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18/06/2024 | FRANCE | N°21/03881

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 8ème chambre 1ère section, 18 juin 2024, 21/03881


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:




8ème chambre
1ère section


N° RG 21/03881 -
N° Portalis 352J-W-B7F-CT752


N° MINUTE :


Assignation du :
01 Mars 2021







JUGEMENT
rendu le 18 juin 2024
DEMANDEURS

Monsieur [W] [C]
[Adresse 1]
[Localité 3]

Monsieur [I] [U]
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentés par Maître Fehmi KRAIEM, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire #PB135


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Monsieur [W] [A]
[Adresse 2]
[Localité 5]

représenté par Maître Ariana BOBETIC, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire #151






Décision du 18 juin 2024
8ème chambre 1ère section
...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:

8ème chambre
1ère section

N° RG 21/03881 -
N° Portalis 352J-W-B7F-CT752

N° MINUTE :

Assignation du :
01 Mars 2021

JUGEMENT
rendu le 18 juin 2024
DEMANDEURS

Monsieur [W] [C]
[Adresse 1]
[Localité 3]

Monsieur [I] [U]
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentés par Maître Fehmi KRAIEM, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire #PB135

DÉFENDEUR

Monsieur [W] [A]
[Adresse 2]
[Localité 5]

représenté par Maître Ariana BOBETIC, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire #151

Décision du 18 juin 2024
8ème chambre 1ère section
N° RG 21/03881 - N° Portalis 352J-W-B7F-CT752

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Laure BERNARD, Vice-Présidente
Madame Elyda MEY, Juge
Monsieur Julien FEVRIER, Juge

assistés de Madame Justine EDIN, Greffière,

DÉBATS

A l’audience du 20 mars 2024 tenue en audience publique devant Madame Laure BERNARD, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile.

JUGEMENT

Prononcé par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort

EXPOSE DU LITIGE

L'immeuble sis [Adresse 4] est soumis au statut de la copropriété des immeubles bâtis, au sein duquel M. [W] [C] et M. [I] [U] (ci-après " les consorts [C] - [U] ") ont été propriétaires indivis d'un appartement situé au 4ème étage dudit immeuble.

M. [W] [A] est, quant à lui, toujours propriétaire de deux chambres de service, n°61 et 62, situées au-dessus de l'appartement des consorts [C]-[U], au 5ème étage du même immeuble.

Entre 2009 et 2015, l'appartement des consorts [C]-[U] a été victime de plusieurs dégâts des eaux.

A la suite d'une mesure d'expertise judiciaire ordonnée en référé, par jugement du tribunal de de céans du 10 mai 2019, M. [A] a été condamné à " supprimer les installations sanitaires et les raccordements des canalisations d'évacuation des chambres numéro 61 et 62, situées au 5ème étage de l'immeuble [Adresse 4], ou à justifier de la réalisation, avec les autorisations nécessaires du syndicat des copropriétaires et des autorités sanitaires, de travaux de mise aux normes des installations sanitaires en cause conformément aux préconisations de l'expert [F] [H] dans son rapport du 23 juin 2016, dans les neuf mois suivant la signification du présent jugement, sous astreinte, passé ce délai de 50 euros par jours de retard pendant 90 jours ".

Par acte en date du 20 janvier 2020, M. [C] et M. [U] ont signé une promesse de vente concernant leur appartement avec M. [V] et Mme [P], pour un prix de 970.000 euros.

Le 25 février 2020, un nouveau dégât des eaux est survenu dans l'appartement de M. [C] et M. [U].

Par lettre en date du 22 avril 2020, M. [C] et M. [U] ont mis en demeure M. [A] de justifier du respect des dispositions du jugement en date du 10 mai 2019.

Par acte notarié en date du 20 mai 2020, M. [C] et M. [U] ont vendu leur bien immobilier aux consorts [P]-[V] au prix de 970.000 euros, avec la disposition suivante : " observation étant ici faite que consécutivement au dégât des eaux, survenu en février 2020 en provenance des chambres 61 et 62 appartenant à M. [W] [A] à l'étage supérieur du bien faisant objet de la vente (…), les parties ont convenu d'un commun accord d'un versement par les vendeurs au profit des acquéreurs, à titre de réparation du préjudice subi par eux, d'une indemnité forfaitaire et définitive de quarante mille euros (40.000 euros). Cet accord fait suite à une proposition des acquéreurs; lesquels ont parfaitement conscience que ledit dégât des eaux résulte du défaut d'entretien par M. [A] des installations sanitaires et des raccordements des canalisations d'eau courante des chambres 61 et 62 situées au 5ème étage de l'immeuble [Adresse 4] ".

Par acte d'huissier délivré le 1er mars 2021, M. [C] et M. [U] ont assigné M. [A] aux fins d'obtenir indemnisation de leur préjudice.

Aux termes de leurs dernières conclusions signifiées par voie électronique le 28 février 2022, M. [C] et M. [U] demandent au tribunal de :
" Vu l'article 1240 du code civil,
Vu l'acte de vente notarié en date du 20 mai 2020,
- Dire et juger la demande de M. [C] et de M. [U] recevable,
- Dire et juger la demande de M. [C] et de M. [U] bien fondée,
- Dire et juger que l'indemnité forfaitaire et définitive de 40.000 euros versée par M. [C] et M. [U] lors de la signature de l'acte notarié est consécutive au défaut d'entretien de M. [A] des installations sanitaires et les raccordements des canalisations dans les appartements lui appartenant,
- Condamner M. [A] à payer en réparation à M. [C] et à M. [U] la somme de 40.000 euros avec intérêt aux taux légal à compter de la mise en demeure en date du 22 avril 2020,
- Condamner M. [A] à verser la somme de 5.368 euros à M. [C] et à M. [U] en réparation du préjudice subi du fait des travaux engagés suite au dernier dégât des eaux,
- Condamner M. [A] à la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,
- Rejeter purement et simplement la demande reconventionnelle de M. [A],
- Ordonner l'exécution provisoire sur l'ensemble des condamnations, conformément aux dispositions de l'article 515 du code de procédure civile. "

Au soutien de leur demande principale, les consorts [C] - [U] prétendent que le sinistre ayant dégradé leur bien au mois de février 2020, alors qu'une promesse de vente le concernant avait été signée, trouve son origine dans le défaut d'exécution fautif par M. [A] des travaux de remise en état à la réalisation desquels il avait été condamné judiciairement, et à propos duquel la procédure d'appel a fait l'objet d'une radiation.

Ils précisent que du fait de la survenance de ce sinistre, ils ont été dans l'obligation d'accorder à leurs acquéreurs une " réduction indirecte " du prix du bien à hauteur de 40.000 euros.

Ils en déduisent être fondés à solliciter l'engagement de la responsabilité délictuelle de M. [A] et sa condamnation à leur régler la somme de 40.000 euros, dont le paiement initial leur a causé un préjudice certain, outre celle de 5.368 euros au titre de frais engagés pour la réfection du plafond de leur bien à la suite du sinistre, assurant que cette demande est recevable nonobstant l'absence de tentative préalable de recouvrement amiable.

En réponse aux moyens de défense, les consorts [C] - [U] contestent notamment avoir manqué à leur devoir d'information envers leurs acquéreurs, la promesse de vente contenant tous les éléments relatifs aux caractéristiques techniques précises de l'immeuble, que leur bonne foi ne saurait être remise en cause, et qu'en toute hypothèse seuls les acheteurs du bien auraient pu les cas échéant, se prévaloir d'un tel argument.

Ils affirment que M. [A] n'a pas respecté ses obligations découlant du jugement précité du 10 mai 2019, soulignant que dans le cadre du protocole d'accord signé entre ce dernier et les consorts [P]-[V] il a reconnu ne pas avoir menés les travaux exigés judiciairement, dans le délai imparti.

Ils font valoir en outre que la procédure d'appel diligentée par M. [A] à l'encontre du jugement le condamnant à la réalisation de travaux au sein de ses lots était dilatoire et a été justement radiée pour défaut d'exécution.

Les consorts [C] - [U] soutiennent également que M. [A] doit être tenu pour responsable du dernier dégât des eaux survenus le 25 février 2020 compte tenu de ce que sa responsabilité avait déjà été caractérisée pour les cinq premiers dégâts des eaux, outre que dans l'acte notarié de vente du 20 mai 2020, les consorts [P]-[V] reconnaissent que ce sinistre de février 2020 provient des chambres appartenant à M. [A], ce qu'il reconnaît dans le protocole d'accord régularisé le 11 mai 2020 avec les consorts [P] [V].

Les consorts [C] - [U] s'opposent enfin à la demande reconventionnelle de M. [A] de 5.000 euros au titre d'une prétendue action abusive dès lors qu'ils sont de bonne foi et qu'ils ont effectué de multiples démarches pour tenter d'obtenir l'exécution du jugement du 10 mai 2019.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 21 juin 2022, M. [A] demande au tribunal de:
" Vu les articles 1112-1, 1240, 1353 et suivants du code civil,
Vu les articles 6 et, 54, 56 et suivants du code de procédure civile,
Vu les pièces versées aux débats,
Vu la jurisprudence,
- Dire irrecevable la demande de condamnation formulée à son encontre à payer la somme de 40.000 euros à MM. [C] et [U], faute de fondement légal et de preuve de l'existence d'un tel versement à leurs cocontractants ;
- Dire irrecevable la demande des mêmes à le voir condamner à leur payer la somme de 5.368 euros faute de tentative amiable de recouvrement préalable,
Subsidiairement, au fond,
- Dire mal-fondées les demandes présentées et débouter MM. [C] et [U] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions dirigées contre M. [A],
A titre reconventionnel,
- Dire abusive l'action de MM. [C] et [U] contre M. [A],
En réparation,
- Les condamner à lui verser une somme de 5.000 euros au titre de préjudice moral,
En tout état de cause,
- Condamner MM. [U] et [C] à verser à M. [A] une somme de 4.800 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- Laisser à la charge de MM. [U] et [C] qui succombent les entiers dépens de l'instance. "

M. [A] s'oppose aux demandes en paiement des consorts [C] - [U], qu'il estime irrecevables et infondées.

Ainsi et d'une part, il se prévaut de ce qu'aux termes du jugement du 10 mai 2019, les dégâts des eaux survenus au sein du lot des demandeurs n'avaient pas pour unique origine les défauts de ses lots, de sorte qu'il ne peut être présentement affirmé utilement par les consorts [C] - [U] que le nouveau sinistre de février 2020 trouve forcément son origine au sein de ses lots sans produire au débat de pièces permettant de l'établir, soulignant sur ce point la carence probatoire en demande tant s'agissant des origines que de l'imputabilité dudit sinistre.

Il se prévaut d'autre part de ce que, compte tenu de la date de signification du jugement précité, il avait jusqu'au 15 mars 2020 pour faire réaliser les travaux litigieux de sorte que si, au moment de la survenance du sinistre dénoncé lesdits travaux n'étaient pas terminés, cela ne saurait pour autant être constitutif d'une faute à son encontre.

Il précise que les travaux sur le lot 61 impliquaient l'accord de l'assemblée générale, qui a été donné en 2021, outre que le départ de ses occupants et leur relogement a pris du temps en raison du contexte de crise sanitaire.

M. [A] rappelle en outre avoir interjeté appel de cette décision, qui a été radié le 16 septembre 2020, et en déduit qu'au moment de la signature par les demandeurs de la promesse de vente portant sur leur bien une procédure judiciaire était toujours en cours, ce dont il prétend qu'ils auraient du informer utilement les acquéreurs, ainsi que des dégâts des eaux antérieurs, ce que les consorts [C] - [U] échouent à démontrer.

Il en déduit que c'est donc en raison de leur omission fautive que les demandeurs ont été contraints d'octroyer à leurs acquéreurs une indemnité forfaitaire chiffrée à 40.000 euros, dont il souligne que l'effectivité du paiement n'est pas justifié, le prix de vente convenu dans la promesse de vente étant le même que le montant indiqué dans l'acte définitif de vente.

S'agissant de la somme de 5.368 euros dont les consorts [C] - [U] réclament le paiement, au titre de prétendus frais de travaux, M. [A] fait valoir l'absence de justification la concernant, tant dans son principe que dans son montant, outre que cette demande est irrecevable faute de tentative de recouvrement amiable préalable en application des dispositions de l'article 56 du code de procédure civile.

Au soutien de sa demande reconventionnelle, M. [A] avance que les demandeurs font usage de procédés déloyaux, que les sommes réclamées ne sont aucunement justifiées et que le lien de causalité entre le sinistre subi et la faute de M. [A] n'est pas établie. Il en déduit que la mauvaise foi des demandeurs est caractérisée et justifie l'octroi d'une somme de 5.000 euros pour procédure abusive.

Pour un exposé plus détaillé des moyens et prétentions des parties, il convient de renvoyer aux termes de leurs dernières écritures susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 23 novembre 2022.

L'affaire, appelée à l'audience du 20 mars 2024, a été mise en délibéré au 18 juin 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de l'action

L'article 56 du code de procédure civile, dans sa version applicable au moment de la date délivrance de l'acte introductif d'instance, édicte que " L'assignation contient à peine de nullité, outre les mentions prescrites pour les actes d'huissier de justice et celles énoncées à l'article 54 :
1° Les lieu, jour et heure de l'audience à laquelle l'affaire sera appelée;

2°Un exposé des moyens en fait et en droit ;

3° La liste des pièces sur lesquelles la demande est fondée dans un bordereau qui lui est annexé ;

4° L'indication des modalités de comparution devant la juridiction et la précision que, faute pour le défendeur de comparaître, il s'expose à ce qu'un jugement soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire.(...) ".

L'article 54 du même code, dans sa version applicable au litige, énonce en son alinéa 2 que " A peine de nullité, la demande initiale mentionne:
(...)
5° Lorsqu'elle doit être précédée d'une tentative de conciliation, de médiation ou de procédure participative, les diligences entreprises en vue d'une résolution amiable du litige ou la justification de la dispense d'une telle tentative ".

Aux termes de l'article 771 du code de procédure civile, " lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal pour :
1. Statuer sur les exceptions de procédure, les demandes formées en application de l'article 47 et sur les incidents mettant fin à l'instance ; les parties ne sont plus recevables à soulever ces exceptions et incidents ultérieurement à moins qu'ils ne surviennent ou soient révélés postérieurement au dessaisissement du juge ".

L'article 74 du même code dispose que " les exceptions doivent, à peine d'irrecevabilité, être soulevées simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir. Il en est ainsi alors même que les règles invoquées au soutien de l'exception seraient d'ordre public. "

Enfin, l'article 750-1 du code de procédure civile précité, dans sa version applicable au litige, énonce en son premier alinéa que " A peine d'irrecevabilité que le juge peut prononcer d'office, la demande en justice doit être précédée, au choix des parties, d'une tentative de conciliation menée par un conciliateur de justice, d'une tentative de médiation ou d'une tentative de procédure participative, lorsqu'elle tend au paiement d'une somme n'excédant pas 5.000 euros ou lorsqu'elle est relative à l'une des actions mentionnées aux articles R.211-3-4 et R. 211-3-8 du code de l'organisation judiciaire. "

Sur ce,

Le tribunal relève d'une part que la sanction prévue par l'article 54 du code de procédure civile précité en cas de non-respect de ses dispositions est la nullité de l'acte introductif d'instance, ce qui constitue une exception de procédure devant être soulevée avant toute défense au fond, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, et relevant en outre de la compétence du juge de la mise en état.

Il relève d'autre part que les demandes en paiement formées par les consorts [C] - [U] à l'encontre de M. [A], dont celle tendant au paiement de divers frais de travaux, sont d'un montant supérieur à 5.000 euros et ne relèvent pas des actions prévues aux articles mentionnées aux articles R.211-3-4 et R. 211-3-8 du code de l'organisation judiciaire de sorte que la tentative préalable de conciliation prévue à peine d'irrecevabilité par l'article 750-1 du code de procédure civile ne saurait trouver application.

Par conséquent l'irrecevabilité alléguée par M. [A] doit être rejetée.

Sur les demandes principales en paiement

Aux termes de l'article 1240 du code civil, " tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. " Sur ce fondement, il incombe à la partie demanderesse, de rapporter la triple preuve de l'existence, d'une faute d'un préjudice et d'un lien causal entre les deux.

L'article 9 du code de procédure civile dispose que " il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention. "

Sur ce,

Il est constant que par jugement du 10 mai 2019 rendu par la juridiction de céans, M. [A] a été condamné à faire effectuer des travaux de mises aux normes des installations sanitaires de ses lots, dans un délai de neuf mois suivant signification de la décision, de sorte qu'il avait jusqu'au 15 mars 2020 pour s'y conformer, et ce à la suite de sinistres répétés ayant dégradé l'appartement des consorts [C] - [U] situé en dessous des lots du défendeur.

Il n'est pas davantage contesté que ce jugement a fait l'objet d'un appel interjeté par M. [A], qui a été radié par ordonnance du 16 septembre 2020, et en l'état il n'est ni établi ni démontré que cette affaire aurait fait l'objet d'une réinscription au rôle de la cour d'appel.

D'après les consorts [C] - [U], leur appartement a subi un nouveau dégât des eaux au mois de février 2020, le procès-verbal de constat d'huissier du 06 mars 2020 mentionnant ainsi que, dans le salon, de l'eau coule depuis la dalle plafonnière, et que le plafond est totalement détrempé à plusieurs endroits.

Pour autant et d'une part, le tribunal relève que s'ils le prétendent, les consorts [C] - [U] ne versent au débat aucune pièce de nature à établir avec certitude que ces fuites trouvent, à nouveau, leur origine dans la défectuosité des installations sanitaires de M. [A], ne serait-ce que partiellement.

Ils ne produisent aucun avis d'expert en la matière, ni même de constat ou de déclaration à leur assureur, pour justifier de la date de survenance de ce sinistre.

Le tribunal n'est dès lors pas en mesure de vérifier la teneur exacte ni la causalité de ce dégât des eaux, alors que dans le cadre de l'instance ayant donné lieu au jugement du mois de mai 2019, il avait été noté par la juridiction que les non-conformités des installations privatives de M. [A] avaient causé pour partie seulement les désordres alors dénoncés.

D'autre part, au moment allégué où ce nouveau sinistre est intervenu, en février 2020, il s'avère que le délai d'exécution des travaux litigieux auquel M. [A] devait se conformer n'était pas expiré, de sorte qu'aucune faute consistant en un défaut d'exécution tardif ne saurait être caractérisé.

Le fait, non contesté, que M. [A] ait signé un protocole d'accord avec les acquéreurs des consorts [C] - [U] portant sur les travaux restant à mener au sein de ses lots ne vaut pas reconnaissance de responsabilité et ne saurait suffire en toute hypothèse à établir un lien de causalité entre une éventuelle inertie fautive de M. [A], à la supposer avérée, et le sinistre dénoncé.

Les termes de la clause insérée dans l'acte authentique de vente selon lesquels " Cet accord fait suite à une proposition des acquéreurs ; lesquels ont parfaitement conscience que ledit dégât des eaux résulte du défaut d'entretien par M. [A] des installations sanitaires et des raccordements des canalisations d'eau courante des chambres 61 et 62 " n'est pas davantage probant dès lors que les affirmations de cet acte, auquel M. [A] est tiers, ne sont corroborées par aucune pièce technique de nature à établir la ou les causes du sinistre.

Il ne saurait davantage être retenu que la condamnation dont M. [A] a fait l'objet par jugement du 10 mai 2019 suffit à considérer comme caractérisée la responsabilité de celui-ci dans la survenance du nouveau sinistre.

En outre, il ressort de l'examen de la promesse de vente du bien des demandeurs qu'aucune mention particulière, concernant les antécédents de sinistre et le jugement précité du 10 mai 2019, qui faisait l'objet d'un appel au moment de la signature de cet acte et dont le délai d'exécution n'était pas encore terminé, n'a été incluse pour informer utilement les acquéreurs de ces éléments de contexte.

S'ils le prétendent, les consorts [C] - [U] ne produisent aucune pièce de nature à démontrer qu'ils avaient, nonobstant cette absence de précision écrite, dûment informé les consorts [P]-[V].

Dès lors, les consorts [C] - [U] ont, par leur silence fautif sur ce point, contribué à leur propre dommage, et ne peuvent donc utilement se prévaloir de leur propre turpitude.

Enfin, contrairement à ce qu'ils soutiennent, le préjudice financier dont pourraient, le cas échéant, se prévaloir les consorts [C] - [U] n'est pas la perte " sèche ", au demeurant non établie, de la somme de 40.000 euros mais une perte de chance de vendre leur bien au prix souhaité nonobstant la situation de sinistre subi, ce qu'ils ne sollicitent pas, fût-ce à titre subsidiaire.

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, caractérisant la carence probatoire des les consorts [C] - [U], il convient de les débouter de leurs demandes en paiement formées à l'encontre de M. [A].

Sur la demande reconventionnelle indemnitaire pour procédure abusive

Aux termes de l'article 32-1 du code de procédure civile, celui qui agit de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile sans préjudice des dommages intérêts qui seraient réclamés.

La condamnation à des dommages-intérêts pour procédure abusive relève du droit de la responsabilité civile pour faute au sens de l'article 1240 du code civil. Elle suppose, d'une part, que soit caractérisée la faute de la partie perdante faisant dégénérer en abus l'exercice du droit d'ester en justice, et, d'autre part, que soit démontré un lien de causalité entre cette faute et le préjudice subi par la partie demanderesse des dommages et intérêts pour procédure abusive.

Il en résulte que la mesure visée à l'article 32-1 du code de procédure civile est une mesure relevant du pouvoir discrétionnaire de la juridiction saisie, le défendeur ne pouvant la requérir, à l'exception de dommages et intérêts relevant de l'article 1240 précité.

Sur ce,

S'il le prétend, M. [A] ne produit au débat aucune pièce de nature à justifier du préjudice qu'il prétend avoir subi et qu'il a quantifié au montant de 5.000 euros, de sorte qu'il convient de le débouter de sa prétention indemnitaire pour ce seul motif, sans qu'il y ait lieu d'examiner les griefs allégués l'encontre des consorts [C] - [U].

Sur les demandes accessoires

Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

Le juge qui statuer sur un litige peut condamner les parties aux dépens d'une autre instance, s'il s'agit de frais relatifs à une instance ayant préparé celle dont le juge est saisi (frais relatifs à la procédure d'expertise et frais d'expertise - Civ. 3ème, 17 mars 2004, n°00-22.522).

En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a lieu à condamnation.

En application de l'article 514 modifié par le décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019, applicable aux instances introduites à compter du 1er janvier 2020, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

Sur ce,

Succombants en leurs demandes principales, les consorts [C] - [U] doivent être condamnés in solidum aux dépens.

L'équité commande en revanche de laisser à chacune des parties leurs frais irrépétibles, et de rejeter dès lors les prétentions formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il n'y a pas lieu d'écarter l'exécution provisoire de droit.

Les parties seront déboutées du surplus de leurs demandes formées au titre des dépens et des frais irrépétibles ainsi que de leurs autres demandes plus amples ou contraires.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par jugement contradictoire, mis à disposition au greffe et en premier ressort,

REJETTE le moyen d'irrecevabilité soulevé par M. [W] [A],

DEBOUTE M. [W] [C] et M. [I] [U] de l'ensemble de leurs prétentions,

DEBOUTE M. [W] [A] de sa demande reconventionnelle indemnitaire,

DEBOUTE les parties de leurs prétentions formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. [W] [C] et M. [I] [U] aux dépens,

RAPPELLE que l'exécution provisoire de la présente décision est de droit,

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes formées au titre des dépens et des frais irrépétibles ainsi que de leurs autres demandes.

Fait et jugé à Paris le 18 juin 2024.

La GreffièreLa Présidente


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 8ème chambre 1ère section
Numéro d'arrêt : 21/03881
Date de la décision : 18/06/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 24/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-18;21.03881 ?
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