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04/07/2024 | FRANCE | N°23/07132

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp acr fond, 04 juillet 2024, 23/07132


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à : Maître Frédéric DROUARD


Copie exécutoire délivrée
le :
à : Maître Myriam CALESTROUPAT

Pôle civil de proximité


PCP JCP ACR fond

N° RG 23/07132 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2XDG

N° MINUTE : 1







JUGEMENT
rendu le 04 juillet 2024

DEMANDEUR

S.C.I. [Adresse 2], dont le siège social est sis [Adresse 2] - [Localité 1]
représenté par Maître Myriam CALESTROUPAT de la SCP CALESTROUPAT THOMAS

ET ASSOCIES, avocats au barreau de SEINE-SAINT-DENIS,

DÉFENDEURS

Monsieur [T] [H] [S] [M],
représenté par Maître Frédéric DROUARD de la SCP BOULAN KOERFER PERRAULT & ASSO...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à : Maître Frédéric DROUARD

Copie exécutoire délivrée
le :
à : Maître Myriam CALESTROUPAT

Pôle civil de proximité

PCP JCP ACR fond

N° RG 23/07132 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2XDG

N° MINUTE : 1

JUGEMENT
rendu le 04 juillet 2024

DEMANDEUR

S.C.I. [Adresse 2], dont le siège social est sis [Adresse 2] - [Localité 1]
représenté par Maître Myriam CALESTROUPAT de la SCP CALESTROUPAT THOMAS ET ASSOCIES, avocats au barreau de SEINE-SAINT-DENIS,

DÉFENDEURS

Monsieur [T] [H] [S] [M],
représenté par Maître Frédéric DROUARD de la SCP BOULAN KOERFER PERRAULT & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : #P0378
Madame [P] [V] [Y],
assistée par Maître Frédéric DROUARD

demeurant ensemble [Adresse 2] [Localité 1]

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Anne BRON, Vice-présidente, juge des contentieux de la protection
assistée de Lisa BOUCHEMMA, Greffière,

DATE DES DÉBATS

Audience publique du 29 avril 2024

JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort prononcé par mise à disposition le 04 juillet 2024 par Anne BRON, juge des contentieux de la protection assistée de Sanaâ AOURIK, Greffière
Décision du 04 juillet 2024
PCP JCP ACR fond - N° RG 23/07132 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2XDG

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Par acte sous seing privé du 6 septembre 2019, la société SCI [Adresse 2] a consenti un bail d’habitation à M. [T] [H] [S] [M] et Mme [P] [V] [Y] sur des locaux situés au [Adresse 2] à [Localité 3].

Par actes de commissaire de justice du 30 mars 2023, la bailleresse a fait délivrer aux locataires un commandement de payer la somme principale de 4122,20 euros au titre de l'arriéré locatif, visant la clause résolutoire prévue dans le contrat.

La commission de coordination des actions prévention des expulsions locatives a été informée de la situation de M. [T] [H] [S] [M] et Mme [P] [V] [Y] le 3 avril 2023.

Par assignations du 21 août 2023, la société SCI [Adresse 2] a ensuite saisi le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris pour faire constater l’acquisition de la clause résolutoire, être autorisée à faire procéder à l’expulsion de M. [T] [H] [S] [M] et Mme [P] [V] [Y] et obtenir leur condamnation au paiement des sommes suivantes :

Solidairement une indemnité mensuelle d’occupation de 921 euros, à compter de la résiliation du bail et jusqu’à libération des lieux,Solidairement 7325,65 euros au titre de l’arriéré locatif arrêté au 10 août 2023,In solidum 1800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
L’assignation a été notifiée au représentant de l’État dans le département le 23 août 2023, mais aucun diagnostic social et financier n'est parvenu au greffe avant l'audience.

À l'audience du 29 avril 2024, la société SCI [Adresse 2] maintient l'intégralité de ses demandes, et précise que la dette locative, actualisée au 17 avril 2024, s'élève désormais à 7132,66 euros.

M. [T] [H] [S] [M] et Mme [P] [V] [Y] sollicitent des délais de paiement et la suspension des effets de la clause résolutoire pendant le cours des délais de paiement. Ils s’opposent à la demande relative aux frais irrépétibles et dépens.

À l’issue des débats, la décision a été mise en délibéré jusqu’à ce jour, où elle a été mise à disposition des parties au greffe.

MOTIVATION

1. Sur la demande de constat de la résiliation du bail

1.1. Sur la recevabilité de la demande

La société SCI [Adresse 2] justifie avoir notifié l’assignation au représentant de l’État dans le département plus de six semaines avant l’audience.

Elle justifie également avoir saisi la commission de coordination des actions prévention des expulsions locatives deux mois au moins avant la délivrance de l’assignation.

Son action est donc recevable au regard des dispositions de l’article 24 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989.

1.2. Sur la résiliation du bail

Aux termes de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989, dans sa version en vigueur à la date de la conclusion du contrat de bail litigieux, toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux.

En l’espèce, un commandement de payer reproduisant textuellement les dispositions légales et la clause résolutoire contenue dans le contrat de location a été signifié aux locataires le 30 mars 2023. Or, d’après l'historique des versements, la somme de 4122,20 euros n’a pas été réglée par ces derniers dans le délai de deux mois suivant la signification de ce commandement et aucun plan d’apurement n’a été conclu dans ce délai entre les parties.

La bailleresse est donc bien fondée à se prévaloir des effets de la clause résolutoire, dont les conditions sont réunies depuis le 31 mai 2023.

Cependant, selon l’article 24 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, le juge peut, à la demande du locataire, du bailleur ou d'office, à la condition que le locataire soit en situation de régler sa dette locative et qu'il ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l'audience, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, par dérogation au délai prévu au premier alinéa de l'article 1343-5 du code civil, au locataire en situation de régler sa dette locative.

Lorsque le juge est saisi en ce sens par le bailleur ou par le locataire, et à la condition que celui-ci ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l'audience, les effets de la clause de résiliation de plein droit peuvent être suspendus pendant le cours des délais ainsi accordés par le juge. Cette suspension prend fin dès le premier impayé ou dès lors que le locataire ne se libère pas de sa dette locative dans le délai et selon les modalités fixés par le juge. Ces délais et les modalités de paiement accordés ne peuvent affecter l'exécution du contrat de location et notamment suspendre le paiement du loyer et des charges. Si le locataire se libère de sa dette locative dans le délai et selon les modalités fixés par le juge, la clause de résiliation de plein droit est réputée ne pas avoir joué. Dans le cas contraire, elle reprend son plein effet.

En l’espèce, M. [T] [H] [S] [M] et Mme [P] [V] [Y] ont repris le paiement du loyer courant avant l’audience et font état de démarches de nature à leur permettre d’assumer le paiement d’une somme supplémentaire tous les mois en plus du loyer courant afin de régler leur dette.

Dans ces conditions, il convient de leur accorder des délais de paiement pour s’acquitter des sommes dues, selon les modalités prévues ci-après, et de faire droit à la demande de M. [T] [H] [S] [M] et Mme [P] [V] [Y] de suspension les effets de la clause résolutoire durant le cours de ces délais.

En cas de respect de ces modalités de paiement, la clause résolutoire sera donc réputée n’avoir pas joué, et l’exécution du contrat de bail pourra se poursuivre.

L’attention des locataires est toutefois attirée sur le fait qu’à défaut de paiement d’une seule échéance comprenant le loyer et la mensualité d’apurement, la clause résolutoire sera acquise, et le bail résilié de plein droit, sans qu’une nouvelle décision de justice ne soit nécessaire : dans ce cas, et pour le cas où les lieux ne seraient pas libérés spontanément, la bailleresse pourra faire procéder à leur expulsion, et à celle de tout occupant de leur chef.

2. Sur la dette locative

Aux termes de l’article 1353 du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver tandis que celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement.

L'article 1103 du même code prévoit, par ailleurs, que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

En l’espèce, la société SCI [Adresse 2] verse aux débats un décompte démontrant qu’à la date du 17 avril 2024, M. [T] [H] [S] [M] et Mme [P] [V] [Y] lui devaient la somme de 7132,66 euros, terme d’avril inclus.

M. [T] [H] [S] [M] et Mme [P] [V] [Y] n’apportant aucun élément de nature à remettre en cause ce montant, ils seront solidairement condamnés à payer cette somme à la bailleresse.

Toutefois, eu égard aux délais de paiement évoqués ci-avant, il convient de différer l'exigibilité de cette somme en autorisant M. [T] [H] [S] [M] et Mme [P] [V] [Y] à se libérer de cette dette selon les modalités détaillées ci-après.

3. Sur l’indemnité d’occupation due en cas de résiliation du bail

Il y a lieu d’allouer à la demanderesse, dans l’hypothèse du maintien dans les lieux des défendeurs ou de toute personne de son chef après la résiliation du bail, une indemnité d’occupation de 921 euros, conformément à la demande, le juge ne pouvant statuer ultra petita, ce jusqu’à la libération des lieux.

Il est fait droit à la demande de condamnation solidaire, la solidarité étant expressément prévue au contrat tant pour le paiement du loyer que pour l’indemnité d’occupation.

4. Sur les frais du procès et l'exécution provisoire

Aux termes de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité et de la situation économique de la partie condamnée.

M. [T] [H] [S] [M] et Mme [P] [V] [Y], qui succombent à la cause, seront in solidum condamnés aux dépens de la présente instance, conformément à l’article 696 du code de procédure civile.

En revanche, l’équité justifie de rejeter la demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Selon l'article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

Toutefois, selon l’article 514-1 du même code, le juge peut écarter l'exécution provisoire de droit, en tout ou partie, s'il estime qu'elle est incompatible avec la nature de l'affaire. Il statue, d'office ou à la demande d'une partie, par décision spécialement motivée.

En l'espèce, il n'y a pas lieu d'écarter l'exécution provisoire de la présente décision.

PAR CES MOTIFS,

La juge des contentieux de la protection, statuant après débats publics, par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,

CONSTATE que la dette locative visée dans le commandement de payer du 30 mars 2023 n’a pas été réglée dans le délai de deux mois,

CONSTATE, en conséquence, que le contrat conclu le 6 septembre 2019 entre la société SCI [Adresse 2], d’une part, et M. [T] [H] [S] [M] et Mme [P] [V] [Y], d’autre part, concernant les locaux situés au [Adresse 2] à [Localité 3] est résilié depuis le 31 mai 2023,

CONDAMNE solidairement M. [T] [H] [S] [M] et Mme [P] [V] [Y] à payer à la société SCI [Adresse 2] la somme de 7132,66 euros (sept mille cent trente-deux euros et soixante-six centimes) au titre de l’arriéré locatif arrêté au 17 avril 2024, terme d’avril inclus,

AUTORISE M. [T] [H] [S] [M] et Mme [P] [V] [Y] à se libérer de leur dette en réglant chaque mois pendant 6 mois, en plus du loyer courant, une somme minimale de 10 euros puis chaque mois pendant 30 mois en plus du loyer courant une somme minimale de 150 euros, la dernière échéance étant majorée du solde de la dette en principal, intérêts et frais,

DIT que les règlements devront intervenir en même temps que le loyer, au plus tard le dixième jour de chaque mois, sauf meilleur accord entre les parties,

SUSPEND les effets de la clause résolutoire pendant l’exécution des délais de paiement accordés à M. [T] [H] [S] [M] et Mme [P] [V] [Y],

DIT que si les délais accordés sont entièrement respectés, la clause résolutoire sera réputée n’avoir jamais été acquise,

DIT qu’en revanche, pour le cas où une mensualité, qu'elle soit due au titre du loyer et des charges courants ou de l’arriéré, resterait impayée,

le bail sera considéré comme résilié de plein droit depuis le 31 mai 2023,
le solde de la dette deviendra immédiatement exigible,
la bailleresse pourra, à défaut de libération spontanée des lieux et dès l’expiration d’un délai de deux mois suivant la délivrance d’un commandement d’avoir à libérer les lieux, faire procéder à l’expulsion de M. [T] [H] [S] [M] et Mme [P] [V] [Y] et à celle de tous occupants de leur chef, au besoin avec l’assistance de la force publique et d’un serrurier,
le sort des meubles sera régi conformément aux dispositions des articles L. 433-1 et L. 433-2 du code des procédures civiles d'exécution,
M. [T] [H] [S] [M] et Mme [P] [V] [Y] seront solidairement condamnés à verser à la société SCI [Adresse 2] une indemnité d’occupation mensuelle de 921 euros, et ce, jusqu’à la date de libération effective et définitive des lieux,
REJETTE les autres demandes,

DIT n’y avoir lieu d’écarter l’exécution provisoire de droit de la présente décision,

DÉBOUTE la société SCI [Adresse 2] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE in solidum M. [T] [H] [S] [M] et Mme [P] [V] [Y] aux dépens comprenant notamment le coût des commandements de payer du 30 mars 2023 et celui des assignations du 21 août 2023.

Ainsi jugé par mise à disposition au greffe le 4 juillet 2024, et signé par la juge et la greffière susnommées.

La Greffière La Juge


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp acr fond
Numéro d'arrêt : 23/07132
Date de la décision : 04/07/2024
Sens de l'arrêt : Expulsion "conditionnelle" ordonnée au fond avec suspension des effets de la clause résolutoire

Origine de la décision
Date de l'import : 11/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-04;23.07132 ?
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