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19/06/2024 | FRANCE | N°23/08746

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp fond, 19 juin 2024, 23/08746


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :Maître Hakima OTMANE
Madame [Z] [W]


Copie exécutoire délivrée
le :
à :Me Karim BOUANANE

Pôle civil de proximité


PCP JCP fond

N° RG 23/08746 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3IJ3

N° MINUTE :
8 JCP






JUGEMENT
rendu le mercredi 19 juin 2024


DEMANDERESSE
S.A. REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE PARIS, dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Me Karim BOUANANE, avocat au barreau de

PARIS, vestiaire : #E1971


DÉFENDEURS
Monsieur [U] [J], demeurant [Adresse 2]
représenté par Maître Hakima OTMANE de la SELEURL SELARL OTMANE, avocats au barreau de PARI...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :Maître Hakima OTMANE
Madame [Z] [W]

Copie exécutoire délivrée
le :
à :Me Karim BOUANANE

Pôle civil de proximité

PCP JCP fond

N° RG 23/08746 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3IJ3

N° MINUTE :
8 JCP

JUGEMENT
rendu le mercredi 19 juin 2024

DEMANDERESSE
S.A. REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE PARIS, dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Me Karim BOUANANE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #E1971

DÉFENDEURS
Monsieur [U] [J], demeurant [Adresse 2]
représenté par Maître Hakima OTMANE de la SELEURL SELARL OTMANE, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : #C2476

Madame [Z] [W], demeurant [Adresse 2]
non comparante, ni représentée

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Fairouz HAMMAOUI, Vice-présidente, juge des contentieux de la protection
assistée de Aline CAZEAUX, Greffier,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 19 mars 2024

JUGEMENT
réputé contradictoire, en premier ressort, prononcé par mise à disposition le 19 juin 2024 par Fairouz HAMMAOUI, Vice-présidente assistée de Aline CAZEAUX, Greffier
Décision du 19 juin 2024
PCP JCP fond - N° RG 23/08746 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3IJ3

Suivant acte sous seing privé en date du 14 juin 2022, la REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE PARIS (R.I.V.P.) a consenti à Monsieur [U] [J] et Madame [Z] [W] un bail portant sur un appartement à usage d'habitation situé [Adresse 3] pour un loyer mensuel de 886,85 euros, outre des charges de 120 euros.

Par acte en date du 04 juillet 2022, la R.I.V.P. a également loué à Monsieur [U] [J] et Madame [Z] [W] un emplacement de stationnement sis à la même adresse pour un loyer de 110 euros.

Par actes d'huissier en date du 03 novembre 2023, la R.I.V.P. a fait assigner Monsieur [U] [J] et Madame [Z] [W] devant le tribunal d'instance aux fins de, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :
prononcer la résiliation judiciaire du bail aux torts exclusifs des preneurs,ordonner l'expulsion immédiate de Monsieur [U] [J] et Madame [Z] [W] et tous occupants de son chef, et ce avec l'assistance du commissaire de police et de la force publique et d'un serrurier s'il y a lieu, avec suppression du délai de deux mois de l'article L.412-1 du code des procédures civiles d'exécution et autorisation de la séquestration du mobilier aux frais , risques et périls des preneurs,condamner solidairement Monsieur [U] [J] et Madame [Z] [W] à lui verser une indemnité mensuelle d'occupation égale au montant du loyer actualisé et doublé jusqu'à libération des lieux,condamner in solidum Monsieur [U] [J] et Madame [Z] [W] à lui verser une somme de 926 euros au titre des fruits civils,condamner in solidum Monsieur [U] [J] et Madame [Z] [W] à lui verser une somme de 9000 euros au titre de l’amende civile,condamner solidairement Monsieur [U] [J] et Madame [Z] [W] à lui verser une somme de 800 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, et aux dépens comprenant le coût d'établissement du procès-verbal de constat d'huissier.
L'affaire a fait l'objet d’un renvoi pour permettre aux parties de se mettre en état pour être finalement retenue à l'audience du 19 mars 2024.

A l'audience du 19 mars 2024, la R.I.V.P., représentée par son conseil, a déposé des conclusions, soutenues oralement, aux termes desquelles elle a réitéré ses demandes de son assignation relatives aux fruits civils et à l’amende civile et s’est désistée de ses autres demandes, notamment celle portant sur la résiliation judiciaire, les preneurs ayant quitté les lieux loués en janvier 2024. La R.I.V.P. a également précisé qu’elle s'opposait à toute demande reconventionnelle des défendeurs.

Au soutien de ses prétentions, la R.I.V.P. soutient que la sous-location illicite est avérée ainsi qu'il en résulte du procès-verbal d'huissier du 19 juin 2023 et de l'aveu même de Monsieur [U] [J] et que par ailleurs il est patent au vu des commentaires déposés sur le site BOOKING que les défenseurs n'habitent plus l'appartement qu'occasionnellement puisqu'il est loué en totalité et qu’il l’a été à 15 reprises entre le mois de décembre 2022 et le mois de juin 2023 pour des séjours d’une à quinze nuits, ce qui constituent deux violations graves et répétées du bail (sous-location illicite et défaut d'occupation du bien). Elle ajoute que cette sous-location illicite leur a rapporté un profit financier d'au moins 926 euros compte tenu du prix moyen de 29 euros pratiqués dans la résidence dont dépend le logement objet du bail.

Monsieur [U] [J], représenté par son conseil, a également déposé des écritures, soutenues oralement, aux termes desquelles il a sollicité, d’une part, que le tribunal constate l’irrecevabilité des demandes formulées à l’encontre de Madame [Z] [W], compte tenu du fait qu’elle a quitté les lieux loués le 17 octobre 2022. D’autre part, Monsieur [J] sollicite le débouté de la R.I.V.P. de l’ensemble de ses demandes et sa condamnation au paiement de la somme de 3000 euros pour procédure abusive et à la somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile. Subsidiairement, il sollicite la réduction de la somme demandée au titre des fruits civils à la somme de 300 euros.

Au soutien de ses demandes, Monsieur [U] [J], fait valoir que la R.I.V.P. a été informée du départ de Madame [Z] [W] des lieux loués et n’a jamais régularisé la situation. Il produit en ce sens une déclaration de main courante qu’il a effectué le 17 octobre 2022 auprès du commissariat du 12ème arrondissement de [Localité 4], ainsi qu’un courriel en date du 27 octobre 2022 de la R.I.V.P. accusant réception d’une demande faite par Mme [W] ayant pour objet « CONGES ». Monsieur [U] [J] rappelle avoir lui-même quitté les lieux le 26 janvier 2024.

Monsieur [U] [J] soutient également avoir toujours occupé les lieux loués. Il affirme également que le nombre de sous-locations constaté par commissaire de justice n’est pas suffisamment important pour justifier la résiliation judicaire du bail. S’agissant de sa condamnation à une amende civile demandée par la R.I.V.P., il affirme que les lieux loués ne constituent pas un logement social et que le préjudice lié à l’attente des personnes susceptibles de bénéficier d’un tel logement invoqué par son bailleur, n’est pas établi. Monsieur [U] [J] invoque également la nature pénale de cette amende et, par suite, l’incompétence matérielle de ce tribunal. En ce qui concerne les fruits civils demandés par la R.I.V.P., le défendeur soutient que son bailleur n’établit pas la réalité de cette somme. Enfin, s’agissant de sa demande reconventionnelle de condamnation de la R.I.V.P. au paiement de la somme de 3000 euros au titre de son préjudice moral, Monsieur [U] [J] argue du caractère abusif de l’action en justice de son bailleur.

Bien que régulièrement assignée à étude, Madame [Z] [W] n'a pas comparu ni ne s'est fait représenter. En application de l'article 473 du code de procédure civile, il sera statué par jugement réputé contradictoire.

L'affaire a été mise en délibéré au 19 juin 2024 par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DECISION

Aux termes de l'article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

Sur le désistement de la demande de résiliation du bail et des demandes subséquentes

Il convient de prendre acte du désistement de la R.I.V.P. de ses demandes de résiliation du bail et des demandes subséquentes d'expulsion, d'indemnités d'occupation et de sort des biens, les preneurs ayant quitté les lieux loués en janvier 2024.

Sur la recevabilité des demandes formulées à l’égard de Madame [Z] [W]

Il ressort de la combinaison des articles 6 et 9 du code de procédure civile qu'il incombe aux parties d'alléguer les faits nécessaires au soutien de leurs prétentions et d'en apporter la preuve.

Les articles 122 et 125 du code de procédure civile disposent que constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée et que les fins de non-recevoir doivent être relevées d'office lorsqu'elles ont un caractère d'ordre public, notamment lorsqu'elles résultent de l'inobservation des délais dans lesquels doivent être exercées les voies de recours ou de l'absence d'ouverture d'une voie de recours.
Le juge peut relever d'office la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt, du défaut de qualité ou de la chose jugée.

En application des dispositions de l'article 15-I de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, le preneur peut délivrer un congé à tout moment et sans besoin de justifier d'un motif. Le délai de préavis est en principe de trois mois, ce délai étant toutefois réduit à un mois pour les zones de tension locative. A l'expiration du délai de préavis, le locataire est déchu de tout titre d'occupation.

En l’espèce, Monsieur [U] [J], fait valoir que la R.I.V.P. a été informée du départ de Madame [Z] [W] des lieux loués et n’a jamais régularisé la situation. Il produit en ce sens une déclaration de main courante qu’il a effectué le 17 octobre 2022 auprès du commissariat du 12ème arrondissement de [Localité 4], ainsi qu’un courriel en date du 27 octobre 2022 de la R.I.V.P. accusant réception d’une demande faite par Mme [W] ayant pour objet « CONGES ».

Ces éléments de preuve ne suffisent cependant pas à caractériser un congé donné par Madame [Z] [W] au sens de l'article 15-I de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989.

L’exception d’irrecevabilité soulevé par Monsieur [U] [J] sera par conséquent rejetée.

Sur la demande en paiement au titre des fruits de la sous-location illicite

Aux termes de l’article 546 du Code civil, la propriété d'une chose, soit mobilière, soit immobilière, donne droit sur tout ce qu'elle produit, et sur ce qui s'y unit accessoirement, soit naturellement, soit artificiellement. Il ressort des dispositions de l’article 547 du Code civil que les fruits civils appartiennent au propriétaire par accession.

Il en résulte que, sauf lorsque la sous-location a été autorisée par le bailleur, les sous-loyers perçus par le preneur constituent des fruits civils qui appartiennent par accession au propriétaire ( Civ 1ère, 12 septembre 2019, n°pourvoi 18-20.727).

En l'espèce, il ressort du procès-verbal de constat du 19 juin 2023 établi par Maître [O] [E], commissaire de justice, que les locataires en titre ont consenti des baux à des tiers du 10 décembre 2022 au 6 juin 2023, ce que Monsieur [U] [J] ne conteste pas.

Si les pièces versées ne permettent pas de chiffrer précisément la totalité des fruits civils, il apparaît à la lecture des captures d'écran 15 commentaires de voyageurs, soit au moins 15 locations d'au moins une nuitée, laquelle peut être estimée selon le bailleur à un minimum de 29 euros par nuité soit un total de 435 euros. Les pièces produites ne permettent cependant pas de connaître le prix auquel Monsieur [U] [J] sous-louait le logement, mais celui-ci reconnaît 300 euros. C'est donc cette somme qui sera retenue.

Monsieur [U] [J] et Mme [W] seront en conséquence condamnés in solidum à verser à la R.I.V.P. la somme de 300 euros au titre des fruits perçus.

Sur la demande de condamnation à l’amende de l’article L442-8 du Code de la construction et de l’Habitation.

En vertu de l'article L442-8 du code de la construction et de l'habitation, dans tous les immeubles destinés à la location et financés au moyen de crédits prévus par le livre III, il est interdit de louer en meublé ou de sous-louer un logement, meublé ou non, sous quelque forme que ce soit, sous peine d'une amende de 9 000 €.

Aucune disposition ne permettant de retenir la compétence du juge d'instance pour prononcer cette amende, il y a lieu de rejeter cette demande.

Sur les demandes accessoires

Les défendeurs, qui succombent, supporteront in solidum les dépens, en application de l'article 696 du code de procédure civile, en ce compris le coût du constat d'huissier.

Il serait inéquitable de laisser à la charge du bailleur les frais exposés par lui dans la présente instance et non compris dans les dépens. La somme de 450 euros lui sera donc allouée au titre de l'article 700 du code de procédure civile, somme à laquelle les défendeurs seront condamnés in solidum.

L'exécution provisoire, compatible avec la nature de l'affaire et apparaissant nécessaire compte tenu de l'ancienneté du litige, sera ordonnée en application de l'article 515 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Le juge des contentieux de la protection statuant publiquement, après débats en audience publique, par jugement mis à disposition au greffe réputé contradictoire et en premier ressort,

REJETTE la demande de Monsieur [U] [J] tendant au constat de l’irrecevabilité des demandes formulées par la REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE PARIS (R.I.V.P.) à l’encontre de Madame [Z] [W] ;

CONSTATE le désistement de la REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE PARIS (R.I.V.P.) de ses demandes de résiliation judiciaire du bail, d’expulsion, de décision sur le sort des meubles, de condamnation de Monsieur [U] [J] et de Madame [Z] [W] aux indemnités d’occupation,

CONDAMNE in solidum Monsieur [U] [J] et Madame [Z] [W] à verser à la REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE PARIS (R.I.V.P.) la somme de 300 euros au titre à titre de restitution des fruits civils perçus dans le cadre de la sous-location illicite du bien;

CONDAMNE in solidum Monsieur [U] [J] et Madame [Z] [W] à verser à la R.I.V.P. la somme de 450 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE le surplus des demandes ;

CONDAMNE in solidum Monsieur [U] [J] et Madame [Z] [W] aux dépens en ce compris les frais d'assignation et de signification du présent jugement ;

ORDONNE l'exécution provisoire.

LA GREFFIERE LA JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION
Décision du 19 juin 2024
PCP JCP fond - N° RG 23/08746 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3IJ3

Fait et jugé à Paris le 19 juin 2024

le greffierle Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp fond
Numéro d'arrêt : 23/08746
Date de la décision : 19/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 01/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-19;23.08746 ?
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