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04/07/2024 | FRANCE | N°24/02984

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp référé, 04 juillet 2024, 24/02984


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le : 04/07/2024
à : Maître Rémi PRADES


Copie exécutoire délivrée
le : 04/07/2024
à : Maître David HONORAT

Pôle civil de proximité

PCP JCP référé

N° RG 24/02984
N° Portalis 352J-W-B7I-C4KSZ

N° MINUTE : 1/2024






ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 04 juillet 2024


DEMANDERESSE
S.A.S. UNEDIS, représentée par son Président, Monsieur [B] [F], dont le siège social est sis [Adresse 1]

comparante en person

ne assistée de Maître David HONORAT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #E0122

DÉFENDEURS
Monsieur [G] [E], demeurant [Adresse 2]

Madame [A] [C], demeurant [Adresse...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le : 04/07/2024
à : Maître Rémi PRADES

Copie exécutoire délivrée
le : 04/07/2024
à : Maître David HONORAT

Pôle civil de proximité

PCP JCP référé

N° RG 24/02984
N° Portalis 352J-W-B7I-C4KSZ

N° MINUTE : 1/2024

ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 04 juillet 2024

DEMANDERESSE
S.A.S. UNEDIS, représentée par son Président, Monsieur [B] [F], dont le siège social est sis [Adresse 1]

comparante en personne assistée de Maître David HONORAT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #E0122

DÉFENDEURS
Monsieur [G] [E], demeurant [Adresse 2]

Madame [A] [C], demeurant [Adresse 2]

représentés par Maître Rémi PRADES de la SELEURL PH AVOCATS, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : #P136 substituée par Maître Maya DAMI, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Yasmine WALDMANN, Juge, juge des contentieux de la protection
assistée de Alexandrine PIERROT, Greffière,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 10 juin 2024

ORDONNANCE
contradictoire et en premier ressort prononcée par mise à disposition le 04 juillet 2024 par Yasmine WALDMANN, Juge, juge des contentieux de la protection assistée de Alexandrine PIERROT, Greffière
Décision du 04 juillet 2024
PCP JCP référé - N° RG 24/02984 - N° Portalis 352J-W-B7I-C4KSZ

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous seing privé à effet au 01/01/2021 d'une durée de trois ans renouvelable tacitement, la SAS UNEDIS a donné à bail à [G] [D] et [A] [C] un appartement meublé à usage d'habitation, un parking et une cave, sis [Adresse 3], pour un loyer mensuel initial de 900 euros dont 35 euros de charges provisionnelles payable annuellement à terme échu.

Par exploit de commissaire de justice remis en date du 16/05/2023, la SAS UNEDIS a fait signifier à [G] [D] et [A] [C] un congé pour vente à effet au 31/12/2023 minuit.

Par actes de commissaire de justice du 01/03/2024 remis à étude, la SAS UNEDIS a assigné [G] [D] et [A] [C] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris, statuant en référé, au visa des articles 834 et 835 du code de pro-cédure civile.

L'affaire était appelée à l'audience du 23/04/2024 et faisait l'objet d'un renvoi avant d'être finalement examinée à l'audience du 10/06/2024.

La SAS UNEDIS, représentée par son conseil, sollicite en vertu de ses dernières conclusions soutenues oralement à l'audience, de voir :
- recevoir la SAS UNEDIS en sa fin de non-recevoir et dire que la demande reconventionnelle requalification du bail meublé en date du 01/01/2021 en bail d'habitation vide est prescrite ;
- constater que [G] [D] et [A] [C] sont déchus de plein droit de tout titre d'occupation des locaux situés [Adresse 3] à compter du 31/12/2023 à minuit, par l'effet du congé pour vente délivré le 16/05/2023 ;
- prononcer l'expulsion sans délai de [G] [D] et [A] [C], occupante sans droit ni titre des lieux sis [Adresse 3], et de tous autres occupants de son chef, à compter de la signification de l'ordonnance à intervenir, avec l'assistance du commissaire de police et d'un serrurier, si besoin ;
- ordonner la séquestration des meubles et objets mobiliers garnissant les lieux en tel garde-meubles qu'il plaira au tribunal de céans, aux frais, risques et périls des défendeurs ;
- débouter [G] [D] et [A] [C] de l'ensemble de ses demandes et notamment sa demande reconventionnelle de délais pour quitter les lieux ;
- condamner solidairement [G] [D] et [A] [C] à payer une indemnité d'occupation provisionnelle de 10800 euros ;
- condamner solidairement [G] [D] et [A] [C] à payer la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et au paiement des dépens.
Elle se désiste de sa demande de condamnation en paiement de la somme de 11122,69 euros au titres des loyers et charges de l'année 2023.

[G] [D] et [A] [C], représentés par leur conseil, sollicitent aux termes de leurs dernières écritures, reprises oralement à l'audience, et au visa des dispositions des articles 12, 484, 514-1, 834 et 835 du code de procédure civile, 1240 et 2241 du code civil, L227-6 du code de commerce, de la loi du 6 juillet 1989, de voir :
A titre principal :
- dire n'y avoir lieu à référé ;
- débouter la demanderesse de l'intégralité de ses demandes ;
Décision du 04 juillet 2024
PCP JCP référé - N° RG 24/02984 - N° Portalis 352J-W-B7I-C4KSZ

A titre subsidiaire :
- constater que [B] [F], en qualité de président de la SAS UNEDIS, n'avait pas la capacité de délivrer un congé pour vente ;
- requalifier le contrat de location d'un logement meublé en contrat de location d'un logement vide ;
- constater que le congé pour vente délivré par la SAS UENDIS en matière de loca-tion d'un logement vide n'est pas valide ;
- débouter la SAS UNEDIS de sa demande de paiement de la somme de 11122,69 eu-ros au titre des loyers et charges ;
- débouter la SAS UNEDIS de toute autre demande ;
A titre très subsidiaire :
- constater que le congé pour vente délivré matière de location d'un logement meublé n'est pas valide ;
- débouter la SAS UNEDIS de toutes ses demandes ;
A titre infiniment subsidiaire :
- octroyer un délai de trois ans avant l'expulsion ;
En tout état de cause :
- condamner la SAS UNEDIS à leur payer la somme de 10000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
- condamner la SAS UNEDIS à leur payer la somme de 6000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et au paiement des dépens.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé aux écritures déposées et développées oralement à l'audience.

La décision a été mise en délibéré au 04/07/2024 par mise à disposition au greffe.

MOTIFS

En application des dispositions des articles 834 et 835 du code de procédure civile, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.
Le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Le trouble manifestement illicite est la perturbation résultant d'un fait matériel ou juridique qui, directement ou indirectement, constitue une violation évidente de la règle de droit.

En vertu de l'article 544 du code civil, la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements.

L'occupation sans droit ni titre du bien d'autrui constitue un trouble manifestement illicite auquel il appartient au juge des référés de mettre fin.

Le juge apprécie souverainement le choix de la mesure conservatoire ou de remise en état propre à faire cesser le trouble manifestement illicite.

Les dispositions de l'article 835 alinéa 1 du code de procédure civile ne sont pas soumises aux conditions de l'article 834 du code de procédure civile, à savoir l'urgence et l'absence de contestation sérieuse.

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la demande reconventionnelle de requalification du contrat de bail d'habitation

Le juge des référés n'est pas compétent pour trancher sur la requalification d'un bail. Néanmoins, il entre dans sa compétence de statuer sur les fins de non-recevoir et leur bien fondé, quand elles portent sur une demande ou un moyen de droit soulevé par les parties.

Aux termes de l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

En vertu de l'article 7-1 alinéa 1 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, toutes actions dérivant d'un contrat de bail sont prescrites par trois ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer ce droit.

En l'espèce, la requérante fait valoir la prescription de la demande reconventionnelle de requalification du bail à usage d'habitation meublé en bail à usage d'habitation vide soulevée par les défendeurs.

Ces derniers contestent cette fin de non-recevoir, estimant qu'en ne maintenant pas leur demande au titre du congé pour vente devant le juge des contentieux de la protection statuant en matière de clause résolutoire et en ne produisant pas le mandat de vente conclu le 05/01/2024 suite à la sommation interpellative d'avoir à produire les éléments justifiant de la vente remise à la SAS UNEDIS le 04/04/2024, la SAS UNEDIS a agi de manière frauduleuse et a empêché les défendeurs de soulever la demande de requalification avant la présence procédure. Selon eux, en leur laissant croire qu'elle abandonnait toute demande au titre du congé, et en ne produisant pas le mandat, la SAS UNEDIS a empêché l'exercice de leur droit en demande de requalification du bail dans le délai de prescription.

Toutefois, il résulte du contrat de location produit qu'il a été signé par les parties le 01/01/2021 pour une entrée dans les lieux à cette même date. Le contrat mentionne clairement en en-tête " locaux meublés à usage d'habitation ". Il est également inscrit en en-tête que le contrat est soumis aux dispositions de la loi du 6 juillet 1989.

En page 6 du contrat de bail, il est stipulé que l'état détaillé du mobilier est annexé.

Il est constant et non contesté que les défendeurs occupent effectivement le bien depuis le 01/01/2021.

Dans ces conditions, il est manifeste que c'est le 01/01/2021 que [G] [D] et [A] [C] ont connu les faits leur permettant d'exercer leur droit, soit la qualification du contrat de bail. Le délai de prescription de trois ans a donc commencé à courir le 01/01/2021.

Les moyens soulevés par les défendeurs ne démontrent pas de l'existence d'une fraude commise par la SAS UNEDIS de nature à interrompre le délai de prescription. En effet, le contrat de bail n'est entaché d'aucune fraude et les parties de soulèvent aucun moyen en ce sens, et le choix de procédure et d'action de la requérante n'empêchait en rien les défendeurs de soulever à titre reconventionnelle une demande de requalification de bail devant le juge du fond. De même, l'absence de production du mandat de vente malgré la sommation interpellative n'empêchait pas les défendeurs de saisir le juge du fond d'une demande de requalification du contrat de bail.
Il sera enfin relevé que [G] [D] et [A] [C] ont assigné la SAS UNEDIS le 19/05/2023 devant le juge du fond aux fins de suspension des effets de la clause résolutoire, et étaient donc en mesure de solliciter la requalification du bail, le congé pour vente ayant déjà été délivré le 16/05/2023. Il n'existe donc aucune cause de suspension ou interruption du délai de prescription, qui a commencé à courir le 01/01/2021 et s'est éteint le 01/01/2024.

Par conséquent, la demande de requalification du contrat de bail invoquée au cours de la présente procédure initiée le 01/03/2024, soit postérieurement au 01/01/2024, est prescrite et ne peut constituer un moyen de défense recevable.

Sur le congé délivré par la bailleresse et ses conséquences

Selon l'article 1737 du code civil, le bail cesse de plein droit à l'expiration du terme fixé, lorsqu'il a été fait par écrit, sans qu'il soit nécessaire de donner congé.

L'article 1738 du même code précise que si, à l'expiration des baux écrits, le preneur reste et est laissé en possession, il s'opère un nouveau bail dont l'effet est réglé par l'article relatif aux locations faites sans écrit.

Enfin, en application de l'article 1739, lorsqu'il y a un congé signifié, le preneur quoiqu'il ait continué sa jouissance, ne peut invoquer la tacite reconduction.

En vertu de l'article 25-8 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 dans sa version applicable au litige, le bailleur qui ne souhaite pas renouveler le contrat doit informer le locataire avec un préavis de trois mois et motiver son refus de renouvellement du bail soit par sa décision de reprendre ou de vendre le logement, soit par un motif légitime et sérieux, notamment l'inexécution par le locataire de l'une des obligations lui incombant.

A peine de nullité, le congé donné par le bailleur doit indiquer le motif allégué et, en cas de reprise, les nom et adresse du bénéficiaire de la reprise ainsi que la nature du lien existant entre le bailleur et le bénéficiaire de la reprise qui ne peut être que le bailleur, son conjoint, le partenaire auquel il est lié par un pacte civil de solidarité enregistré à la date du congé, son concubin notoire depuis au moins un an à la date du congé, ses ascendants, ses descendants ou ceux de son conjoint, de son partenaire ou de son concubin notoire.

En cas de contestation, le juge peut, même d'office, vérifier la réalité du motif du congé et le respect des obligations prévues au présent article. Il peut notamment déclarer non valide le congé si la non-reconduction du bail n'apparaît pas justifiée par des éléments sérieux et légitimes.

Le congé doit être notifié par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou signifié par acte d'un commissaire de justice ou remis en main propre contre récépissé ou émargement. Ce délai court à compter du jour de la réception de la lettre recommandée ou de la signification de l'acte du commissaire de justice ou de la remise en main propre.

Il ne rentre pas dans les pouvoirs du juge des référés de prononcer la validité du congé mais uniquement de faire cesser le trouble manifestement illicite résultant de la poursuite de l'occupation après la date d'effet du congé.

En l'espèce, le bail consenti à [G] [D] et [A] [C] à effet au 01/01/2021 prévoyait une échéance initiale au 31/12/2023.

La SAS UNEDIS a fait délivrer un congé pour vente à chacun des locataires le 16/05/2023 par commissaire de justice. Ce congé indique le motif du congé ainsi que sa date d'effet à échéance du bail, le 31/12/2023 à minuit.

[G] [D] et [A] [C] contestent la validité du congé pour vente, en raison de l'absence de qualité pour délivrer ce congé de [B] [F], de l'absence d'élément sérieux et légitime venant corroborer l'intention de vendre, de l'impossibilité de vendre le bien sans vote des associés de la SAS UNEDIS dont [G] [D] fait partie. Ils ajoutent qu'il n'est pas de la compétence du juge des référés d'apprécier la réalité et le sérieux du motif du congé délivré et les contestations sérieuses soulevées.

Cependant, s'il n'est pas de la compétence du juge des référés de valider ou d'annuler un congé pour vente, il est de sa compétence d'évaluer l'existence ou non d'un trouble manifestement illicite et de contestations sérieuses de nature à renverser le caractère manifestement illicite de l'occupation.

Or, en l'espèce, il résulte des statuts de la SAS UNEDIS et de l'article L227-6 du code de commerce que le président d'une société par actions simplifiées est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société dans la limite de l'objet social.

Il résulte de l'extrait Kbis de la SAS UNEDIS et des statuts que son objet social est la propriété de tous biens et droits immobiliers que la société acquiert, la gestion et l'exploitation de ces biens et droits, sous forme de location ou autre.

Il ressort de ces éléments que la gestion locative d'un bien immobilier lui appartenant entre dans l'objet social de la SAS UNEDIS. Le président de la SAS UNEDIS détient de manière manifeste le pouvoir de délivrer un congé afin de faire cesser un bail de location en cours sur une des propriétés immobilières de la SAS UNEDIS.

Le moyen tiré du défaut de qualité n'est pas sérieux et sera écarté.

[G] [D] et [A] [C] soulèvent également l'impossibilité de vendre le bien sans accord des associés, et donc de [G] [D]. Ils en concluent l'absence de caractère légitime et sérieux du motif de vente.

Néanmoins, et comme le soutient la SAS UNEDIS, la seule opposition de [G] [D] à la vente d'un bien appartenant à la société n'est pas de nature à empêcher entièrement cette vente, un administrateur ad'hoc pouvant par exemple être désigné. En outre, la SAS UNEDIS produit un mandat de vente avec la société FRENCH IMMOBILIER le 05/01/2024 pour un montant de 575000 euros portant sur le bien immobilier litigieux. La SAS UNEDIS produit également le contrat de prêt immobilier portant sur ce bien immobilier, et le tableau d'amortissement prévoyant des mensualités de remboursement à hauteur de 3254,04 euros à compter du 05/10/2023, alors que les défendeurs règlent un loyer moyen de 935 euros par mois.

Les défendeurs soulèvent le fait que le contrat de prêt immobilier ait été conclu pour une durée de 10 ans, induisant ainsi des mensualité élevée, mais cela ne modifie en rien l'analyse de la situation et la nécessité de régler les mensualités de remboursement de prêt.

Dans ces conditions, [G] [D] et [A] [C] ne soulèvent aucune contestation sérieuse de nature à remettre en cause la volonté et la possibilité manifeste de vendre le bien immobilier de la SAS UNEDIS.

Décision du 04 juillet 2024
PCP JCP référé - N° RG 24/02984 - N° Portalis 352J-W-B7I-C4KSZ

Enfin, le congé délivré par la bailleresse contient toutes les dispositions légales imposées par les textes susvisés, a été délivré plus de trois mois avant le terme du contrat de bail, soit le 16/05/2024, et a indiqué la date de l'échéance du bail, soit le 31/12/2023 à minuit.

Il sera relevé que les défendeurs n'ont pas saisi le juge du fond en demande d'annulation du congé pendant le délai de préavis.

Il résulte de ces éléments que le congé a pris tous ses effets le 31/12/2023 à minuit. Depuis cette date, [G] [D] et [A] [C] ne disposent plus de titre d'occupation.

Par conséquent, en se maintenant dans les lieux postérieurement à cette date sans l'autorisation de la SAS UNEDIS, [G] [D] et [A] [C] lui a causé un trouble manifestement illicite.

Il convient donc d'ordonner leur expulsion, selon les modalités détaillées au dispositif de la décision.

La bailleresse sera autorisée à faire procéder à la séquestration des meubles dans tout garde meuble de son choix aux frais, risques et péril de [G] [D] et [A] [C] à défaut de local désigné, le sort des meubles étant régi par les articles L433-1 et L433-2 du code des procédures civiles d'exécution, le cas échéant.

Sur la demande de suppression du délai de deux mois

Il résulte de l'article L412-1 du code des procédures civiles d'exécution, auquel renvoie l'article L613-1 du code de la construction et de l'habitation, que si l'expulsion porte sur un local affecté à l'habitation principale de la personne expulsée ou de tout occupant de son chef, elle ne peut avoir lieu qu'à l'expiration d'un délai de deux mois qui suit le commandement, sans préjudice des dispositions des articles L412-3 à L412-7. Toutefois, le juge peut, notamment lorsque la procédure de relogement effectuée en application de l'article L442-4-1 du code de la construction et de l'habitation n'a pas été suivie d'effet du fait du locataire, réduire ou supprimer ce délai.

Le délai prévu au premier alinéa du présent article ne s'applique pas lorsque le juge qui ordonne l'expulsion constate que les personnes dont l'expulsion a été ordonnée sont entrées dans les locaux par voie de fait.

En l'espèce, les conditions ne sont pas réunies pour supprimer le délai de deux mois suivant la délivrance d'un commandement de quitter les lieux, [G] [D] et [A] [C] n'étant pas entrés dans les locaux par voie de fait mais en vertu de leur contrat de bail.

Par conséquent, la demande à ce titre sera rejetée.

Sur la demande reconventionnelle d'octroi de délais pour quitter les lieux

Aux termes des dispositions combinées des articles L613-1 du code de la construction et de l'habitation, L412-3, L412-4, L412-6 à L412-8 du code des procédures civiles d'exécution, le juge peut accorder des délais aux occupants de locaux d'habitation dont l'expulsion a été ordonnée judiciairement chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales. Pour la fixation de ces délais, il doit notamment tenir compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l'occupant dans l'exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l'occupant, notamment en ce qui concerne l'âge, l'état de santé, la situation de famille ou de fortune de chacun d'eux ainsi que des diligences que l'occupant justifie avoir faites en vue de son relogement. La durée de ces délais ne peut être inférieure à un mois ni supérieure à un an.

Les défendeurs soulèvent l'absence de caractère proportionné de leur expulsion en vertu d'un contrôle de conventionnalité et de constitutionnalité. Ils soutiennent qu'un contrôle de proportionnalité doit être fait entre leur droit au logement digne au regard du but poursuivi, soit la reprise de la jouissance d'un bien immobilier par la SAS UNEDIS.

En l'espèce, [G] [D] et [A] [C] ne produisent aucune pièce sur leur situation personnelle, professionnelle, financière et sociale. Ils ne démontrent pas d'une recherche de logement dans le parc privé ou social. Ils affirment rencontrer des difficultés de fait pour trouver un logement à [Localité 4] compte tenu de la tension sur le parc locatif, mais ne justifient d'absolument aucune recherche ou tentative du moins.

La SAS UNEDIS produit quant à elle le prêt immobilier associé au bien occupé, le montant des mensualités à régler soit 3254 euros à compter d'octobre 2023 alors que le loyer réglé par les défendeurs est de 926 euros, et le mandat de vente conclu le 05/01/2024.

Il convient également de prendre en compte la date de délivrance du congé, soit le 16/05/2023, et la date de fin de bail, soit le 31/12/2023. Les défendeurs ont donc bénéficié de fait d'un délai de près d'un an pour chercher un nouveau logement, et occupent le bien depuis plus de six mois sans titre.

Enfin, les défendeurs bénéficient du délai légal de deux mois suivant la délivrance d'un commandement de quitter les lieux.

Dans ces conditions, et après un contrôle de proportionnalité et la prise en compte de la situation de chacune des parties tel qu'elles en justifient, la demande d'octroi d'un délai supplémentaire sera rejetée.

Sur la demande en paiement de l'indemnité d'occupation

Le maintien dans les lieux postérieurement à la date d'expiration du bail constitue une faute civile ouvrant droit à réparation en ce qu'elle cause un préjudice certain pour le propriétaire dont l'occupation indue de son bien l'a privé de sa jouissance. Au delà de cet aspect indemnitaire, l'indemnité d'occupation, qui est également de nature compensatoire, constitue une dette de jouissance correspondant à la valeur équitable des locaux.

[G] [D] et [A] [C] seront ainsi condamnés solidairement au paiement d'une indemnité mensuelle d'occupation provisionnelle de 900 euros, soit le montant du loyer qui aurait été payé si le bail s'était poursuivi, pour la période courant à compter du 01/01/2024, date d'effet de la résiliation du bail, et jusqu'à la date de la libération effective et définitive des lieux.

Sur la demande de dommages et intérêts

En vertu de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

[G] [D] et [A] [C] sollicitent la condamnation de la SAS UNEDIS au paiement de la somme de 10000 euros en raison du caractère abusif de la procédure.

Néanmoins, et compte tenu de la solution du litige, la demande de condamnation au titre de la procédure abusive n'est pas justifiée et sera rejetée.

Sur les demandes accessoires

[G] [D] et [A] [C], parties succombantes, seront tenus in solidum aux dépens, en application de l'article 696 du code de procédure civile.

[G] [D] et [A] [C] seront condamnés in solidum à verser la somme de 800 euros à la SAS UNEDIS au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'exécution provisoire est de droit et sera rappelée.

PAR CES MOTIFS

La juge des contentieux de la protection statuant en référé, après débats en audience pu-blique, par ordonnance contradictoire, mise à disposition au greffe en premier ressort,

RENVOIE les parties à mieux se pourvoir au fond, et dès à présent vu le trouble manifestement illicite,

DECLARE IRRECEVABLE la demande reconventionnelle en requalification du contrat de bail conclu le 01/01/2021 entre la SAS UNEDIS et [G] [D] et [A] [C] sur les locaux sis [Adresse 3] ;

CONSTATE que les conditions de délivrance le 16/05/2024 à [G] [D] et [A] [C] d'un congé pour vente relatif au bail à effet au 01/01/2021, concernant l'appartement à usage d'habitation meublé (avec parking et cave) situé [Adresse 3], sont réunies et que le bail a ainsi expiré le 31/12/2023 à minuit ;

DIT qu'à défaut pour [G] [D] et [A] [C] d'avoir volontairement libéré les lieux et restitué les clés immédiatement après la signification de la présente décision, la SAS UNEDIS pourra faire procéder à leur expulsion ainsi qu'à celle de tous occupants de leur chef, y compris le cas échéant avec le concours d'un serrurier et de la force publique, et ce deux mois après la signification d'un commandement de quitter les lieux ;

REJETTE la demande de suppression du délai de deux mois pour quitter les lieux suivant délivrance d'un commandement de quitter les lieux ;

REJETTE la demande reconventionnelle d'octroi d'un délai supplémentaire pour quitter les lieux ;

AUTORISE la SAS UNEDIS à faire procéder à la séquestration des meubles se trouvant dans les lieux dans tout garde meuble de son choix aux frais, risques et péril de [G] [D] et [A] [C] à défaut de local désigné ;

RAPPELLE que le sort du mobilier garnissant le logement est prévu par les articles L433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution ;

CONDAMNE solidairement [G] [D] et [A] [C] à verser à la SAS UNEDIS une indemnité mensuelle d'occupation provisionnelle d'un montant de 900 euros (charges comprises), à compter du 01/01/2024 et jusqu'à la date de la libération effective et définitive des lieux, caractérisée par la restitution des clés ou un procès-verbal d'expulsion ou de reprise ;

REJETTE la demande reconventionnelle de dommages et intérêts ;

CONDAMNE solidairement [G] [D] et [A] [C] à verser à la SAS UNEDIS la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE [G] [D] et [A] [C] aux entiers dépens de l'instance ;

RAPPELLE que l'exécution provisoire est de droit.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe, les jour, mois et an susdits, et signé par la juge et la greffière susnommées.

La greffière, La juge des contentieux de la protection,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp référé
Numéro d'arrêt : 24/02984
Date de la décision : 04/07/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs en accordant des délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 10/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-04;24.02984 ?
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