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19/06/2024 | FRANCE | N°23/08642

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp fond, 19 juin 2024, 23/08642


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à : Me Lauren PAVARD


Copie exécutoire délivrée
le :
à :Me Simon VANDEWEEGHE

Pôle civil de proximité


PCP JCP fond

N° RG 23/08642 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3HPJ

N° MINUTE :
7 JCP




JUGEMENT
rendu le mercredi 19 juin 2024


DEMANDEURS
Monsieur [A] [N], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Simon VANDEWEEGHE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #K0107

Madame [Z] [N], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Simon VANDEWEEGHE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #K0107

DÉFENDEURS
Madame [J] [I], demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Lauren PAVARD,...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à : Me Lauren PAVARD

Copie exécutoire délivrée
le :
à :Me Simon VANDEWEEGHE

Pôle civil de proximité

PCP JCP fond

N° RG 23/08642 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3HPJ

N° MINUTE :
7 JCP

JUGEMENT
rendu le mercredi 19 juin 2024

DEMANDEURS
Monsieur [A] [N], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Simon VANDEWEEGHE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #K0107

Madame [Z] [N], demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Simon VANDEWEEGHE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #K0107

DÉFENDEURS
Madame [J] [I], demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Lauren PAVARD, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #P0461

Monsieur [O] [R] [M], demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Lauren PAVARD, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #P0461

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Fairouz HAMMAOUI, Vice-présidente, juge des contentieux de la protection
assistée de Aline CAZEAUX, Greffier,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 19 mars 2024

JUGEMENT
contradictoire, en premier ressort, prononcé par mise à disposition le 19 juin 2024 par Fairouz HAMMAOUI, Vice-présidente assistée de Aline CAZEAUX, Greffier
Décision du 19 juin 2024
PCP JCP fond - N° RG 23/08642 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3HPJ

Par acte sous seing privé en date du 25 février 2021 intitulé « contrat de location de logement meublé », Madame [Z] [N] et Monsieur [A] [N] ont consenti à bail à Monsieur [O] [M] un appartement à usage d'habitation situé [Adresse 1] moyennant un loyer mensuel de 2 400 euros, outre une provision pour charges de 200 euros, pour une durée d'un an.

Le 31 mars 2023, Madame [Z] [N] et Monsieur [A] [N] ont fait délivrer un commandement de payer à Monsieur [O] [M] et à Madame [J] [I] la somme de 5 519,88 euros au titre des arriérés de loyer.

Par actes d'huissier en date du 18 août 2023 et du 23 août 2023, Madame [Z] [N] et Monsieur [A] [N] ont fait assigner Monsieur [O] [M] et à Madame [J] [I] devant le Juge des contentieux de la protection du pole civil de proximité du Tribunal judiciaire de PARIS aux fins de :
les voir condamner solidairement à payer la somme de 16 338 euros au titre de la dette locative,prononcer judiciaire de la résiliation du bail en date du 25 février 2021,ordonner l'expulsion des défendeurs et de tout occupant de leur chef avec au besoin l'assistance de la force publique, sans les délais de l'article L.412-1 du code des procédures civiles d'exécution,condamner solidairement Monsieur [O] [M] et Madame [J] [I] au paiement d’une indemnité d'occupation correspondant au montant du dernier loyer, charges, taxes et accessoires contractuels exigibles à compter de la date d'effet de résiliation du bail et ce jusqu’à la libération effective des lieux, payable d'avance,ordonner la séquestration des meubles sur place ou en tout autre endroit clos et couvert au choix de Madame [Z] [N] et Monsieur [A] [N], aux frais de Monsieur [O] [M] et Madame [J] [I],condamnation solidairement Monsieur [O] [M] et Madame [J] [I] au paiement de la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles, ainsi qu’aux entiers dépens,rappeler l'exécution provisoire de la décision à intervenir.
A l'audience du 23 novembre 2023, l’examen de l’affaire a été renvoyé, afin de permettre aux parties de se mettre en état.

A l’audience du 19 mars 2024, Madame [Z] [N] et Monsieur [A] [N], représentés par leur conseil, ont déposé des écritures qu'ils ont développées oralement, aux termes desquelles ils ont repris les demandes contenues dans leur assignation en actualisant l'arriéré locatif dû à la somme de 37 123,57 euros selon décompte arrêté au 19 mars 2024 et en sollicitant le rejet des demandes des défendeurs.

Madame [Z] [N] et Monsieur [A] [N] font valoir qu’ils ont signifié le 31 mars 2023 aux défendeurs un commandement de payer par commissaire de justice resté infructueux. Ils précisent qu’à l’époque la dette locative s’élevait à la somme de 5519,88 euros et qu’elle s’établit à présent à la somme de 37 123,57 euros, ce qui les met dans une situation matérielle complexe. Madame [Z] [N] et Monsieur [A] [N] arguent également de la sous-location des lieux loués par les défendeurs et produisent, outre « le manuel d’entrée » remis par ces derniers aux sous-locataires, deux attestations de Monsieur [L] (le précédent bailleur de Madame [J] [I]) et de Madame [K] (la gardienne de l’immeuble du précédent appartement de Madame [J] [I]). Les bailleurs rappellent, par ailleurs, que les défendeurs sont mariés depuis le 31 décembre 2019. Ils produisent le certificat de mariage en attestant et ajoutent que Madame [J] [I] occupe les lieux avec Monsieur [O] [M] depuis la signature du bail. S’agissant de la qualification de celui-ci, Madame [Z] [N] et Monsieur [A] [N] soutiennent qu’il s’agit bien d’une location meublée et arguent notamment, en ce sens, de la facture relative au lit produite en défense et libellée au nom de Monsieur [A] [N], ainsi que de travaux de réfection de la cuisine réalisés par eux. En ce qui concerne les désordres relatifs aux fenêtres invoqués en défense, ils rappellent que l’état des lieux d’entrée évoquait déjà leur mauvais état.

Monsieur [O] [M] et Madame [J] [I], représentés par leur conseil, ont également déposé des écritures à l'audience, dont ils ont sollicité le bénéfice et ont développé oralement des observations. Il a été demandé, outre le rejet des demandes de Madame [Z] [N] et Monsieur [A] [N] :
la requalification du contrat de location meublé en date du 25 février 2021 en contrat de location non -meublé de trois ans,par suite :
la réduction du loyer mensuel à la somme de 1900 euros,la réduction de l’arriéré locatif à la somme de 15443,40 euros,la condamnation de Madame [Z] [N] et Monsieur [A] [N] au paiement de la somme de 15 000 euros à titre de dommages-intérêts,la compensation entre l’arriéré locatif et la somme due au titre des dommages-intérêts,subsidiairement, l’octroi de délai de paiement à hauteur de 36 mois en vue de s’acquitter de l’arriéré locatif,la condamnation de Madame [Z] [N] et Monsieur [A] [N] au paiement de la somme de 5000 euros au titre des frais irrépétibles, outre les entiers dépens.
Au soutien de leurs prétentions, Monsieur [O] [M] et Madame [J] [I] font valoir que les lieux loués ne comportaient pas, lors de la prise d’effet du bail, les « équipements minimums » prescrit par la loi, notamment une literie, des rideaux occultants, un four micro-ondes, de la vaisselle, des ustensiles de cuisine, des luminaires, du matériel d’entretien adapté aux caractéristiques du logement. Monsieur [O] [M] et Madame [J] [I] soutiennent également qu’ils ne peuvent être condamnés à payer solidairement les sommes demandées par Madame [Z] [N] et Monsieur [A] [N], la solidarité ne trouvant pas à s’appliquer entre eux. Ils rappellent que Monsieur [O] [M] est seul signataire du bail en date du 25 février 2021, que Madame [J] [I] est hébergée au [Adresse 1], à titre gratuit. Ils soutiennent également qu’aucun écrit ne prévoit une quelconque solidarité entre eux au titre de cette location. S’agissant de l’absence de bien fondé du prononcé d’une éventuelle résiliation judiciaire du bail sollicitée par les demandeurs, Monsieur [O] [M] arguent du manquement des bailleurs à leur obligation d’assurer la jouissance paisible des lieux loués, lequel résulte d’après eux des malfaçons affectant les fenêtres des lieux loués, ainsi que du vol des doubles des clés de l’appartement et du changement des serrures de la cave. En ce qui concerne la sous-location avancée par les bailleurs, Monsieur [O] [M] et Madame [J] [I] relèvent que ces derniers n’en apportent pas la preuve.

La décision a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 19 juin 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire sur la qualification du contrat, il sera rappelé qu'en application de l'article 12 du code de procédure civile, le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables. Il doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée.

En l'espèce, il est constant que par contrat en date du 25 février 2021 intitulée par les parties « contrat de location de logement meublé », pour une durée d’un an, les époux [N] ont donné à bail à Monsieur [O] [M] un appartement sis [Adresse 1] (3ème étage, gauche). Il est également constant que cet appartement constitue la résidence principale des époux [M]- [I]. De même, il résulte des écritures des défendeurs que les lieux loués comportent un piano imposant, un canapé, quatre chaises, trois commodes, un réfrigérateur-congélateur, une cuisinière et des plaques de cuisson. S’agissant de la literie, Monsieur [O] [M] soutient avoir acheté un lit, réglé pour moitié par Monsieur [A] [N]. Il produit également une facture attestant de cet achat, émise au nom du bailleur.

Il résulte de ces éléments que les meubles présents dans les lieux loués au moment de la conclusion du bail étaient en nombre suffisant afin d'assurer une jouissance normale des lieux. Si certains éléments figurant dans le décret du 31 juillet 2015 tels des rideaux occultants, un four micro-ondes, de la vaisselle, des ustensiles de cuisine, des luminaires, du matériel d’entretien adapté aux caractéristiques du logement manquaient aux termes des déclarations des défendeurs, ces seuls éléments, à propos desquels aucune réclamation n'a été fait par les locataires sur trois années d'occupation, n'est pas de nature à remettre en cause la qualification du bail.

Dans ces conditions, aucune requalification ne sera donc prononcée. A fortiori, la demande des consorts [M]- [I] tendant à la réduction du montant du loyer mensuel sera rejetée.

Enfin, il sera rappelé que si le bail a été conclu uniquement par Monsieur [O] [M], celui-ci étant marié, son épouse, Madame [J] [I], en est co-titulaire en application de l'article 1751 du code civil.

Sur la recevabilité de la demande

Une copie de l’assignation a été notifiée à la préfecture de Paris par la voie électronique le 05 septembre 2023, soit plus de deux mois avant l’audience, conformément aux dispositions de l’article 24 IV de la loi n°89-462 du 06 juillet 1989 (applicable aux locations meublées par renvoi de l'article 25-3).

Aucun grief d'irrecevabilité sur ce fondement n'est ainsi encouru.

Sur le prononcé de la résiliation judiciaire

Aux termes de l'article 1224 du code civil, la résolution résulte soit de l'application d'une clause résolutoire soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice. L'article 1229 du même code précise que lorsque les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l'exécution réciproque du contrat, il n'y a pas lieu à restitution pour la période antérieure à la dernière prestation n'ayant pas reçu sa contrepartie et que, dans ce cas, la résolution est qualifiée de résiliation.

En application de l'article 1228 du code civil, le juge peut, selon les circonstances, constater ou prononcer la résolution ou ordonner l'exécution du contrat, en accordant éventuellement un délai au débiteur, ou allouer seulement des dommages et intérêts. Les délais de grâce sont en outre régis par l'article 1343-5 selon lequel le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues. Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital.

Enfin, il sera rappelé que l'une des obligations essentielles du preneur d'un contrat de bail est celle du paiement des loyers aux termes convenus en application de l''article 7 de la loi n°89-462 du 06 juillet 1989 (applicable aux locations meublées par renvoi de l'article 25-3). Le défaut de paiement pendant plusieurs mois caractérise un manquement contractuel suffisamment grave pour justifier la résiliation du contrat de bail aux torts du locataire et son expulsion des lieux.

En l'espèce, ainsi qu'il a été dit plus haut, le loyer mensuel convenu entre les parties était de 2 400 euros, outre une provision mensuelle pour charges locatives de 200 euros, sans aucune ambiguïté ainsi qu'il en ressort de tous les documents contractuels. Or, il ressort du décompte produit en demande et non contesté en défense que sur la période de février 2023 à mars 2024, soit pendant 14 mois, aucun paiement n’est intervenu, ce qui porte la somme débitrice à 37 123,57 euros.

Ces éléments caractérisent un manquement suffisamment grave aux obligations découlant du bail sans incidence sur l'obligation au loyer, qui justifie la résiliation du contrat aux torts exclusifs des locataires et leur expulsion des lieux, sans qu’il soit nécessaire d’examiner le motif invoqué par les demandeurs dans la sous-location illicite des lieux loués.

Sur le manquement à l'obligation de délivrance du bailleur

Aux termes de l'article 6 de la loi du 6 juillet 1989 (applicable aux locations meublées suivant les disposition de la loi ALUR n° 2014- 366 du 24 mars 2014), le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé, exempt de toute infestation d'espèces nuisibles et parasites, répondant à un critère de performance énergétique minimale et doté des éléments le rendant conforme à l'usage d'habitation. Le décret n°2202-120 du 30 janvier 2002 vient préciser que le logement doit permet une aération suffisante et que les dispositifs d'ouverture et les éventuels dispositifs de ventilation des logements sont en bon état et permettent un renouvellement de l'air et une évacuation de l'humidité adaptés aux besoins d'une occupation normale du logement et au fonctionnement des équipements. Pareillement, le gros œuvre du logement et de ses accès doit être en bon état d'entretien et de solidité et protéger les locaux contre les eaux de ruissellement et les remontées d'eau.

Le bailleur est également obligé de délivrer au locataire le logement en bon état d'usage et de réparation ainsi que les équipements mentionnés au contrat de location en bon état de fonctionnement, étant précisé que la mise en place d'un système de ventilation et les réfections de grande ampleur ne font pas partie de la liste des réparations locatives à la charge du preneur listées dans le décret n°87-712 du 26 août 1987.

Ces obligations forment plus généralement l'obligation de délivrance du bail. De telles obligations sont des obligations de résultat et ne nécessitent pas de rapporter la preuve d'une faute du bailleur ou d'un défaut de diligences.

En cas de méconnaissance par le bailleur de son obligation de délivrance, le locataire dispose de l'action en exécution des travaux avec demande d'indemnisation pour les préjudices subis tels que la restriction d'usage ou le préjudice d'agrément. Pour la réalisation des travaux, une astreinte peut être prononcer pour assurer l'exécution de la décision en application de l'article L.131-1 du code des procédures civiles d'exécution.

En matière d'indécence en particulier, l'article 20-1 de la loi du 6 juillet 1989 prévoit deux sanctions. La première consiste pour le locataire à demander au bailleur ou à exiger judiciairement de lui une mise en conformité des locaux lorsque le logement loué ne satisfait pas aux normes de décence fixées par les textes. La deuxième lui reconnaît le droit, à défaut de mise en conformité, d’obtenir du juge une réduction du loyer.

En revanche, le locataire n'a pas d'autres droits, particulièrement celui de répondre à l'indécence par une suspension du paiement des loyers. En effet, l'exception d'inexécution n'est en effet pas admise sauf en cas d'impossibilité totale d'habiter les lieux.

En l'espèce, il ressort notamment du procès-verbal de constat de Me [P] [B], commissaire de justice, en date du 25 mai 2023 que toutes les fenêtres des lieux loués présentent des jours et sont en mauvaise état.

Cette circonstance est, par ailleurs, corroborée par l’état des lieux d’entrée non signé par les défendeurs, mais dont se prévalent les époux [N].
Les bailleurs ne contestent pas en eux-mêmes ces désordres.

Il en résulte que le manquement à l'obligation de délivrance est justifié et que la demande d'indemnisation du préjudice de jouissance est légitime en son principe. Les époux [N] seront ainsi tenus au dédommagement du préjudice de jouissance à compter du 08 février 2021.

S'agissant du quantum de l'indemnisation il conviendra de prendre en considération, outre la durée du préjudice et la superficie affectée de l'appartement, l'importance du trouble mais également le nombre et le type de pièces affectées, ainsi que la valeur locative effective du bien et les conditions de vie du locataire, en ce que cela a une évidente incidence sur l'importance de la gêne occasionnée.

En l'espèce, force est de constater que les locataires n'apportent que peu d'explications et de pièces permettant d'apprécier et d'objectiver l'ampleur du préjudice. En particulier, ils ne produisent notamment aucun rapport d'intervention d'un technicien ayant mesuré le taux d'humidité et décrit précisément les zones de moisissures et leur localisation et ayant pris des clichés photographiques complets de l'appartement avec une vue d'ensemble des pièces (les photographies produites étant trop zoomées pour apprécier pleinement la situation), ni aucun certificat médical à propos des éventuelles conséquences de ces désordres sur la santé des personnes occupant les lieux loués.

En ces conditions, le préjudice de jouissance ne pourra qu'être évalué à 15% de la valeur locative du bien sur la période courant du mois du 08 février 2021 à l'audience du 19 mars 2024, soit sur 37 mois, de sorte que la somme de 13 320 euros sera accordée.

Sur les comptes entre les parties et la compensation des créances respectives

Selon l'article 1347 du code civil, la compensation est l'extinction simultanée d'obligations réciproques entre deux personnes. Elle s'opère, sous réserve d'être invoquée, à due concurrence, à la date où ses conditions se trouvent réunies.

Les consorts [M]- [I] sont redevables des loyers impayés jusqu'à la date de résiliation du bail en application des articles 1103 et 1217 du code civil. Par ailleurs, le maintien dans les lieux postérieurement à la date d’expiration du bail constitue une faute civile ouvrant droit à réparation en ce qu'elle cause un préjudice certain pour le propriétaire dont l'occupation indue de son bien l'a privé de sa jouissance. Au delà de cet aspect indemnitaire, l'indemnité d'occupation, qui est également de nature compensatoire, constitue une dette de jouissance correspondant à la valeur équitable des locaux.

En l'espèce, les consorts [N] produisent un décompte démontrant que les consorts [M]- [I] restent à leur devoir la somme de 37 123,57 euros à la date du 19 mars 2024, cette somme correspondant à l'arriéré des loyers impayés. Pour la somme au principal, les consorts [M]- [I], n’apportent aucun élément de nature à contester le principe ni le montant de la dette. Ils seront donc jugés tenue de la somme de 37 123,57 euros.

Et, ainsi qu'il a été indiqué, les bailleurs sont tenus d'une indemnité de 13 320 euros pour le préjudice de jouissance de sa locataire.

Il en résulte que les consorts [M]- [I] seront condamnés à verser la somme de 23 803,57 euros aux consorts [N].

Les consorts [M]- [I] seront aussi condamnés au paiement d'une indemnité mensuelle d’occupation pour la période du 19 juin 2024 à la date de la libération effective et définitive des lieux, égale au montant des loyers et charges qui auraient été dus si le bail s'était poursuivi, étant précisé toutefois qu'il conviendra de prendre en compte le préjudice de jouissance qui perdure, de sorte qu'il sera tenu compte d'une diminution de 15% du montant du loyer, dans les conditions fixées au dispositif.

Sur la demande de délais de paiement

En vertu de l'article 1343-5 du code civil compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge peut, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues.

En l'espèce, les consorts [M]- [I] ne produisent aucun justificatif de leur situation, notamment s’agissant de leurs revenus. En ces conditions, ils ne justifient pas de pouvoir régler leur dette dans le délai légal de deux ans. Leur demande de délais de paiement sera ainsi rejetée.

Sur les demandes accessoires

Les succombances réciproques des parties justifie que chacune conserve à sa charge les dépens engagés par elle en application de l'article 696 du code de procédure civile.

L’équité ne justifie de ne pas faire droit aux demandes respectives formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La présente décision est exécutoire à titre provisoire, conformément à l'article 514 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Le tribunal statuant publiquement, après débats en audience publique, par jugement mis à disposition au greffe contradictoire et en premier ressort,

PRONONCE la résiliation judiciaire du bail d'habitation liant Madame [Z] [N] et Monsieur [A] [N], d’une part, et Monsieur [O] [M] et Madame [J] [I], d’autre part, concernant l’appartement à usage d’habitation situé au [Adresse 1] à effet du 8 février 2021 aux torts des locataires ;

DIT qu’à défaut pour Monsieur [O] [M] et Madame [J] [I] d’avoir volontairement libéré les lieux et restitué les clés dans ce délai, Madame [Z] [N] et Monsieur [A] [N] pourront, deux mois après la signification d’un commandement de quitter les lieux, faire procéder à leur expulsion ainsi qu’à celle de tous occupants de leur chef, conformément à l'article L.412-1 du code des procédures civiles d'exécution, y compris le cas échéant avec le concours d’un serrurier et de la force publique ;

DIT n'y avoir lieu à ordonner l'enlèvement, le transport et la séquestration des meubles éventuellement laissés sur place et rappelle que le sort du mobilier garnissant le logement est prévu par les articles L.433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution ;

JUGE que Monsieur [O] [M] et Madame [J] [I] sont redevables d'un arriéré locatif de 37 123,57 euros;

JUGE que Madame [Z] [N] et Monsieur [A] [N] sont redevables d'une indemnité de 13 320 euros au titre du préjudice de jouissance de la locataire ;

CONDAMNE en conséquence Monsieur [O] [M] et Madame [J] [I] à verser à Madame [Z] [N] et Monsieur [A] [N] la somme de 23 803,57 euros;

DEBOUTE Monsieur [O] [M] et Madame [J] [I] de leur demande de délai de paiement ;

CONDAMNE Monsieur [O] [M] et Madame [J] [I] à verser à Madame [Z] [N] et Monsieur [A] [N] une indemnité mensuelle d’occupation d'un montant équivalent au loyer diminué de 15%, avec charges à compter du présent jugement et jusqu’à libération effective et définitive des lieux (volontaire ou en suite de l'expulsion);

REJETTE le surplus des demandes des parties ;

LAISSE à la charge de chacune des parties les dépens exposés par elle;

RAPPELLE que le présent jugement est exécutoire de plein droit à titre provisoire.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition les jour, mois et an susdits par la juge des contentieux de la protection et la greffière susnommées.

La greffière,La juge des contentieux de la protection


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp fond
Numéro d'arrêt : 23/08642
Date de la décision : 19/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 01/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-19;23.08642 ?
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