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02/07/2024 | FRANCE | N°23/00553

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Surendettement, 02 juillet 2024, 23/00553


PROCÉDURE DE SURENDETTEMENT
JUGEMENT
DU MARDI 02 JUILLET 2024

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS



[Adresse 17]
[Localité 6]
Téléphone : [XXXXXXXX02]
Télécopie : [XXXXXXXX01]
Mél : [Courriel 18]

Surendettement

Références à rappeler
N° RG 23/00553 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2VSO

N° MINUTE :
24/00306

DEMANDEUR(S):
[10]


DEFENDEUR(S):
[M] [V]




DEMANDERESSE

LE [10]
CHEZ [8]
[Adresse 11]
[Localité 4]
représentée par Me Isabelle SIMONNEAU, avocat au barreau

de PARIS, avocat plaidant, vestiaire D578


DÉFENDERESSE

Madame [M] [V]
[Adresse 7]
[Adresse 7]
[Localité 5]
comparante



COMPOSITION DU TRIBUNAL

Présidente : Déborah FORST

Greffièr...

PROCÉDURE DE SURENDETTEMENT
JUGEMENT
DU MARDI 02 JUILLET 2024

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

[Adresse 17]
[Localité 6]
Téléphone : [XXXXXXXX02]
Télécopie : [XXXXXXXX01]
Mél : [Courriel 18]

Surendettement

Références à rappeler
N° RG 23/00553 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2VSO

N° MINUTE :
24/00306

DEMANDEUR(S):
[10]

DEFENDEUR(S):
[M] [V]

DEMANDERESSE

LE [10]
CHEZ [8]
[Adresse 11]
[Localité 4]
représentée par Me Isabelle SIMONNEAU, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire D578

DÉFENDERESSE

Madame [M] [V]
[Adresse 7]
[Adresse 7]
[Localité 5]
comparante

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Présidente : Déborah FORST

Greffière lors des débats : Trécy VATI
Greffière lors de la mise à disposition: Selma BOUCHOUL

DÉCISION :

contradictoire, rendue en premier ressort, et mise à disposition au greffe.

EXPOSE DU LITIGE

Le 24 avril 2023, Madame [M] [V] a déposé un dossier auprès de la commission de surendettement des particuliers de [Localité 16] (ci-après « la commission »), aux fins de traitement de sa situation de surendettement.

Son dossier a été déclaré recevable le 11 mai 2023.

Par décision du 10 août 2023, la commission a adopté des mesures imposées consistant en un plan de rééchelonnement des dettes sur une durée de 84 mois, au taux de 0%, pour des mensualités maximales de 397 euros par mois, avec l’effacement partiel des dettes à l’issue du plan à hauteur de 31453,47 euros.

La décision a été notifiée à la société [10] le 11 août 2023.

Par courrier envoyé le 14 août 2023, la société [10] a contesté les mesures imposées.

L’ensemble des parties a été convoqué à l’audience du 18 janvier 2024 du juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris. Un renvoi a été ordonné afin de permettre aux parties d’échanger leurs conclusions.

L’affaire a été de nouveau été appelée à l’audience du 2 mai 2024, à laquelle elle a été retenue.

La société [10], représentée par son conseil, a déposé des conclusions écrites, modifiées dans ses observations orales aux termes desquelles elle demande :
de juger que Madame [M] [V] est titulaire d’un portefeuille de titres évalué à la somme de 74032 euros ;de juger que Madame [M] [V] n’est pas en situation de surendettement et dans l’impossibilité manifeste de faire face à la créance du [10] ;d’annuler l’effacement de la dette résiduelle du [10] d’un montant de 31453,47 euros à l’issue du plan de remboursement de 84 mois compte tenu de l’actif mobilier de Madame [M] [V].
Au soutien de ses demandes, elle indique que la débitrice a souscrit, selon offre du 2 mai 2014, un prêt immobilier d’un montant de 123 860,15 euros au taux de 2,01% l’an remboursable en une échéance en capital de 123 860,15 euros payable à la date du 5 mai 2021, afin de racheter un prêt immobilier accordé par la banque [9] le 16 octobre 2006 et destiné initialement au financement d’un appartement à titre de résidence principale. Elle fait valoir, sur le fondement de l’article L711-1 du code de la consommation, que la débitrice est titulaire d’un portefeuille de titres auprès de la société [14] évalué à la somme de 74032 euros, et qui sera débloquée au mois de décembre 2025 et doit permettre de régler entièrement sa créance de 64134,51 euros.

Madame [M] [V], présente en personne, a demandé une diminution du montant des mensualités retenues par la commission. Elle a déposé un écrit au tribunal, qu’elle a repris dans ses observations orales, aux termes duquel elle expose avoir été victime d’une escroquerie à la suite d’un placement dans la société luxembourgeoise [14], dirigée par Monsieur [S] [Y], et qui détient également d’autres sociétés. Elle expose qu’elle devait commencer à percevoir les intérêts de son placement en 2014, qu’ils ont été repoussés en 2021 puis en 2023 et ainsi de suite. Elle précise que Monsieur [Y] s’était engagé à lui verser 1750 euros par mois à compter du 1er janvier 2023, et que cette somme devait lui permettre de régler son crédit auprès du [10], mais qu’elle n’a jamais reçu aucun versement, et qu’il ne répond pas au téléphone. Elle fait valoir que la société [14] a été placée en liquidation judiciaire au mois d’octobre 2023 et qu’elle n’avait plus d’adresse à compter de 2022. Elle fait valoir qu’elle ne peut plus récupérer son capital investi de 73000 euros. Questionnée sur la déclaration de sa créance à la procédure de liquidation judiciaire de cette société, elle indique ne pas l’avoir fait, sans pouvoir en être sûre. Sur sa situation personnelle, elle expose être locataire, divorcée, s’acquitter 1619 euros de charges et 700 euros de loyer.

A l’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré au 2 juillet 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité du recours

En application des dispositions de l'article L733-10 du code de la consommation, une partie peut contester devant le juge des contentieux de la protection, dans un délai fixé par décret, les mesures imposées par la commission en application des articles L. 733-1, L. 733-4 ou L. 733-7.

Les conditions de recevabilité du recours formé contre la décision de la commission relative aux mesures qu'elle entend imposer sont régies par les dispositions des articles L 733-10 et R 733-6 du code de la consommation ; en vertu de ces dispositions, cette contestation doit intervenir dans les trente jours de la notification des mesures imposées, par déclaration remise ou lettre recommandée avec accusé de réception adressée au secrétariat de la Commission.

La computation de ce délai de 30 jours s’effectue conformément aux dispositions des article 640 et suivants du Code de procédure civile.

En l’espèce, la société [10] a formé son recours le 14 août 2023 à l’encontre de la décision de la commission du 10 août 2023, qui lui avait été notifiée le 11 août 2023, soit dans le délai de 30 jours.

Son recours doit donc être déclaré recevable en la forme.

Sur le fond

En application de l'article L.733-12 du code de la consommation, lorsqu'il est saisi d'un recours contre les mesures imposées par la commission, le juge peut, avant de statuer, s'assurer que le débiteur se trouve bien dans la situation définie à l'article L. 711-1.

Selon l'article L. 711-1 alinéa 1 du code de la consommation, le bénéfice des mesures de traitement des situations de surendettement est ouvert aux personnes physiques de bonne foi. La situation de surendettement est caractérisée par l'impossibilité manifeste de faire face à l'ensemble de ses dettes, professionnelles et non professionnelles, exigibles et à échoir. Le seul fait d'être propriétaire de sa résidence principale dont la valeur estimée à la date du dépôt du dossier de surendettement est égale ou supérieure au montant de l'ensemble des dettes professionnelles et non professionnelles exigibles et à échoir ne fait pas obstacle à la caractérisation de la situation de surendettement.

En l’espèce, afin de déterminer si Madame [V] se trouve dans une situation de surendettement, il convient d’examiner si l’actif dont elle dispose est de nature à lui permettre de face faire à l’ensemble de son passif.

Le passif de Madame [M] [V] est constitué d’une unique dette à l’égard de la société [10], d’un montant de 64 134,51 euros. Cette dette résulte du prêt in fine du 18 septembre 2014, d’un montant de 123 860,15 euros, destiné au rachat d’un prêt immobilier accordé par la banque [9] le 16 octobre 2006 et destiné initialement au financement d’un appartement situé à [Localité 19]. Il est acquis aux débats que Madame [M] [V] a vendu avant le dépôt de son dossier de surendettement le bien situé à [Localité 19], et que le produit de la vente a permis de désintéresser en partie la société [10].

En ce qui concerne l’actif de la débitrice, elle ne dispose d’aucun bien immobilier. En revanche, selon une attestation de conformité obligataire du 23 mars 2020, Madame [M] [V] dispose de 74032 obligations d’une valeur nominale d’un euro auprès de la société [14], domiciliée au Luxembourg, ce qui correspond à un actif total auprès de cette société de 74032 euros. L’attestation mentionne que le contrat obligataire a été souscrit le 27 novembre 2019. Ce contrat n’est pas produit par la débitrice, qui soutient que cette société est en tout état de cause en liquidation judiciaire, de sorte cet actif est indisponible et qu’elle ne pourra le recouvrer. Elle verse à ce titre une impression-écran du site internet « datocapital.lu », relatif à la société [14], et qui fait état de plusieurs documents à différentes dates (« incorporation » le 6 septembre 2019, « dépôt des états financiers (exercice se terminant le 31 décembre 2019) » le 28 septembre 2020, « démission » le 28 septembre 2021, « fin du contrat de domiciliation » le 8 novembre 2021, « modification » le 5 janvier 2022, « fin du contrat de domiciliation » le 17 août 2022, « publication d’une décision de justice » le 30 octobre 2023). Outre que le nom de la société ne correspond pas exactement à celui indiqué que l’attestation de conformité du 23 mars 2020, aucun des documents, pourtant téléchargeables à la partir de la page internet produite, n’est versé par la débitrice. Cette simple impression-écran ne permet ainsi nullement d’établir que la société [14], dans laquelle elle dispose d’un actif obligataire de 74032 euros et qui est ainsi de nature à solder la totalité de son endettement, se trouve en liquidation judiciaire.

Madame [M] [V] soutient par ailleurs qu’elle a fait l’objet d’une escroquerie, et que son actif mobilier se trouve indisponible de ce fait. Elle verse à ce titre une plainte déposée 17 mars 2023 auprès des services de police de [Localité 16] pour des faits d’escroquerie visant Monsieur [S] [Y] et Monsieur [P] [O].

Afin de justifier de ces éléments, elle produit un certificat numéro 13070 du 5 mars 2014 de la société [12], se trouvant à [Localité 15] et fondée par Monsieur [S] [Y], selon lequel elle a versé le 27 février 2014 la somme de 25000 euros en compte courant et dispose d’une part en capital d’une livre. Elle justifie par ailleurs avoir versé la somme de 25250 euros par virement du 11 février 2024 à la société [12] correspondant à une action d’une livre et le solde en compte courant d’associé à son nom. Madame [M] [V] produit en outre la convention de compte courant d’associé en date du 11 février 2014 avec la société [12], précisant qu’elle met à disposition de l’entreprise la somme de 25000 euros pour une durée minimum de 3 mois. Cette convention de compte précise les conditions de valorisation du compte courant, de retrait du compte courant et de rachat de capital. Il est ainsi suffisamment établi que Madame [M] [V] a acquis une part sociale de la société [12] et versé sur le compte courant d’associé à son nom au moins la somme de 25000 euros au titre d’un apport en compte courant d’associé.

Madame [M] [V] verse en outre un courrier du 5 mars 2014 de la société [12] lui indiquant qu’elle lui fait parvenir un certificat de compte courant d’associé numéro [XXXXXXXXXX03] et la convention d’associé, et précisant que ses revenus commenceraient à partir du 1er mars 2014. Il convient néanmoins de relever que le certificat de compte courant numéro [XXXXXXXXXX03] joint à ce courrier, faisant état du transfert du solde du compte courant d’un montant de 46 199,06 euros à la société [13] est daté du 31 octobre 2015, ce qui n’est pas cohérent avec une transmission concomitante au courrier du 1er mars 2014. Ce transfert du solde de son compte courant auprès de la société [13] est en revanche cohérent avec le protocole de cession de part sociale et de compte courant d’associé qu’elle produit et qui est daté du 20 octobre 2015. Aux termes de ce protocole, il est rappelé que Madame [M] [V], désignée comme « cédant-investisseur », a souscrit une part sociale auprès de la société [12] (désignée comme « la société gestionnaire ») et a apporté en compte courant la somme de 25 000 euros dans le cadre d’un certificat d’investissement numéro [XXXXXXXXXX03] dans le cadre d’un placement privé, qu’à la date du 1er octobre 2015, le capital disponible est de 46 199,06 euros, et qu’aux termes de cette convention, Madame [M] [V] cède et apporte au cessionnaire, soit la société [13] [P] [O] [13], la part sociale qu’elle détient au capital de la société [12], et qu’en contrepartie, la société [13] [P] [O] [13] s’engage à attribuer à Madame [M] [V] une part sociale d’un euro dans cette société. Il est par ailleurs précisé que Madame [M] [V] cède et transporte à la société [13] [P] [O] [13] sa créance en compte courant d’associé d’un montant de 46 199,06 euros. Ainsi, aux termes de cette convention, l’actif de Madame [M] [V] de 46 199,06 euros se trouve désormais au passif de la société [13] [P] [O] [13], et tel que cela est résumé dans le certificat d’investissement auprès de la société [13] du 25 octobre 2015.

Or, selon la pièce numéro 9 qu’elle produit, elle a versé une nouvelle somme de 15 000 euros auprès de la société [13] le 20 novembre 2015, de sorte que son compte courant d’associé était de 63421,35 euros à cette date.

Les éléments que Madame [M] [V] verse ne permettent pas d’établir que cette somme de 63 421,35 euros, qui se trouvait au titre de son compte courant d’associé dans la société [13] en 2015, ait été transférée dans la société [14]. Ainsi, la note d’information du 3 janvier 2022 rédigée par Monsieur [S] [Y] afin d’expliciter le rapport de gestion de chaque société filiale faisant partie du groupe [14] ne mentionne à aucun moment un quelconque lien avec la société [13] [P] [O] [13]. Il en résulte que Madame [M] [V] ne justifie nullement que les liquidités dont elle disposait auprès de la société [13] n’existent plus.

Par ailleurs, les échanges de courriels au mois de février 2021 entre Monsieur [S] [Y] et Monsieur [P] [O] sont insuffisamment explicites sur la localisation des fonds de Madame [M] [V] pour retenir qu’elle ne dispose plus d’aucun d’actif disponible dans les sociétés précitées.

Au regard de l’ensemble de ces éléments, Madame [M] [V] n’apporte pas la preuve que les liquidités auprès des sociétés [13] [P] [O] [13] et [14] soient indisponibles, et qu’elles ne puissent ainsi pas être utilisées à court terme afin de régler sa dette.

Il en résulte que sa situation d’endettement n’est pas établie.

Par conséquent, elle sera déclarée irrecevable au bénéfice de la procédure de surendettement.

PAR CES MOTIFS

Le juge des contentieux de la protection, statuant après débats en audience publique par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire, et en premier ressort,

DÉCLARE recevable en la forme le recours formé par la SA [10] à l'encontre de la décision de la commission de surendettement des particuliers de paris du 10 août 2023 ;

CONSTATE que Madame [M] [V] ne se trouve pas en situation de surendettement;

DÉCLARE en conséquence Madame [M] [V] irrecevable à bénéficier d'une procédure de traitement de sa situation de surendettement ;

REJETTE le surplus des demandes ;

LAISSE à chaque partie la charge des éventuels dépens par elle engagés ;

DIT que la présente décision sera notifiée par lettre recommandée avec avis de réception à Madame [M] [V] et à ses créanciers, et par lettre simple à la commission de surendettement des particuliers de Paris ;

RAPPELLE que la présente décision est immédiatement exécutoire.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition les jour, mois et an susdits par la Présidente et la Greffière susnommées.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Surendettement
Numéro d'arrêt : 23/00553
Date de la décision : 02/07/2024
Sens de l'arrêt : Déclare la demande ou le recours irrecevable

Origine de la décision
Date de l'import : 08/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-02;23.00553 ?
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