La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/07/2024 | FRANCE | N°23/09099

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp acr fond, 02 juillet 2024, 23/09099


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :

à : Madame [P] [F]


Copie exécutoire délivrée
le :

à : Me Priscilla PALMA

Pôle civil de proximité


PCP JCP ACR fond

N° RG 23/09099 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3MAI

N° MINUTE : 2







JUGEMENT
rendu le 02 juillet 2024


DEMANDEURS

Monsieur [R] [B],
[Adresse 1]
représenté par Me Priscilla PALMA, avocat au barreau de PARIS,

Madame [M] [I] épouse [B],
[Adresse 1]
représen

tée par Me Priscilla PALMA, avocat au barreau de PARIS,

DÉFENDERESSE

Madame [P] [F],
[Adresse 2]
non comparante, ni représentée

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Domitille RENARD, Vice-présidente,...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :

à : Madame [P] [F]

Copie exécutoire délivrée
le :

à : Me Priscilla PALMA

Pôle civil de proximité

PCP JCP ACR fond

N° RG 23/09099 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3MAI

N° MINUTE : 2

JUGEMENT
rendu le 02 juillet 2024

DEMANDEURS

Monsieur [R] [B],
[Adresse 1]
représenté par Me Priscilla PALMA, avocat au barreau de PARIS,

Madame [M] [I] épouse [B],
[Adresse 1]
représentée par Me Priscilla PALMA, avocat au barreau de PARIS,

DÉFENDERESSE

Madame [P] [F],
[Adresse 2]
non comparante, ni représentée

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Domitille RENARD, Vice-présidente, juge des contentieux de la protection assistée de Aurélia DENIS, Greffier,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 01 février 2024

JUGEMENT
réputé contradictoire et en premier ressort prononcé par mise à disposition le 02 juillet 2024 par Domitille RENARD, juge des contentieux de la protection assistée de Aurélia DENIS, Greffier

Décision du 02 juillet 2024
PCP JCP ACR fond - N° RG 23/09099 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3MAI

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Par acte sous seing privé du 7 septembre 2021, M. [R] [B] et Mme [M] [I] épouse [B] ont consenti un bail d’habitation à Mme [P] [F] sur des locaux situés au [Adresse 2] (bâtiment B, 1er étage, porte gauche, avec une cave), moyennant le paiement d’un loyer mensuel de 850 euros et d’une provision pour charges de 50 euros.

Par acte de commissaire de justice du 28 février 2023, les bailleurs ont fait délivrer à la locataire un commandement de payer la somme principale de 15 300 euros au titre de l'arriéré locatif, visant la clause résolutoire prévue dans le contrat (déduction faite du coût de l’acte).

La commission de coordination des actions prévention des expulsions locatives a été informée de la situation de Mme [P] [F] le 2 mars 2023.

Par assignation du 25 septembre 2023, M. [R] [B] et Mme [M] [I] épouse [B] ont ensuite saisi le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris pour faire constater l’acquisition de la clause résolutoire, être autorisés à faire procéder à l’expulsion de Mme [P] [F] et obtenir sa condamnation au paiement des sommes suivantes :
une indemnité mensuelle d’occupation d’un montant égal à celui du loyer et des charges, à compter de la résiliation du bail et jusqu’à libération des lieux,22 100 euros au titre de l’arriéré locatif arrêté au 1er septembre 2023, terme de septembre 2023 inclus, avec intérêts au taux légal à compter du commandement de payer,1 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
L’assignation a été notifiée au représentant de l’État dans le département le 27 septembre 2023, mais aucun diagnostic social et financier n'est parvenu au greffe avant l'audience.

Dans des conclusions signifiées le 22 janvier 2024, M. [R] [B] et Mme [M] [I] épouse [B] ont maintenu leurs demandes. Ils demandent par ailleurs de juger qu’un contrat de location écrit a bien été conclu entre les parties portant sur le bien situé au [Adresse 2].

Ils exposent que, malgré l’absence de signature des parties sur le contrat de location, ledit contrat constitue un élément probant établissant la réalité du bail en ce qu’il a été complété de manière manuscrite par chacune des parties et du fait de la présence des mentions prescrites par l’article 3 de la loi du 6 juillet 1989. Par ailleurs, Mme [P] [F] n’a jamais contesté sa qualité de locataire tel qu’il en ressort des échanges par mails et courriers avec les bailleurs.

Prétentions et moyens des parties

À l'audience du 1er février 2024, M. [R] [B] et Mme [M] [I] épouse [B], représentés par leur conseil, maintiennent l'intégralité de leurs demandes, et précisent que la dette locative, actualisée au 1er janvier 2024, s'élève désormais à 25 500 euros, terme de janvier 2024 inclus. Ils considèrent par ailleurs qu'il n'y a pas eu de reprise du paiement intégral du loyer courant avant l'audience, au sens de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989.

Ils exposent que l’huissier de justice leur a indiqué que la locataire avait quitté les lieux. Par ailleurs, la locataire n’a jamais versé de loyer depuis l’entrée des lieux. Mme [P] [F] leur a indiqué avoir réalisé des travaux dans l’appartement afin de justifier le non versement du loyer. Elle a enfin laissé un chèque en dépôt de garantie que M. [R] [B] a encaissé mais qui n’a pas été débité.

Bien que régulièrement assignée par acte de commissaire de justice délivré à étude, Mme [P] [F] n’a pas comparu.

M. [R] [B] et Mme [M] [I] épouse [B] ne forment aucune demande de suspension des effets de la clause résolutoire.

En application de l'article 24 V de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, les parties ont été invitées à produire tous éléments relatifs à l’existence d’une procédure de traitement du surendettement au sens du livre VII du code de la consommation.

M. [R] [B] et Mme [M] [I] épouse [B] ont précisé ne pas avoir connaissance de l’existence d’une telle procédure concernant Mme [P] [F].

À l’issue des débats, la décision a été mise en délibéré jusqu’à ce jour, où elle a été mise à disposition des parties au greffe.

M. [R] [B] et Mme [M] [I] épouse [B] ont, par note reçue au greffe le 25 février 2024, produit l’enveloppe du courrier recommandé avec accusé de réception adressé par le commissaire de justice à Mme [P] [F] à la suite du procès-verbal de recherches infructueuses dressé le 22 janvier 2024 (PV659) et revenue à étude.

MOTIVATION

En application de l’article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne faisant alors droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.

1. Sur l’existence du contrat de bail

Conformément à l’article 3 de la loi du 6 juillet 1989, le contrat de bail doit contenir les précisions suivantes : « 1° Le nom ou la dénomination du bailleur et son domicile ou son siège social ainsi que, le cas échéant, ceux de son mandataire ; 2° Le nom ou la dénomination du locataire ; 3° La date de prise d'effet et la durée ; 4° La consistance, la destination ainsi que la surface habitable de la chose louée, définie par le code de la construction et de l'habitation ; 5° La désignation des locaux et équipements d'usage privatif dont le locataire a la jouissance exclusive et, le cas échéant, l'énumération des parties, équipements et accessoires de l'immeuble qui font l'objet d'un usage commun, ainsi que des équipements d'accès aux technologies de l'information et de la communication ; 6° Le montant du loyer, ses modalités de paiement ainsi que ses règles de révision éventuelle ; 7° (Abrogé) ; 8° Le montant et la date de versement du dernier loyer appliqué au précédent locataire, dès lors que ce dernier a quitté le logement moins de dix-huit mois avant la signature du bail ; 9° La nature et le montant des travaux effectués dans le logement depuis la fin du dernier contrat de location ou depuis le dernier renouvellement du bail ; 10° Le montant du dépôt de garantie, si celui-ci est prévu ».

Aux termes de l’article 1353 du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. L’article 1367 du code civil ajoute que l’acte juridique doit contenir une signature identifiant son auteur laquelle est nécessaire à la perfection de l’acte.

Toutefois, conformément à l’article 1361 du code civil, il peut être suppléé à l'écrit par un commencement de preuve par écrit corroboré par un autre moyen de preuve. Constitue un tel commencement de preuve par écrit tout écrit qui, émanant de celui qui conteste un acte ou de celui qu'il représente, rend vraisemblable ce qui est allégué.

En l’espèce, M. [R] [B] et Mme [M] [I] épouse [B] ont produit au débat un contrat de location consenti à Mme [P] [F], reprenant les précisions légales de l’article 3 de la loi du 6 juillet 1989. Bien que l’acte juridique ne soit pas signé, il constitue un commencement de preuve rendant vraisemblable l’existence d’un contrat de location entre les parties. Il est alors corroboré par d’autres moyens de preuve produits au débat tel que l’état des lieux d’entrée annexé audit contrat de location et dument signé par les parties, ainsi que les échanges par courriel entre les bailleurs et Mme [P] [F] dans lesquels celle-ci ne conteste pas sa qualité de locataire.

Il convient donc de constater qu’il existe bien un contrat de location entre les parties.

2. Sur la demande de constat de la résiliation du bail

2.1. Sur la recevabilité de la demande

M. [R] [B] et Mme [M] [I] épouse [B] justifient avoir notifié l’assignation au représentant de l’État dans le département plus de six semaines avant l’audience.

Ils justifient également avoir saisi la commission de coordination des actions prévention des expulsions locatives deux mois au moins avant la délivrance de l’assignation.

Leur action est donc recevable au regard des dispositions de l’article 24 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989.

2.2. Sur la résiliation du bail

Aux termes de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989, dans sa version en vigueur à la date de la conclusion du contrat de bail litigieux, toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux.

En l’espèce, un commandement de payer reproduisant textuellement les dispositions légales et la clause résolutoire contenue dans le contrat de location a été signifié à la locataire le 28 février 2023. Or, d’après l'historique des versements, la somme de 15 300 euros n’a pas été réglée par cette dernière dans le délai de deux mois suivant la signification de ce commandement et aucun plan d’apurement n’a été conclu dans ce délai entre les parties.

Les bailleurs sont donc bien fondés à se prévaloir des effets de la clause résolutoire, dont les conditions sont réunies depuis le 29 avril 2023.

Il convient, en conséquence, d’ordonner à la locataire ainsi qu’à tous les occupants de son chef de quitter les lieux, et, pour le cas où les lieux ne seraient pas libérés spontanément, d’autoriser M. [R] [B] et Mme [M] [I] épouse [B] à faire procéder à l’expulsion de toute personne y subsistant.

Cependant, dès lors qu'aucune circonstance ne justifie la réduction du délai prévu à l'article L.412-1 du code des procédures civiles d'exécution, il convient de rappeler que l'expulsion ne pourra avoir lieu qu'à l'expiration d'un délai de deux mois suivant la délivrance à la locataire d'un commandement de quitter les lieux.

3. Sur la dette locative

Aux termes de l’article 1353 du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver tandis que celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement.

L'article 1103 du même code prévoit, par ailleurs, que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

En l’espèce, M. [R] [B] et Mme [M] [I] épouse [B] versent aux débats un décompte démontrant qu’à la date du 1er janvier 2024, Mme [P] [F] leur devait la somme de 25 500 euros, terme de janvier 2024 inclus.

Mme [P] [F] n’apportant aucun élément de nature à remettre en cause ce montant, elle sera condamnée à payer cette somme aux bailleurs, avec intérêts au taux légal à compter du 28 février 2023 sur la somme de 15300 euros, à compter de l'assignation sur la somme de 6800 euros et à compter de la signification de la présente décision pour le surplus, conformément aux dispositions des articles 1231-6 et 1344-1 du code civil.

4. Sur l’indemnité d’occupation

En cas de maintien dans les lieux de la locataire ou de toute personne de son chef malgré la résiliation du bail, une indemnité d’occupation sera due. Au regard du montant actuel du loyer et des charges, son montant sera fixé à la somme mensuelle de 850 euros.

L’indemnité d’occupation est payable et révisable dans les mêmes conditions que l’étaient le loyer et les charges, à partir du 29 avril 2023, et ne cessera d’être due qu’à la libération effective des locaux avec remise des clés à M. [R] [B] et Mme [M] [I] épouse [B] ou à leur mandataire.

5. Sur les frais du procès et l'exécution provisoire

Aux termes de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité et de la situation économique de la partie condamnée.

Mme [P] [F], qui succombe à la cause, sera condamnée aux dépens de la présente instance, conformément à l’article 696 du code de procédure civile.

L’équité commande par ailleurs de faire droit à hauteur de 800 euros à la demande de M. [R] [B] et Mme [M] [I] épouse [B] concernant les frais non compris dans les dépens, en application des dispositions précitées.

PAR CES MOTIFS,

La juge des contentieux de la protection, statuant après débats publics, par jugement mis à disposition au greffe, réputé contradictoire et en premier ressort,

CONSTATE l’existence d’un contrat de location entre M. [R] [B] et Mme [M] [I] épouse [B], d’une part, et Mme [P] [F], d’autre part, concernant les locaux situés au [Adresse 2] (bâtiment B, 1er étage, porte gauche),

CONSTATE que la dette locative visée dans le commandement de payer du 28 février 2023 n’a pas été réglée dans le délai de deux mois,

CONSTATE, en conséquence, que le contrat conclu le 7 septembre 2021 entre M. [R] [B] et Mme [M] [I] épouse [B], d’une part, et Mme [P] [F], d’autre part, concernant les locaux situés au [Adresse 2] (bâtiment B, 1er étage, porte gauche) est résilié depuis le 29 avril 2023,

DIT n’y avoir lieu d’octroyer des délais de paiement à Mme [P] [F], sans préjudice des délais qui pourraient lui être accordés dans le cadre d’une procédure de surendettement,

ORDONNE à Mme [P] [F] de libérer de sa personne, de ses biens, ainsi que de tous occupants de son chef, les lieux situés au [Adresse 2] (bâtiment B, 1er étage, porte gauche, avec une cave) ainsi que, le cas échéant, tous les lieux loués accessoirement au logement,

DIT qu’à défaut de libération volontaire, il pourra être procédé à son expulsion et à celle de tous occupants de son chef avec l’assistance de la force publique,

DIT que le sort des meubles sera régi conformément aux dispositions des articles L. 433-1 et L. 433-2 du code des procédures civiles d'exécution,

RAPPELLE que l’expulsion ne pourra avoir lieu qu’hors période hivernale et à l’expiration d’un délai de deux mois suivant la délivrance d’un commandement d’avoir à libérer les lieux,

CONDAMNE Mme [P] [F] au paiement d’une indemnité d’occupation mensuelle égale au loyer et aux charges qui auraient été dus en cas de poursuite du bail, soit 850 euros (huit cent cinquante euros) par mois,

DIT que cette indemnité d’occupation, qui se substitue au loyer dès le 29 avril 2023, est payable dans les mêmes conditions que l’étaient le loyer et les charges, jusqu’à libération effective des lieux et remise des clés aux bailleurs ou à leur mandataire,

CONDAMNE Mme [P] [F] à payer à M. [R] [B] et Mme [M] [I] épouse [B] la somme de 25 500 euros (vingt-cinq mille cinq cents euros) au titre de l’arriéré locatif arrêté au 1er janvier 2024, terme de Janvier 2024 inclus, avec intérêts au taux légal à compter du 28 février 2023 sur la somme de 15300 euros, à compter de l'assignation sur la somme de 6800 euros et à compter de la signification de la présente décision pour le surplus,

CONDAMNE Mme [P] [F] à payer à M. [R] [B] et Mme [M] [I] épouse [B] la somme de 800 euros (huit cents euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Mme [P] [F] aux dépens comprenant notamment le coût du commandement de payer du 28 février 2023 et celui de l'assignation du 25 septembre 2023.

Ainsi jugé par mise à disposition au greffe le 2 juillet 2024, et signé par la juge et la greffière susnommées.

La Greffière La Juge


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp acr fond
Numéro d'arrêt : 23/09099
Date de la décision : 02/07/2024
Sens de l'arrêt : Expulsion "ferme" ordonnée au fond (sans suspension des effets de la clause résolutoire)

Origine de la décision
Date de l'import : 15/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-02;23.09099 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award