La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/07/2024 | FRANCE | N°19/06125

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 18° chambre 1ère section, 04 juillet 2024, 19/06125


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:





18° chambre
1ère section

N° RG 19/06125 - N° Portalis 352J-W-B7D-CP53J

N° MINUTE : 2

contradictoire

Assignation du :
23 Avril 2019








JUGEMENT
rendu le 04 Juillet 2024
DEMANDERESSE

S.A.R.L. S&B FRANCE
représentée par son gérant Monsieur [Z] [B]
[Adresse 3]
[Localité 5]

représentée par Me Sandrine LEBAR, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E0058

r>
DÉFENDEURS

Madame [F] [E], [M] [U]
[Adresse 1]
[Localité 4]

Monsieur [S] [O]
[Adresse 2]
[Localité 7]

Madame [J] [W] [O] épouse [X]
[Adresse 8]
[Localité 6]

représentée par Me Liliane KURC ...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:

18° chambre
1ère section

N° RG 19/06125 - N° Portalis 352J-W-B7D-CP53J

N° MINUTE : 2

contradictoire

Assignation du :
23 Avril 2019

JUGEMENT
rendu le 04 Juillet 2024
DEMANDERESSE

S.A.R.L. S&B FRANCE
représentée par son gérant Monsieur [Z] [B]
[Adresse 3]
[Localité 5]

représentée par Me Sandrine LEBAR, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E0058

DÉFENDEURS

Madame [F] [E], [M] [U]
[Adresse 1]
[Localité 4]

Monsieur [S] [O]
[Adresse 2]
[Localité 7]

Madame [J] [W] [O] épouse [X]
[Adresse 8]
[Localité 6]

représentée par Me Liliane KURC TESGUI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D1024

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Sophie GUILLARME, 1ère Vice-présidente adjointe,
Madame Sabine FORESTIER, Vice-présidente,
Madame Diana SANTOS CHAVES, Juge,

assistées de Monsieur Christian GUINAND, Greffier principal,

Rédactrice : Madame Sabine FORESTIER

DÉBATS

A l’audience du 30 Avril 2024, tenue en audience publique, devant Madame Sabine FORESTIER et Madame Diana SANTOS CHAVES, juges rapporteurs, qui, sans opposition des avocats, ont tenu l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en ont rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile.
Avis a été donné aux avocats des parties que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 4 juillet 2024.

JUGEMENT

Rendu par mise à disposition au greffe
Contradictoire
en premier ressort

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé en date du 7 juillet 2020, l'indivision [O] a donné à bail commercial à la société JDA VIDEO des locaux dépendant d’un immeuble sis à [Adresse 3], pour une durée de neuf années à compter du 1er juillet 2020, l'exercice de l'activité de « photo-ciné-son-vidéo-hifi-téléphonie-informatique» et un loyer annuel de 34 000 francs, soit 5 183 euros, hors taxes et hors charges.

Par acte sous seing privé en date du 5 août 2003, la société JDA VIDEO a cédé son fonds de commerce à la société MOKRI et, par acte sous seing privé en date du 23 juillet 2012, cette dernière a cédé son fonds de commerce à la société S & B FRANCE.

Par acte d'huissier de justice signifié le 13 octobre 2017, Mme [F] [U] veuve [O], M. [S] [O] et Mme [J] [O] épouse [X] (ci-après les consorts [O]) ont donné congé à la société S & B FRANCE pour le 30 juin 2018, sans offre de renouvellement et avec offre d'indemnité d'éviction.

Par acte d'huissier de justice signifié le 23 avril 2019, la société S & B FRANCE a assigné les consorts [O] à comparaître devant le tribunal judiciaire de Paris afin de les voir condamner au paiement de l'indemnité d'éviction.

Selon jugement rendu le 05 juillet 2022, le tribunal a :
- débouté les consorts [O] de leur demande de condamnation de la société S&B FRANCE à remettre les lieux dans l'état où ils se trouvaient à leur entrée ;
- débouté les concorts [O] de leur demande de condamnation de la société S&B FRANCE à leur payer la somme de 5 000 euros de dommages-intérêts ;

- dit que le congé sans offre de renouvellement délivré le 13 octobre 2017 par les consorts [O] à la société S & B FRANCE a mis fin le 30 juin 2018 au bail liant les parties ;
avant dire droit au fond,
- désigné M. [I] [A] en qualité d'expert en lui donnant notamment pour mission de déterminer le montant de l'indemnité d'éviction.

L'expert a déposé son rapport le 29 mars 2023.

Dans ses dernières conclusions (conclusions en ouverture de rapport notifiées par RPVA le 5 septembre 2023), la société S & B FRANCE demande au tribunal de :
- fixer l'indemnité principale à 61 000 euros et les indemnités accessoires à 10 000 euros;
- condamner solidairement et à défaut in solidum les consorts [O] à payer la somme de 61 000 euros au titre de l'indemnité principale et la somme de 10 000 euros au titre des indemnités accessoires ;
- condamner solidairement et à défaut in solidum les consorts [O] au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;
- condamner solidairement et à défaut in solidum les consorts [O] aux entiers dépens en ce compris les honoraires de l'expert qui pourront être recouvrés par Me Sandrine LEBAR.

Au soutien de leurs demandes et au visa des articles L. 145-14, L. 145-9 alinéa 5, L. 145-28 du code de commerce, elle invoque que les observations et conclusions de l'expert sont bien fondées et qu'elles doivent être retenues, tant dans leur principe que dans leur quantum.

Dans leurs dernières conclusions (conclusions récapitulatives n°5 en ouverture de rapport notifiées par RPVA le 26 février 2024), les consorts [O] demandent au tribunal de :
- fixer à la somme de 12 980 euros le montant de l'indemnité d'éviction ;
- condamner le preneur à remettre les lieux dans l'état où ils se trouvaient à son entrée;
- condamner la société S & B FRANCE à leur payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts ;
- condamner la société S & B FRANCE à leur payer la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la société S & B FRANCE en tous les dépens qui pourront être recouvrés par Me Liliane KURC TESGUI, avocat.

Sur le fondement des articles L.145-9 et suivants du code de commerce, ils soutiennent que le rapport de l'expert est contestable car celui-ci a effectué sa mission sans être en possession des pièces justificatives réclamées à la société S & B FRANCE. Ils ajoutent que l'expert n'a pas tenu compte des seules activités professionnelles autorisées par le bail ainsi que le mentionnait sa mission alors que c'est l'activité de reprographie qu'elle exerce, et qui n'est pas autorisée par le bail, qui génère l'essentiel du chiffre d'affaires de la société S & B FRANCE. Ils indiquent que la société S & B FRANCE a modifié sans autorisation la désignation des lieux en créant une salle d'eau et en procédant à des travaux sans respecter les règles de l'art ce qui va les obliger à prendre en charge la réfection complète des locaux pour un coût élevé.

Par ordonnance du 28 mars 2024, le juge de la mise en état a ordonné la clôture de l’instruction de l’affaire, laquelle a été plaidée à l’audience du juge rapporteur du 30 avril 2024 et mise en délibéré au 4 juillet 2024.

MOTIFS

1- Sur la demande en paiement de l'indemnité d'éviction

L'article L. 145-14 du code de commerce dispose que le bailleur peut refuser le renouvellement du bail. Toutefois, le bailleur doit, sauf exceptions prévues aux articles L. 145-17 et suivants, payer au locataire évincé une indemnité dite d'éviction égale au préjudice causé par le défaut de renouvellement.
Cette indemnité comprend notamment la valeur marchande du fonds de commerce, déterminée suivant les usages de la profession, augmentée éventuellement des frais normaux de déménagement et de réinstallation, ainsi que des frais et droits de mutation à payer pour un fonds de même valeur, sauf dans le cas où le propriétaire fait la preuve que le préjudice est moindre.

Il est acquis que l'indemnité d'éviction doit compenser l'entier préjudice subi par le preneur du fait de l'éviction.

a) Sur l'indemnité principale

L'indemnité d'éviction a pour objet de compenser le préjudice qui résulte pour le locataire de la perte de son droit au bail. Si le fonds de commerce est transférable, l'indemnité principale correspond au minimum à la valeur du droit au bail , laquelle correspond à la différence entre le loyer qui aurait été payé par le locataire si le bail avait été renouvelé et la valeur locative de marché de ces mêmes locaux, affecté d'un coefficient de situation suivant l'intérêt de l'emplacement. Si le fonds n'est pas transférable, l'indemnité principale correspond à la valeur du fonds et est dite de remplacement et comprend la valeur marchande du fonds, déterminée selon les usages de la profession. Si la valeur du droit au bail est supérieure à la valeur marchande du fonds, le locataire doit alors se voir allouer une indemnité égale à la valeur du droit au bail .

- Sur le caractère transférable du fonds de commerce

L'expert considère que l'éviction entraînera une perte du fonds de commerce en retenant qu'il s'agit d'un principe sauf au bailleur de démontrer le contraire, lequel, en l'espèce, ne propose pas de locaux de remplacement.

Aucune des parties n'invoque une possibilité de transfert du fonds de commerce.

Dès lors, il convient de retenir qu'il y aura perte du fonds de commerce et de considérer que l'indemnité à évaluer correspond à une indemnité de remplacement qui sera égale à la valeur du fonds de commerce et qui ne pourra être inférieure à la valeur du droit au bail.

- Sur la valeur du droit au bail

Il est rappelé que les locaux loués se situent à [Localité 5], [Adresse 3].

L'expert indique que la rue se trouve dans la partie Est de l'arrondissement et qu'il s'agit d'une très longue voie, à double sens de circulation, qui relie le [Adresse 1] à la [Adresse 10] et traverse la place éponyme, les locaux étant établis dans la partie Nord, à environ 100 m de cette place.

Il considère que l'emplacement bénéficie d'une assez bonne commercialité locale, avec quelques commerces de proximité et de service s'adressant aux résidents ainsi qu'un marché bi-hebdomadaire sur la place.

Les locaux se composent, d'une part, d'un local commercial comprenant sur deux niveaux, non reliés, une boutique sur rue située au rez-de-chaussée de l'immeuble et une réserve/cave au sous-sol et accessible par les parties communes et, d'autre part, un appartement situé au premier étage, accessible depuis l'arrière-boutique ou par les parties communes, et comprenant entrée, séjour-cuisine, chambre et salle d'eau-wc. Il s'avère cependant que le logement ne peut plus être occupé depuis le 25 mai 2021 à la suite d'un contrôle sanitaire réalisé par la Ville de [Localité 9] qui a révélé des désordres, le bailleur ayant été invité à effectuer les travaux nécessaires pour y remédier.

L'expert évalue la surface du local commercial à 34,11 m2, soit 30,18 m2P, et la surface de l'appartement à 29,11 m2.

Il calcule le loyer annuel plafonné à la somme de 7 903,06 euros dans l'hypothèse d'un renouvellement au 1er janvier 2021.

Il considère qu'il ne peut y avoir de modification notable des facteurs locaux de commercialité au cours du bail expiré compte tenu du nombre insuffisant de nouvelles constructions, de la fréquentation variable des stations de métro Nationale et Olympiades, situées à 500 mètres des locaux concernés et dans des rues mieux à même de capter la clientèle, et de la commercialité immuable du secteur.

Compte tenu de l'emplacement des locaux, de la destination prévue au bail qu'il qualifie d'assez large, de la configuration correcte des locaux et de l'avantage procuré par le logement, du prix des locations de boutique et de logement constatés dans le quartier, l'expert évalue la valeur locative de marché des locaux commerciaux à 400 euros/m2 et celle du logement à 28 euros/m2/mois, soit une valeur locative annuelle totale de (400 euros x 30,18 m2P + 23 euros x 29,11 m2 x 12 =) 20 106 euros.

Il applique un coefficient de valorisation de 5 compte tenu de l'emplacement, soit une valeur de droit au bail de (20 106 - 7 903 x 5 =) 61 015 euros qu'il arrondit à 61 000 euros.

Celle évaluation n'est pas contestée par les parties.

Si les consorts [O] font état d'une modification des caractéristiques des locaux, notamment la création d'une salle de bains dans le logement, ils n'en tirent aucune conséquence quant à l'évaluation de l'indemnité d'éviction. A ce sujet, il est observé qu'il n'est pas rapporté la preuve de la date à laquelle ces modifications auraient été réalisées et que, selon la clause d'accession stipulée au contrat de bail, les changements ou améliorations effectués par le preneur deviennent la propriété du bailleur au départ du preneur, sauf à exiger de ce dernier la remise des lieux dans leur état d'origine à ses frais et il n'est pas justifié que cette demande ait été faite. Il n'est pas davantage rapporté la preuve des désordres qui auraient été engendrés par les modifications des lieux ni du coût des travaux nécessaires pour y remédier. A ce sujet, il est relevé que la lettre de la Ville de [Localité 9] du 25 mai 2021 mentionne des désordres relatifs aux raccordements électriques par dominos en hauteur et à l'absence, dans la cuisine, de grilles d'aération rendues nécessaires par l'installation de gaz. Aucun désordre ne concerne la salle de bains qui auraient été installée, à l'exception peut-être des raccordements électriques.

L'évaluation de l'expert doit dès lors être retenue.

- Sur la valeur du fonds de commerce

L'expert retient que la société S & B FRANCE exerce dans les locaux à la fois une activité de vente au détail d'articles de téléphonie et d'internet ainsi qu'une activité de reprographie. Le gérant M. [Z] [B] n'est pas salarié et la société emploie, à temps partiel, trois salariés en qualité de vendeurs.

L'expert indique qu'il ne lui a pas été communiqué de ventilation du chiffre d'affaires par activité.

Il explique que selon les barêmes les fonds de téléphonie se valorisent entre 20% et 40% du chiffre d'affaires et les fonds de reprographie entre 25% et 50% du chiffres d'affaires et considère que ces fourchettes sont très voisines.

Il prend en considération :
- d'une part, un chiffre d'affaires, hors crise sanitaire, qui progresse notamment durant les deux derniers exercices, soit
2019 : 65 209 euros
2021 : 74 487 euros (+ 14,22 %)
2022 : 98 312 euros (+ 31,98 %),
- d'autre part, l'absence d'investissement récent,
- et la très faible rentabilité compte tenu des résultats d'exploitation, soit
2019 : 1 868 euros
2021 : 1 274 euros
2022 : 5 394 euros,
pour retenir un pourcentage d'évaluation de 25% à 30% du chiffre d'affaires moyen des exercices 2019, 2021 et 2022, soit une valeur du fonds de commerce de ( 79 336 euros x 27,50 % =) 21 817 euros qu'il arrondit à 22 000 euros.

Si la société S & B FRANCE ne justifie pas de la ventilation du chiffre d'affaires par activité, les consorts [O] ne justifient pas non plus que l'essentiel du chiffre d'affaires est généré par l'activité de reprographie non autorisée par le contrat de bail ainsi qu'ils le soutiennent. Il s'avère en outre que les barêmes d'évaluation des deux activités sont semblables, ce qui permet d'appliquer un taux global sans avoir à distinguer entre les deux activités pratiquées ainsi que l'a fait l'expert. Enfin, il est relevé que les consorts [O] n'ont jamais mis en demeure la société S & B FRANCE de respecter la destination prévue au contrat de bail alors que l'infraction au bail commise par le preneur ne peut être invoquée que si elle s'est poursuivie ou renouvelée plus d'un mois après la mise en demeure du bailleur d'avoir à la faire cesser.

Les parties ne contestent pas davantage la méthode appliquée par l'expert, laquelle permet d'évaluer assez précisément la valeur du fonds de commerce.

Il convient par conséquent de retenir la valeur de 22 000 euros.

*****

La valeur du fonds de commerce (22 000 euros) étant inférieure à la valeur du droit au bail (61 000 euros), l'indemnité principale doit être fixée à la valeur du droit au bail, soit 61 000 euros.

Par conséquent, les consorts [O] seront condamnés à payer à la société S & B FRANCE la somme de 61 000 euros.

b) Sur les indemnités accessoires

Il ressort de l'article L. 145-14 du code de commerce que l'indemnité principale peut être augmentée éventuellement des frais normaux de déménagement et de réinstallation, ainsi que des frais et des droits de mutation à payer pour un fonds de même valeur.

- Sur les frais de remploi

L'indemnité de remploi est destinée à compenser les droits de mutation définis à l'article 719 du code général des impôts dus pour l'acquisition d'un fonds de commerce ou un droit au bail de valeur équivalente, outre les frais d'acte et les frais de transaction.

L'expert détermine les frais de remploi à 5 715 euros en tenant compte, d'une part, des frais d'agence nécessaires à l'acquisition d'un droit au bail ou d'un fonds de commerce qu'il évalue entre 5% et 10%, soit (61 000 x 7,5% =) 4 575 euros et, d'autre part, des droits fiscaux de 3 % entre 23 000 euros et 200 000 euros, soit (38 000 x 3%=) 1 140 euros, soit une somme totale de 5 715 euros.

Les consorts [O] ne rapportent pas la preuve que la société S & B FRANCE n'a pas l'intention de se réinstaller.

En outre, l'indemnité proposée par l'expert suffit à compenser les frais qui seront à la charge de la société S & B FRANCE.

Dès lors, les consorts [O] devront verser à la société S & B FRANCE la somme de 5 715 euros au titre des frais de remploi.

- Sur le trouble commercial

L'indemnité fondée sur le trouble commercial est destinée à compenser la perte de temps générée par l'éviction et le moindre investissement dans le commerce.

L'expert expose qu'il est généralement retenu soit trois mois d'excédent brut d'exploitation moyen mais qu'en l'espèce le montant serait très faible, soit plus ou moins de quinze jours de masse salariale, qu'il calcule en l'espèce sur le dernier exercice 2022, soit 620 euros qu'il arrondit forfaitairement à 1 000 euros.

Cette évaluation correspondant aux usages et n'étant pas critiquée par les parties, elle doit être retenue pour le montant de 620 euros.

- Sur les frais de déménagement

Cette indemnité a pour objet d'indemniser le preneur des frais exposés pour libérer entièrement les locaux dont il est évincé lorsqu'il se réinstalle. En cas de remplacement du fonds de commerce, seuls les frais liés au déménagement des effets personnels, des archives et du stock sont en principe indemnisés

L'expert note que le preneur ayant déjà quitté le logement, les éléments restant à déménager sont limités. Il fixe l'indemnité à un montant forfaitaire de 500 euros.

La société S & B FRANCE ne produit aucun justificatif , ni du coût du déménagement à venir ni de celui déjà réalisé et ne conteste pas l'évaluation forfaitaire de l'expert.

Celle-ci doit être reconnue comme suffisante au regard de la taille du commerce.

- Sur les frais divers

L'expert les évalue à 3 000 euros en précisant qu'il s'agit des frais juridiques et administratifs tels que rédaction d'acte et formalités au registre du commerce et des sociétés.

Les consorts [O] ne rapportent pas la preuve que la société S & B FRANCE n'a pas l'intention de se réinstaller.

En outre, la société S & B FRANCE devra effectivement engager les frais divers visés par l'expert, lesquels ont été justement évalués à la somme de 3 000 euros qui doit être retenue.

- Sur les frais de licenciement

L'expert indique que les frais de licenciement seront à rembourser sur justificatifs.

Il ressort du rapport d'expertise que la société S & B FRANCE emploie trois salariés à temps partiels.

La perte du fonds de commerce entraînant le licenciement de ces salariés, il convient d'inclure les frais de licenciement dans l'indemnité d'éviction et ceux-ci seront remboursés à la société S & B FRANCE par les consorts [O] sur justificatifs ,

*****

Les consorts [O] seront par conséquent condamnés à payer à la société S & B FRANCE, au titre des indemnités accessoires, la somme de (5 715 + 620 + 500 + 3 000 =) 9 835 euros, outre les frais de licenciement qui seront réglés sur justificatifs qui lui seront présentés par cette dernière.

2- Sur les demandes de condamnation à la remise en état des lieux et de dommages-intérêts

L'article 122 du code de procédure civile dispose que constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

Les consorts [O] sollicitent la condamnation de la société S & B FRANCE à remettre les lieux dans l'état où ils se trouvaient à son entrée ainsi qu'à leur payer la somme de 5 000 euros de dommages-intérêts en raison de sa mauvaise foi.

Cependant, le précédent jugement du 5 juillet 2022 ayant déjà statué à ce sujet et les ayant déboutés, ces demandes à nouveau formulées seront déclarées irrecevables.

4- Sur les demandes accessoires

L'instance et l'expertise ayant pour origine la délivrance d'un congé sans offre de renouvellement par les consorts [O], ceux-ci seront condamnés aux dépens, qui comprendront le coût de l'expertise et avec distraction au profit de Me Sandrine LEBAR, avocat, en application des articles 696 et 699 du code de procédure civil.

L'équité commande de les condamner à payer en outre à la société S & B FRANCE la somme de 4 000 euros en application de l' article 700 du code de procédure civile.

L'existence du droit de repentir dont bénéficient les consorts [O] en vertu de l' article L. 145-58 du code de commerce justifie que l'exécution provisoire du jugement soit écartée.

PAR CES MOTIFS

le tribunal, statuant après débats publics, par jugement contradictoire et en premier ressort, mis à disposition au greffe,

Condamne in solidum Mme [F] [U] veuve [O], M. [S] [O] et Mme [J] [O] épouse [X] à payer à la société S & B FRANCE la somme de 61 000 euros au titre de l'indemnité principale d'éviction ;

Condamne in solidum Mme [F] [U] veuve [O], M. [S] [O] et Mme [J] [O] épouse [X] à payer à la société S & B FRANCE la somme de 9 835 euros, outre les frais de licenciement sur présentation de justificatifs, au titre des indemnités accessoires d'éviction ;

Déclare irrecevable la demande de Mme [F] [U] veuve [O], M. [S] [O] et Mme [J] [O] épouse [X] de condamnation de la société S & B FRANCE à remettre les lieux dans l'état où ils se trouvaient à son entrée ;

Déclare irrecevable la demande de Mme [F] [U] veuve [O], M. [S] [O] et Mme [J] [O] épouse [X] de condamnation de la société S & B FRANCE à leur payer la somme de 5 000 euros de dommages-intérêts;

Condamne in solidum Mme [F] [U] veuve [O], M. [S] [O] et Mme [J] [O] épouse [X] aux dépens, qui comprendront le coût de l'expertise, avec distraction au profit de Me Sandrine LEBAR, avocat ;

Condamne in solidum Mme [F] [U] veuve [O], M. [S] [O] et Mme [J] [O] épouse [X] à payer à la société S & B FRANCE la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Ecarte l'exécution provisoire du jugement.

Fait et jugé à [Localité 9] le 04 Juillet 2024.

Le GreffierLe Président

Christian GUINANDSophie GUILLARME


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 18° chambre 1ère section
Numéro d'arrêt : 19/06125
Date de la décision : 04/07/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 10/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-04;19.06125 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award