La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/07/2024 | FRANCE | N°23/09382

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp acr fond, 02 juillet 2024, 23/09382


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :

à : Me Mariame TOURE


Copie exécutoire délivrée
le :

à : Me Laetitia MOUGENOT

Pôle civil de proximité


PCP JCP ACR fond

N° RG 23/09382 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3OVH

N° MINUTE :







JUGEMENT
rendu le 02 juillet 2024


DEMANDEUR

Monsieur [M] [Y],
[Adresse 1]
représenté par Me Laetitia MOUGENOT, avocat au barreau de PARIS,

DÉFENDEURS

Madame [B] [G],
[Adresse 2]>représentée par Me Mariame TOURE, avocat au barreau de PARIS,

Monsieur [H] [G],
[Adresse 2]
représenté par Me Mariame TOURE, avocat au barreau de PARIS,

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Domitille REN...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :

à : Me Mariame TOURE

Copie exécutoire délivrée
le :

à : Me Laetitia MOUGENOT

Pôle civil de proximité

PCP JCP ACR fond

N° RG 23/09382 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3OVH

N° MINUTE :

JUGEMENT
rendu le 02 juillet 2024

DEMANDEUR

Monsieur [M] [Y],
[Adresse 1]
représenté par Me Laetitia MOUGENOT, avocat au barreau de PARIS,

DÉFENDEURS

Madame [B] [G],
[Adresse 2]
représentée par Me Mariame TOURE, avocat au barreau de PARIS,

Monsieur [H] [G],
[Adresse 2]
représenté par Me Mariame TOURE, avocat au barreau de PARIS,

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Domitille RENARD, Vice-présidente, juge des contentieux de la protection assistée de Aurélia DENIS, Greffier,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 01 février 2024

JUGEMENT
contradictoire et en premier ressort prononcé par mise à disposition le 02 juillet 2024 par Domitille RENARD, juge des contentieux de la protection assistée de Aurélia DENIS, Greffier

Décision du 02 juillet 2024
PCP JCP ACR fond - N° RG 23/09382 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3OVH

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Par acte sous seing privé du 23 mars 2022, M. [M] [Y] a consenti un bail d’habitation à Mme [B] [G] et M. [H] [G] sur des locaux situés au [Adresse 2] (rez-de-chaussée), moyennant le paiement d’un loyer mensuel de 1 822 euros et d’une provision pour charges de 65 euros.

Par actes de commissaire de justice du 18 août 2023, le bailleur a fait délivrer aux locataires un commandement de payer la somme principale de 32 751 euros au titre de l'arriéré locatif dans un délai de six semaines, en visant une clause résolutoire.

La commission de coordination des actions prévention des expulsions locatives a été informée de la situation de Mme [B] [G] et M. [H] [G] le 22 août 2023.

Par assignations du 22 novembre 2023, M. [M] [Y] a ensuite saisi le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris pour faire constater l’acquisition de la clause résolutoire, être autorisé à faire procéder à l’expulsion de Mme [B] [G] et M. [H] [G], sous astreinte de 250 euros par jour de retard, et obtenir leur condamnation solidaire au paiement des sommes suivantes :
- 2 165 au titre de l’indemnité mensuelle d’occupation, à compter de la date du jugement et jusqu’à libération des lieux,
- 307,75 euros au titre de la taxe sur les ordures ménagères,
- 38 249,20 euros au titre de l’arriéré locatif arrêté au 22 novembre 2023.

L’assignation a été notifiée au représentant de l’État dans le département le 24 novembre 2023, mais aucun diagnostic social et financier n'est parvenu au greffe avant l'audience.

Prétentions et moyens des parties

À l'audience du 1er février 2024, M. [M] [Y], représenté par son conseil, maintient l'intégralité de ses demandes, et précise que la dette locative, actualisée au 1er janvier 2024, s'élève désormais à 42 458,25 euros, terme de janvier 2024 inclus. M. [M] [Y] considère qu'il n'y a pas eu de reprise du paiement intégral du loyer courant avant l'audience, au sens de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989.

Il expose qu’il n’y a pas eu de paiement depuis mars 2022 et qu’il ne s’est pas rendu compte tout de suite que les locataires ne payaient pas. Il pense par ailleurs que les bulletins de paie produits lors de la conclusion du bail sont de faux bulletins.

Mme [B] [G] et M. [H] [G], représentés par leur conseil, demandent à ce que leur soit octroyé un délai pour apurer la dette. Ils proposent de se libérer de leur dette en réglant chaque mois, en plus du loyer courant, une somme minimale de 500 euros.

Ils souhaitent quitter le logement à partir du 15 avril 2024, tel qu’il en résulte du courrier recommandé de résiliation de bail en date du 30 janvier 2024. Ils ont par ailleurs un enfant au lycée.

En application de l'article 24 V de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, les parties ont été invitées à produire tous éléments relatifs à l’existence d’une procédure de traitement du surendettement au sens du livre VII du code de la consommation.

Mme [B] [G] et M. [H] [G] ont indiqué ne pas faire l’objet d’une telle procédure.

À l’issue des débats, la décision a été mise en délibéré jusqu’à ce jour, où elle a été mise à disposition des parties au greffe.

MOTIVATION

1. Sur la demande de constat de la résiliation du bail

1.1. Sur la recevabilité de la demande

M. [M] [Y] justifie avoir notifié l’assignation au représentant de l’État dans le département plus de six semaines avant l’audience.

Il justifie également avoir saisi la commission de coordination des actions prévention des expulsions locatives deux mois au moins avant la délivrance de l’assignation.

Son action est donc recevable au regard des dispositions de l’article 24 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989.

1.2. Sur la résiliation du bail

Aux termes de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989, dans sa version en vigueur à la date de la conclusion du contrat de bail litigieux, toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux.

En l’espèce, si un commandement de payer reproduisant textuellement les dispositions légales a bien été signifié aux locataires le 18 août 2023 et que la somme de 32 751 euros n’a pas été réglée par ces derniers dans le délai de six semaines suivant la signification de ce commandement, les stipulations du contrat de bail doivent prévaloir sur les dispositions légales qui ne peuvent avoir d'effet rétroactif sur les contrats conclus antérieurement à leur entrée en vigueur, conformément à l'article 2 du code civil. En l'absence d'autre élément permettant d'établir une volonté des parties de voir appliquer le droit nouveau à leur contrat bail, il y a donc lieu de retenir le délai de deux mois tel que prévu au contrat de bail.

Le bailleur est ainsi bien fondé à se prévaloir des effets de la clause résolutoire, dont les conditions sont réunies depuis le 19 octobre 2023.

Il convient, en conséquence, d’ordonner au locataire ainsi qu’à tous les occupants de son chef de quitter les lieux, et, pour le cas où les lieux ne seraient pas libérés spontanément, d’autoriser M. [M] [Y] à faire procéder à l’expulsion de toute personne y subsistant.

Le recours à la force publique se révélant une mesure suffisante pour contraindre Mme [B] [G] et M. [H] [G] à quitter les lieux, il n'y a pas lieu d'ordonner une astreinte, le bailleur obtenant par ailleurs une indemnité d'occupation.

1.3 Sur les délais de paiement

Selon l’article 24 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, le juge peut, à la demande du locataire, du bailleur ou d'office, à la condition que le locataire soit en situation de régler sa dette locative et qu'il ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l'audience, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, par dérogation au délai prévu au premier alinéa de l'article 1343-5 du code civil, au locataire en situation de régler sa dette locative.

Lorsque le juge est saisi en ce sens par le bailleur ou par le locataire, et à la condition que celui-ci ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l'audience, les effets de la clause de résiliation de plein droit peuvent être suspendus pendant le cours des délais ainsi accordés par le juge. Cette suspension prend fin dès le premier impayé ou dès lors que le locataire ne se libère pas de sa dette locative dans le délai et selon les modalités fixés par le juge. Ces délais et les modalités de paiement accordés ne peuvent affecter l'exécution du contrat de location et notamment suspendre le paiement du loyer et des charges. Si le locataire se libère de sa dette locative dans le délai et selon les modalités fixés par le juge, la clause de résiliation de plein droit est réputée ne pas avoir joué. Dans le cas contraire, elle reprend son plein effet.

En l'espèce, il ressort des éléments du dossier, et notamment de l’audience, que Mme [B] [G] et M. [H] [G] n’ont pas repris le paiement integral du loyer avant l’audience. Par ailleurs, ils n’ont effectué aucun paiement du loyer depuis leur entrée dans l’appartement, soit depuis mars 2022.

Dans ces conditions, il convient de ne pas faire droit à leur demande de délais de paiement pour s’acquitter des sommes dues.

2. Sur la dette locative

Aux termes de l’article 1353 du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver tandis que celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement.

L'article 1103 du même code prévoit, par ailleurs, que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

En l’espèce, M. [M] [Y] verse aux débats un décompte démontrant qu’à la date du 1er janvier 2024, Mme [B] [G] et M. [H] [G] lui devaient la somme de 42 458,25 euros, terme de janvier 2024 inclus.

Mme [B] [G] et M. [H] [G] n’apportant aucun élément de nature à remettre en cause ce montant, ils seront solidairement condamnés à payer cette somme au bailleur.

3. Sur l’indemnité d’occupation

En cas de maintien dans les lieux des locataires ou de toute personne de leur chef malgré la résiliation du bail, une indemnité d’occupation sera due. Au regard du montant actuel du loyer et des charges, son montant sera fixé à la somme mensuelle de 1 887 euros.

L’indemnité d’occupation est payable et révisable dans les mêmes conditions que l’étaient le loyer et les charges, à partir du 19 octobre 2023, et ne cessera d’être due qu’à la libération effective des locaux avec remise des clés à M. [M] [Y] ou à son mandataire.

4. Sur les frais du procès et l'exécution provisoire

Mme [B] [G] et M. [H] [G], qui succombent à la cause, seront condamnés aux dépens de la présente instance, conformément à l’article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La juge des contentieux de la protection, statuant après débats publics, par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,

CONSTATE que la dette locative visée dans le commandement de payer du 18 août 2023 n’a pas été réglée dans le délai de deux mois,

CONSTATE, en conséquence, que le contrat conclu le 23 mars 2022 entre M. [M] [Y], d’une part, et Mme [B] [G] et M. [H] [G], d’autre part, concernant les locaux situés au [Adresse 2] (rez-de-chaussée) est résilié depuis le 19 octobre 2023,

DIT n’y avoir lieu d’octroyer des délais de paiement à Mme [B] [G] et M. [H] [G], sans préjudice des délais qui pourraient leur être accordés dans le cadre d’une procédure de surendettement,

ORDONNE à Mme [B] [G] et M. [H] [G] de libérer de leur personne, de leurs biens, ainsi que de tous occupants de leur chef, les lieux situés au [Adresse 2] (rez-de-chaussée) ainsi que, le cas échéant, tous les lieux loués accessoirement au logement,

DIT qu’à défaut de libération volontaire, il pourra être procédé à leur expulsion et à celle de tous occupants de leur chef avec l’assistance de la force publique,

DIT que le sort des meubles sera régi conformément aux dispositions des articles L. 433-1 et L. 433-2 du code des procédures civiles d'exécution,

RAPPELLE que l’expulsion ne pourra avoir lieu qu’hors période hivernale et à l’expiration d’un délai de deux mois suivant la délivrance d’un commandement d’avoir à libérer les lieux,

CONDAMNE solidairement Mme [B] [G] et M. [H] [G] au paiement d’une indemnité d’occupation mensuelle égale au loyer et aux charges qui auraient été dus en cas de poursuite du bail,

DIT que cette indemnité d’occupation, qui se substitue au loyer dès le 19 octobre 2023, est payable dans les mêmes conditions que l’étaient le loyer et les charges, jusqu’à libération effective des lieux et remise des clés à la bailleresse ou à son mandataire,

CONDAMNE solidairement Mme [B] [G] et M. [H] [G] à payer à M. [M] [Y] la somme de 42 458,25 euros (quarante-deux mille quatre cent cinquante-huit euros et vingt-cinq centimes) au titre de l’arriéré locatif arrêté au 1er janvier 2024,

CONDAMNE solidairement Mme [B] [G] et M. [H] [G] aux dépens comprenant notamment le coût des commandements de payer du 18 août 2023 et celui des assignations du 22 novembre 2023.

Ainsi jugé par mise à disposition au greffe le 2 juillet 2024, et signé par la juge et la greffière susnommées.

La Greffière La Juge


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp acr fond
Numéro d'arrêt : 23/09382
Date de la décision : 02/07/2024
Sens de l'arrêt : Expulsion "ferme" ordonnée au fond (sans suspension des effets de la clause résolutoire)

Origine de la décision
Date de l'import : 15/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-02;23.09382 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award