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24/06/2024 | FRANCE | N°20/09295

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 19eme contentieux médical, 24 juin 2024, 20/09295


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

19ème contentieux médical

N° RG 20/09295

N° MINUTE :

Assignation du :
- 04 Septembre 2020
- 26 Août 2020

AJ du TJ DE PARIS du 22 Juin 2020
N° 2020/009826

CONDAMNE

PLL





JUGEMENT
rendu le 24 Juin 2024
DEMANDERESSE

Madame [E] [W]
[Adresse 1]
[Localité 3]

Représentée par Maître Afifa TEKARI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C2083

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/009826 du 22/06/2020 accordée par le bu

reau d’aide juridictionnelle de Paris)

DÉFENDEURS

Monsieur [C] [S]
[Adresse 6]
[Localité 4]

Représenté par la SAS DROUOT AVOCATS prise en la personne de Maître Flori...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

19ème contentieux médical

N° RG 20/09295

N° MINUTE :

Assignation du :
- 04 Septembre 2020
- 26 Août 2020

AJ du TJ DE PARIS du 22 Juin 2020
N° 2020/009826

CONDAMNE

PLL

JUGEMENT
rendu le 24 Juin 2024
DEMANDERESSE

Madame [E] [W]
[Adresse 1]
[Localité 3]

Représentée par Maître Afifa TEKARI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C2083

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/009826 du 22/06/2020 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Paris)

DÉFENDEURS

Monsieur [C] [S]
[Adresse 6]
[Localité 4]

Représenté par la SAS DROUOT AVOCATS prise en la personne de Maître Florian DE MASCUREAU, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #W06

La CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE [Localité 8]
[Adresse 2]
[Localité 5]

Non représentée

Expéditions
exécutoires
délivrées le :

Décision du 24 Juin 2024
19ème contentieux médical
RG 20/09295

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Monsieur Pascal LE LUONG, Premier Vice-Président
Madame Laurence GIROUX, Vice-Présidente
Madame Sarah CASSIUS, Vice-Présidente

Assistés de Madame Erell GUILLOUËT, Greffière, lors des débats et au jour de la mise à disposition au greffe.

DÉBATS

A l’audience du 29 Avril 2024 tenue en audience publique devant Monsieur Pascal LE LUONG, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seul l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile. Avis a été donné aux avocats que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 17 Juin 2024. Le 18 Juin 2024, avis a été donné aux avocats que le délibéré serait prorogé au 24 Juin 2024.

JUGEMENT

- Réputé contradictoire
- En premier ressort
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE

Madame [E] [W] était suivie sur le plan dentaire par le docteur [C] [S] qui a établi plusieurs devis entre 2010 et 2012 pour traiter plusieurs dents.

Par acte d’huissier en date du 3 mars 2017, Mme [W] a assigné en référé le Dr [S] devant le tribunal de grande instance de Paris afin qu’une expertise médicale soit diligentée et qu’une provision d’un montant de 3.000 € lui soit versée.

Par ordonnance de référé du 11 mai 2017, le Dr [M] a été désigné pour réaliser une expertise médicale de Mme [W]. La demande de provision a été rejetée. L’expertise a eu lieu le 02/10/2017 au cabinet de l’expert. Le Dr [C] [S] ne s’est pas présenté et n’était pas représenté. Autorisé à rendre son rapport en l’état, l’expert a clôturé ses travaux et a rendu son rapport le 10/10/2017.

Par actes d’huissier des 26 Août 2020 et 4 septembre 2020, Mme [E] [W] a assigné le Dr [C] [S] et la CPAM de [Localité 8] devant le tribunal judiciaire de Paris afin d’obtenir l’indemnisation des préjudices qu'elle aurait subis dans le cadre de sa prise en charge chirurgicale, représentant un montant total de 50.880 €.

Par conclusions signifiées par RPVA le 13 mars 2023, Madame [E] [W] demande au tribunal de :

Constater les manquements fautifs du Dr [S] à ses obligations contractuelles et professionnelles d’information, de remise du dossier médical, de diligence et de conseil;

Le condamner à lui payer au titre de dommages et intérêts :
- Déficit Fonctionnel Temporaire : 30 € x 6 jours : 180 €
- Souffrance endurées : 2.5/7 : 4.000 €
- Préjudice esthétique : 2/7 : 3.500 €
- Déficit Fonctionnel permanent : 20 % : 28 400 €
- Préjudice moral pour défaut d’information, refus de communiquer le dossier médical : 6.000€
- Défaut de diligences préalable et de conseil (implants déconseillés) : 6.000 €
- Remboursement des frais et honoraires imputés au Dr [S] :
4.800 €
- Remboursement de frais et honoraires liés aux complications :
501,05 €
- Remboursement des soins futurs suivant devis à actualiser :
946,92 €.

Soit un total à parfaire de : 54 327,97 €.

- Dire que la somme de 52.327,97 € qui sera allouée à Mme [W] produira des intérêts au taux légal à compter de la date de l’assignation et au taux légal majoré à compter de la signification du jugement à intervenir, l’exécution provisoire étant de droit, et condamner le Dr [S] à les payer.
- Condamner le Dr [S] au paiement de la somme de 3.500 € au profit de Maître TEKARI qui renonce au bénéfice de l’indemnité au titre de l’aide juridictionnelle en application de l’article 700 du code de procédure civile et 37 du décret sur l’aide juridictionnelle ;
- Condamner le Dr [S] aux entiers dépens qui comprendront les frais et honoraires de l’expert
- Dire et juger que le jugement à intervenir sera opposable à l’Assurance Maladie.

Par conclusions en défense signifiées par voie électronique le 2 juin 2023, le docteur [C] [S] demande au tribunal de :

- Constater son absence de responsabilité établie dans la prise en charge de Mme [E] [W],
- Constater son absence de faute dans la prise en charge de Mme [E] [W],
- Débouter Mme [E] [W] de ‘ensemble de ses demandes, fins et conclusions, à l'encontre du Dr [C] [S],
- Condamner Mme [E] [W] à la somme de 2.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens.

La CPAM de [Localité 8] n’ayant aucune créance, n’a pas constitué avocat.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties quant à l'exposé détaillé de leurs prétentions et moyens.

La décision sera réputée contradictoire.

L’ordonnance de clôture était rendue le 9 octobre 2023 et l’audience de plaidoiries se tenait le 29 avril 2024. La décision était mise en délibéré au 18 juin 2024 puis prorogée au 24 juin 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I / SUR LA RESPONSABILITÉ

1/ Sur la qualité des soins

Il résulte des dispositions des articles L.1142-1-I et R.4127-32 du code de la santé publique que, hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les praticiens ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. Tout manquement à cette obligation qui n'est que de moyens, n'engage la responsabilité du praticien que s'il en résulte pour le patient un préjudice en relation de causalité directe et certaine.

En application des dispositions de l'article R 4127-32 du code de la santé publique, le médecin, dès lors qu'il a accepté de répondre à une demande de son patient, s'engage à lui assurer personnellement des soins consciencieux, dévoués et fondés sur les données acquises de la science, en faisant appel, s'il y a lieu, à l'aide de tiers compétents.

Il incombe au praticien de mener des investigations utiles et d'interroger le patient, en particulier lorsqu'il présente des facteurs de risques, sur les symptômes qu'il présente.

En l’espèce, l’expert a indiqué, ayant examiné et entendu la demanderesse que cette dernière est en invalidité depuis 2002 et soignée par le Dr [S] depuis 2011. Le 2 mai 2011, il a rédigé un devis de 2.100 € pour 4 couronnes en céramique sur les dents 23-24-25-26. Un second devis a été rédigé le même jour pour une prothèse amovible du bas pour 890 €. Le 21 juillet 2011, il a rédigé un autre devis de 2.900 € pour 2 implants et 2 couronnes en céramique sur implants en position 35 et 36. Le devis a été réédité le 7 septembre 2011. Le 18 décembre 2012, un dernier devis a été rédigé d’un montant de 1.500 € pour 3 couronnes en céramique sur les dents 13-14-15 et une couronne métallique sur la dent 16. Il observe que Madame [W] a bénéficié de plusieurs aide de la CPAM : 909 € le 28/06/2011, 800 € et 295 € le 05/10/2011, 1.070 € le 28/02/2013 (soit au total 3.074 €) et ajoute qu’elle a emprunté 1.000 € auprès de la banque CIC le 31/05/2011.

L’expert indique que le Dr [S] a posé 2 implants en position 35 et 36 et réalisé les couronnes en céramique sur ces implants et sont constatés sur le bilan radiographique du 1er juin 2015 qui est inséré en page 4 de son rapport. Il observe que l’implant 35 présente une perte osseuse importante et a dû être déposé en juin 2015 et qu’à cette date, un implant et une couronne, qui n’ont pas fait l’objet de devis, ont été posés en position 45 par le Dr [S], puis ont été déposés. Un nouvel implant a été posé en position 45. La patiente, souffrant de ces implants et alléguant que le Dr [S] n’avait rien fait pour elle, a consulté un autre dentiste, le DR [D], qui a indiqué, par écrit en date du 10 mars 2016, que l’implant 36 était mobile et que le 45 n’était pas en fonction. S’en est suivie une infection sur ce dernier implant qui a été soigné par antibiotiques à [7], en novembre 2017. Cet implant a été retiré an centre de santé [9]. Elle a réglé 450 € en quatre fois.

L’expert a également relevé que “les restaurations prothétiques des dents du haut (a priori, dents 23-24-25-26) semblent justifiées” et que “les indications implantaires peuvent paraître justifiées mais on ne peut l’affirmer en l’absence d’analyse scanner des volumes osseux initiaux” et précisé que “les complications apparues laissent penser que ces indications étaient risquées”. Il ajoute que “la palpation actuelle indique qu’il serait déraisonnable d’envisager d’autres implants sur une mâchoire très atrophiée.”
S’agissant de la qualité des soins, l’expert indique que “les couronnes sur implants 35-36 ont été posées en 2012 et que les complications surviennent en 2015 (implant 35, 36, 45) et qu’il n’est pas possible d’affirmer que les données acquises de la science ont été respectées.

Madame [E] [W] conclut sur la base de ce rapport qu’il y a un lien direct entre les interventions du docteur [C] [S] et ses dommages, ce qui engage la responsabilité professionnelle de ce praticien en raison d’une indication opératoire et de traitements non conformes.
Elle prétend que sur le conseil de Dr [S], elle a entrepris plusieurs soins dentaires entre 2010 et 2012, pour un total de 11 840 €, suivant différents devis :

Devis du 12/11/2010 de 850,00 €
Devis du 02/05/2011 de 2100,00 €
Devis du 18/05/2011 de 3600,00 €
Devis du 18/05/2011 de 890,00 €
Devis du 21/07/2011 de 2900,00 €
Devis du 07/09/2011 de 2900,00 €
Devis du 18/12/2012 de 1500,00 €.

Parmi ces soins, elle lui reproche la non-conformité des implants posés sur les dents 35 et 36 objet du devis édité le 21/07/2011, réédité le 07/09/2011, ainsi qu’un implant posé sur la dent 45 sans devis, lesquels implants étaient douloureux, mobiles, d’où les complications apparues qui ont conduit à leur retrait.

Elle estime que le fait que les implants et couronnes en 35 et 36 apparaissent sur le bilan radiographique réalisé le 2 juin 2015, alors que l’implant en 45 n’apparaît que plus tard sur le cliché panoramique daté du 2 septembre 2015, prouve que ce dernier implant a bien été posé par le Dr [S] le 2 juin 2015 et que dès lors, la réalisation par le Dr [S] des implants litigieux en position 35, 36 et 45, est ainsi incontestable tout comme leur retrait suite aux complications apparues.

Le docteur [S] explique que finalement, Mme [W] a choisi de n'effectuer que la pose d'implants et de couronnes, prévue par le devis établi en juillet 2011 et réédité en septembre 2011, concernant les dents 35 et 36, ce qu’il a donc réalisé à la fin de l’année 2012 et qu’ainsi, les soins effectués sur les dents 35 et 36 sont donc les seuls qu’il a réalisés dans le cadre de sa prise en charge de Mme [W], et sont d'ailleurs les seuls objectivés par les clichés radiographiques panoramiques figurant dans le rapport d'expertise, et qu’il n'a ainsi pratiqué aucun soin sur la dent 45, pour laquelle il avait effectué un devis auquel aucune suite n’a jamais été donnée par la patiente et qu’en tout état de cause, les aides financières attribuées à Mme [W] par l’assurance maladie n’ont jamais été perçues d’une quelconque façon contrairement à ce qui est indiqué à tort, selon lui, dans le rapport d’expertise. Puisque ces aides correspondent à des devis qui nont pas été suivis de soins, sauf pour celui édité le 21 juillet 2011 et réédité le 7 septembre 2011.

Il ajoute qu’à la suite de la pose des implants et des couronnes en fin d’année 2012, il a eu loccasion de revoir Mme [W] pour la pose d’ “Inlay Core” ou pivots, sous les couronnes le 5 mars 2013. Cependant, en septembre 2015, soit près de trois ans après ces soins, Mme [W] est revenue le consulter en raison de douleurs à la mâchoire, et il a immédiatement constaté qu’un des implants posés, sur la dent 35, avait lâché et était infecté. Il lui aurait indiqué qu’il fallait déposer cet implant et qu’il pouvait effectuer cet acte, mais la patiente a refusé tout nouveau soin de sa part et l’aurait menacé de porter plainte contre lui. Il prétend qu’à la fin de l’année 2015, Mme [W] est venue à son cabinet pour demander son dossier médical, qui lui a été communiqué dans son intégralité.

Le docteur [C] [S] conteste l’engagement de sa responsabilité quant à la conformité de l’indication de myomectomie. Il fait valoir que les recommandations relevées dans le rapport d’expertise n’avaient pas vocation à s’appliquer à Madame [E] [W], notamment car celle-ci présentait des symptômes en lien avec le myome retiré et que l’indication de myomectomie a été prise au regard de cette symptomatologie.

S’il n’est pas contesté que le docteur [S] a traité les dents 35 et 36 comme il est détaillé précédemment, en revanche, une interrogation subsiste sur le traitement de la dent 45.

Il ressort des pièces du dossier et notamment du relevé de prestations de l’Assurance Maladie effectués par le Docteur [S] versé par Madame [W], que ce document concerne la pose de 3 prothèses dentaires datées du 5 mars 2013. Il n’est pas contesté que le traitement litigieux des dents 35 et 36 a été effectué par le Docteur [S] fin 2012 puis le 2 septembre 2015. En revanche, alors que Madame [W] prétend que la dent n°45 aurait été également été traitée le même jour, elle ne produit pas le relevé de soins de l’Assurance Maladie sur lequel devaient nécessairement figurer les soins et remboursements des dents 35, 36 et 45. En outre, la radiographie du 2 septembre 2015 sur laquelle l’expert se fonde pour affirmer que le praticien aurait posé un implant sur la dent 45 de la patiente n’a jamais été versée aux débats. Dans ces conditions, ce document ne saurait constituer la preuve d'une intervention du praticien sur cette dent. Dans ces conditions, et peu important le fait que l’expert ait repris les dires de la demanderesse, cette dernière ne rapporte pas la preuve que le docteur [S] a posé l’implant 45 litigieux.

S’agissant des dommages relatifs aux implants 35 et 36, Il est incontestable qu’une infection est survenue environ 3 ans après la pose. L’expert sur ce point n’apparaît pas catégorique et hésite à relever une faute du praticien que le tribunal ne saurait lui-même constater, faute de preuves.

En conséquence, les demandes de Madame [W] relatives à l’indemnisation de ses préjudices ci-dessus évoqués, seront rejetées.

2/ Sur l'obligation d'information
Tout professionnel de santé est tenu en application des articles L 1111-2 et R4127-35 du code de la santé publique d'un devoir de conseil et d'information. L'information du patient doit porter de manière claire, loyale et adaptée, sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus.

En cas de litige, il appartient au professionnel d'apporter, par tous moyens en l'absence d'écrit, la preuve que l'information a été délivrée à l'intéressé.

En l’espèce, Madame [E] [W] fait valoir que le docteur [C] [S] n’a pas respecté son obligation faute d’une information sur les éventuelles conséquences et risques des interventions. Elle considère que ce défaut d’information lui permet de solliciter la réparation de son préjudice, étant précisé qu’elle demande la somme de 6.000 € d’indemnisation au titre du défaut d’information et celle de 6.000 € au titre du défaut de diligences préalable et de conseil.

Le docteur [C] [S] explique qu’il reçu Mme [W] en consultation à de multiples reprises : les 2 mai 2011, 18 mai 2011, 21 juillet 2011, 7 septembre 2011, 31 octobre 2011, 20 juin 2012, 19 mars 2012, 18 décembre 2012 et 5 mars 2013. Il estime qu’elle a ainsi bénéficié d'un temps de réflexion largement suffisant pour le libérer de son obligation d'information. A cet égard, le tribunal ne peut que constater que Madame [W] a été régulièrement soignée par le Docteur [S] entre 2010 et 2015 et qu’une pleine confiance s’est, de fait, instaurée entre cette dernière et son dentiste, dont elle n’a jamais contesté la qualité des soins avant juin 2015. Toutefois, cette relation sans encombre jusqu’en 2015 n’exonérait pas le praticien d’expliquer à sa patiente les risques inhérents à la pose d’implants, notamment sur une mandibule fragilisée. Force est de constater que le Docteur [S] ne rapporte pas la preuve d’avoir rempli son obligation sur ce point, ayant au surplus omis de conserver un double du dossier médical de la patiente.

Il en résulte que le chirurgien-dentiste, qui a la charge de rapporter la preuve de l’information délivrée, ne démontre pas qu’il a informé sa patiente des risques encourus normalement prévisibles, les seules consultations, fussent-elles nombreuses, étant insuffisantes à établir cette information.

Ce préjudice moral, caractérisé au regard de l’absence de toute preuve de délivrance de l’information, sera réparé en l'espèce par l’allocation d’une indemnité de 3000 €.

II/ SUR LES AUTRES DEMANDES

*Sur l’application de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

Il convient de condamner le docteur [C] [S], partie succombante partiellement, à payer à Madame [E] [W] une somme de 2.000€ sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Par ailleurs, les dépens seront mis à la charge du docteur [C] [S].

*Sur l’exécution provisoire

En application de l’article 514 du code de procédure civile en vigueur au jour de l’assignation, s’agissant en effet d’une instance introduite après le 1er janvier 2020, l’exécution provisoire est de droit.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire mis à disposition au greffe et rendu en premier ressort,

CONDAMNE le docteur [C] [S] à payer à Madame [E] [W], une somme de 3.000 € en réparation de son préjudic moral avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;

CONDAMNE le docteur [C] [S] à payer à Madame [E] [W], la somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE le docteur [C] [S] aux dépens incluant les frais d’expertise ;

DIT que le présent jugement est opposable à la CPAM de [Localité 8] ;
REJETTE le surplus des demandes, plus amples ou contraires.

Fait et jugé à Paris le 24 Juin 2024.

La GreffièreLe Président

Erell GUILLOUËTPascal LE LUONG


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 19eme contentieux médical
Numéro d'arrêt : 20/09295
Date de la décision : 24/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-24;20.09295 ?
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