéquitable de laisser à la charge de Madame [F] [J] les frais exposés par elle dans la présente procédure et non compris dans les dépens. La somme de 800 euros lui sera donc allouée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La présente décision est exécutoire à titre provisoire, conformément à l'article 514 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le juge des contentieux de la protection statuant publiquement, après débats en audience publique, par jugement mis à disposition au greffe réputé contradictoire et en premier ressort,

CONSTATE que Monsieur [L] [H] est occupant sans droit ni titre du logement situé [Adresse 1] à [Localité 3],

ORDONNE en conséquence à Monsieur [L] [H] de libérer les lieux et de restituer les clés dans le délai de quinze jours à compter de la signification du présent jugement,

DIT qu'à défaut pour Monsieur [L] [H] d'avoir volontairement libéré les lieux et restitué les clés dans ce délai, Madame [F] [J] pourra deux mois après la signification d'un commandement de quitter les lieux faire procéder à son expulsion ainsi qu'à celle de tous occupants de son chef, y compris le cas échéant avec le concours d'un serrurier et de la force publique,

DÉBOUTE Madame [F] [J] de sa demande de suppression du délai prévu par les articles L.412-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution,

DÉBOUTE Madame [F] [J] de sa demande d'astreinte,

DIT n'y avoir lieu à ordonner l'enlèvement, le transport et la séquestration des meubles éventuellement laissés sur place et rappelle que le sort du mobilier garnissant le logement est prévu par les articles L.433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution,

CONDAMNE Monsieur [L] [H] à verser à Madame [F] [J] une indemnité d'occupation de 500 euros par mois à compter de ce jour et jusqu'à la date de la libération effective et définitive des lieux (volontaire ou en suite de l'expulsion),

CONDAMNE Monsieur [L] [H] au règlement des charges locatives dues à compter de ce jour, sur présentation des justificatifs y afférents,

DÉBOUTE Madame [F] [J] de sa demande de dommages et intérêts,

CONDAMNE Monsieur [L] [H] à verser à Madame [F] [J] une somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code procédure civile,

REJETTE les demandes plus amples ou contraires,

CONDAMNE Monsieur [L] [H] aux dépens comme visé dans la motivation,

RAPPELLE que le présent jugement est de plein droit exécutoire à titre provisoire

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition les jour, mois et an susdits par le Juge des contentieux de la protection et le Greffier susnommés.

Le Greffier Le Juge des contentieux de la protection


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp fond
Numéro d'arrêt : 24/01393
Date de la décision : 05/07/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 16/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-05;24.01393 ?
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