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25/06/2024 | FRANCE | N°20/01026

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 8ème chambre 1ère section, 25 juin 2024, 20/01026


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:




8ème chambre
1ère section


N° RG 20/01026 -
N° Portalis 352J-W-B7E-CRR5H


N° MINUTE :


Assignation du :
24 Janvier 2020







JUGEMENT
rendu le 25 juin 2024
DEMANDERESSE

Madame [W] [P]
[Adresse 4]
[Localité 7]

représentée par Maître Olivier GANEM, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D1404


DÉFENDEURS

Syndicat des copropriétaires de la résidence

“[Adresse 8]” sis [Adresse 1], représenté par son syndic, la S.A.S. Mysyndic
[Adresse 2]
[Localité 6]

représenté par Maître Philippe BENSUSSAN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0074


S.A.S. ...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:

8ème chambre
1ère section

N° RG 20/01026 -
N° Portalis 352J-W-B7E-CRR5H

N° MINUTE :

Assignation du :
24 Janvier 2020

JUGEMENT
rendu le 25 juin 2024
DEMANDERESSE

Madame [W] [P]
[Adresse 4]
[Localité 7]

représentée par Maître Olivier GANEM, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D1404

DÉFENDEURS

Syndicat des copropriétaires de la résidence “[Adresse 8]” sis [Adresse 1], représenté par son syndic, la S.A.S. Mysyndic
[Adresse 2]
[Localité 6]

représenté par Maître Philippe BENSUSSAN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0074

S.A.S. [Z] [I]
[Adresse 3]
[Localité 5]

représentée par Maître Pierre-Henri HANOUNE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C1202
Décision du 25 juin 2024
8ème chambre 1ère section
N° RG 20/01026 - N° Portalis 352J-W-B7E-CRR5H

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Laure BERNARD, Vice-Présidente
Monsieur Julien FEVRIER, Juge
Madame Elyda MEY, Juge

assistés de Madame Lucie RAGOT, Greffière lors des débats, et de Madame Justine EDIN, Greffière lors du prononcé.

DÉBATS

A l’audience du 28 février 2024 tenue en audience publique devant Monsieur Julien FEVRIER, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seul l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile.

JUGEMENT

Prononcé par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort

EXPOSE DU LITIGE

Mme [W] [P] est copropriétaire au sein de l'immeuble [Adresse 8].

Indiquant que la société [Z] [I], alors syndic de l'immeuble, n'a pas ouvert de compte bancaire au nom du syndicat des copropriétaires, Mme [P] a obtenu la désignation d'un administrateur provisoire par ordonnance du président du tribunal judiciaire de Paris du 15 mai 2018.

Cette ordonnance a été rétractée par une nouvelle ordonnance du 8 novembre 2018.

Le 19 décembre 2018, l'assemblée générale des copropriétaires a de nouveau désigné la société [Z] [I] en qualité de syndic.

Le 4 décembre 2019, l'assemblée générale des copropriétaires a voté une résolution n° 16 donnant pouvoir au syndic de diligenter une action judiciaire contre Mme [P] afin d'obtenir le remboursement des sommes exposées par le syndicat des copropriétaires au titre des honoraires de l'administrateur provisoire.

Par acte d'huissier de justice du 24 janvier 2020, Mme [P] a assigné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 8] afin d'obtenir principalement la nullité du mandat du syndic [Z] [I] depuis le 3 décembre 2014 et de l'ensemble des actes postérieurs accomplis par lui dont les assemblées générales de 2014 à 2019.

L'affaire a été enregistrée sous le numéro RG 20/01026.

Par acte d'huissier de justice du 14 mai 2020, Mme [P] a assigné en intervention forcée la SAS [Z] [I] en sa qualité de syndic de l'immeuble.

Cette seconde affaire a été enregistrée sous le numéro RG 20/03809.

Le 9 novembre 2020, le juge de la mise en état a ordonné la jonction de ces deux affaires sous le numéro RG 20/01026.

Par ordonnance du 29 mars 2022, le juge de la mise en état a déclaré le cabinet [I] recevable à discuter le bien fondé des prétentions de Mme [P] et a rejeté l'incident de cette dernière.

Par ordonnance du 6 juin 2023, le juge de la mise en état a ordonné la révocation de l'ordonnance de clôture du 27 juin 2022 pour traiter un incident soulevé trois jours avant la clôture.

Par ordonnance du 9 janvier 2024, le juge de la mise en état a rejeté les fins de non-recevoir au titre de la prescription soulevées par le syndicat des copropriétaires, a déclaré recevables les demandes au fond de Mme [P], a rejeté la demande de dommages-intérêts ou provision sur dommages-intérêts de Mme [P].

*

Dans ses dernières écritures notifiées par le réseau privé des avocats le 19 mai 2022, Mme [P] demande au tribunal de :

" Constater que depuis le 3 décembre 2014 l'ensemble des actes, en ce compris les convocations aux diverses assemblées générales, accomplis par la SAS [Z] [I], syndic du syndicat des copropriétaires de la Résidence [Adresse 8] sis [Adresse 1], sont nuls de plein droit et de manière rétroactive en application de l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965 faute d'ouverture d'un compte bancaire séparé au nom du syndicat dans les 3 mois suivant sa désignation ;
En conséquence :
Dire nul le mandat de syndic de la SAS [Z] [I] depuis le 3 décembre 2014
Dire nul l'ensemble des actes postérieurs accomplis par [I] sous le couvert de mandat de syndic nu au nom et pour le compte du syndicat,
Dire nul en particulier les assemblées générales du syndicat des copropriétaires de la Résidence [Adresse 8] des : 17 décembre 2015, 23 novembre 2016, 29 novembre 2017, 3 décembre 2018 19 décembre 2019 ;
Subsidiairement :
Annuler la résolution n° 16 de l'assemblée générale du 4 décembre 2019 du syndicat des copropriétaires de la Résidence [Adresse 8] ;
Dans tous les cas :
Débouter le SDC de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles ;

Condamner le syndicat des copropriétaires de la Résidence [Adresse 8] sis [Adresse 1] et à payer à Mme [P] la somme de 4 000 € au titre de l'article 700 CPC, outre les dépens.
Débouter la SAS [Z] [I] de l'ensemble de ses demandes ;
Condamner la SAS [Z] [I] à payer à Mme [P] la somme de 8 000 € au titre de l'article 700 CPC, outre les dépens ".

*

Dans ses dernières écritures notifiées par le réseau privé des avocats le 24 juin 2020, le syndicat des copropriétaires [Adresse 8] sis [Adresse 1] demande au tribunal de :

" Vu les dispositions des articles 10 et 42 de la loi du 10 juillet 1965,
Vu es dispositions de l'article 1240 du code civil,
Vu les dispositions des articles 699 et 700 du CPC,

Il est demandé à la juridiction de céans de :
Recevoir le syndicat des copropriétaires Parking Orient-Occident sis [Adresse 1], représenté par son syndic, la société [I] en son action et le déclarer bien fondé,
En conséquence,
Débouter irrecevable (sic) et à défaut mal fondée madame [W] [P] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
Condamner madame [W] [P] au paiement de la somme de 17.798,77 € à titre de dommages et intérêts, en réparation du préjudice directement subi par le syndicat
Condamner madame [W] [P] au paiement de la somme de 2.000 € à titre de dommages et intérêts, en sanction de la mauvaise foi avérée de Mme [P],
Condamner madame [W] [P] au paiement de la somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
Dire et juger qu'il n'y a pas lieu à exécution provisoire ".

*

Dans ses dernières écritures notifiées par le réseau privé des avocats le 24 juin 2022, la SAS [Z] [I] demande au tribunal de :

" Vu les articles 18 et 42 de la loi du 10 juillet 1965,
Il est demandé au tribunal de :
Dire madame [W] [P] irrecevable et mal fondée en ses demandes, fins et conclusions ;
En conséquence, débouter madame [W] [P] de toutes ses demandes fins et prétentions ;
Condamner madame [W] [P] à payer à la SAS [Z] [I] une somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
La condamner en tous les dépens dont distraction au profit de maître [T] [C] pour ceux dont il aurait fait l'avance sans avoir reçu de provision ".
*
Décision du 25 juin 2024
8ème chambre 1ère section
N° RG 20/01026 - N° Portalis 352J-W-B7E-CRR5H

Il est renvoyé aux conclusions des parties pour l'exposé des moyens de droit et de fait à l'appui de leurs prétentions conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

La clôture de la procédure a été ordonnée le 29 janvier 2024 et l'affaire a été plaidée le 28 février 2024. La décision a été mise en délibéré au 21 mai 2024, prorogée au 25 juin 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur les demandes principales de Mme [P]

A l'appui de ses demandes, Mme [P] fait valoir que :
- à l'occasion d'un litige de charges de copropriété, elle a mis en évidence que le syndic [I] encaissait les règlements sur son compte bancaire personnel et avait manqué depuis 2014 à son obligation d'ouvrir un compte bancaire séparé au nom du syndicat des copropriétaires ;
- en application de l'article 18 de la loi de 1965, le mandat du syndic [I] est devenu nul de plein droit ;
- [I] était le syndic du syndicat des copropriétaires défendeur depuis 2006 et n'a pas ouvert de compte bancaire séparé à l'issue de l'assemblée générale du 3 décembre 2014 l'ayant désigné ;
- l'ouverture du compte bancaire serait intervenu le 26 avril 2018, sans que cela ne puisse couvrir la nullité de plein droit du mandat du syndic;
- la demande de désignation d'un administrateur provisoire était légitime ;
- lors de l'assemblée générale du 4 décembre 2019, une résolution n° 16 a été voté afin de donner pouvoir au syndic de diligenter contre elle une action judiciaire afin d'obtenir le remboursement des sommes versées à l'administrateur provisoire ;
- le 17 décembre 2020, le syndicat des copropriétaires a été débouté de sa demande en paiement d'arriéré de charges contre elle ;
- la nullité invoquée est une nullité de plein droit, automatique et doit simplement être constatée ;
- sont nuls de plein droit le mandat de syndic avec effet rétroactif au 3 décembre 2014 et les actes dont les convocations aux assemblées générales et donc la nullité des assemblées générales au cours desquelles [I] été désigné syndic de 2015 à ce jour ;
- le syndic avoue avoir violé l'article 18 de la loi de 1965 ;
- compte tenu de l'effet rétroactif de la nullité, [I] n'avait plus de mandat valable depuis le 29 novembre 2017 ;
- l'assemblée générale de 2018 est nulle faute d'avoir été convoquée par un syndic ayant mandat valable et le mandat confié lors de cette assemblée est nul ;
- l'assemblée générale de 2019 est nulle car convoquée par un syndic dépourvu de mandat valable et le mandat confié lors de cette assemblée est nul.

En défense, le syndicat des copropriétaires fait valoir que :
- la date à prendre en compte afin d'apprécier la date à laquelle le mandat est nul est fixée en novembre 2017 ;
- la nullité de plein droit du mandat n'est effective qu'à compter du troisième mois suivant la désignation du syndic ;
- [I] a été désigné syndic en novembre 2017 et la décision portant annulation de son mandat ne pourrait rétroagir qu'à compter du mois de février 2018 ;
Décision du 25 juin 2024
8ème chambre 1ère section
N° RG 20/01026 - N° Portalis 352J-W-B7E-CRR5H

- les assemblées antérieures à 2017 ne peuvent être critiquées du chef d'une absence de mandat du syndic à compter de février 2018 ;
- Mme [P] est irrecevable à solliciter l'annulation de l'assemblée générale du 19 décembre 2018 car son action a été engagée le 24 janvier 2020 au delà du délai de deux mois de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965.

Pour sa part, la SAS [Z] [I] fait valoir que :
- Mme [P] ne règle pas ses charges de manière régulière ;
- il peut être considéré que le cabinet [I] a vu son mandat de syndic nul de plein droit fin février 2018 ;
- les assemblées antérieures ne peuvent être remises en cause du fait du défaut de mandat du syndic ;
- les assemblées entre 2014 et 2017 n'ont pas été contestées dans le délai de deux mois ;
- la désignation en qualité de syndic datant de l'assemblée générale du 29 novembre 2017, il peut être considéré qu'elle a vu son mandat de syndic nul de plein droit fin février 2018 ;
- Mme [P] n'a pas contesté l'assemblée générale du 19 décembre 2018 dont le procès-verbal lui a été notifié le 28 décembre 2018 et son assignation a été délivrée le 24 janvier 2020 ;
- Mme [P] n'est plus recevable à contester cette assemblée générale ;
- l'annulation d'une première assemblée n'entraîne pas de plein droit la nullité des assemblées ultérieures en raison du principe d'autonomie des assemblées ;
- le procès-verbal de l'assemblée du 4 décembre 2019 a été notifié à Mme [P] le 13 décembre 2019 ;
- le mandat de syndic du cabinet était valide depuis le 28 février 2019, date à laquelle l'assemblée générale du 19 décembre 2018 est devenu définitive.

Vu l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965 qui prévoit notamment que le syndic est chargé d'ouvrir, dans l'établissement bancaire qu'il a choisi ou que l'assemblée générale a choisi, un compte séparé rémunéré au nom du syndicat. La méconnaissance par le syndic de ces obligations emporte la nullité de plein droit de son mandat à l'expiration du délai de trois mois suivant sa désignation. Toutefois, les actes qu'il a passés avec des tiers de bonne foi demeurent valables.

Vu l'article 42 de la même loi qui précise que les actions en contestation des décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants dans un délai de deux mois à compter de la notification du procès-verbal d'assemblée sans ses annexes.

Vu l'article 789 du code de procédure civile qui dispose que lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour statuer sur les fins de non-recevoir. Les parties ne sont plus recevables à soulever ces fins de non-recevoir au cours de la même instance à moins qu'elles ne surviennent ou soient révélées postérieurement au dessaisissement du juge de la mise en état.

Sur ce,

Décision du 25 juin 2024
8ème chambre 1ère section
N° RG 20/01026 - N° Portalis 352J-W-B7E-CRR5H

En l'espèce, par ordonnance du juge de la mise en état du 9 janvier 2024, toutes les demandes au fond de Mme [P] ont été déclarées recevables. La prescription n'a pas été retenue pour les motifs indiqués par le juge de la mise en état dans son ordonnance précitée.

Cette question a donc déjà été tranchée conformément à l'article 789 précité et il n'y a donc pas lieu de statuer à nouveau sur ce point.

S'agissant de la demande d'annulation du mandat de syndic de la SAS [Z] [I] depuis le 3 décembre 2014, Mme [P] verse aux débats le procès-verbal de l'assemblée générale du 3 décembre 2014 ayant désigné ledit cabinet en qualité de syndic pour la période allant du 3 décembre 2014 au 31 décembre 2015.

Les parties s'accordent sur le fait que le cabinet [I] n'a pas ouvert de compte bancaire séparé au nom du syndicat des copropriétaires avant le 26 avril 2018.

Il en ressort que le cabinet [I] a violé l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965 (dans sa version alors applicable) prévoyant l'ouverture par le syndic d'un compte bancaire séparé au nom du syndicat sur lequel devaient être versées sans délai toutes les sommes reçues au nom ou pour le compte du syndicat.

La méconnaissance par le syndic de cette obligation emporte la nullité de plein droit de son mandat à l'expiration du délai de trois mois suivant sa désignation.

L'obligation n'ayant pas été respectée au 3 mars 2015, le mandat de la SAS [Z] [I] obtenu le 3 décembre 2014 est nul de plein droit. Il y a donc lieu de considérer que la SAS [Z] [I] n'a plus aucun mandat de syndic dans la copropriété concernée depuis le 3 décembre 2014.

L'article 18 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit que les actes passés par le syndic dans ce cadre avec des tiers de bonne foi demeurent valables. Il n'y a dès lors pas lieu de dire que l'ensemble des actes postérieurs accomplis par le cabinet [I] seraient nuls. Mais uniquement que les seuls actes passés par le syndic SAS [Z] [I] avec des tiers de bonne foi demeurent valables.

S'agissant de l'assemblée générale du 17 décembre 2015, le procès-verbal de cette assemblée indique que les copropriétaires ont été réunis sur convocation adressée par le syndic cabinet [Z] [I] et que ce syndic a été désigné pour une nouvelle durée de 16 mois du 17 décembre 2015 au 17 avril 2017. Le mandat de ce syndic étant nul à cette époque, l'assemblée générale a été convoquée par une personne n'ayant pas qualité pour le faire en application de l'article 7 du décret du 17 mars 1967. Il convient donc d'annuler l'assemblée générale du 17 décembre 2015 pour ce motif.

Il en va de même pour les mêmes motifs des assemblées générales des 23 novembre 2016 (ayant désigné le cabinet [I] en qualité de syndic pour la période du 23 novembre 2016 au 23 mars 2018), 29 novembre 2017 (ayant désigné le cabinet [I] en qualité de syndic pour la période du 29 novembre 2017 au 31 décembre 2020), 3 décembre 2018 (assemblée générale du 19 décembre 2018 désignant le cabinet [Z] [I] pour la période du 19 décembre 2018 au 31 décembre 2021) et 19 décembre 2019 (assemblée du 4 décembre 2019).
Décision du 25 juin 2024
8ème chambre 1ère section
N° RG 20/01026 - N° Portalis 352J-W-B7E-CRR5H

Sur les demandes reconventionnelles du syndicat des copropriétaires

Le syndicat des copropriétaires sollicite la condamnation de Mme [P] à lui verser 17.798,77 € à titre de dommages-intérêts en lien avec les frais exposés auprès de l'administrateur provisoire, outre 2.000 € à titre de dommages-intérêts pour mauvaise foi avérée.

Il fait valoir que :
- la résolution n° 16 litigieuse n'est pas un abus de majorité et aucune intention de nuire ne peut être reprochée au syndicat des copropriétaires;
- la demande reconventionnelle est fondée sur l'article 1240 du code civil ;
- Mme [P] a commis une faute en engageant une procédure tendant à voir prononcer à l'encontre du syndicat une mesure d'administration provisoire et ce sans débat contradictoire ;
- la procédure de Mme [P] est abusive.

En défense sur cette demande, Mme [P] fait valoir que :
- les honoraires et frais liés à la désignation d'un administrateur provisoire constituent des charges communes ;
- la résolution n° 16 de l'assemblée générale du 4 décembre 2019 est contraire au principe d'égalité entre copropriétaires et aux règles de réparation des charges communes ;
- le syndicat des copropriétaires n'apporte pas la preuve du caractère abusif de son action judiciaire ;
- la faute et les préjudices invoqués ne sont pas démontrés.

Pour sa part, la SAS [Z] [I] fait valoir que le vote de la résolution n° 16 litigieuse n'est pas abusif et a été exprimé dans l'intérêt collectif de la copropriété.

Vu l'article 1240 du code civil invoqué aux termes duquel " tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ".

Sur ce,

En l'espèce, Mme [P] n'a pas commis de faute en engageant des actions judiciaires afin de faire respecter la législation et notamment l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965. Le seul responsable de cette situation conflictuelle est le syndic SAS [Z] [I], qui n'a pas respecté ses obligations légales alors qu'il s'agit d'un syndic professionnel. La demande de dommages-intérêts du syndicat des copropriétaires est à l'évidence mal dirigée et la mauvaise foi de Mme [P] absolument pas démontrée.

Les demandes reconventionnelles de dommages-intérêts contre Mme [P] seront rejetées.

Sur les demandes accessoires

En application de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

La SAS [Z] [I], qui est responsable de ce litige du fait du non-respect de ses obligations légales, supportera les dépens.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée et il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation.

La SAS [Z] [I] sera condamnée à verser à Mme [P] une somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Les autres demandes des parties à ce titre seront rejetées.

En application de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965, le copropriétaire qui, à l'issue d'une instance judiciaire l'opposant au syndicat, voit sa prétention déclarée fondée par le juge, est dispensé, même en l'absence de demande de sa part, de toute participation à la dépense commune des frais de procédure, dont la charge est répartie entre les autres copropriétaires. Le juge peut toutefois en décider autrement en considération de l'équité ou de la situation économique des parties au litige.

Mme [P] sera dispensée de toute participation à la dépense commune des frais de procédure, dont la charge sera répartie entre les autres copropriétaires.

En application des articles 514 et 515 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement. Le juge peut écarter l'exécution provisoire de droit, en tout ou partie, s'il estime qu'elle est incompatible avec la nature de l'affaire. Il statue d'office ou à la demande d'une partie.

En l'espèce, il n'y a pas lieu de suspendre l'exécution provisoire du jugement.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant après débats en audience publique, en premier ressort et par jugement contradictoire, par mise à disposition au greffe:

RAPPELLE que, par ordonnance du juge de la mise en état du 9 janvier 2024, toutes les demandes au fond de Mme [W] [P] ont été déclarées recevables ;

CONSTATE la nullité de plein droit du mandat de syndic de la SAS [Z] [I] concernant la copropriété de l'immeuble [Adresse 8], depuis le 3 décembre 2014, conformément à l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965;

RAPPELLE que seuls les actes passés par le syndic SAS [Z] [I] avec des tiers de bonne foi demeurent valables ;

ANNULE les assemblées générales suivantes du syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 8] irrégulièrement convoquées par la SAS [Z] [I] : celles des 17 décembre 2015, 23 novembre 2016 (ayant désigné le cabinet [I] en qualité de syndic pour la période du 23 novembre 2016 au 23 mars 2018), 29 novembre 2017 (ayant désigné le cabinet [I] en qualité de syndic pour la période du 29 novembre 2017 au 31 décembre 2020), 3 décembre 2018 (assemblée générale du 19 décembre 2018 désignant le cabinet [Z] [I] pour la période du 19 décembre 2018 au 31 décembre 2021) et 19 décembre 2019 (assemblée du 4 décembre 2019) ;

REJETTE les demandes reconventionnelles de dommages-intérêts du syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 8] ;

CONDAMNE la SAS [Z] [I] à verser à Mme [W] [P] une somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE les autres demandes des parties au titre des frais irrépétibles;

DIT que Mme [W] [P] sera dispensée de toute participation à la dépense commune des frais de procédure, dont la charge sera répartie entre les autres copropriétaires ;

CONDAMNE la SAS [Z] [I] aux dépens ;

DIT n'y avoir lieu à suspendre l'exécution provisoire.

Fait et jugé à Paris le 25 juin 2024.

La GreffièreLa Présidente


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 8ème chambre 1ère section
Numéro d'arrêt : 20/01026
Date de la décision : 25/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 01/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-25;20.01026 ?
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