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20/06/2024 | FRANCE | N°23/08770

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Charges de copropriété, 20 juin 2024, 23/08770


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le:




Charges de copropriété

N° RG 23/08770
N° Portalis 352J-W-B7H-CZER5

N° MINUTE :

Assignation du :
08 Mars 2023
JUGEMENT
rendu le 20 Juin 2024
DEMANDEUR

Syndicat des copropriétaire de l’immeuble sis [Adresse 2], représenté par son syndic, la société NEXITY LAMY, S.A.S
[Adresse 1]
[Localité 5]

représenté par Me Jean-Yves ROCHMANN, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #D0643


D

ÉFENDEURS

Madame [S] [L]
[Adresse 3]
[Localité 6]

Monsieur [O] [L]
[Adresse 2]
[Localité 6]

Monsieur [N] [L]
[Adresse 2]
[Localité 6]

Madame [M] [W]
[A...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le:

Charges de copropriété

N° RG 23/08770
N° Portalis 352J-W-B7H-CZER5

N° MINUTE :

Assignation du :
08 Mars 2023
JUGEMENT
rendu le 20 Juin 2024
DEMANDEUR

Syndicat des copropriétaire de l’immeuble sis [Adresse 2], représenté par son syndic, la société NEXITY LAMY, S.A.S
[Adresse 1]
[Localité 5]

représenté par Me Jean-Yves ROCHMANN, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #D0643

DÉFENDEURS

Madame [S] [L]
[Adresse 3]
[Localité 6]

Monsieur [O] [L]
[Adresse 2]
[Localité 6]

Monsieur [N] [L]
[Adresse 2]
[Localité 6]

Madame [M] [W]
[Adresse 7]
[Localité 8] - TUNISIE

Madame [Z] [L]
[Adresse 2]
[Localité 6]

Madame [P] [V]
[Adresse 4]
[Localité 6]

non- représentés
Décision du 20 Juin 2024
Charges de copropriété
N° RG 23/08770 - N° Portalis 352J-W-B7H-CZER5


COMPOSITION DU TRIBUNAL

Par application des articles R.212-9 du Code de l’Organisation Judiciaire et 812 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été attribuée au Juge unique.

Avis en a été donné aux avocats constitués qui ne s’y sont pas opposés.

Madame Lucie AUVERGNON, Vice-Présidente, statuant en juge unique,

assistée de Line-Joyce GUY, Greffière.

DÉBATS

A l’audience publique du 06 Mars 2024

JUGEMENT

- Réputé contradictoire
- En premier ressort
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile


EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Mme [Z] [L], Mme [P] [V], M. [N] [L], Mme [S] [L], M. [O] [L] et Mme [M] [W] sont propriétaires indivisaires des lots n° 4, 5, 6, 9, 10, 11, 12, 14, 15, 16 et 17 de copropriété d'un immeuble situé au [Adresse 2].

Par lettre recommandée avec avis de réception du 22 juin 2022, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble a fait mettre en demeure « M. ou Mme [L] » de payer diverses sommes au titre des charges de copropriété. Par sommation de payer signifiée le 12 septembre 2022, il a fait sommation à « l’indivision [L] » de lui payer immédiatement un arriéré de charges et de frais.

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé au [Adresse 2] a fait assigner en paiement d’arriérés de charges de copropriété, devant le tribunal judiciaire de Paris, pour l'audience d'orientation du 27 septembre 2023, M. [N] [L], Mme [Z] [L] et [O] [L], par exploit d’huissier du 2 mars 2023, Mme [S] [L] et Mme [P] [V], par exploit d’huissier du 8 mars 2023, et Mme [M] [W], domiciliée en Tunisie, par assignation remise à parquet le 30 juin 2023 dont elle a été avisée par lettre recommandée présentée à son domicile le 17 juillet 2023 puis le 4 août 2023.

Au visa des articles 10 et 10-1 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis et des dispositions du décret n°67-223 du 17 mars 1967, il demande au tribunal de :

- condamner solidairement Mme [Z] [L], Mme [P] [V], M. [N] [L], Mme [S] [L], M. [O] [L] et Mme [M] [W] au paiement de la somme de 9.745,90 €, frais compris à hauteur de 844,53 €, au titre des charges de copropriété dues selon décompte arrêté au 15 février 2023 incluant le 1er appel de provision de charges 2023, avec intérêts au taux légal, à compter du 22 juin 2022, date de la mise en demeure de payer sur la somme de 1.949,82 €, du 13 septembre 2023, date de la sommation de payer, sur la somme de 4.567,70 €, et de la délivrance de l’assignation sur le surplus,

- condamner solidairement Mme [Z] [L], Mme [P] [V], M. [N] [L], Mme [S] [L], M. [O] [L] et Mme [M] [W] au paiement de la somme de 2.000 €, à titre de dommages et intérêts,
- condamner solidairement Mme [Z] [L], Mme [P] [V], M. [N] [L], Mme [S] [L], M. [O] [L] et Mme [M] [W] au paiement des entiers dépens, qui comprendront le coût de la sommation de payer du 13 février 2022 d’un montant de 156,96 €, dont distraction au profit de Maître Jean-Yves ROCHMANN, avocat constitué, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,

- condamner solidairement Mme [Z] [L], Mme [P] [V], M. [N] [L], Mme [S] [L], M. [O] [L] et Mme [M] [W] au paiement de la somme de 3.000 € au titre des frais irrépétibles,

- rappeler que l’exécution provisoire de la décision à intervenir est de droit.

Compte tenu du défaut de comparution en défense, et en application de l’article 455 alinéa 1er du code de procédure civile, il est renvoyé à l’assignation du demandeur pour l’exposé exhaustif de ses moyens en fait et en droit.

M. [N] [L], Mme [Z] [L] et [O] [L] ont été cités suivant les modalités des articles 656 et 658 du code de procédure civile (remise de l'acte en l'étude d'huissier).

Mme [S] [L] et Mme [P] [V] ont été citées suivant les modalités de l’article 659 du code de procédure civile (procès-verbal infructueux). Mme [M] [W], domiciliée en Tunisie, a été citée par assignation remise à parquet le 30 juin 2023 dont elle a été avisée par lettre recommandée présentée à son domicile le 17 juillet 2023 puis le 4 août 2023. Ils n’ont pas comparu à l'instance. Il sera ainsi statué par jugement réputé contradictoire.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 27 septembre 2023, et l'affaire a été appelée à l'audience de plaidoiries (juge unique) du 6 mars 2024. La décision a été mise en délibéré au 20 juin 2024, date à laquelle elle a été prononcée par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DECISION

En application de l'article 472 du code de procédure civile si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond et le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

A titre liminaire, il convient de rappeler que l'article 684 du code de procédure civile dispose que « L'acte destiné à être notifié à une personne ayant sa résidence habituelle à l'étranger est remis au parquet, sauf dans les cas où un règlement européen ou un traité international autorise l'huissier de justice ou le greffe à transmettre directement cet acte à son destinataire ou à une autorité compétente de l'Etat de destination.
L'acte destiné à être notifié à un Etat étranger, à un agent diplomatique étranger en France ou à tout autre bénéficiaire de l'immunité de juridiction est remis au parquet et transmis par l'intermédiaire du ministre de la justice aux fins de signification par voie diplomatique, à moins qu'en vertu d'un règlement européen ou d'un traité international la transmission puisse être faite par une autre voie.(...) ».

Aux termes de l'article 688 du code de procédure civile, « La juridiction est saisie de la demande formée par assignation par la remise qui lui est faite de l'acte complété par les indications prévues à l'article 684-1 ou selon le cas, à l'article 687, le cas échéant accompagné des justificatifs des diligences accomplies en vue de sa notification au destinataire.
S'il n'est pas établi que le destinataire d'un acte en a eu connaissance en temps utile, le juge saisi de l'affaire ne peut statuer au fond que si les conditions ci-après sont réunies :
1° L'acte a été transmis selon les modes prévus par les règlements européens ou les traités internationaux applicables ou, à défaut de ceux-ci, selon les prescriptions des articles 684 à 687 ;
2° Un délai d'au moins six mois s'est écoulé depuis l'envoi de l'acte ;
3° Aucun justificatif de remise de l'acte n'a pu être obtenu nonobstant les démarches effectuées auprès des autorités compétentes de l'Etat où l'acte doit être remis.
Le juge peut prescrire d'office toutes diligences complémentaires, notamment donner commission rogatoire à toute autorité compétente aux fins de s'assurer que le destinataire a eu connaissance de l'acte et de l'informer des conséquences d'une abstention de sa part.
Toutefois, le juge peut ordonner immédiatement les mesures provisoires ou conservatoires nécessaires à la sauvegarde des droits du demandeur ».

Il s'avère en l'espèce que l'acte introductif d'instance a été envoyé pour notification à Mme [M] [W] en Tunisie le 6 juillet 2023 et a été présentée à son domicile le 17 juillet 2023 puis le 4 juillet 2023.

Il n'est pas établi par les pièces produites qu'elle en a eu connaissance en temps utile.

Néanmoins, le délai de six mois prévu au 2° de l'article 688 du code de procédure civile étant écoulé, il peut être statué au fond.

1 - Sur les demandes principales en paiement

A – Au titre des charges de copropriété

Décision du 20 Juin 2024
Charges de copropriété
N° RG 23/08770 - N° Portalis 352J-W-B7H-CZER5

Aux termes des dispositions énoncées aux articles 10 et 5 de la loi du 10 juillet 1965, « les copropriétaires sont tenus de participer aux charges entraînées par les services collectifs, les éléments d’équipement commun en fonction de l’utilité que ces services et éléments présentent à l’égard de chaque lot » ainsi qu’ « aux charges relatives à la conservation, à l’entretien et à l’administration des parties communes et de verser au fonds de travaux mentionné à l’article 14-2 la cotisation prévue au même article, proportionnellement aux valeurs relatives des parties privatives comprises dans leurs 4, 5, 6, 9, 10, 11, 12, 14, 15, 16, 17 telles que ces valeurs résultent » « lors de l’établissement de la copropriété, de la consistance, de la superficie et de la situation des 4, 5, 6, 9, 10, 11, 12, 14, 15, 16, 17 , sans égard à leur utilisation » - le règlement de copropriété fixant la part afférente à chaque lot dans chacune des catégories de charges.

En application de l’article 42 de la même loi, lorsque les comptes et le budget prévisionnel ont été approuvés, les copropriétaires qui n’ont pas contesté l’assemblée générale ayant voté cette approbation dans les deux mois de la notification ne sont plus fondés à contester ces comptes et ce budget provisionnel. Ils ne sont pas non plus fondés à refuser de payer les charges appelées si, ayant contesté une décision de l'assemblée générale, ils n'ont pas obtenu son annulation de manière définitive – toute décision non annulée étant par principe valide et donc exécutoire.

En revanche, tout copropriétaire peut contester les modalités de calcul du solde de son compte individuel de copropriété. En conséquence, il appartient au syndicat des copropriétaires qui poursuit le recouvrement de charges de produire le procès-verbal de la ou des assemblées générales approuvant les comptes des exercices correspondants et les budgets prévisionnels.

*

En l'espèce, le syndicat des copropriétaires justifie tout d'abord, par la production d’un extrait de matrice cadastrale, que Mme [Z] [L], Mme [P] [V], M. [N] [L], Mme [S] [L], M. [O] [L] et Mme [M] [W] sont propriétaires indivisaires des lots n° 4, 5, 6, 9, 10, 11, 12, 14, 15, 16, 17 de l’immeuble en copropriété sis [Adresse 2].

Au soutien de sa demande principale, le syndicat des copropriétaires produit aux débats :

- les procès-verbaux des assemblées générales des 1er mars 2021 et du 2 mars 2022 par lesquelles l’assemblée des copropriétaires a fixé les budgets prévisionnels des années 2022 et voté la réalisation de divers travaux;

- l’attestation de non-recours relatives aux assemblées générales précitées (pièce n° 7 du demandeur) ;

- les appels de fonds portant application aux charges collectives de la clé de répartition des 4, 5, 6, 9, 10, 11, 12, 14, 15, 16 et 17 du défendeur (pièce n° 8 du demandeur) ;

- un décompte de créance actualisé au 15 février 2023 (pièces n° 4 et n° 5 du demandeur).
Décision du 20 Juin 2024
Charges de copropriété
N° RG 23/08770 - N° Portalis 352J-W-B7H-CZER5

Il résulte de l'examen de ces pièces que le compte individuel de copropriétaires de l’indivision des consorts [L]-[V]-[W], déduction faite des frais de recouvrement, est débiteur de 8.901, 37 €.

Par ailleurs, le règlement de copropriété (pièce n° 11 du demandeur) ne prévoit pas de clause de solidarité. La demande en condamnation solidaire des défendeurs n’est donc pas justifiée.

La solidarité ne se présumant pas, en application de l'article 1310 du Code civil, la condamnation au paiement des charges, divisibles, sera conjointe, à proportion des droits respectifs de chacun dans l'indivision (ex. : Cour d'appel de Chambéry, 2ème chambre, 30 mai 2013, n° RG 11/01024).  

Mme [Z] [L], Mme [P] [V], M. [N] [L], Mme [S] [L], M. [O] [L] et Mme [M] [W] seront en conséquence condamnés conjointement, à proportion de leurs droits respectifs dans l’indivision, à payer au syndicat des propriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] la somme de 8.901, 37 € au titre des charges courantes et appels de fonds impayés, selon décompte arrêté au 15 février 2023 incluant le 1er appel de provision de charges 2023.

Faute pour le syndicat des copropriétaires de justifier de la désignation, par l’indivision, d’un mandataire commun, la mise en demeure adressée par lettre recommandée le 22 juin 2022 à « M. ou Mme [L], [Adresse 2], M. [L] [T], [Localité 6] » (pièce n° 2 du demandeur) ainsi que la sommation de payer adressée le 12 septembre 2022 à « l’indivision [L], domiciliée chez M. [L] [T], [Adresse 2] » (pièce n° 3 du demandeur) ne peuvent valoir interpellation suffisante au sens de l’article 1333 du code civil.

Les intérêts au taux légal seront donc dus à compter de l’assignation, c’est-à-dire, à compter du :

2 mars 2023 s’agissant des sommes dues par M. [N] [L], Mme [Z] [L] et M. [O] [L],
8 mars 2023, s’agissant des sommes dues par Mme [S] [L], Mme [P] [V],
du 4 août 2023, s’agissant des sommes dues par Mme [M] [W].
B – Au titre des frais de recouvrement

Selon l’article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965 sont imputables au seul copropriétaire concerné les frais nécessaires exposés par le syndicat, notamment les frais de mise en demeure, de relance et de prise d’hypothèque à compter de la mise en demeure, pour le recouvrement d’une créance justifiée à l’encontre d’un copropriétaire ainsi que les droits et émoluments des actes des huissiers de justice et le droit de recouvrement ou d’encaissement à la charge du débiteur. Cette énumération n'est pas exhaustive, la juridiction disposant d'un pouvoir d'appréciation souverain quant au caractère nécessaire de ces frais.

En conséquence, ne sont pas considérés comme des frais nécessaires au recouvrement de la créance de charges, au sens des dispositions susmentionnées :

- les frais de relance antérieurs à l'envoi d'une mise en demeure, ainsi que les frais de relance, mise en demeure et sommation de payer postérieurs à la délivrance de l'assignation ;

- les frais de suivi de procédure ou les honoraires du syndic pour transmission du dossier à l'huissier ou à l'avocat, dès lors qu'il n'est pas justifié de l'accomplissement de diligences exceptionnelles ;

- les frais d'huissier engagés pour l'introduction de l'instance ou la signification de conclusions, qui constituent des dépens au sens de l'article 695 du code de procédure civile (6°) ;

- les frais d'avocat, qui constituent des frais irrépétibles indemnisés en application de l'article 700 du code de procédure civile.

*

En l'espèce, le syndicat des copropriétaires sollicite en outre le paiement de la somme de 844, 53 € au titre des frais exposés pour le recouvrement de sa créance, comprenant, selon le décompte des sommes dues versée aux débats (pièce n° 4 du demandeur) :

« 31/05/2022, mise en demeure, 52 €,
20/06/2022, relance après mise en demeure, 52 €,
24/06/2022, SCP GOLDBERG Avocat, dernier avis avant poursuite, 53, 17 €,
27/07/2022, sommation de payer, 132,60 €,
13/09/2022, Me [Y], huissier, sommation, 156,96 €,
14/02/2023, constitution dossier avocat, 397,80 € ».
Faute pour le syndicat des copropriétaires de produire la mise en demeure du 31 mai 2022, la relance du 20 juin 2022, la sommation de payer du 27 juillet 2022, les coûts de celles-ci ne peuvent être retenus.

Le syndicat des copropriétaires produit en revanche la mise en demeure réalisée par lettre recommandée de son conseil le 22 juin 2022 (pièce n° 2 du demandeur) ainsi que la facture d’honoraires afférentes à hauteur de 53,17 € (pièce n° 9 du demandeur). Cependant, le tribunal relève que :

le syndicat des copropriétaires ne justifie pas de la désignation, par l’indivision, d’un mandataire commun,
la lettre recommandée de mise en demeure en date du 22 juin 2022 a été adressée, à « M. ou Mme [L], [Adresse 2], M. [L] [T], [Localité 6] » (pièce n° 2 du demandeur), sans plus de précision sur l’identité du destinataire, alors même que M. [T] [L] est manifestement le copropriétaire décédé,
la sommation de payer en date du 12 septembre 2022 a été signifiée à étude à « l’indivision [L], domiciliée chez M. [L] [T], [Adresse 2] » (pièce n° 3 du demandeur), sans davantage de précision sur l’identité du destinataire.
Dès lors, cette mise en demeure et cette sommation de payer ne constituent pas une interpellation suffisante des défendeurs assignés, au sens de l’article 1333 du code civil. Leur coût ne pourra donc être retenu.

En outre, il est relevé que le recouvrement d'une créance de charges constitue un acte élémentaire d'administration de la copropriété faisant partie des missions de base du syndic, et que le contrat de syndic n'est pas opposable à un copropriétaire particulier mais uniquement au syndicat des copropriétaires. Conformément au contrat-type prévu par le décret n°67-223 du 17 mars 1967, les frais d'envoi ou de suivi de dossier contentieux ne peuvent être facturés qu'en cas de « diligences exceptionnelles », non démontrées ou même alléguées en l'espèce.

Les frais de « constitution du dossier transmis à l’auxiliaire de justice » pour un montant de 397,80 € seront donc rejetés.

En conséquence, le syndicat des copropriétaires sera débouté de sa demande en paiement de la somme de 844, 53 € au titre des frais exposés pour le recouvrement de sa créance.

2 - Sur la demande indemnitaire

L'article 1231-6 du code civil dispose que les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure. Toutefois, le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts de l'intérêt moratoire.

Il résulte de ces dispositions que le syndicat des copropriétaires qui se prévaut d'un défaut de paiement des charges dues par un copropriétaire doit en outre démontrer que celui-ci a fait preuve de mauvaise foi, et qu'il a subi un préjudice distinct de celui engendré par le seul retard de paiement (Cass. 3e civ., 20 oct. 2016, n°15-20.587).

*

En l'espèce, le syndicat des copropriétaires réclame l'indemnisation du préjudice qu'il dit avoir subi en raison de l'inexécution par Mme [Z] [L], Mme [P] [V], M. [N] [L], Mme [S] [L], M. [O] [L] et Mme [M] [W] de leurs obligations.

A l'examen des pièces produites aux débats, et notamment du décompte de créance, il apparaît que Mme [Z] [L], Mme [P] [V], M. [N] [L], Mme [S] [L], M. [O] [L] et Mme [M] [W] ont manqué de longue date à leur obligation de paiement de leur quote-part de charges – le compte apparaissant débiteur à l'égard de la copropriété dès le 2 mars 2022.

Les manquements systématiques et répétés d'un copropriétaire à son obligation essentielle à l'égard du syndicat des copropriétaires de régler ses charges de copropriété sont constitutifs d'une faute susceptible de causer un préjudice financier direct et certain à la collectivité des copropriétaires, distinct de celui compensé par les intérêts moratoires, dès lors qu'il est établi qu'elle a été privée de sommes importantes nécessaires à la gestion et à l'entretien de l'immeuble.

Toutefois, le syndicat des copropriétaires ne rapporte pas la preuve que le défaut de paiement a été à l’origine de difficultés quelconques ou qu'elle aurait nécessité le vote d'appels de fonds exceptionnels pour pallier un manque temporaire de trésorerie, alors que le seul fait d'être privé de sommes nécessaires à la gestion et à l'entretien de l'immeuble ne constitue pas en soi un préjudice indépendant de celui du retard dans l'exécution de l'obligation.

En outre, alors que la bonne foi du débiteur doit être présumée, il n'est pas démontré que Mme [Z] [L], Mme [P] [V], M. [N] [L], Mme [S] [L], M. [O] [L] et Mme [M] [W] ont agi de mauvaise foi et que le défaut de paiement précédemment constaté ne résulterait pas de difficultés personnelles et/ou financières.

Faute de justifier de l'existence d'un préjudice distinct de celui susceptible d'être réparé par les intérêts moratoires assortissant sa créance, et de démontrer que les copropriétaires ont agi de mauvaise foi, le syndicat des copropriétaires sera débouté de sa demande en paiement de dommages et intérêts.

3 - Sur les demandes accessoires

- Sur les dépens

Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

Mme [Z] [L], Mme [P] [V], M. [N] [L], Mme [S] [L], M. [O] [L] et Mme [M] [W], parties perdant le procès, seront condamnés conjointement, à proportion de leurs droits respectifs dans l’indivision, au paiement des entiers dépens de l'instance, qui ne comprendront pas le coût de la sommation de payer du 12 septembre 2022 dont l’efficacité n’a précédemment pas été retenue au titre des frais relevant de l’article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965, avec distraction au profit de Maître Jean-Yves ROCHMANN, avocat constitué, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

- Sur les frais non compris dans les dépens

En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a lieu à condamnation.

Il n’apparaît pas équitable de laisser à la charge de la copropriété les frais non compris dans les dépens qui ont été exposés dans le cadre de la présente instance.

Tenus aux dépens, Mme [Z] [L], Mme [P] [V], M. [N] [L], Mme [S] [L], M. [O] [L] et Mme [M] [W] seront en outre condamnés conjointement, à proportion de leurs droits respectifs dans l’indivision, à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 1.500 euros à ce titre.

- Sur l’exécution provisoire

Aux termes des articles 514 et suivants du code de procédure civile, dans leur rédaction issue du décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019 et applicable aux instances introduites à compter du 1er janvier 2020, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

Le juge peut écarter l'exécution provisoire de droit, en tout ou partie, s'il estime qu'elle est incompatible avec la nature de l'affaire. Il statue, d'office ou à la demande d'une partie, par décision spécialement motivée.

En l'espèce, au regard de la nature des condamnations prononcées et de la particulière ancienneté du litige, il n'y a pas lieu d'écarter l'exécution provisoire de droit.

PAR CES MOTIFS,

Le tribunal, statuant par un jugement réputé contradictoire, en premier ressort, après débats en audience publique et par mise à disposition au greffe,

CONDAMNE Mme [Z] [L], Mme [P] [V], M. [N] [L], Mme [S] [L], M. [O] [L] et Mme [M] [W], conjointement, à proportion de leurs droits respectifs dans l’indivision, à payer au syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] les sommes de :
8.901, 37 € au titre des charges courantes et appels de fonds impayés, selon décompte arrêté au 15 février 2023 incluant le 1er appel de provision de charges 2023, avec intérêts au taux légal à compter du 2 mars 2023 s’agissant des sommes dues par M. [N] [L], Mme [Z] [L] et M. [O] [L], du 8 mars 2023, s’agissant des sommes dues par Mme [S] [L] et Mme [P] [V], et du 4 août 2023, s’agissant des sommes dues par Mme [M] [W] ;
1.500 € au titre des frais irrépétibles ;
DEBOUTE le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] de sa demande en paiement de la somme de 844, 53 € au titre des frais exposés pour le recouvrement de sa créance ;

DEBOUTE le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] de sa demande en paiement de dommages et intérêts ;

CONDAMNE Mme [Z] [L], Mme [P] [V], M. [N] [L], Mme [S] [L], M. [O] [L] et Mme [M] [W], conjointement, à proportion de leurs droits respectifs dans l’indivision, aux entiers dépens de l’instance, à l’exclusion du coût de la sommation de payer du 12 septembre 2022, avec distraction au profit de Maître Jean-Yves ROCHMANN, avocat constitué, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;

DIT n'y avoir lieu d'écarter l'exécution provisoire de droit.

Fait et jugé à Paris le 20 Juin 2024

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Charges de copropriété
Numéro d'arrêt : 23/08770
Date de la décision : 20/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-20;23.08770 ?
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