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01/07/2024 | FRANCE | N°22/02450

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 19eme contentieux médical, 01 juillet 2024, 22/02450


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

19ème contentieux médical

N° RG 22/02450

N° MINUTE :

Assignations des :
15, 16 et 18 Février 2022

DEBOUTE

SB




JUGEMENT
rendu le 01 Juillet 2024
DEMANDERESSE

Madame [Y] [D]
[Adresse 2]
[Localité 4]

Représentée par Maître Anne-laure TIPHAINE de la SELARL Inter-Barreaux COUBRIS, COURTOIS & Associés, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #A0251

DÉFENDEURS

Monsieur [W] [I]
[Adresse 3]
[Localité 6]

ET

La MACSF
[Adresse 9]r>[Adresse 9]
[Localité 8]

Représentés par Maître Aloîs DENOIX, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D1665

L’OFFICE NATIONAL D’INDEMNISATION DES ACCIDENTS MÉDICAUX (ONIAM)
[A...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

19ème contentieux médical

N° RG 22/02450

N° MINUTE :

Assignations des :
15, 16 et 18 Février 2022

DEBOUTE

SB

JUGEMENT
rendu le 01 Juillet 2024
DEMANDERESSE

Madame [Y] [D]
[Adresse 2]
[Localité 4]

Représentée par Maître Anne-laure TIPHAINE de la SELARL Inter-Barreaux COUBRIS, COURTOIS & Associés, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #A0251

DÉFENDEURS

Monsieur [W] [I]
[Adresse 3]
[Localité 6]

ET

La MACSF
[Adresse 9]
[Adresse 9]
[Localité 8]

Représentés par Maître Aloîs DENOIX, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D1665

L’OFFICE NATIONAL D’INDEMNISATION DES ACCIDENTS MÉDICAUX (ONIAM)
[Adresse 11]
[Adresse 11]
[Localité 7]

Représenté par la SELARLU RRM avocat représentée par Maître Céline ROQUELLE MEYER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0082

Expéditions
exécutoires
délivrées le :
La CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE [Localité 10]
[Adresse 1]
[Localité 5]

Décision du 01 Juillet 2024
19ème contentieux médical
RG 22/02450

Non représentée

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Sabine BOYER, Vice-Présidente
Madame Laurence GIROUX, Vice-Présidente
Madame Emmanuelle GENDRE, Vice-Présidente

Assistées de Madame Erell GUILLOUËT, Greffière, lors des débats et au jour de la mise à disposition au greffe.

DEBATS

A l’audience du 13 Mai 2024 tenue en audience publique devant Madame Sabine BOYER, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile. Avis a été donné aux avocats que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 01 Juillet 2024.

JUGEMENT

- Réputé contradictoire
- En premier ressort
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE

Madame [Y] [D], qui présentait une atteinte de la pulpe à l’origine de douleurs violentes au niveau de la dent 17, consultait, le 23 septembre 2014, le docteur [W] [I] qui l’orientait vers le docteur [E], afin que ce dernier procède à la dévitalisation de la dent.
Le 23 novembre 2015, le docteur [I] entreprenait le traitement prothétique qui se poursuivait jusqu’au 21 novembre 2016.
Un différend intervenait entre la patiente et le docteur [I] concernant des soins facturés mais non effectués, ne permettant pas l’achèvement du traitement prothétique.
Ainsi, dans les suites, la couronne prothétique se descellait à 6 reprises et des troubles de l’occlusion dentaire apparaissaient.
Madame [D] se plaignait de douleurs oro-faciales.

Procédure

Madame [D] saisissait le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris d’une demande d’expertise médicale.
Par ordonnance du 17 août 2018, le juge des référés désignait le docteur [X], chirurgien-dentiste, en qualité d’expert.

L’expert considérait que la prise en charge de madame [D] avait été conforme. Néanmoins, il indiquait que le descellement à 6 reprises de la couronne sur l’implant de la dent n°26 résultait d’une rupture du contrat de soins de la part du docteur [I] et de l’inachèvement de la séquence prothétique.
Concernant les douleurs oro-faciales, l’expert précisait qu’elles ne se trouvaient pas en lien avec la perte de la couronne sur la dent n°26 puisque celle-ci avait été rescellée.
L’expert considérait que l’état de santé de madame [D] n’était pas consolidé.
Au jour de l’accedit, il estimait qu’elle n’avait pas subi de préjudice professionnel, de déficit fonctionnel temporaire, de souffrances endurées ni même de préjudice esthétique.

Par actes des 15, 16 et 18 février 2022, assignant le docteur [I], la mutuelle MACSF, l’ONIAM et la CPAM de [Localité 10], suivis de conclusions récapitulatives signifiées le 10 mars 2023, auxquelles il est référé expressément conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, Madame [Y] [D] demande au tribunal de :

Déclarer Madame [Y] [D] recevable et bien fondée à solliciter une expertise médicale.
Désigner un expert chirurgien-dentiste, ayant la mission pré-citée,
Déclarer les opérations d'expertise à intervenir opposables au Docteur [I], à la MACSF son assureur, et à l’ONIAM.
Rendre l’ordonnance à intervenir commune à la CPAM de [Localité 10].
Débouter les défendeurs de toutes demandes contraires aux présentes.
Réserver les dépens.

Aux termes de leurs conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 5 juin 2023, auxquelles il est référé expressément conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, Monsieur [W] [I] et la M.A.C.S.F, assureur, demandent au tribunal de :
Juger Madame [D] mal fondée en sa demande tendant à l’organisation d’une contre-expertise et l’en débouter.
La condamner à payer aux Concluants, ensemble, une indemnité de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens de l’Instance,
Subsidiairement, ordonner un complément d’expertise confié au Dr [X], pour procéder à une évaluation définitive des préjudices allégués.
Réserver en ce cas les dépens de l’Instance.

Aux termes de ses dernières écritures récapitulatives notifiées par voie électronique le 22 juillet 2022, auxquelles il est référé expressément conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (Oniam) demande au tribunal de :

A titre principal :
- Constater que les conditions d’intervention de l’Oniam au titre de la solidarité nationale ne sont pas réunies, la présence de l’Oniam à l’expertise étant doncmanifestement inutile ;
En conséquence :
- Ordonner la mise hors de cause de l’Oniam ;
A titre subsidiaire :
- Donner acte à l’Oniam de ses protestations et réserves sur le bien-fondé de sa mise en cause devant la présente juridiction et sur la mesure d’expertise sollicitée ;
- Dire et juger qu’il convient d’étendre la mission de l’expert comme suit :
« 1. Dire si les préjudices subis sont directement imputables à un acte de prévention, dediagnostic ou de soins et lequel ;
2. Dire quelles sont les causes possibles de ce dommage et rechercher si d’autres pathologies, l’âge du patient ou la prise d’un traitement antérieur particulier ont pu interférer sur les évènements à l’origine de la présente expertise et expliquer en quoi elles ont pu interférer ;
3. Dire quel a été le rôle de la pathologie initiale ou de l’accident initial dans la réalisation du dommage;
4. Dire si l’on est en présence de conséquences anormales, non pas au regard du résultat attendu de l’intervention, mais au regard :
- de l’état de santé de la personne,
- de l’évolution prévisible de cet état ;
- de la fréquence de réalisation du risque constaté ;
5. Dire si ces conséquences étaient, au regard de l’état de la personne comme de l’évolution de cet état, probables, attendues ou encore redoutées ;
6. Déposer un pré-rapport afin de permettre aux parties de faire valoir contradictoirement leurs observations préalablement au dépôt du rapport définitif. »
- Laisser les frais d’expertise à la charge de madame [D] ;
- Statuer ce que de droit sur les dépens.

La Caisse Primaire d’Assurance-Maladie de [Localité 10], quoique régulièrement assignée par acte remis à personne morale, n’a pas constitué avocat ; susceptible d'appel, la présente décision sera donc réputée contradictoire et lui sera déclarée commune.

La clôture de la présente procédure a été prononcée le 16 octobre 2023.

L'affaire a été mise en délibéré au 1er juillet 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

SUR LA DEMANDE D'EXPERTISE

Au soutien de la demande d’expertise, Mme [D] fait valoir qu’elle a subi des préjudices en raison de la rupture du contrat de soins de la séquence prothétique par le docteur [I] et que son état n’était pas consolidé lors de l’expertise du docteur [X].
Elle précise que depuis le traitement prothétique a été réalisé et que son état est consolidé.
A cette fin, elle justifie de l’achèvement des soins par le docteur [H] le 22 avril 2020 qui a refait la couronne implanto-portée 26 après plusieurs décollements.
Elle souhaite que la qualité des soins du docteur [I] soit de nouveau examinée et se fonde sur les avis des docteurs [J], [V] et [Z] qui selon elle expliquaient les descellements successifs de la couronne 26 par un défaut du pilier implantaire.
Elle considère qu’il est donc étonnant que l’expert n’ait retenu aucune faute, ni relevé aucun problème d’occlusion alors qu’elle a été constatée par le docteur [V].

En défense, il est soutenu que l’expert a répondu clairement et de façon détaillée aux questions posées, qu’il a répondu aux dires des parties, que Mme [D] ne verse aucun élément nouveau venant contredire l’analyse du docteur [X], de sorte que la demanderesse ne justifierait pas d’un intérêt légitime.

Sur ce, il est relevé que le rapport d’expertise est en date du 27 mars 2019 tandis que les pièces versées à l’appui de la demande de contre-expertise sont du 30 octobre 2017, 14 novembre 2017 et 4 octobre 2019.
L’expert a pris en compte les dires des parties, notamment de Mme [D] du 15 mars 2019.

L’expert, aux termes d’un rapport de 37 pages a répondu à l’ensemble des questions de la mission après avoir pris note des positions des parties. Il a examiné la problématique de la dent 26, celle des douleurs oro-faciales et de l’instabilité occlusale, outre celle du litige concernant les inlay-core facturés à tort.
La position du docteur [I] était de reconnaitre que l’équilibration occlusale n’a pu être menée à terme compte tenu de la rupture du contrat de soins dont il attribuait la responsabilité à Mme [D].
L’expert a retracé l’historique des soins qui ont duré une année de novembre 2015 à novembre 2016 et relevé que la couronne 26 a été posée le 28 juillet 2016 après mise en place de l’implant en position 26 le 9 mars 2016.
Il mentionne les actes « contrôle » du docteur [V] les 13 octobre et 14 novembre 2017, le rescellement du docteur [J] le 22 septembre 2017, les rescellements successifs de la 26 les 12 décembre 2017 et 7 août 2018.
Il admet techniquement que le docteur [I] ait pu renoncer à poser les inlay-cores 15 et 24, objet du litige car ils étaient mentionnés au devis et signale l’absence de préjudice en dehors de la problématique financière.
Il conclut que le descellement à 6 reprises de la couronne sur implant 26 est dû à l’arrêt des soins prothétiques, le réglage des points de contacts entre cette couronne et les dents 25 et 27 n’ayant pu être corrigé. Il relève une insuffisance de contact postérieur créant une zone de tassement alimentaire et une instabilité de la couronne sur son moignon.
Dès lors il considère que le dommage n’est pas dû à un ou des manquements dans la réalisation prothétique mais à l’inachèvement de celle-ci.
Il observe enfin que le docteur [I] a abandonné sa créance de 2070€ devant la chambre disciplinaire du conseil de l’ordre alors que Mme [D] avait versé à tort 1103,44€ pour les inlay-cores non posés.

Depuis cette expertise, Mme [D] produit 2 pièces non prises en compte :
Le courrier du docteur [Z] du 4 octobre 2019 qui constate la mise en place d’un pilier a priori provisoire pour une prothèse scellée de faible hauteur sur l’implant 26, que la couronne réalisée est de type transvissée avec un accès occlusal bouché par un composite, l’absence de correspondance entre le pilier et la couronne, la hauteur du pilier interdisant une pérennité de l’assemblage.L’attestation de fin de traitement du 22 avril 2020 du docteur [H] qui indique avoir réalisé une nouvelle CCM scellée sur un pilier transvissé sur mesure.Décision du 01 Juillet 2024
19ème contentieux médical
RG 22/02450

Ces pièces sont insuffisantes pour justifier l’organisation d’une nouvelle expertise, ces praticiens ne font pas de nouveau constat depuis l’expertise et les avis des docteurs [J] et [V] avaient été pris en compte.

Dans ces conditions la demande est rejetée.

Sur la mise hors de cause de l’ONIAM

La demande de contre-expertise de Mme [D] ayant été rejetée, la mise en cause de l’ONIAM n’est pas justifiée, il sera mis hors de cause.

Sur les dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civile

Mme [D], qui succombe en la présente instance, sera condamnée aux dépens.

En revanche, il n’est pas équitable de laisser le docteur [I] et son assureur supporter les frais irrépétibles engagés dans la présente instance, il n’y a pas lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile.

* Sur l’exécution provisoire

Rien ne justifie d'écarter l'exécution provisoire dont la présente décision bénéficie de droit, conformément aux dispositions des articles 514 et 514-1 du code de procédure civile, s'agissant en effet d'une instance introduite après le 1er janvier 2020.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire mis à disposition au greffe et rendu en premier ressort,

REJETTE la demande d’expertise de Madame [Y] [D] ;

PRONONCE la mise hors de cause de l’ONIAM ;

CONDAMNE Madame [Y] [D] aux dépens comprenant les frais d’expertise ;

DIT n’y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

DÉCLARE le présent jugement commun à la CPAM de [Localité 10] ;

RAPPELLE que la présente décision bénéficie de l'exécution provisoire de droit ;

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Fait et jugé à Paris le 01 Juillet 2024.

La GreffièreLa Présidente

Erell GUILLOUËTSabine BOYER


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 19eme contentieux médical
Numéro d'arrêt : 22/02450
Date de la décision : 01/07/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 09/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-01;22.02450 ?
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