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02/07/2024 | FRANCE | N°21/10623

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 5ème chambre 1ère section, 02 juillet 2024, 21/10623


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
3 Expéditions
exécutoires
- Me Sandrine ROUSSEAU
- Me Jérôme HASSID
- Me Jonathan TOBOLSKI
délivrées le :
+ 1 copie dossier




5ème chambre
1ère section


N° RG 21/10623
N° Portalis 352J-W-B7F-CU64Q

N° MINUTE :




Assignation du :
06 Août 2021









JUGEMENT
rendu le 02 Juillet 2024
DEMANDERESSES

La SCM [Adresse 3], Société Civile de Moyens au capital de 1.448,27 €, dont le siège social est sit

ué [Adresse 3] – [Localité 5], immatriculée au Registre du commerce t des Sociétés de PARIS sous le numéro 340 216 761, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualit...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
3 Expéditions
exécutoires
- Me Sandrine ROUSSEAU
- Me Jérôme HASSID
- Me Jonathan TOBOLSKI
délivrées le :
+ 1 copie dossier

5ème chambre
1ère section

N° RG 21/10623
N° Portalis 352J-W-B7F-CU64Q

N° MINUTE :

Assignation du :
06 Août 2021

JUGEMENT
rendu le 02 Juillet 2024
DEMANDERESSES

La SCM [Adresse 3], Société Civile de Moyens au capital de 1.448,27 €, dont le siège social est situé [Adresse 3] – [Localité 5], immatriculée au Registre du commerce t des Sociétés de PARIS sous le numéro 340 216 761, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,

représentée par Me Jérôme HASSID, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #E0048

La Société XEROX FINANCIAL SERVICES, SAS inscrite au RCS de Nanterre sous le numéro 441 339 389, dont le siège social est [Adresse 1] [Localité 6], agissant poursuites et diligences de son représentant légal élisant domicile audit siège en cette qualité,

représentée par Me Sandrine ROUSSEAU, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #E0119

Décision du 02 Juillet 2024
5ème chambre 1ère section
N° RG 21/10623 - N° Portalis 352J-W-B7F-CU64Q

DÉFENDERESSES

La SAS SACOM, Société par Actions Simplifiée au capital de 15.244,90 €, dont le siège social est situé [Adresse 2] – [Localité 4]S, immatriculée au Registre du Commerce de PARIS sous le numéro 347 726 549, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,

représentée par Me Jonathan TOBOLSKI, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #C2049

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Thierry CASTAGNET, Premier Vice-Président Adjoint
Antoine de MAUPEOU, Premier Vice-Président Adjoint
Lise DUQUET, Vice-Présidente

assistés de Tiana ALAIN, Greffier,

DÉBATS

A l’audience du 13 Mai 2024 tenue en audience publique devant Thierry CASTAGNET, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seul l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile. Avis a été donné aux parties que la décision serait rendue le 2 Juillet 2024 par mise à disposition au greffe.

JUGEMENT

Prononcé par mise à disposition
Contradictoire
En premier ressort

____________________

EXPOSE DU LITIGE

Le 12 février 2018, la SCM DU [Adresse 3] a signé avec la société XEROX FINANCIAL SERVICES un contrat de location portant sur un copieur de marque RANK XEROX moyennant 20 loyers trimestriels de 2.148 euros HT.

Le 9 décembre 2020, la SCM DU [Adresse 3] a signé avec la société SACOM un bon de commande portant sur la location d’un copieur CANON en remplacement de l’ancien matériel évoqué ci-dessus.

Le bon de commande du nouveau copieur stipulait la prise en charge par la société SACOM “du solde de la dernière échéance” du précédent contrat.

La SCM DU [Adresse 3] a également signé avec la société SACOM un contrat de service pour l’entretien et la fourniture des consommables, alors que l’ancien copieur RANK XEROX faisait l’objet d’un contrat de maintenance souscrit auprès de la société DOCUMENT STORE le 12 février 2018.

Le contrat de location du nouveau copieur CANON fourni par SACOM a été souscrit auprès de la SAS DE LAGE LANDEN LEASING et prévoyait le paiement de 21 loyers trimestriels de 1.877 euros.

Le nouveau copieur CANON a été livré le 28 décembre 2020, et le copieur XEROX a été repris par la société SACOM.

Un litige est né entre les parties sur l’exécution du contrat lorsqu’il est apparu que ce n’est pas une échéance mais neuf qui restaient dues à la société XEROX FINANCIAL SERVICES lors de la résiliation anticipée du contrat de location du premier copieur.

Pour mettre fin à ce litige, le 20 mai 2021, les parties ont signé un protocole d’accord accompagné d’un nouveau contrat prévoyant la fourniture à la SCM DU [Adresse 3] d’une nouvelle installation téléphonique, les sommes perçues par la société SACOM par son fournisseur étant affectées au paiement des créances résultant de la résiliation anticipée du contrat de location du copieur XEROX.

Cependant, ce contrat d’installation et ce protocole ont été résiliés unilatéralement par la SCM DU [Adresse 3] par courrier RAR du 25 mai 2021 et par mail du 26 mai 2021.

C’est dans ces conditions que par acte d’huissier de justice du 6 août 2021, la SCM DU [Adresse 3] a fait assigner la SASU SACOM devant le tribunal judiciaire de Paris afin d’obtenir sa condamnation au paiement des sommes restant dues à la suite de la résiliation anticipée du contrat RANK XEROX, outre celle de 5.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile.

De son côté, par exploit du 31 octobre 2022, la SAS XEROX FINANCIAL SERVICES a fait assigner la SCM DU [Adresse 3] devant le tribunal judiciaire de Paris afin que celui-ci:

- Constate la résiliation amiable du contrat du 12 février 2018 à effet du 30 juin 2021;
A titre subsidiaire,
- Prononcer la résiliation judiciaire du contrat à effet du 30 juin 2021 ou à tout le moins à la date de l'assignation ;
En tout état de cause,
- Condamne la SCM DU [Adresse 3] à lui régler les sommes suivantes :
- 2.652,35 euros TTC au titre des loyers échus impayés, majorés des intérêts au taux de trois fois le taux légal prévu par les dispositions de l’article L. 441-6 du code de commerce, et ce à compter de la délivrance de l’assignation et jusqu’à parfait paiement ;
- 40 euros au titre des dispositions de l’article L.441-10 du code de commerce ;

- 20.620,80 euros TTC au titre de l’indemnité de résiliation, majorée des intérêts légaux à compter l’assignation ;
- 2.062 euros au titre de la pénalité de 10 %, majorée des intérêts légaux à compter de l’assignation ;
Dans l’hypothèse où le tribunal serait amené à fixer la résiliation à une date antérieure ou postérieure au 30 juin 2021,
- Condamne la SCM DU [Adresse 3] à lui verser la totalité des loyers TTC échus et impayés, outre accessoires y attachés (intérêts majorés et pénalités article L.441-10 du code de commerce), à la date retenue ainsi qu’une indemnité de résiliation équivalente à la totalité des loyers TTC restant à échoir à compter de la date retenue et jusqu'au terme du contrat, majorée de la pénalité de 10%, outre intérêts légaux à compter de l’assignation ;
- Ordonne la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du code civil ;
- Ordonne à la SCM DU [Adresse 3] de restituer, dans les 15 jours de la signification du jugement, le copieur XEROX C 8055 n° de série : 3711970222, et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard pendant un délai de deux mois passé lequel il sera de nouveau statué ;
- Se réserve la liquidation de l’astreinte ;
- Condamne la SCM DU [Adresse 3] à lui verser la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Rappelle que l’exécution provisoire est de droit ;
- Condamne la SCM DU [Adresse 3] aux dépens.

Les deux instances ont été jointes par ordonnance de 3 avril 2023.

Au soutien de ses prétentions, la société XEROX FINANCIAL SERVICES expose pour l’essentiel que le 28 avril 2021, la SCM DU [Adresse 3] a demandé la résiliation anticipée du contrat et qu’elle a accepté la proposition de dédit qui lui a été adressée de sorte que le contrat a été résilié à la date du 30 juin 2021.
Subsidiairement, elle considère que la résiliation judiciaire est encourue pour défaut de paiement des loyers par application des articles 1224 et 1227 du code civil.
Elle demande donc le paiement des loyers échus impayés à la date de résiliation outre l’indemnité de résiliation prévue par le contrat ainsi que la pénalité forfaitaire de 40 euros prévue par l’article L.441-10 du code de commerce.
Elle réclame aussi la restitution du matériel sous astreinte de 50 euros par jours de retard passé un délai de 15 jour et ce pendant 2 mois.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 25 mai 2023, la SCM DU [Adresse 3] demande au tribunal de (ne sont ici reprises que les prétentions au sens de l’article 4 du code de procédure civile, à l’exclusion des demandes tenant à voir “constater” qui constituent des moyens improprement inclus dans le dispositif) :

- Débouter la société XEROX FINANCIAL SERVICES de l’intégralité de ses demandes ;

- Condamner la société SACOM au paiement de la somme de 43.348,80 euros avec intérêts au taux légal à compter du 23 juin 2021 ;
Subsidiairement,
- Condamner la société SACOM à la garantir de toute éventuelle condamnation qu’elle pourrait encourir à l’égard de la société XEROX FINANCIAL SERVICES ;
- Condamner la société SACOM au paiement de la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens ;
- Débouter la société SACOM de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;
- Rappeler que l’exécution provisoire est de droit et au cas particulier la prononcer en tant que de besoin.

A l’appui, la SCM DU [Adresse 3] fait essentiellement valoir au visa de l’article 1103 du code civil que la société SACOM s’est engagée à prendre en charge les sommes restant dues tant à la société DOCUMENT STORE qu’à la société XEROX FINANCIAL SERVICES.
Elle ajoute que selon le bon de commande, la société SACOM avait prévu le retrait du photocopieur XEROX qu’elle devait restituer à son légitime propriétaire, mais que si le photocopieur a bien été repris, il n’a pas été restitué à la société XEROX FINANCIAL SERVICES.
Elle conteste l’affirmation de la société SACOM selon laquelle elle aurait indiqué lors de la signature du bon de commande qu’il ne restait qu’une seule échéance à payer au titre des anciens contrats, et considère, en toute hypothèse, qu’il lui appartenait de vérifier le montant du solde restant dû aux termes du contrat XEROX.
Elle explique que la mention “solde de la dernière échéance” portée sur le bon de commande ne pouvait se comprendre que comme l’engagement de régler le solde dû jusqu’à la dernière échéance.
Elle expose que dans le protocole du 20 mai 2021, la société SACOM a admis avoir fait une mauvaise interprétation du contrat et s’est engagée à prendre en charge les sommes restant dues pour le financement de l’ancien photocopieur RANK XEROX et ainsi que celles dues à l’ancien fournisseur, la société DOCUMENT STORE.
Elle fait observer que la société SACOM n’a pas répondu à son courrier recommandé du 28 mai 2021 qui lui faisait part des deux solutions possibles à savoir le paiement des sommes réclamées par XEROX FINANCIAL SERVICES, ou l’annulation du contrat tout en lui rappelant qu’elle avait repris le matériel réclamé par ladite société.
Elle s’oppose à l’argumentation subsidiaire de la société SACOM qui sollicite l’annulation du contrat sur le fondement de l’erreur puisqu’il n’existe, selon elle, aucune erreur sur les qualités essentielles du contrat.

Selon ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 5 avril 2022, la SAS SACOM demande au tribunal de (ne sont ici reprises que les prétentions au sens de l’article 4 du code de procédure civile, à l’exclusion des demandes tenant à voir “constater” qui constituent des moyens improprement inclus dans le dispositif) :

A titre principal ;
- Débouter la SCM DU [Adresse 3] de l’ensemble de ses demandes ;
A titre subsidiaire,
Si le tribunal ne retenait pas le moyen tiré de la novation du contrat du 9 décembre 2020;
- Prononcer la nullité du contrat du 9 décembre 2020 pour erreur sur les qualités essentielles de la prestation ;
En tout état de cause ;
- Condamner la SCM DU [Adresse 3] à lui payer la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

A l’appui, la SAS SACOM fait essentiellement valoir qu’elle a exécuté ses engagements contractuels qui prévoyaient uniquement le paiement du solde de la dernière échéance des anciens contrats ce qui a été fait par virement le 20 avril 2021.
Elle explique qu’elle n’aurait pas pu proposer un coût de location inférieur au précédent contrat si elle avait dû y intégrer une indemnité de résiliation de 39.728,40 euros représentant 9 échéances, en contradiction de ce qui avait été arrêté contractuellement.
Elle expose que le protocole signé le 20 mai 2021 et le nouveau contrat portant sur l’installation d’un nouveau système téléphonique devait lui permettre de percevoir de son fournisseur une somme qui serait affectée au paiement de la créance des sociétés DOCUMENT STORE et XEROX FINANCIAL SERVICES, mais que ce contrat et ce protocole ont été résiliés unilatéralement par la SCM DU [Adresse 3] par courrier LRAR du 25 mai 2021 et par mail du 26mai 2021.
Il s’ensuit, selon elle, que, par application de l’article 1329 du code civil, les nouveaux engagements pris aux termes du protocole comme du contrat du 20 mai 2021 ont procédé à la novation des engagements antérieurs, de telle sorte qu’ils n’existent plus au sens du droit civil.
Elle s’estime en conséquence fondée, en application de l’article 1219 du code civil, à opposer à la SCM DU [Adresse 3] une exception d’inexécution en raison de son refus d’exécuter son engagement portant sur la nouvelle installation téléphonique.

Elle fait valoir, au visa des articles 1132 et 1133 du code civil, que si le tribunal devait considérer qu’elle s’était engagée à régler la totalité des neuf échéances restantes au titre des anciens contrats, alors il conviendrait de constater qu’il ne peut s’agir que d’une erreur sur les qualités essentielles de la chose promise et qu’il y aurait alors lieu de prononcer la nullité du contrat.

Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, le tribunal renvoie aux conclusions des parties pour un exposé plus complet de leurs prétentions et moyens.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 09 octobre 2023 et les plaidoiries ont été fixées au 13 mai 2024 à 14h00.

A l’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré et les parties ont été avisées de ce que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 2 juillet 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur les demandes de la SAS XEROX FINANCIAL SERVICES

A) Sur la demande en paiement

En premier lieu, il convient d’observer que la résiliation anticipée du contrat du 12 février 2018 à la date du 30 juin 2018 par l’effet de la demande de la SCI DU [Adresse 3] n’est pas discutée.

Selon les articles 1103 et 1104 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits, et ils doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.

En l’espèce, il est constant que le 12 février 2018, la SCM DU [Adresse 3] a signé avec la société XEROX FINANCIAL SERVICES un contrat portant sur la location d’un copieur XEROX ALTALINK acheté auprès de la société DOCUMENT STORE aux prix de 42.332,08 euros TTC et loué sur une durée de 20 trimestres moyennant un loyer trimestriel de 2.148 euros HT.

Aucune des parties ne produit la demande de résiliation émanant de la SCM DU [Adresse 3] mais la société XEROX FINANCIAL SERVICES produit son courrier de réponse du 30 avril 2021 précisant le montant de “dédit” tel que fixé par le contrat.

Sur ce point, l’article “RES 02 - Dédit” du contrat du 12 février 2018 stipule :

“ En cas de résiliation du contrat avant son échéance, le prix de la location étant calculé en fonction de la durée du contrat, le client est redevable envers XFS, outre du paiement de toutes sommes dues jusqu’à la date de restitution effective de l’équipement, du paiement d’un dédit au titre de la location correspondant à la somme des échéances du prix de location HT restant dues même non encore échues jusqu’au terme de la durée du contrat.
En outre, XFS demandera au client le paiement d’une pénalité égale à 10 % du montant du dédit.”

Dans le dispositif de ses conclusions, la SCM DU [Adresse 3] demande au tribunal de:
“Constater que le photocopieur RANK XEROX C 8055 n° de série 3711970222 est actuellement détenu dans le dépôt de la société SACOM ;
Débouter par voie de conséquence la société XEROX FINANCIAL SERVICES de l’intégralité de ses demandes.”

Or, force est de constater que, d’une part, il n’existe aucun lien entre l’éventuelle détention du copieur par la société SACOM et le montant de l’indemnité de résiliation contractuelle réclamée par XEROX FINANCIAL SERVICES et que, d’autre part, les accords liant la SCM DU [Adresse 3] à la société SACOM sont, en toute hypothèse, inopposables à la société XEROX FINANCIAL SERVICES.

La SCM DU [Adresse 3] ne discute ni la somme réclamée au titre des loyers ni même la clause pénale de 10%.

Toutefois, il convient de relever que la somme telle que réclamée dans l’assignation ne correspond pas aux pièces produites par XEROX FINANCIAL SERVICES.

En effet, dans l’assignation, la société XEROX FINANCIAL SERVICES réclame la somme de 2.652,35 euros au titre des loyers échus impayés, celle de 20.620,80 euros à titre d’indemnité de résiliation, et 2.062 euros au titre de la pénalité de 10 % soit un total de 25.335,15, alors que la mise en demeure du 31 août 2021(pièce n°10) et le tableau produit (pièce n°11) portent tous deux sur une somme totale, hors pénalité, de 21.754,75 euros.

Il s’ensuit que la somme due à la société XEROX FINANCIAL SERVICES s’établit à 21.754,75 + 2.062 (au titre de la pénalité telle que réclamée et qui lit le tribunal) = 23.816,75 euros et que la SCM DU [Adresse 3] sera condamnée au paiement de cette somme avec intérêts au taux légal à compter de l’assignation du 31 octobre 2022.

Conformément à l’article 1343-2 du code civil, il y a lieu de dire que les intérêts échus dus pour une année entière produiront à leur tour intérêt.

La SCM DU [Adresse 3] sera également condamnée au paiement de la somme de 40 euros au titre de la pénalité forfaitaire prévue par l’article L. 441-10 du code de commerce.

B) Sur la demande de restitution du matériel

Il est établi par les pièces produites aux débats et notamment le rappel des faits du protocole d’accord du 20 mai 2021 que la société SACOM lors de la livraison du copieur CANON fin décembre 2020, a procédé à la reprise du copieur RANK XEROX, propriété de la société XEROX FINANCIAL SERVICES et qui se trouve actuellement dans ses entrepôts.

Quelle que soit par ailleurs, la valeur attribuée audit protocole, les faits qui sont rapportés dans le préambule constituent des faits reconnus qui ne sont pas susceptibles d’être affectés par la non-exécution du protocole.

D’ailleurs, dans le cadre de la présente instance, la société SACOM n’oppose toujours aucune contestation à la reprise du matériel RANK XEROX d’autant qu’il convient de remarquer que le retrait du copieur est prévu au bon de commande moyennant la somme de 450 euros HT.

Il est donc constant que le copieur dont s’agit n’est plus détenu par la SCM DU [Adresse 3], de sorte que la demande de restitution dirigée contre elle sera rejetée.

Sur les demandes de la SCM DU [Adresse 3] à l’égard de la société SACOM

A) Sur les engagements de la société SACOM

Le bon de commande du 9 novembre 2020 porte la mention : “Solde de la dernière échéance locative Xerox”

Si les parties s’accordent sur le fait qu’il convient de comprendre que la société SACOM devait prendre à sa charge la somme ainsi définie, elles s’opposent en revanche sur la signification exacte de la mention et sur le montant correspondant.

Il est indéniable que l’emploi du mot “solde” crée une confusion dans l’interprétation de cette mention puisque à s’en tenir à la stricte logique sémantique, il s’agirait seulement de la part non encore réglée de la dernière échéance (dont la date n’est d’ailleurs pas précisée) ce qui laisserait supposer qu’une part de cette échéance a déjà été payée.

En second lieu, il résulte indubitablement du caractère laconique de cette mention qu’elle ne traduit pas clairement la commune intention des parties puisque la société SACOM évoque elle-même dans ses écritures de la dernière échéance à purger sur les anciens contrats, ce qui inclut le contrat DOCUMENT STORE alors que la mention n’évoque que le contrat XEROX.

Il y a donc lieu à interprétation et selon l’article 1188 du code civil, le contrat s'interprète d’après la commune intention des parties plutôt qu’en s’arrêtant au sens littéral de ses termes et lorsque cette intention ne peut être décelée, le contrat s'interprète selon le sens que lui donnerait une personne raisonnable placée dans la même situation.

En l’espèce, on peine à comprendre l’intérêt que pouvait avoir la SCM DU [Adresse 3] à louer un nouveau copieur à 1.877 euros HT par trimestre, si elle restait par ailleurs redevable de toutes les échéances à échoir du contrat précédent, outre les sommes restant dues à la société DOCUMENT STORE, puisque alors son intérêt était de toute évidence d’exécuter le premier contrat de location jusqu’à son terme.

Ensuite, de son côté, la société SACOM qui ne communique pas les conditions d’achat du copieur CANON et qui était par ailleurs également liée par un contrat de service avec une facturation à la copie ne fournit pas suffisamment d’éléments permettant de vérifier l’intérêt ou le défaut de profit global pouvant résulter pour elle de l’opération même dans l’hypothèse soutenue par la demanderesse.

Outre ce premier élément, il convient de rechercher ce qui, dans les autres éléments communiqués, permet de déterminer quelle était la commune intention des parties.

A cet égard, le tribunal relève que dans le préambule du protocole d’accord du 20 mai 2021, les parties ont écrit :

“ La société SACOM s’est engagée, comme il est d’usage en la matière, de prendre en charge le solde du leasing restant dû à la société de leasing pour l’acquisition du photocopieur de marque RANK XEROX, à savoir la société XEROX FINANCIAL SERVICES et le solde restant dû à l’ancien fournisseur, la société DOCUMENT STORE.
A la suite d’une mauvaise interprétation du contrat liant la SCM [Adresse 3] à la société DOCUMENT STORE et à la société XEROX FINANCIAL SERVICES par la société SACOM, cette dernière pensait qu’il ne restait dû qu’une trimestrialité alors qu’en réalité, il restait dû huit trimestrialités.
[...]
Monsieur [I] [M] s’est alors rapproché du gérant de la SCM [Adresse 3] pour trouver une solution amiable permettant aux parties, d’une part de poursuivre leurs relations commerciales et, d’autre part, à la société SACOM de tenir ses engagements et de prendre à sa charge les sommes restant dû tant à la société DOCUMENT STORE qu’à la société XEROX FINANCIAL SERVICES.”

Même en l’absence d’exécution du protocole, les faits relatés dans le préambule sont avérés et acquis aux débats.

Par ailleurs, la société SACOM, professionnelle de la location financière de matériels de bureau, était parfaitement informée de l’existence d’un précédent contrat de location, et se devait donc de vérifier les conditions financières liant la SCM DU [Adresse 3] à la société XEROX FINANCIAL SERVICES.

Elle confirme dans le préambule rappelé ci-dessus que son engagement portait bien sur le solde des sommes restant dues.

B) Sur la novation

Selon l’article 1329 du code civil :

“ La novation est un contrat qui a pour objet de substituer à une obligation, qu’elle éteint, une obligation nouvelle qu’elle crée.
Elle peut avoir lieu par substitution d’obligation entre les mêmes parties, par changement de débiteur ou par changement de créancier”

Aux termes de l’article 1330 du code civil, la novation ne se présume pas et la volonté de l’opérer doit résulter clairement de l’acte. Il s’évince donc de ces dispositions que, sauf intention expresse des parties, la transaction n’emporte pas novation.

Tel est bien le cas du protocole d’accord du 20 mai 2021 qui ne comporte aucune expression de volonté des parties de procéder à une novation et qui ne substitue pas une obligation à une autre, l’engagement de la société SACOM de régler les sommes dues aux sociétés XEROX FINANCIAL SERVICES et DOCUMENT STORE demeurant inchangé. Le protocole organise, en contrepartie de la renonciation des parties à toute réclamation, les modalités de paiement de ces sommes par SACOM au moyen d’un contrat de location portant sur une nouvelle installation téléphonique.

En l’absence de toute novation, la société SACOM n’est donc pas fondée à opposer à la SCM DU [Adresse 3] l’exception d’inexécution en raison de la résiliation du contrat de location de ladite installation téléphonique à laquelle elle a d’ailleurs consent.

C) Sur l’erreur

La société SACOM se prévaut, au visa de l’article 1132 du code civil, d’une erreur portant sur les qualités essentielles de la prestation.

Cependant, selon l’article 1136 du code civil l’erreur sur la valeur par laquelle, sans se tromper sur les qualités essentielles de la prestation, un contractant fait seulement de celle-ci une appréciation économique inexacte n’est pas une cause de nullité.

En l’espèce, la société SACOM se prévaut bien du manque d’intérêt économique de l’opération du fait de la prise en charge des mensualités restant dues à la société XEROX FINANCIAL SERVICES.

Pour le reste, les prestations essentielles du contrat sont clairement définies à savoir, la mise en location d’un copieur moyennant 21 loyers trimestriels de 1.877 euros, et sur ce point la société. SACOM ne peut se prévaloir d’aucune erreur.

Elle sera donc déboutée de sa demande de nullité

En conséquence, la société SACOM sera condamnée à garantir la SCM DU [Adresse 3] de toutes les condamnations prononcées à son encontre au profit de la société XEROX FINANCIAL SERVICES.

S’agissant des sommes réclamées par la SCM DU [Adresse 3] au titre de la résiliation anticipée du contrat souscrit auprès de DOCUMENT STORE, la demanderesse ne produit que la lettre recommandée de résiliation du 19 avril 2021 faisant état d’une indemnité de 17.973,65 euros TTC.

La SCM DU [Adresse 3] ne justifie d’aucun règlement fait entre les mains de la société DOCUMENT STORE ni même de réclamation de cette dernière depuis cette date.

Elle sera donc déboutée de ce chef de demande.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

La société SACOM qui succombe sera tenue aux dépens.

La société XEROX FINANCIAL SERVICES ne forme de demande au titre des frais non compris dans les dépens qu’à l’encontre de la SCM DU [Adresse 3].

Aucune considération tirée de l’équité ne justifie que la société XEROX FINANCIAL SERVICES et la SCM DU [Adresse 3], conservent à leur charge la totalité des frais non compris dans les dépens.

En conséquence, la SCM DU [Adresse 3] sera condamnée à payer à la société XEROX FINANCIAL SERVICES la somme de 2.500 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile.

La société SACOM, sera condamnée à payer à la SCM DU [Adresse 3] une somme identique, sur le même fondement et pour les mêmes motifs.

Sur l’exécution provisoire

Selon l’article 514 du code de procédure civile les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

En l’espèce, aucune circonstance particulière ne justifie qu’elle soit écartée.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement par jugement contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe, et en premier ressort ;

CONDAMNE la SCM DU [Adresse 3] à payer à la SAS XEROX FINANCIAL SERVICES somme de 23.816,75 euros avec intérêts au taux légal à compter de l’assignation du 31 octobre 2022 ;

DIT que les intérêts dus pour une année entière produiront à leur tour intérêt ;

CONDAMNE la SCM DU [Adresse 3] à payer à la SAS XEROX FINANCIAL SERVICES somme de 40,00 euros au titre de la pénalité forfaitaire prévue par l’article L. 441-10 du code de commerce ;

DEBOUTE la SAS XEROX FINANCIAL SERVICES de sa demande de restitution ;

CONDAMNE la SAS SACOM à garantir la SCM DU [Adresse 3] des condamnations prononcées à son encontre au profit de la SAS XEROX FINANCIAL SERVICES y inclus celle au titre des frais non compris dans les dépens ;

DEBOUTE la SCM DU [Adresse 3] du surplus de ses demandes ;

CONDAMNE la SCM DU [Adresse 3] à payer à la SAS XEROX FINANCIAL SERVICES la somme de 2.500 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile;

CONDAMNE la SAS SACOM à payer à la SCM DU [Adresse 3] à la somme de 2.500 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE les parties de toutes demandes plus amples ou contraires ;
RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit et DIT n’y avoir lieu de l’écarter ;

CONDAMNE la SAS SACOM aux dépens qui pourront être recouvrés par les avocats de la cause conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

Fait et jugé à Paris le 2 juillet 2024.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 5ème chambre 1ère section
Numéro d'arrêt : 21/10623
Date de la décision : 02/07/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 08/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-02;21.10623 ?
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