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21/06/2024 | FRANCE | N°23/56868

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Service des référés, 21 juin 2024, 23/56868


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS








N° RG 23/56868 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2XKQ

N° : 7

Assignation du :
13 Septembre 2023

[1]

[1] 2 Copies exécutoires
délivrées le:

JUGEMENT RENDU EN ETAT DE REFERE
(article 487 du Code de procédure civile)
le 21 juin 2024


par le Tribunal judiciaire de Paris, composé de :

Stéphane NOËL, Président
Fabrice VERT, Premier Vice- Président
Maïté GRISON-PASCAIL, Première Vice-Présidente,

Assistés de Pascale GARAVEL, Greffier. <

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La société LATRICOGNE CAPITAL S.A.S.
[Adresse 3]
[Localité 4]

représentée par la SELAS BIGNON LEBRAY prise en la personne de Maître Laurence DEFONTAINE...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS


N° RG 23/56868 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2XKQ

N° : 7

Assignation du :
13 Septembre 2023

[1]

[1] 2 Copies exécutoires
délivrées le:

JUGEMENT RENDU EN ETAT DE REFERE
(article 487 du Code de procédure civile)
le 21 juin 2024

par le Tribunal judiciaire de Paris, composé de :

Stéphane NOËL, Président
Fabrice VERT, Premier Vice- Président
Maïté GRISON-PASCAIL, Première Vice-Présidente,

Assistés de Pascale GARAVEL, Greffier.

DEMANDERESSE

La société LATRICOGNE CAPITAL S.A.S.
[Adresse 3]
[Localité 4]

représentée par la SELAS BIGNON LEBRAY prise en la personne de Maître Laurence DEFONTAINE et de Maître Paul BRISSET, avocats au barreau de PARIS - #P0370

DEFENDERESSE

La société SOCIETE EST METROPOLES S.A.
[Adresse 5]
[Localité 6]

représentée par Me Pascal RENARD, avocat au barreau de PARIS - #E1578, avocat constitué et par Me Vincent CUISINIER, A.A.R.P. I. DU PARC MONNET, avocat au barreau de DIJON, [Adresse 2][Localité 1], avocat plaidant

DÉBATS

A l’audience du 23 Avril 2024 tenue publiquement, présidée par Stéphane NOËL, Président, Fabrice VERT, Premier Vice- Président, Maïté GRISON-PASCAIL, Première Vice-Présidente, Assesseurs, assistés de Pascale GARAVEL, Greffier,

Nous, Président,

Après avoir entendu les conseils des parties,

Suivant acte sous seing privé en date du 29 juin 2011, la SCI [Localité 6] 95, aux droits de laquelle vient aujourd’hui la société Latricogne Capital, a donné à bail commercial au GIE EPLAAD, aux droits duquel vient aujourd’hui la société Est Métropoles , des locaux à usage de bureaux, d’une surface de 689 m2, dans un immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 6] (département 21) pour une durée de neuf ans courant à compter du 1er juillet 2011.

Le 16 mars 2021, la société Latricogne Capital et la société Est Métropoles ont conclu un avenant de renouvellement du bail pour une durée de neuf ans à compter du 16 mars 2021.

Ce contrat comporte en son article 18 une clause attributive de juridiction rédigée comme suit: « Pour tout litige relatif au bail renouvelé, les parties attribuent compétence exclusive au tribunal judiciaire de Paris».

La société Est Métropoles ne s’étant pas acquittée du paiement de certains loyers échus, la société Latricogne Capital lui a fait délivrer, par acte d’huissier en date du 13 juillet 2023, un commandement de payer visant la clause résolutoire pour la somme principale de 95 578,95 euros du chef de l’arriéré locatif dans un délai de 8 jours.

La société Est Métropoles n’ayant réglé qu’une partie de cet arriéré, c’est dans ces conditions que, par acte d’huissier délivré le 13 septembre 2023, la société Latricogne Capital a fait assigner devant le juge des référés du tribunal de céans la société Est Métropoles aux fins principalement de voir constater l’acquisition de la clause résolutoire du bail commercial liant les parties, condamner le preneur à payer une provision sur loyers impayés et indemnités d’occupation et voir ordonner son expulsion.

A l’audience du 13 février 2024, le juge des référés, en application de l’article 487 du code de procédure civile, a décidé de renvoyer l’affaire en état de référé devant la formation collégiale siégeant le 23 avril 2024 pour évoquer notamment la question de la compétence territoriale du juge des référés.

Les parties ont été informées qu’à cette audience, deux amici curiae, Messieurs les professeurs [N] [R] et [M] [P], seraient entendus sur les enjeux systémiques de la compétence territoriale du juge des référés saisi d’une demande de mesure d’instruction in futurum ayant pour objet un bien immobilier situé hors du ressort du tribunal judiciaire de Paris ou d’une demande en matière de bail commercial portant sur des immeubles loués situés hors du ressort du tribunal judicaire de Paris.

A l’audience du 23 avril 2024, Messieurs les professeurs [N] [R] et [M] [P] ont été entendus comme amici curiae sur les points susvisés.

Dans ses écritures visées le 23 avril 2024, soutenues oralement, la société Latricogne Capital demande à la juridiction des référés du tribunal de céans de se déclarer compétente, de juger acquise la clause résolutoire, d’ordonner l’expulsion de la société Est Métropoles sous astreinte, d’ordonner la séquestration des biens meubles garnissant les locaux loués, de condamner la société Est Métropoles au paiement d’une provision de 142 435,35 euros au titre de l’arriéré locatif, d’une pénalité correspondant à 10% de l’arriéré, et d’une provision de 52 697,44 euros à titre d’indemnité, de juger que le dépôt de garantie sera conservé par la société Latricogne Capital, de condamner la société Est Métropoles aux dépens et à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans ses écritures visées le 23 avril 2024, soutenues oralement, la société Est Métropoles demande à la présente juridiction, à titre principal, de se déclarer territorialement incompétente pour connaître des demandes formées par la société Latricogne Capital au profit du tribunal judiciaire de Dijon, à titre subsidiaire, d’enjoindre à la société Latricogne Capital de conclure sur le fond, de condamner la société Latricogne Capital à lui payer la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Conformément aux dispositions de l'article 446-1 du code de procédure civile, il convient de se référer à l’acte introductif d’instance, aux écritures et aux notes d’audience pour un plus ample exposé des faits et des moyens qui y sont contenus.

MOTIFS

Sur l ’exception d’incompétence territoriale

En vertu des dispositions de l’article 75 du code de procédure civile, s’il est prétendu que la juridiction saisie en première instance est incompétente, la partie qui soulève cette exception doit, à peine d’irrecevabilité, la motiver et faire connaitre dans tous les cas devant quelle juridiction elle demande que l’affaire soit portée.

Selon les dispositions de l'article R.145-23 du code de commerce le tribunal judiciaire est compétent pour les contestations relatives aux baux commerciaux autres que celles relatives à la fixation du prix du bail révisé ou renouvelé et la juridiction compétente est celle du lieu de la situation de l’immeuble, qu'il s'agisse du juge des loyers commerciaux ou du tribunal judiciaire.

Cette dernière disposition est justifiée par la nécessité, dans de nombreux litiges, d'ordonner une expertise sur place, un constat ou d'autres mesures d’instruction, l’article R. I45-30 du code de commerce envisageant même une visite des lieux par le juge. Elle est également justifiée au regard des enjeux modernes du principe de proportionnalité qui impose au juge de rechercher le mode de règlement du litige le plus adapté (étant observé que si le juge des référés envisage de convoquer les parties à une audience de règlement amiable avec un éventuel transport sur les lieux, la proximité sera un critère décisif).

Si ce texte n’a pas été déclaré d’ordre public par une disposition précise, il apparaît qu’il s’impose comme tel aux justiciables, ayant été édicté dans le cadre de l’organisation judiciaire et dans l’intérêt d’une meilleure administration de la justice et non dans l’intérêt particulier de l’une ou l’autre des parties, de sorte que les règles prévues par ce texte s’imposent aux parties qui ne peuvent y déroger (voir en ce sens Civ.3ème 10 juin 1971, n° 70-12.678).

Il ressort des dispositions de l’article 48 du code de procédure civile que « Toute clause qui, directement ou indirectement, déroge aux règles de compétence territoriale est réputée non écrite à moins qu'elle n’ait été convenue entre des personnes ayant toutes contracté en qualité de commerçant et qu'elle n’ait été spécifiée de façon très apparente dans l’engagement de la partie à qui elle est opposée ».

Au cas présent, le litige ayant pour objet une demande d’acquisition de la clause résolutoire et des demande subséquentes relativement à un bail commercial, conclu entre deux sociétés commerciales, portant sur des locaux à usage de bureaux dans un immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 6] (département 21), il y a lieu en application de la règle de compétence territoriale rappelée ci-dessus, qui revêt un caractère impératif et d’ordre public, de se déclarer territorialement incompétent au profit du président du tribunal judicaire de Dijon, statuant en référé, juridiction du lieu de la situation de l’immeuble devant laquelle l’affaire sera renvoyée. Il sera relevé que la clause attributive de juridiction stipulée dans le bail au profit de la présente juridiction doit être regardée comme réputée non écrite et comme n’ayant pas vocation à s’appliquer au présent litige, le caractère d'ordre public de l’article R. 145-23 du code de commerce devant prévaloir sur les dispositions plus libérales de l’article 48 du code de procédure civile.

La décision de renvoi ne mettant pas fin au litige, il n'y a pas lieu de statuer sur les frais irrépétibles et les dépens.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par jugement rendu en état de référé, contradictoire et en premier ressort,

Se déclare territorialement incompétent ;

Renvoie l'affaire et les parties devant le président du tribunal judiciaire de Dijon statuant en référé ;

Ordonne que la présente décision soit notifiée aux parties par lettre recommandée en application de l’article 84 du code de procédure civile ;

Dit qu’à défaut d’appel dans un délai de quinze jours à compter de cette notification, le dossier de l’affaire sera transmis par le secrétariat avec une copie de la décision de renvoi à la juridiction désignée, en application de l’article 82 du code de procédure civile.

Réserve les dépens et les demandes du chef de l’article 700 du code de procédure civile.

Fait à Paris le 21 juin 2024

Le Greffier,Le Président,

Pascale GARAVELStéphane NOEL


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Service des référés
Numéro d'arrêt : 23/56868
Date de la décision : 21/06/2024
Sens de l'arrêt : Se déclare incompétent

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-21;23.56868 ?
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