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04/07/2024 | FRANCE | N°24/03858

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp référé, 04 juillet 2024, 24/03858


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le : 04/07/2024
à : Maître Madjemba DJASSAH
Monsieur [R] [L]
Monsieur [O] [W]
Monsieur [Y] [C]

Copie exécutoire délivrée
le : 04/07/2024
à : Maître Sylvie JOUAN

Pôle civil de proximité

PCP JCP référé

N° RG 24/03858
N° Portalis 352J-W-B7I-C4SB4

N° MINUTE : 2/2024



ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 04 juillet 2024





DEMANDERESSE
S.A. ADOMA, dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée pa

r Maître Sylvie JOUAN de la SCP JOUAN WATELET, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : #P0226

DÉFENDEURS
Monsieur [E] [C], demeurant [Adresse 3]
comparant en personne ass...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le : 04/07/2024
à : Maître Madjemba DJASSAH
Monsieur [R] [L]
Monsieur [O] [W]
Monsieur [Y] [C]

Copie exécutoire délivrée
le : 04/07/2024
à : Maître Sylvie JOUAN

Pôle civil de proximité

PCP JCP référé

N° RG 24/03858
N° Portalis 352J-W-B7I-C4SB4

N° MINUTE : 2/2024

ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 04 juillet 2024

DEMANDERESSE
S.A. ADOMA, dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Maître Sylvie JOUAN de la SCP JOUAN WATELET, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : #P0226

DÉFENDEURS
Monsieur [E] [C], demeurant [Adresse 3]
comparant en personne assisté de Maître Madjemba DJASSAH, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : #E1054
Monsieur [J] [C], demeurant [Adresse 3]
comparant en personne assisté de Maître Madjemba DJASSAH, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : #E1054
Monsieur [R] [L], demeurant [Adresse 3]
non comparant, ni représenté
Monsieur [O] [W], demeurant [Adresse 3]
non comparant, ni représenté
Monsieur [Y] [C], demeurant [Adresse 3]
non comparant, ni représenté

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Yasmine WALDMANN, Juge, juge des contentieux de la protection
assistée de Alexandrine PIERROT, Greffière,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 10 juin 2024

ORDONNANCE
réputée contradictoire et en premier ressort prononcée par mise à disposition le 04 juillet 2024 par Yasmine WALDMANN, Juge, juge des contentieux de la protection assistée de Alexandrine PIERROT, Greffière
Décision du 04 juillet 2024
PCP JCP référé - N° RG 24/03858 - N° Portalis 352J-W-B7I-C4SB4

EXPOSÉ DU LITIGE

Par contrat de résidence prenant effet le 08/11/2016, la société anonyme d'économie mixte ADOMA, ci-après désignée SA ADOMA, a attribué à [G] [C] le logement portant le numéro B015 au sein de la résidence sociale située [Adresse 2], pour une durée d'un mois renouvelable par tacite reconduction, pour une même durée, moyennant une redevance mensuelle de 451,37 euros au jour de la conclusion du contrat, ce montant évoluant chaque année conformément à la réglementation en vigueur.

Par actes de commissaire de justice remis en date des 13/03/2024 à étude,13/03/2024 à étude, 13/03/2024 selon les dispositions de l'article 659 du code de procédure civile, 13/03/2024 selon les dispositions de l'article 659 du code de procédure civile, 13/03/2024 selon les dispositions de l'article 659 du code de procédure civile, la SA ADOMA a respectivement fait assigner [E] [C], [J] [C], [R] [L], [O] [W], [Y] [C] et [H] [T] devant la juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de PARIS, statuant en référé, aux fins de voir :
- constater que [E] [C], [J] [C], [R] [L], [O] [W], [Y] [C] et [H] [T] sont occupants sans droit ni titre des lieux ;
- ordonner leur expulsion du foyer-logement ainsi que celle de tous occupants de leur chef, au besoin avec l'assistance de la force publique ;
- les condamner in solidum à payer :
- une indemnité d'occupation mensuelle provisionnelle de 600 euros à compter de la délivrance de l'assignation et jusqu'à la libération effective des lieux ;
- la somme de 600 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner les défendeurs aux entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions, la SA ADOMA fait valoir, au visa des articles L633-1 et suivants et R633-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation, qu'elle a appris en 28/10/2023 que le titulaire du contrat de résidence, [G] [C], était décédé et que plusieurs autres personnes, dont ses deux fils [E] [C] et [J] [C], occupaient son logement sans autorisation.

L'affaire était appelée à l'audience du 08/04/2024 et faisait l'objet d'un renvoi avant d'être examinée à l'audience du 10/06/2024.

La SA ADOMA, représentée par son conseil, maintient les termes de son acte introductif d'instance. Au surplus, elle s'oppose à la demande reconventionnelle en transfert de bail et à la demande d'octroi d'un délai supplémentaire pour quitter les lieux.

Elle indique notamment que le résident titulaire est décédé le 28/08/2018 mais n'avoir été informée de ce décès qu'en octobre 2023, suite à la désignation d'un commissaire de justice pour constater les conditions d'occupation des lieux. Elle précise que le transfert de bail ne peut être accordée dans le cadre d'une convention de résidence temporaire, et que les contestations soulevées par les défendeurs ne sont pas sérieuses. Elle ajoute que les occupants ont déjà disposé d'un délai de fait de plusieurs années dans les lieux, alors qu'il est nécessaire que la chambre soit libérée afin de pouvoir être réattribuée par la Préfecture.

[E] [C] et [J] [C], assistés de leur conseil, sollicitent en vertu de leurs dernières écritures soutenues oralement à l'audience, de voir :
- constater qu'il n'y a pas lieu à référé et renvoyer la requérante au fond ;
- à titre subsidiaire : constater le transfert du contrat de résidence entre la SA ADOMA et [J] [C] ;
- à titre infiniment subsidiaire : accorder un délai de 12 mois à [J] [C] pour qu'il puisse se reloger ;
- en tout état de cause : rejeter la demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et écarter l'exécution provisoire de la décision.

[R] [L], [O] [W], [Y] [C] et [H] [T], régulièrement avisés, ne comparaissent pas et ne sont pas représentés.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, il est renvoyé à l'assignation et aux conclusions des parties dont les termes ont été développés oralement à l'audience.

L'affaire a été mise en délibéré au 04/07/2024 par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande d'expulsion en raison de l'occupation illicite du logement

En application de l'article 835 alinéa 1er du code de procédure civile, le juge des contentieux de la protection, dans les limites de sa compétence, peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Le trouble manifestement illicite est la perturbation résultant d'un fait matériel ou juridique qui, directement ou indirectement, constitue une violation évidente de la règle de droit.

En vertu de l'article 544 du code civil, la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règle-ments.

L'occupation sans droit ni titre du bien d'autrui constitue un tel trouble manifestement illicite au-quel il appartient au juge des référés de mettre fin.

En l'espèce, il résulte des pièces versées aux débats que [E] [C] et [J] [C] occupent le logement litigieux, appartenant à la SA ADOMA, à des fins d'habitation. En effet, dans son procès-verbal de constat du 23/10/2023, le commissaire de justice a rencontré sur place [E] [C], qui lui a indiqué occuper les lieux depuis 1995, et [J] [C]. [E] [C] a également informé au cours de cette intervention que [G] [C] était décédé. Selon l'acte d'état civil produit, [G] [C] est décédé le 28/08/2018.

[E] [C] et [J] [C] soulèvent une contestation en invoquant une occupation de fait depuis plusieurs années et donc l'absence d'urgence, et en sollicitant le transfert du bail fondé sur l'usage pratiqué dans les résidences sociales.

Toutefois, aucune disposition légale ou règlementaire ne prévoit le transfert d'un contrat de résidence temporaire, de sorte que la demande de transfert de bail n'est pas une contestation sérieuse. Aussi, la SA ADOMA ne fonde pas sa demande sur l'urgence, mais sur le trouble manifestement illicite, qui est constitué par le seul constat d'une occupation des lieux sans titre d'occupation. Le fait qu'[E] [C] occupe la chambre depuis de nombreuses années et ait une place importante de médiateur au sein de la résidence n'est pas de nature à lui octroyer un titre d'occupation. La SA ADOMA s'oppose au maintien de [E] [C] et [J] [C] dans les lieux.

Dès lors, l'occupation des lieux par [E] [C] et [J] [C], de même que le défaut de tout droit ou titre d'occupation, la SA ADOMA n'ayant nullement consenti à une telle occupation.

Il convient donc d'ordonner l'expulsion de [E] [C] et [J] [C], selon les modalités détaillées dans le dispositif de la présente décision.

Décision du 04 juillet 2024
PCP JCP référé - N° RG 24/03858 - N° Portalis 352J-W-B7I-C4SB4

S'agissant des demandes d'expulsion à l'encontre de [R] [L], [O] [W], [Y] [C] et [H] [T], il résulte des débats à l'audience qu'ils ont été occupants des lieux du fait de [E] [C] et [J] [C].

Sur la provision au titre de l'indemnité d'occupation

Aux termes de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le juge des contentieux de la protection, dans les limites de sa compétence, peut accorder une provision au créancier.

Le maintien dans des lieux sans droit ni titre constitue une faute civile de nature quasi délictuelle ouvrant droit à réparation en ce qu'elle cause un préjudice certain pour le propriétaire dont l'occupation indue de son bien l'a privé de sa jouissance et de la possibilité de le louer à une autre personne remplissant les conditions d'attribution du logement.

En l'espèce afin de préserver les intérêts de la SA ADOMA, il convient de dire que [E] [C] et [J] [C] seront redevables in solidum, à son égard, d'une indemnité d'occupation mensuelle à compter du 13/03/2024, date de l'assignation, et jusqu'à libération effective des lieux.

Compte tenu, d'une part, des caractéristiques des lieux occupés et, d'autre part, de la nécessité de rendre dissuasive l'occupation tout en compensant le préjudice subi par la demanderesse, l'indem-nité d'occupation peut être fixée à 500 euros par mois. [E] [C] et [J] [C] seront ainsi condamnés in solidum au paiement de cette somme à titre provisionnel.

Sur la demande reconventionnelle d'octroi d'un délai de 12 mois pour quitter les lieux

Aux termes des dispositions combinées des articles L613-1 du code de la construction et de l'habitation, L412-3, L412-4, L412-6 à L412-8 du code des procédures civiles d'exécution, le juge peut accorder des délais aux occupants de locaux d'habitation dont l'expulsion a été ordonnée judiciairement chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales. Pour la fixation de ces délais, il doit notamment tenir compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l'occupant dans l'exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l'occupant, notamment en ce qui concerne l'âge, l'état de santé, la situation de famille ou de fortune de chacun d'eux ainsi que des diligences que l'occupant justifie avoir faites en vue de son relogement. La durée de ces délais ne peut être inférieure à un mois ni supérieure à un an.

En l'espèce, [J] [C] sollicite des délais de 12 mois et produit pour justifier de sa situation son titre de séjour, son bulletin de salaire de décembre 2023, la preuve du règlement des redevances locatives, le justificatif d'une demande de logement social auprès de CDC HABITAT le 22/11/2022 et sa dernière déclaration de revenus.

S'il résulte de ces pièces que [J] [C] fait preuve de bonne volonté dans l'exécution de ses obligations en réglant la redevance et en cherchant un logement social et démontre d'une situation sociale et financière fragile, il ne justifie pas néanmoins avoir informé la SA ADOMA de son occupation des lieux et du décès de son père en août 2018. Aussi, il ne justifie pas d'une recherche de logement dans tout le parc social.

En outre, il convient de prendre également en compte la situation de la SA ADOMA qui exerce une activité sociale et dois pouvoir disposer rapidement des chambres attribuées par la Préfecture pour loger des personnes en situation précaire et inscrites sur la liste d'attente.

Dans ces conditions, il convient d'accorder à [J] [C] un délai supplémentaire restreint, soit d'un mois, pour quitter les lieux.

Il convient de rappeler que le défendeur bénéficie de fait du délai de deux mois suivant la déli-vrance d'un commandement de quitter les lieux.

Sur les demandes accessoires

Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

Compte tenu de la situation respective des parties, chacune conservera la charge de ses propres dépens.

En application de l'article 700 du même code, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée.

Au regard de la situation des parties et en équité, il n'y a pas lieu de prononcer de condamnation à ce titre.

La présente décision est exécutoire à titre provisoire, conformément à l'article 514 du code de procédure civile. Il n'y a pas lieu d'écarter cette exécution provisoire.

PAR CES MOTIFS

La juge des contentieux de la protection, statuant en référé, après débats en audience publique, par ordonnance contradictoire, rendue en premier ressort par mise à disposition au greffe,

Au principal, RENVOIE les parties à se pourvoir ainsi qu'elles aviseront mais, dès à présent,

CONSTATE que [E] [C] et [J] [C] sont occupants sans droit ni titre du logement portant le numéro B015 au sein de la résidence sociale située [Adresse 2];

ORDONNE en conséquence à [E] [C] de libérer les lieux immédiatement à compter de la signification de la présente décision ;

ORDONNE en conséquence à [J] [C] de libérer les lieux à compter du 05/08/2024 ;

DIT qu'à défaut pour [E] [C] et [J] [C] d'avoir volontairement libéré les lieux dans les délais, la SA ADOMA pourra, deux mois après la signification d'un commandement de quitter les lieux, faire procéder à leur expulsion ainsi qu'à celle de tous occupants de leur chef, notamment de [R] [L], [O] [W], [Y] [C] et [H] [T], y compris le cas échéant avec le concours d'un serrurier et de la force publique ;

CONDAMNE in solidum [E] [C] et [J] [C] à verser à la SA ADOMA une indemnité provisionnelle mensuelle d'occupation d'un montant de 500 euros à compter du 13/03/2024 et jusqu'à la date de la libération effective et définitive des lieux constituée par la remise des clefs ou un procès-verbal d'expulsion ;

DIT n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

DIT que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens ;

DIT n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire que la présente ordonnance.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe les jour, mois et an susdits, et signé par la juge et la greffière susnommées.

La greffière,La juge des contentieux de la protection,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp référé
Numéro d'arrêt : 24/03858
Date de la décision : 04/07/2024
Sens de l'arrêt : Expulsion "ferme" ordonnée en référé (sans suspension des effets de la clause résolutoire)

Origine de la décision
Date de l'import : 11/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-04;24.03858 ?
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