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26/06/2024 | FRANCE | N°24/51023

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Service des référés, 26 juin 2024, 24/51023


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS








N° RG 24/51023 - N° Portalis 352J-W-B7I-C3ZB5

N° : 10

Assignation du :
19 Janvier 2024

[1]

[1] 2 Copies exécutoires
délivrées le:


ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 26 juin 2024



par Maïté GRISON-PASCAIL, 1er Vice-président au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,

Assistée de Fanny ACHIGAR, Greffier.
DEMANDERESSE

S.A. Régie Immobilière de la Ville de [Localité 3] (RIVP)
[Adresse

1]
[Localité 4]

représentée par Maître Fabrice POMMIER de l’ASSOCIATION AMIGUES, AUBERTY, JOUARY & POMMIER, avocats au barreau de PARIS - #J114


DEFENDERESSE

S.A.R.L. C’O...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS


N° RG 24/51023 - N° Portalis 352J-W-B7I-C3ZB5

N° : 10

Assignation du :
19 Janvier 2024

[1]

[1] 2 Copies exécutoires
délivrées le:

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 26 juin 2024

par Maïté GRISON-PASCAIL, 1er Vice-président au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,

Assistée de Fanny ACHIGAR, Greffier.
DEMANDERESSE

S.A. Régie Immobilière de la Ville de [Localité 3] (RIVP)
[Adresse 1]
[Localité 4]

représentée par Maître Fabrice POMMIER de l’ASSOCIATION AMIGUES, AUBERTY, JOUARY & POMMIER, avocats au barreau de PARIS - #J114

DEFENDERESSE

S.A.R.L. C’O POIL AUDIENCE DE REFERE DU MERCREDI 06 MARS 2024 A 13 HEURES 30
[Adresse 2]
[Localité 4]

représentée par Maître Richard ARBIB de la SELARL A.K.A, avocats au barreau de VAL-DE-MARNE - #PC320

DÉBATS

A l’audience du 29 Mai 2024, tenue publiquement, présidée par Maïté GRISON-PASCAIL, 1er Vice-président, assistée de Fanny ACHIGAR, Greffier,

Nous, Président,

Après avoir entendu les conseils des parties,

Par acte sous seing privé du 1er juillet 2018, la Régie Immobilière de la Ville de [Localité 3] (RIVP) a donné à bail commercial à la société C’O Poil des locaux commerciaux situés [Adresse 2] à [Localité 4], pour une durée de neuf ans, moyennant un loyer annuel de 13 264 euros, outre taxes et accessoires, payable trimestriellement et d’avance.

Le 10 février 2023, la bailleresse a fait délivrer au preneur un commandement visant la clause résolutoire d’avoir à payer la somme de 9 895,97 euros représentant un arriéré de loyers et charges.

Par acte en date du 19 janvier 2024, la RIVP a fait assigner en référé la société C’O Poil sollicitant de :

“Vu les articles L. 145-41 du code de commerce, 1103 et 1728 du code civil, 834 et 835 du code de procédure civile,

Constater la résiliation du bail commercial conclu entre les parties, cette résiliation étant effective au 10 mars 2023,

Ordonner l'expulsion de la société C’O POIL, ainsi que celle de tout occupant de son chef des lieux loués situés au [Adresse 2] à [Localité 4], avec si besoin est, 1'assistance de la force publique et d'un serrurier,

Dire et juger que le sort des meubles se trouvant dans les lieux sera soumis aux dispositions des articles L.433-1 et L433-2, R433-1 à R.433-7 du code des procédures civiles d’exécution,

Condamner la société C’O POIL à payer à la RIVP, à titre de provision, une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant du dernier loyer trimestriel majoré de 50%, outre tous accessoires du loyer, du 11 mars 2023 jusqu'à la date de libération effective des lieux.

Condamner la société C’O POIL à payer à la RIVP, à titre de provision, la somme de 17 660,86 € arrêtée au 3 janvier 2024 (terme du 1er trimestre 2024 inclus), à actualiser au jour de l’audience, outre intérêts au taux conventionnel à compter de la délivrance de l’assignation jusqu’à complet règlement, ainsi qu’une indemnité de 1 766 € au titre de la clause pénale,

Dire et juger que le dépôt de garantie versé par le preneur restera acquis à la RIVP.

Condamner la société C’O POIL à payer à la RIVP la somme de 1.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les dépens, comprenant notamment le coût du commandement de payer.”

A l’audience du 29 mai 2024, le conseil de la RIVP a actualisé sa demande de provision à hauteur de la somme de 22 450,23 euros arrêtée au 17 mai 2024, 2ème trimestre 2024 inclus.

Dans ses écritures déposées et développées oralement à l’audience, la société C’O Poil sollicite de :
- ordonner la suspension des effets de la clause résolutoire,
- lui octroyer des délais de paiement rétroactifs pour les sommes qui seront mises à sa charge,
- l’autoriser à se libérer de sa dette locative, en sus du loyer et des charges courants, en 16 mensualités, payables le 10 de chaque mois à compter du jugement à intervenir, selon les modalités suivantes :
*versement de la somme de 2 586,68 euros pendant les trois premiers mois,
*versement de la somme de 990,22 euros pendant les dix mois suivants,
*versement de la somme de 1 596 euros pendant les trois derniers mois,
- suspendre pendant cette période les effets de la clause résolutoire qui sera réputée n’avoir jamais été acquise en cas de respect des modalités de paiement,
- en tout état de cause, débouter la RIVP de ses demandes au titre des dépens et des frais irrépétible,
- écarter l’exécution provisoire de droit dans le cadre de toute condamnation prononcée à son encontre.

Conformément aux articles 446-1 et 455 du code de procédure civile, pour plus ample informé de l’exposé et des prétentions des parties, il est renvoyé à l'assignation introductive d’instance et aux écritures déposées par les parties.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l’acquisition de la clause résolutoire

Aux termes de l'article L. 145-41 du code de commerce, ”toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.”

L’article 834 du code de procédure civile dispose que “dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend”.

Le commandement de payer, visant la clause résolutoire stipulée au bail, délivré le 10 février 2023, porte sur une somme de
9 895,97 euros arrêtée au 3 février 2023, 1er trimestre 2023 inclus, un décompte détaillé étant annexé à l’acte.

Il est établi par les pièces produites aux débats, et non contesté en l’état, que cet arriéré locatif n’a pas été payé intégralement dans le délai d’un mois imparti au preneur, un seul règlement ayant été effectué le 17 février 2023 d’un montant de 2 500 euros.

C’est donc à bon droit que la RIVP sollicite le bénéfice de l’acquisition de plein droit de la clause résolutoire, à la date du
10 mars 2023.

Sur la demande de provision et la demande de délais de paiement

Aux termes de l'article 835, alinéa 2,du code de procédure civile, “dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, il [le président du tribunal judiciaire] peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire”.

Selon l’article L.145-41 du code de commerce, “Les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l'article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge”.

L’article 1343-5 du code civil dispose que “Le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.”

La bailleresse sollicite la somme provisionnelle de 22 450,23 euros arrêtée au 17 mai 2024, 2ème trimestre 2024 inclus, à valoir sur l’arriéré locatif.

La dette locative n’est pas contestée par la société défenderesse.

Il sera donc fait droit à la demande de provision à hauteur de la somme réclamée qui ne se heurte à aucune contestation sérieuse au regard des justificatifs versés aux débats.

La société C’O Poil, invoquant des difficultés financières en raison de la crise sanitaire, des efforts pour procéder à des versements réguliers et une insuffisance de trésorerie pour régler intégralement sa dette, sollicite des délais de paiement auxquels la RIVP ne s’oppose pas.

Il y a donc lieu d’octroyer à la société C’O Poil des délais de paiement dans les termes du dispositif ci-après et de suspendre les effets de la clause résolutoire durant les délais accordés.

A défaut de respect de ces délais, la clause résolutoire reprendra son plein effet. L’expulsion du preneur sera ordonnée.

Dans cette hypothèse, la RIVP sollicite :
- la fixation d’une indemnité d’occupation égale au loyer du dernier trimestre majoré de 50%, outre les accessoires du loyer (article 8.4 du bail)
- une clause pénale de 10% du montant de l’impayé (article 3.8)
- des intérêts de retard au taux des avances sur titres de la Banque de France majoré de deux points (article 8.3)
- la conservation du dépôt de garantie (article 8.3).

Compte tenu de la multiplicité de ces clauses pénales susceptibles de conférer au bailleur un avantage excessif, ces demandes, se heurtant à une contestation sérieuse, seront écartées au stade du référé et devront être soumises à l’appréciation du juge du fond.

L’indemnité d’occupation provisionnelle sera donc égale au montant du dernier loyer tel qu’il résulterait de la poursuite du contrat outre les charges, jusqu’à la libération effective des lieux et la remise des clés.

Sur les autres demandes

Il n’y a pas lieu en équité de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile : la demande est rejetée.

La société C’O Poil supportera la charge des dépens de l’instance en ce compris le coût du commandement de payer.

PAR CES MOTIFS

Le juge des référés, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par ordonnance contradictoire et en premier ressort,

Constatons l’acquisition de plein droit de la clause résolutoire à la date du 10 mars 2023,

Condamnons la société C’O Poil à payer à la Régie Immobilière de la Ville de [Localité 3] (RIVP) la somme provisionnelle de 22 450,23 euros à valoir sur l’arriéré de loyers et charges arrêté au
17 mai 2024, 2ème trimestre 2024 inclus,

Accordons à la société C’O Poil des délais de paiement,

Disons que la société C’O Poil pourra s’acquitter du paiement de la provision fixée, en sus du loyer courant, selon les modalités suivantes, le 10 de chaque mois :
- paiement de la somme de 2 586,68 euros les trois premiers mois, soit juillet, août et septembre 2024,
- paiement de la somme de 990,22 euros durant les 10 mois suivants, d’octobre 2024 à juillet 2025 inclus,
- paiement de la somme de 1 596 euros aux mois d’août et septembre 2025,
- le solde de la dette au mois d’octobre 2025,

Disons que les effets de la clause résolutoire sont suspendus durant le cours des délais accordés,

Disons qu’à défaut de paiement d’un seul loyer courant ou du respect du délai accordé, la clause résolutoire reprendra ses effets, et :
- la dette deviendra immédiatement exigible,
- l’expulsion de la société C’O Poil pourra être poursuivie ainsi que celle de tous occupants de son chef des locaux commerciaux situés [Adresse 2] à [Localité 4] avec l’assistance, si besoin, de la force publique et d’un serrurier,
- le sort des meubles sera réglé conformément aux articles L.433-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution,
- la société C’O Poil sera condamnée à payer, à titre provisionnel, à la Régie Immobilière de la Ville de [Localité 3] (RIVP), une indemnité d’occupation égale au montant du dernier loyer tel qu’il résulterait de la poursuite du contrat outre les charges, jusqu’à la libération effective des lieux et la remise des clés,

Dans cette hypothèse :

- Disons n’y avoir lieu à référé sur la demande de majoration du montant de l’indemnité d’occupation provisionnelle,

- Disons n’y avoir lieu à référé sur la demande au titre des intérêts conventionnels,

- Disons n’y avoir lieu à référé sur la demande à valoir sur la clause pénale de 10%,

- Disons n’y avoir lieu à référé sur la demande tendant à la conservation du dépôt de garantie,

Disons n’y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamnons la société C’O Poil aux dépens comprenant le coût du commandement de payer délivré le 10 février 2023,

Disons n’y avoir lieu à référé sur toute autre demande,

Rappelons que la présente ordonnance bénéficie de l'exécution provisoire de plein droit.

Fait à Paris le 26 juin 2024

Le Greffier,Le Président,

Fanny ACHIGARMaïté GRISON-PASCAIL


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Service des référés
Numéro d'arrêt : 24/51023
Date de la décision : 26/06/2024
Sens de l'arrêt : Expulsion "conditionnelle" ordonnée en référé avec suspension des effets de la clause résolutoire

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-26;24.51023 ?
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