La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/06/2024 | FRANCE | N°23/07970

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp fond, 17 juin 2024, 23/07970


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :
Me Jean-françois QUIEVY
Me Antoinette REILLE
Copie exécutoire délivrée
le :
à : Me Jean-françois QUIEVY
Me Antoinette REILLE

Pôle civil de proximité


PCP JCP fond

N° RG 23/07970 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3AOW

N° MINUTE :







JUGEMENT
rendu le lundi 17 juin 2024


DEMANDERESSE
S.A.R.L. PAULUS ARZH, dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par Me Jean-françois QUIEVY, avocat a

u barreau de PARIS, vestiaire : #E0968


DÉFENDEURS
Madame [K] [U], demeurant [Adresse 1]

Monsieur [F] [B], demeurant [Adresse 3]

représentés par Me Antoinette REILLE, av...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :
Me Jean-françois QUIEVY
Me Antoinette REILLE
Copie exécutoire délivrée
le :
à : Me Jean-françois QUIEVY
Me Antoinette REILLE

Pôle civil de proximité

PCP JCP fond

N° RG 23/07970 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3AOW

N° MINUTE :

JUGEMENT
rendu le lundi 17 juin 2024

DEMANDERESSE
S.A.R.L. PAULUS ARZH, dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par Me Jean-françois QUIEVY, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #E0968

DÉFENDEURS
Madame [K] [U], demeurant [Adresse 1]

Monsieur [F] [B], demeurant [Adresse 3]

représentés par Me Antoinette REILLE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0901

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Clara SPITZ, Juge, juge des contentieux de la protection
assistée de Inès CELMA-BERNUZ, Greffier,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 08 mars 2024

JUGEMENT
contradictoire, en premier ressort, prononcé par mise à disposition le 17 juin 2024 prorogé du 21 mai 2024 par Clara SPITZ, Juge assistée de Inès CELMA-BERNUZ, Greffier

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 20 septembre 2021, la SARL PAULUS ARZH a donné à bail d'habitation à Madame [K] [U] un appartement meublé de deux pièces situé [Adresse 1] moyennant un loyer initial de 1390 euros outre une provision sur charges de 75 euros.

Aux termes de ce même contrat, Monsieur [F] [B] et son épouse se sont portés cautions solidaires.

Madame [K] [U] a donné congé par lettre recommandée avec accusé de réception du 31 mars 2023, à effet au 31 mai 2023.

Par courrier du 17 avril 2023, le conseil de la SARL PAULUS ARZH a adressé à Madame [K] [U] une mise en demeure de lui régler la somme de 7 678,52 euros, restée vaine.

Par acte de commissaire de justice du 31 mai 2023, elle a fait assigner Madame [K] [U] ainsi que Monsieur [F] [B] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de PARIS aux fins d'obtenir :
leur condamnation solidaire au paiement de la somme de 9 192,17 euros au titre des loyers dus, échéance du mois de mai 2023 incluse, sous réserve des sommes qui pourraient être réclamées à l'issue de l'état de sortie des lieux,leur condamnation solidaire au paiement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
A l’audience du 08 mars 2024 à laquelle l'affaire a été retenue, la SARL PAULUS ARZH, représentée par son conseil, a déposé des conclusions qu'elle a soutenues oralement et aux termes desquelles elle demande :
la condamnation solidaire de Madame [K] [U] et de Monsieur [F] [B] au paiement des loyers dus, à hauteur de 9 718,89 euros,leur condamnation solidaire au paiement de la somme de 5 104,58 euros au titre des frais avancés pour la réparation des dégradations constatées dans le logement,le débouté de toutes les demandes reconventionnelles formées par les défendeursleur condamnation solidaire au paiement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
A l'appui de sa demande, la SARL PAULUS ARZH fait valoir que Madame [K] [U] ne s'est pas conformée à ses obligations légales résultant de la combinaison des articles 1728 du code civil et 7 de la loi du 6 juillet 1989 imposant au locataire de régler ses loyers. Elle expose qu'elle ne saurait valablement se prévaloir de l'exception d'inexécution tirée de l'indécence du logement en ce que les nuisibles ont été éradiqués, que le taux d'humidité est insuffisant à caractériser l'indécence du logement, et que les causes de cette humidité, qui n'ont pas été identifiées, ne sauraient lui être imputables.
Au visa de l'article 7 de la loi du 6 juillet 1989, la SARL PAULUS ARZH sollicite la réparation des dégradations locatives à hauteur de 5 104,58 euros, constatées par procès-verbal de commissaire de justice le 31 mai 2023.
Enfin, elle s'oppose aux demandes reconventionnelles formées par Madame [K] [U] et à la demande en restitution du dépôt de garantie compte-tenu de la réalité des désordres invoquées et constatés par constat de commissaire de justice.

Madame [K] [U] et Monsieur [F] [B], représentés par leur conseil, ont déposé des conclusions aux termes desquelles ils demandent, sous le bénéfice de l’exécution provisoire :
à titre principal, le débouté de la SARL PAULUS ARZH de toutes ses demandes,à titre subsidiaire, la réévaluation du loyer à la baisse et l'octroi de délais pour s'acquitter des sommes qui pourraient être dues par Madame [K] [U],en tout état de cause,la condamnation de la SARL PAULUS ARZH à verser à Madame [K] [U] la somme de 6 000 euros en indemnisation du préjudice causé par l'absence de communication du Diagnostic de Performance Énergétique,sa condamnation à lui rembourser la somme de 4 620,72 euros au titre des biens personnels endommagé par les moisissures,sa condamnation à lui verser la somme de 3 336 euros au titre du dépôt de garantie majoré des intérêts de retard,sa condamnation à lui verser la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens
Elle expose notamment qu'elle a pu valablement s'abstenir de régler les loyers au titre de l'exception d'inexécution tirée du caractère indécent du logement pris à bail et matérialisé par la présence de cafards et une humidité ambiante.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, et les parties ayant plaidé conformément aux conclusions déposées, il convient de renvoyer à celles-ci pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

La décision a été mise en délibérée au 21 mai 2024 et prorogée au 17 juin 2024, date à laquelle elle a été mise à disposition des parties.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande en paiement au titre de l'arriéré locatif

L'article 7 de la loi du 6 juillet 1989 fait obligation au locataire de payer son loyer et les charges récupérables aux termes convenus.

L'article 6 de la même loi oblige le bailleur à remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé, exempt de toute infestation d'espèces nuisibles et parasites, et doté des éléments le rendant conforme à l'usage d'habitation.

Le décret n°2202-120 du 30 janvier 2002 vient préciser que le logement décent doit assurer le clos et le couvert. Le gros œuvre du logement et de ses accès est en bon état d'entretien et de solidité et protège les locaux contre les eaux de ruissellement et les remontées d'eau. Les menuiseries extérieures et la couverture avec ses raccords et accessoires assurent la protection contre les infiltrations d'eau dans l'habitation (...). En outre, il est protégé contre les infiltrations d'air parasites. Les portes et fenêtres du logement ainsi que les murs et parois de ce logement donnant sur l'extérieur ou des locaux non chauffés présentent une étanchéité à l'air suffisante. Les ouvertures des pièces donnant sur des locaux annexes non chauffés sont munies de portes ou de fenêtres. Les cheminées doivent être munies de trappes (….). Le logement permet une aération suffisante. Les dispositifs d'ouverture et les éventuels dispositifs de ventilation des logements sont en bon état et permettent un renouvellement de l'air et une évacuation de l'humidité adaptées aux besoins d'une occupation normale du logement et au fonctionnement des équipements.

L'article 6 de la loi du 06 juillet 1989 prévoit également que le bailleur est obligé de délivrer au locataire le logement en bon état d'usage et de réparation ainsi que les équipements mentionnés au contrat de location en bon état de fonctionnement.

Le bailleur est enfin tenu de l'obligation de mettre à disposition un logement et ses équipements dans leurs consistance et aux conditions prévues au contrat.

Ces trois obligations forment plus généralement l'obligation de délivrance du bail. De telles obligations sont des obligations de résultat et ne nécessitent pas de rapporter la preuve d'une faute du bailleur ou d'un défaut de diligences.

En cas de méconnaissance par le bailleur de son obligation de délivrance, le locataire dispose de l'action en exécution des travaux avec demande d'indemnisation pour les préjudices subis tels que la restriction d'usage ou le préjudice d'agrément.

En matière d'indécence en particulier, l'article 20-1 de la loi du 6 juillet 1989 prévoit deux sanctions. La première consiste pour le locataire à demander au bailleur ou à exiger judiciairement de lui une mise en conformité des locaux lorsque le logement loué ne satisfait pas aux normes de décence fixées par les textes. La deuxième lui reconnaît le droit, à défaut de mise en conformité, d'obtenir du juge une réduction du loyer.

En revanche, le locataire n'a pas d'autres droits, particulièrement celui de répondre à l'indécence par une suspension du paiement des loyers. L'exception d'inexécution n'est en effet pas admise sauf en cas d'impossibilité totale d'habiter les lieux.

Enfin, il est constant que la réduction ou la suspension de loyer n'étant prévue qu'accessoirement à l'exécution des travaux, le juge n'a pas le pouvoir de les ordonner dès lors qu'il n'est pas saisi d'une demande de travaux.

Décision du 17 juin 2024
PCP JCP fond - N° RG 23/07970 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3AOW

En l'espèce, la SARL PAULUS ARZH demande la condamnation solidaire de Madame [K] [U] et de Monsieur [F] [B] à titre de caution, au paiement de la somme de 9 718,89 euros au titre des loyers impayés.

Toutefois, il ressort des pièces versées par le demandeur que la locataire est redevable, au 04 octobre 2023, de la somme de 9 441,17 euros, ce qui correspond à six échéances de loyers.

Il n'est pas contesté par Madame [K] [U] qu'elle s'est abstenue de payer ses loyers à compter du mois de novembre 2022.

En effet, elle ne remet pas en question le montant de la dette mais en conteste, en revanche, le principe, en ce qu'elle invoque, en défense, l'exception d’inexécution prévue à l'article 1219 du code civil.

Toutefois, elle ne soutient pas que le logement donné à bail a été inhabitable durant cette période de six mois. Or seule l'inhabitabilité du logement peut fonder l'exception d'inexécution en matière de bail d'habitation.

Par conséquent, elle ne saurait se prévaloir de ce moyen pour s'opposer à la demande en paiement des loyers.

En outre, s'agissant de sa demande subsidiaire de réduction du montant du loyer, Madame [K] [U] ne forme aucune demande de réalisation de travaux au sein du logement qu'elle a d'ailleurs quitté le 30 mai 2023. Par conséquent, cette demande ne saurait non plus prospérer. Elle sera toutefois requalifiée, conformément à l'article 12 du code de procédure civile, en demande d'indemnisation du préjudice d'agrément découlant du défaut de délivrance d'un logement décent, qui sera étudiée ci-après.

Le bail ayant été signé par Madame [K] [U] et par Monsieur [F] [B] à titre de caution solidaire, les parties seront condamnées solidairement à verser à la SARL PAULUS ARZH la somme de 9 441,14 euros au titre des loyers impayés, somme arrêtée au 04 octobre 2023.

Sur la demande en paiement au titre des dégradations locatives

Selon l'article 7 de la loi du 6 juillet 1989, le locataire est tenu de répondre des dégradations et pertes qui surviennent pendant la durée du contrat dans les locaux dont il a la jouissance exclusive, à moins qu'il ne prouve qu'elles ont eu lieu par cas de force majeure, par la faute du bailleur ou par le fait d'un tiers qu'il n'a pas introduit dans le logement.

Lorsque le bailleur reproche à son locataire d'avoir commis des dégradations, il convient de vérifier si le mauvais état du logement est dû à un usage anormal ou à un défaut d'exécution par le locataire de son obligation d'entretien ou des réparations locatives, ou s'il trouve sa cause dans l'usure et l'obsolescence dues au simple écoulement du temps, c'est-à-dire à la « vétusté ». Cette appréciation doit notamment prendre en compte la durée d'occupation. Les dégradations et pertes visées par le texte précédemment cité s'apprécient en comparant l'état des lieux d'entrée et de sortie. Le décret n°87-712 du 26 août 1987 dresse la liste non exhaustive des réparations locatives incombant au locataire.

La preuve de l’état d’usure normale ou de la vétusté incombe au locataire mais c’est au bailleur de rapporter la preuve de l’existence de dégradations locatives.

En l'espèce, la SARL PAULUS ARZH produit un état de sortie des lieux dressé par commissaire de justice le 31 mai 2023 aux termes duquel il est relevé des fissurations dans les murs, ainsi que des écaillements de peinture, des moisissures, des traces d'infiltrations d'eau et de coulure dans chaque pièce. Il est également relevé des traces de déjections d'insectes et nids de cafards dans la cuisine et la salle de bain.

S'il ressort de la comparaison de cet état des lieux avec celui qui a été dressé à l'entrée que l'appartement se trouve dans un état dégradé, il convient néanmoins de vérifier que la cause en est imputable à la locataire.

Or, la bailleresse ne démontre pas que la locataire est à l'origine de ces dégradations, les pièces versés au débat tendant au contraire à établir un défaut d'isolation du logement et de ventilation du placard notamment, qui ne sauraient entrer dans le champ de l'entretien courant du logement qui lui incombe.

Ainsi, la SARL PAULUS ARZH ne saurait être fondée à réclamer le paiement des sommes engagées au titre de la recherche de fuite (129,80 euros), de la reprise des murs de l'appartement et de la pose de grilles de ventilation ainsi que de l’isolation du placard de la chambre, (2 310 euros).

De même s'agissant des nuisibles, il n'est pas rapporté la preuve que leur présence provient d'un défaut d'hygiène de la part de la locataire et les frais de désinsectisation sont ainsi à la charge du bailleur, compte-tenu de son obligation de délivrance d'un logement décent. La somme de 275 euros réclamée à ce titre n’apparaît donc pas justifiée.

Par ailleurs, la SARL PAULUS ARZH demande paiement de la somme de 2 013 euros au titre du remplacement du frigidaire, du lave-vaisselle et du lave-linge en raison de leur contamination aux déjections de cafard. Le procès-verbal de constat établi par le commissaire de justice le 31 mai 2023 relève cependant des traces de déjections sur le sol derrière le réfrigérateur et non à l’intérieur. Les photographies jointes montrent, par ailleurs, que l’intérieur de l'équipement est propre. Le lave-vaisselle, comme le lave-linge, sont mentionnés comme étant à l'état d'usage, sans référence aux déjections mais seulement à des traces blanchâtres pour le lave-vaisselle. Dès lors, la bailleresse ne saurait imputer les frais de remplacement de ces appareils électroménager à Madame [K] [U].

Enfin, la SARL PAULUS ARZH se dit bien-fondée à solliciter le remboursement de la somme de 376,78 euros dépensée pour fixer le mitigeur de l'évier qui, aux termes de l'état des lieux de sortie, est en « état de fonctionnement, à l'état d'usage, sur un plan de travail à l'état d'usage ». Cette somme n'apparaît donc pas non plus justifiée.

Par conséquent, la SARL PAULUS ARZH sera déboutée de sa demande de condamnation de Madame [K] [U] au paiement de la somme de 5 104,58 euros au titre des dégradations locatives.

Sur les demandes reconventionnelles formées par Madame [K] [U]

Sur la demande d'indemnisation du préjudice d'agrément
Comme rappelé plus haut, le bailleur, en vertu de l'article 6 de la loi du 6 juillet 1989, est tenu à l'égard du locataire d'une obligation de délivrance qui s'analyse en une obligation de résultat et qui consiste notamment à lui délivrer un logement décent.

En cas de non respect de cette obligation, le locataire peut solliciter la suspension du paiement du loyer ou la réduction du loyer pendant la durée des travaux mais également son indemnisation pour les préjudices subis tels que la restriction d'usage ou le préjudice d'agrément.

Conformément à l'article 12 du code de procédure civile, qui impose au juge de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables et de donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée, il convient d'analyser la demande faite par Madame [K] [U] en réduction de loyer, en l'absence de toute demande tendant à la réalisation de travaux, en demande d'indemnisation du préjudice d'agrément découlant du défaut de délivrance d'un logement décent.

En l'espèce, les pièces versées au débat établissent la présence de cafards dans le logement pris à bail par Madame [K] [U] à compter du mois de d'août 2022, date du courriel qu'elle a adressé à l'agence JOURDAN.

En effet, les parties s'accordent sur la réalité de l'intervention d'un expert anti-nuisibles au mois d'octobre 2022, corroborée par la facture d'intervention en date du 31 octobre 2022.

Il n'est pas débattu le fait que cette intervention a été efficace jusqu'au 08 mars 2023, date à laquelle Madame [K] [U] indique les cafards sont réapparus.

Il ressort du constat d'état des lieux de sortie dressés par commissaire de justice le 31 mai 2023 que beaucoup de cafards sont visibles derrière le réfrigérateur, qu'un nid de cafards est visible au niveau des jointures du pare-douche. En outre, une désinsectisation a eu lieu, postérieurement au départ de la locataire, dans les parties communes et privatives de l'immeuble.

La réapparition des nuisibles au mois de mars 2023 comme allégué par la défenderesse est donc avérée.

Ainsi, Madame [K] [U] a eu a subir la présence de nuisibles dans son logement pendant cinq mois, ce qui constitue un manquement de la part du bailleur à son obligation de délivrance du logement, alors que celui-ci ne démontre pas que leur présence est due à un défaut d'entretien de la part de la locataire et qui lui a nécessairement causé un préjudice qu'il convient de réparer.

Par ailleurs, Madame [K] [U] verse au débat des photographies prises par commissaire de justice attestant de la prolifération de moisissures dans l’appartement et notamment au droit du placard de la chambre, lesquelles ne peuvent provenir que d'une source d'humidité passée ou présente.

Les différentes pièces produites tendent par ailleurs à établir de manière certaine un défaut de ventilation du logement dont il n'est pas établi qu'il est du fait de la locataire. En effet, la SARL PAULUS ARZH ne saurait expliquer l'origine de cette humidité par les déplacements à l'étranger de cette dernière, laquelle n'aurait ainsi pas aéré appartement, alors qu'en son absence, les sources d'humidité se sont nécessairement taries.

De plus, il ne peut qu'être relevé qu'au départ de Madame [K] [U], la SARL PAULUS ARZH a fait procéder à l'installation de ventilations dans le salon et dans la chambre à deux endroits notamment dans le placard. De même, la propriétaire des lieux à fait procéder à une isolation « de type sempatap » en fond de placard.

Enfin, l'agence JOURDAN rapporte les conclusions du prestataire qu'elle a fait intervenir dans le courant du mois de novembre 2022 selon lequel il existe possiblement des fissures dans les murs, des ponts thermiques et selon qui il est nécessaire de procéder à l'isolation des murs par l'intérieur. Le cordiste, qui a dressé un rapport d'intervention le 29 novembre 2022, n'a certes constaté aucune humidité dans le logement, rien d'anormal en façade, sur le mur pignon en meulière, mais a remarqué que « le mur au droit des placards ne respire pas », qu'il faut que « les placards soient écartés du mur et qu'une isolation du mur soit effectuée car choc thermique présent, améliorer l’isolation et / ou la ventilation pour résoudre les désordres actuels ».

Par conséquent, il est suffisamment établi, même en l'absence d’expertise technique ou judiciaire, que le bailleur a manqué à son obligation de délivrance d'un logement décent, eu égard aux dispositions du décret n°2202-120 du 30 janvier 2002 susmentionnée.

Cette prolifération de moisissures au sein d'un appartement que Madame [K] [U] a pris à bail, en considération notamment de son standing, a causé un préjudice d'agrément à Madame [K] [U] qui a subi une dégradation de ses conditions de vie attestée certains témoins et la constance avec laquelle elle a dénoncé auprès de l'agence JOURDAN, les conditions de vie dans lesquelles elle a été amenée à vire pendant six mois.

Par conséquent, le manquement de la SARL PAULUS ARZH à son obligation de délivrance d'un logement décent justifie que soit allouée à Madame [K] [U] la somme de 3000 euros en réparation du préjudice subi.

Sur la demande d’indemnisation du préjudice découlant de l'absence de communication du diagnostic de performance énergétique (DPE)

L'article 3-3 de la loi du 6 juillet 1989 prévoit qu'un dossier de diagnostic technique, fourni par le bailleur, est annexé au contrat de location lors de sa signature ou de son renouvellement et comprend notamment le diagnostic de performance énergétique prévu à l'article L. 134-1 du code de la construction et de l'habitation ;

Toutefois, le diagnostic de performance énergétique n'a qu'une valeur informative et aucune sanction spécifique n'est prévue par les textes en cas de défaut de transmission de celui-ci.

Il appartient donc à celui qui se prévaut du non respect de cette obligation de faire la preuve du préjudice qui en a découlé pour espérer voir prospérer une action en responsabilité.

Or en l'espèce, Madame [K] [U] ne démontre pas le préjudice actuel, direct et certain qu'elle a subi de cette absence de transmission du DPE et se contente d'indiquer qu'un tel document aurait pu lui permettre d'être informée, le cas échéant, du caractère suffisant ou non de l'isolation de l'appartement et du caractère adéquat des systèmes d’aérations et de ventilation, ce que le diagnostic versé ne mentionne pas.

Par conséquent, elle sera déboutée de la demande qu'elle a formée de ce chef et qui, au surplus, n'est pas justifiée en son quantum.

Sur la demande d'indemnisation du préjudice matériel
S'agissant du préjudice matériel tenant à l'endommagement des vêtements et textiles, non sérieusement contestable eu égard à l'état de moisissures du placard constaté par commissaire de justice et aux photographies prises par Madame [K] [U] des vêtements portant trace également de moisissures et de taches, il sera indemnisé mais revu à de plus justes proportions compte-tenu de la difficulté à relier les factures produites aux photographies des vêtements endommagés.

La somme de 1 000 euros lui sera ainsi accordée, étant précisé que la SARL PAULUS ARZH ne rapporte pas la preuve de ce qu'elle allègue, à savoir que l'assureur de Madame [K] [U] l'aurait déjà indemnisée de ce préjudice.

Sur la demande de restitution du dépôt de garantie
Selon l’article 25-6 de la loi du 6 juillet 1989 applicable aux baux portant sur des appartements meublés, le montant du dépôt de garantie exigible par le bailleur est limité à deux mois de loyer en principal, par dérogation à l'article 22 de la même loi qui prévoit par ailleurs que celui-ci est restitué dans un délai maximal de deux mois à compter de la remise en main propre, ou par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, des clés au bailleur ou à son mandataire, déduction faite, le cas échéant, des sommes restant dues au bailleur et des sommes dont celui-ci pourrait être tenu, aux lieu et place du locataire, sous réserve qu'elles soient dûment justifiées. A cette fin, le locataire indique au bailleur ou à son mandataire, lors de la remise des clés, l'adresse de son nouveau domicile.
Il est restitué dans un délai maximal d'un mois à compter de la remise des clés par le locataire lorsque l'état des lieux de sortie est conforme à l'état des lieux d'entrée, déduction faite, le cas échéant, des sommes restant dues au bailleur et des sommes dont celui-ci pourrait être tenu, en lieu et place du locataire, sous réserve qu'elles soient dûment justifiées.
(...) »
A défaut de restitution dans les délais prévus, le dépôt de garantie restant dû au locataire est majoré d'une somme égale à 10 % du loyer mensuel en principal, pour chaque période mensuelle commencée en retard. Cette majoration n'est pas due lorsque l'origine du défaut de restitution dans les délais résulte de l'absence de transmission par le locataire de l'adresse de son nouveau domicile.

En l'espèce, Madame [K] [U] a versé à la SARL PAULUS ARZH une somme de 2 780 euros à titre de dépôt de garantie, correspondant à deux échéances de loyers.

Il n'est pas contesté par la SARL PAULUS ARZH qu'elle ne lui a pas restitué cette somme versée à l'entrée dans les lieux. La bailleresse indique en effet qu'elle fournit la preuve des dégradations commises dans l’appartement, lesquelles sont exclusivement imputables à Madame [K] [U].

Or la SARL PAULUS ARZH a déjà sollicité la condamnation de Madame [K] [U] au paiement de la somme de 5 104,58 euros à ce titre et en a été déboutée, faute pour elle de rapporter la preuve que ces dégradations, tenant à la présence d'humidité dans le logement et à celle de nuisibles, sont le fait de la locataire.

Par conséquent, elle n'est pas plus fondée à conserver le montant du dépôt de garantie et sera condamnée à e restituer à Madame [K] [U], outre la majoration de 10% du loyer initial hors charges de 1390 euros.

En l'absence d'actualisation de la demande de Madame [K] [U] au jour de l'audience, la SARL PAULUS ARZH sera condamnée à lui verser la somme de 3 336 euros au titre de la restitution du montant du dépôt de garantie majorée.

Sur la demande de délais de paiement

L'article 1343-5 du code civil dispose que le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.

En l'espèce, Madame [K] [U] est redevable de la somme de 9 441,14 euros à la SARL PAULUS ARZH qui lui doit, au total, la somme de 7 336 euros. Ainsi, le montant résiduel n'apparaît pas disproportionné par rapport aux ressources supposées de Madame [K] [U], compte-tenu de son emploi.

En outre, elle ne justifie pas sa demande de délais de paiement par de quelconques difficultés financières.

Par conséquent, elle sera déboutée de cette demande.

Sur les demandes accessoires

Chaque partie conservera la charge de ses dépens.

L'équité commande, en outre, que chaque partie conserve également à sa charge les frais irrépétibles engagés.

L'exécution provisoire des décisions de première instance est de droit et sera rappelée.

PAR CES MOTIFS

Le juge des contentieux de la protection statuant publiquement, par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,

CONDAMNE Madame [K] [U] et Monsieur [F] [B] solidairement à payer à la SARL PAULUS ARZH la somme de 9 441,44 euros au titre des loyers impayés, arrêtée au 04 octobre 2023,

DÉBOUTE la SARL PAULUS ARZH sa demande de condamnation solidaire de Madame [K] [U] et de Monsieur [F] [B] au titre des dégradations locatives,

CONDAMNE la SARL PAULUS ARZH à verser à Madame [K] [U] la somme de 3 000 euros en réparation de son préjudice d'agrément,

DÉBOUTE Madame [K] [U] de sa demande en réparation du préjudice causé par l'absence de communication du diagnostic de performance énergétique,

CONDAMNE la SARL PAULUS ARZH à verser à Madame [K] [U] la somme de 1000 euros en réparation de son préjudice matériel,

CONDAMNE la SARL PAULUS ARZH à verser à Madame [K] [U] la somme de 3 336 euros au titre de la restitution du montant du dépôt de garantie en ce compris la majoration de 10%,

DÉBOUTE Madame [K] [U] de sa demande de délais de paiement,

DÉBOUTE les parties des demandes respectives formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

DIT que chacune des parties conservera à sa charge les frais irrépétibles engagés par elles,

DIT que chacune des parties conservera à sa charge les dépens engagés par elles,

RAPPELLE que la présente décision est assortie de plein droit de l'exécution provisoire,

Ainsi signé par la juge et la greffière susnommées et mis à disposition des parties le 17 juin 2024

La greffièreLa juge


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp fond
Numéro d'arrêt : 23/07970
Date de la décision : 17/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 24/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-17;23.07970 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award