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17/06/2024 | FRANCE | N°24/03150

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp fond, 17 juin 2024, 24/03150


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :
Mme [U] [J] [K]

Copie exécutoire délivrée
le :
à : Maître Karim BOUANANE

Pôle civil de proximité


PCP JCP fond

N° RG 24/03150 - N° Portalis 352J-W-B7I-C4L4I

N° MINUTE :







JUGEMENT
rendu le lundi 17 juin 2024


DEMANDERESSE
S.A.S. HENEO, dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par Maître Karim BOUANANE de l’ASSOCIATION LEGITIA, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : #E1

971


DÉFENDERESSE
Madame [V] [O], demeurant [Adresse 3]
représentée par Mme [U] [J] [K] (munie d’un pouvoir)

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Clara SPITZ, Juge, juge des content...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :
Mme [U] [J] [K]

Copie exécutoire délivrée
le :
à : Maître Karim BOUANANE

Pôle civil de proximité

PCP JCP fond

N° RG 24/03150 - N° Portalis 352J-W-B7I-C4L4I

N° MINUTE :

JUGEMENT
rendu le lundi 17 juin 2024

DEMANDERESSE
S.A.S. HENEO, dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par Maître Karim BOUANANE de l’ASSOCIATION LEGITIA, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : #E1971

DÉFENDERESSE
Madame [V] [O], demeurant [Adresse 3]
représentée par Mme [U] [J] [K] (munie d’un pouvoir)

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Clara SPITZ, Juge, juge des contentieux de la protection
assistée de Inès CELMA-BERNUZ, Greffier,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 29 mars 2024

JUGEMENT
contradictoire, en premier ressort, prononcé par mise à disposition le 17 juin 2024 prorogé du 10 juin 2024 par Clara SPITZ, Juge assistée de Inès CELMA-BERNUZ, Greffier

Décision du 17 juin 2024
PCP JCP fond - N° RG 24/03150 - N° Portalis 352J-W-B7I-C4L4I

EXPOSE DU LITIGE

La société HENEO a consenti le 21 juin 2018 à Madame [V] [O] un titre d’occupation temporaire portant sur un logement n°7 situé au rez-de-chaussée de la résidence sociale sise [Adresse 1].

Par acte de commissaire de justice du 08 mars 2024, la société HENEO a fait assigner Madame [V] [O] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris aux fins de voir :
à titre principal, constater l'acquisition de la clause résolutoire à compter du 10 septembre 2023,à titre subsidiaire, prononcer la résiliation judiciaire du titre d'occupation consenti sur le logement susmentionné,en tout état de cause et en conséquence, ordonner l'expulsion de Madame [V] [O] et de tous occupants de son chef, avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier si besoin est,ordonner le transport et la séquestration des meubles et objets mobiliers garnissant les lieux dans un garde-meubles qu'il désignera ou tel autre lieu du choix de la demanderesse en garantie de toutes sommes qui pourront être dues, aux frais, risques et périls de Madame [V] [O],condamner Madame [V] [O] au paiement d’une indemnité d’occupation des lieux égale au montant de la redevance actualisé à compter de la résiliation du contrat et ce, jusqu’à libération effective des lieux ;condamner Madame [V] [O] à payer à la société HENEO la somme de 3 063,91 euros au titre des arriérés de redevance échéance du mois de février 2024 incluse avec intérêt au taux légal à compter du 09 août 2023,condamner Madame [V] [O] au paiement d'une somme de 480 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens en ce compris le coût du commandement de payer du 09 août 2023,dire n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire.
A l'audience du 29 mars 2024, la société HENEO, représentée par son conseil, a maintenu ses demandes dans les termes de son assignation. Elle a actualisé le montant de sa dette à la somme de 2 727,13 euros et précisé que le montant actuel de la redevance s'élevait à la somme de 336,78 euros.

Madame [V] [O], représentée par sa mère, dûment munie d'un pouvoir, a demandé le débouté de la demande de résiliation, des délais pour pouvoir régler sa dette et a proposé de verser 100 euros par mois en sus du loyer courant à cette fin. Elle a déclaré vivre seule dans son logement, être au chômage et percevoir une indemnité de 980 euros par mois et s'est opposée à son expulsion.

La décision a été mise en délibéré au 10 juin 2024, par mise à disposition au greffe des parties et prorogée au 17 juin 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire sur le statut juridique applicable au titre d'occupation litigieux, il convient de rappeler que le logement occupé par Madame [V] [O] est soumis à la législation des logements-foyers résultant des articles L.633-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation. Ainsi, il est soumis à une réglementation spécifique qui exclut le droit au maintien dans les lieux de l’occupant et il échappe aux dispositions protectrices de l’article L.632-1 du code de la construction et de l’habitation en vertu de l’article L.632-3 du même code ainsi qu'au titre Ier bis précité de la loi du 6 juillet 1989 en vertu de l’article 25-3 de la loi du 6 juillet 1989.

Sur l'acquisition de la clause résolutoire

L'article 1103 du code civil prévoit que « les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ».

L'article 1224 du même code dispose que « la résolution résulte soit de l'application d'une clause résolutoire soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice ». L'article 1225 précise que « en présence d'une clause résolutoire, la résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse s'il n'a pas été convenu que celle-ci résulterait du seul fait de l'inexécution. La mise en demeure doit viser expressément la clause résolutoire pour produire effet ».

En matière de logement foyer plus précisément, l'article L.633-2 du code de la construction et de l'habitation prévoit que « le contrat est conclu pour une durée d'un mois et tacitement reconduit à la seule volonté de la personne logée. La résiliation du contrat par le gestionnaire ou le propriétaire ne peut intervenir que dans les cas suivants :
inexécution par la personne logée d'une obligation lui incombant au titre de son contrat ou d'un manquement grave ou répété au règlement intérieur ;cessation totale d'activité de l'établissement ;cas où la personne logée cesse de remplir les conditions d'admission dans l'établissement considéré ».
L'article R.633-3 du même code précise que « le gestionnaire ou le propriétaire peut résilier le contrat dans l'un des cas prévus à l'article L. 633-2 sous réserve d'un délai de préavis :
a) D'un mois en cas d'inexécution par la ou les personnes titulaires du contrat d'une obligation leur incombant au titre de ce contrat ou en cas de manquement grave ou répété au règlement intérieur. La résiliation peut être décidée pour impayé, lorsque trois termes mensuels consécutifs, correspondant au montant total à acquitter pour le logement, les charges et les prestations obligatoires et facultatives, sont impayés ou bien, en cas de paiement partiel, lorsqu'une somme au moins égale à deux fois le montant mensuel à acquitter pour le logement et les charges reste due au gestionnaire.
b) De trois mois lorsque la personne logée cesse de remplir les conditions d'admission dans l'établissement telles qu'elles sont précisées dans le contrat ou lorsque l'établissement cesse son activité.

La résiliation du contrat est signifiée par commissaire de justice ou notifiée par courrier écrit remis contre décharge ou par lettre recommandée avec avis de réception. Lorsque la résiliation émane du gestionnaire, la personne logée est redevable, pendant le préavis, des sommes correspondant à la seule période d'occupation effective des lieux ».

En l'espèce, le titre d'occupation du 21 juin 2018 unissant Madame [V] [O] à la société HENEO contient, en son article 7, une clause résolutoire ainsi rédigée : «le titre d'occupation pourra être résilié pour l'un des motifs suivants: inexécution par le résident de l'une des obligations lui incombant au regard du titre d'occupation ou manquement grave ou répété au règlement intérieur et notamment non-paiement de la redevance dans les délais prévus, la résiliation portera effet un mois après la date de notification par lettre recommandée avec accusé de réception. La résiliation peut être décidée pour impayé lorsque trois termes mensuels consécutifs correspondant à la redevance totale à acquitter pour le logement, sont impayés, ou bien, en cas de paiement partiel, lorsqu'une somme au moins égale à deux fois le montant mensuel à acquitter pour le logement et les charges reste dû à HENEO (...)».

La société HENEO a, par acte de commissaire de justice en date du 09 août 2023, bien fait signifier à Madame [V] [O] un commandement de payer la somme de 1532,79 euros en principal dans le délai d'un mois.

Or cette somme, au moins égale à deux fois le montant mensuel de la redevance, n'a pas été réglée intégralement dans le délai imparti.

Il convient de préciser que le commandement a été délivré au regard du non-respect du plan d'apurement mis en place entre les parties et à défaut du règlement des redevance courantes. Ainsi, Madame [V] [O] ne saurait invoquer la mise en place de ce plan d'apurement ni l'absence de tentative de règlement amiable du litige.

En conséquence, il y a lieu de constater que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire contenue dans le titre d'occupation sont réunies à la date du 09 septembre 2023 à minuit.

Madame [V] [O] étant désormais occupante sans droit ni titre du logement, il convient d'ordonner son expulsion ainsi que celle de tous occupants de son chef, des lieux loués, selon les modalités prévues ci-après.

Il sera rappelé que le sort des meubles sera régi conformément aux dispositions des articles L.433-1 et L.433-2 du code des procédures civiles d'exécution.

Sur l'indemnité d'occupation

Le maintien dans les lieux postérieurement à la date d’expiration du contrat de résidence constitue une faute civile ouvrant droit à réparation en ce qu'elle cause un préjudice certain pour le propriétaire dont l'occupation indue de son bien l'a privé de sa jouissance. Au-delà de cet aspect indemnitaire, l'indemnité d'occupation, qui est également de nature compensatoire, constitue une dette de jouissance correspondant à la valeur équitable des locaux.

Madame [V] [O] sera condamnée au paiement d'une indemnité mensuelle d’occupation à compter du 10 septembre 2023 jusqu'à la date de la libération effective et définitive des lieux, égale au montant de la redevance qui aurait été due si le contrat de résidence s'était poursuivi, dont le montant s'élève, selon les déclarations de la demanderesse et l'historique du compte locataire édité le 18 mars 2024 à la somme de 336,78 euros par mois.

Sur la dette locative

Selon l'article 1353 du code civil, 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

En l'espèce, la société HENEO produit un décompte arrêté au 18 mars 2024 démontrant qu'à cette date, Madame [V] [O] était redevable d'une somme de 2 727,13 euros échéance du mois de février 2024 incluse.

Madame [V] [O] ne conteste pas cette dette.

Elle sera donc condamnée à payer à la société HENEO cette somme de 2 727, 13 euros arrêtée au 18 mars 2024, avec intérêt au taux légal à compter de la présente décision, les causes du commandement de payer en date du 09 août 2023 ayant été intégralement réglées, en application de l'article 1231-6 et 1342-10 du code civil.

Sur la demande de délais de paiement

L'article 1343-5 du code civil prévoit que « Le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues ».

En l'espèce, Madame [V] [O] sollicite de pouvoir apurer sa dette en versant 100 euros par mois en sus du loyer courant. Elle expose qu'elle est au chômage, qu'elle vit seule et qu'elle perçoit l'APL.

La dette est en diminution, Madame [V] [O] ayant déjà commencé à la rembourser.

Par conséquent, il sera fait droit à la demande de délais formée par Madame [V] [O] dans les conditions précisées au dispositif de la présente décision.

Sur les mesures accessoires:

Madame [V] [O], partie perdante, sera condamnée aux dépens de l'instance, en application de l'article 696 du code de procédure civile, en ce compris le coût du commandement de payer du 09 août 2023.

Toutefois, l'équité commande de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile et la société HENEO sera déboutée de la demande qu'elle a formée à ce titre.

Il sera rappelé que les décisions de première instance sont de plein droit assorti de l'exécution provisoire.

PAR CES MOTIFS,

Le juge des contentieux de la protection, statuant après débats en audience publique, par décision mise à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,

CONSTATE l'acquisition de la clause résolutoire du titre d'occupation conclu le 21 juin 2018 entre d'une part, la société HENEO, et d'autre part, Madame [V] [O] portant sur le logement n°7 situé au rez-de-chaussée de la résidence sociale sise [Adresse 1], à la date du 09 septembre 2023 à minuit,

CONSTATE par conséquent, que Madame [V] [O] est occupante sans droit ni titre de ce logement depuis cette date,

DIT qu'à défaut de départ volontaire dans un délai de trois semaines et en tant que de besoin, il pourra être procédé à l'expulsion de Madame [V] [O] et de tous occupants de son chef, avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier si nécessaire, à l'expiration d'un délai de deux mois suivant la délivrance d'un commandement d'avoir à libérer les lieux, conformément aux dispositions des articles L.412-1 et suivants, R. 411-1 et suivants, et R.412-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution,

RAPPELLE que le sort des meubles garnissant le logement est régi par les articles L.433-1 et L.433-2 du code des procédures civiles d'exécution.

CONDAMNE Madame [V] [O] à verser à la société HENEO une indemnité d'occupation égale au montant des redevances qui auraient été dus en cas de non résiliation du titre d'occupation, à compter du 10 septembre 2023 et ce jusqu'à complète libération des lieux se matérialisant par remise des clés ou procès-verbal d’expulsion, étant précisé qu'elle est comprise, jusqu'au mois de février 2024 dans les sommes dues au titre des redevances impayées,

CONDAMNE Madame [V] [O] à payer à la société HENEO la somme de 2 727,13 euros au titre des redevances impayées arrêtée au 18 mars 2024, échéance du mois de février 2024 incluse,

DIT que cette somme portera intérêt au taux légal à compter de la présente décision,

AUTORISE Madame [V] [O] à se libérer de sa dette en réglant chaque mois pendant 24 mois une somme minimale de 100 euros, la dernière échéance étant majorée du solde de la dette en principal, intérêts et frais,

DIT que le premier règlement devra intervenir dans les dix jours suivant la signification de la présente décision, puis, pour les paiements suivants, en même temps que le loyer, au plus tard le dixième jour de chaque mois, sauf meilleur accord entre les parties,

RAPPELLE que le défaut de paiement d'une seule mensualité à son échéance entraînerait la déchéance du terme et que la totalité du solde restant dû deviendra alors immédiatement exigible.

DÉBOUTE la société HENEO de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Madame [V] [O] aux entiers dépens de l'instance, en ce compris le coût du commandement de payer,

RAPPELLE que la présente décision est exécutoire provisoirement de plein droit.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition de l'ordonnance au greffe du tribunal, le 10 juin 2024,

La greffièreLa juge


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp fond
Numéro d'arrêt : 24/03150
Date de la décision : 17/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 24/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-17;24.03150 ?
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