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13/06/2024 | FRANCE | N°21/01924

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 18° chambre 2ème section, 13 juin 2024, 21/01924


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] C.C.C.F.E. + C.C.C.
délivrées le :
à Me DE GAULLE (K0035)
C.C.C.
délivrée le :
à Me FUNKE (B1070)




18° chambre
2ème section


N° RG 21/01924

N° Portalis 352J-W-B7F-CTYUD

N° MINUTE : 1

Assignation du :
02 Février 2021









JUGEMENT
rendu le 13 Juin 2024


DEMANDERESSE

S.A.S. AXONE (RCS de Nanterre 538 571 506)
[Adresse 2]
[Localité 5]

représentée par Me Jean-François FUNKE, avocat au bar

reau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #B1070


DÉFENDERESSE

S.A.S. SURISNAE (RCS de Paris 841 522 303)
[Adresse 3]
[Localité 4]

représentée par Maître Louis DE GAULLE de la S.E.L.A.S. DE GAULLE ...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] C.C.C.F.E. + C.C.C.
délivrées le :
à Me DE GAULLE (K0035)
C.C.C.
délivrée le :
à Me FUNKE (B1070)

18° chambre
2ème section


N° RG 21/01924

N° Portalis 352J-W-B7F-CTYUD

N° MINUTE : 1

Assignation du :
02 Février 2021

JUGEMENT
rendu le 13 Juin 2024

DEMANDERESSE

S.A.S. AXONE (RCS de Nanterre 538 571 506)
[Adresse 2]
[Localité 5]

représentée par Me Jean-François FUNKE, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #B1070

DÉFENDERESSE

S.A.S. SURISNAE (RCS de Paris 841 522 303)
[Adresse 3]
[Localité 4]

représentée par Maître Louis DE GAULLE de la S.E.L.A.S. DE GAULLE FLEURANCE & ASSOCIÉS, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #K0035

Décision du 13 Juin 2024
18° chambre 2ème section
N° RG 21/01924 - N° Portalis 352J-W-B7F-CTYUD

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Lucie FONTANELLA, Vice-présidente
Maïa ESCRIVE, Vice-présidente
Cédric KOSSO-VANLATHEM, Juge

assistés de Henriette DURO, Greffier

DÉBATS

A l’audience du 18 Janvier 2024 tenue en audience publique avis .

Après clôture des débats, avis a été donné aux avocats que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 04 Avril 2024, prorogé au 30 Mai 2024 puis au 13 Juin 2024.

JUGEMENT

Rendu publiquement
Contradictoire
En premier ressort

Sous la rédaction de Maïa ESCRIVE

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé en date du 25 juin 2018, les sociétés IMMO EVOLUTIF, FRUCTIPIERRE et FRUCTI FONCIER ont consenti un bail commercial à la S.A.S. AXONE (ci-après la société AXONE) portant sur des locaux à usage exclusif de bureaux situés [Adresse 1] à [Localité 6] désignés comme suit :

"Local de bureaux situé au quatrième étage du bâtiment "jardin", d'une surface d'environ 480 m², quote-part de parties communes incluses et bénéficiant d'un accès privatif à deux terrasses de 150 m² et 127 m²,
Les locaux comprennent également 8 emplacements de stationnement intérieur, situés au 1er sous-sol, désignés lots 87, 88, 89, 90, 91, 92, 93, 94".

Le bail a été conclu pour une durée de dix années à compter du 6 août 2018 et moyennant le versement d'un loyer annuel de 125.600 euros hors taxes, hors charges et hors redevance RIE (Restaurant Inter-Entreprises) fixée quant à elle à 7.200 euros par an, hors taxes et hors charges.

Les bailleurs ont :
- consenti au preneur une franchise de 7,5 mois de loyer et 7,5 mois de redevance RIE à compter de la date de prise d'effet du bail, les charges, impôts, taxes et accessoires restant dus pendant cette période (article 27.3) ;
- accordé au preneur une mise à disposition anticipée des locaux à titre gratuit à compter du 27 juin 2018, alors que la prise d'effet du bail est fixée au 6 août 2018 ;
- accepté de financer partiellement la réalisation de travaux d'aménagement des locaux et de climatisation par le preneur à hauteur d'une somme forfaitaire globale de 96.000 euros hors taxes. Cette contribution financière devait se faire par remboursement de factures dûment acquittées à l'issue de l'achèvement des travaux (article 27.12.4).

Conformément au bail (article 27.12.2), un état des lieux d'entrée a été effectué le 27 juin 2018, au jour de la prise de possession des locaux par la société AXONE.

En décembre 2018, l'ensemble immobilier dont dépendent les locaux loués à la société AXONE a été cédé par les sociétés IMMO EVOLUTIF, FRUCTIPIERRE et FRUCTI FONCIER à la S.A.S. SURISNAE (ci-après la société SURISNAE) qui a confié la gestion de l'ensemble immobilier à la société IMMOBILIER GESTION SERVICES ET SOLUTIONS ("iGestion").

La société AXONE a dénoncé des nuisances telles que la panne fréquente des ascenseurs, des fuites et mauvaises odeurs dans les sanitaires, un dysfonctionnement du chauffage, de la buée sur des fenêtres.

La société SURISNAE a entrepris, à compter de septembre 2019, des travaux d'amélioration et de rénovation de l'ensemble immobilier décrits ainsi :

- création d'un espace de détente commun au 4ème étage, de salles de réunion mutualisées et d'une cafétéria au RDC ;
- mise à disposition d'une grande terrasse commune surplombant la Seine au 4ème étage ;
- rénovation du restaurant inter-entreprises (RIE), de la salle de sport et des vestiaires ;
- remplacement des ascenseurs ;
- rénovation de la façade de l'immeuble comprenant le remplacement des vitrages embués et des joints défectueux.

Par courrier recommandé du 31 janvier 2020 reçu le 4 février suivant, la société AXONE a dénoncé auprès du bailleur des nuisances liées aux travaux de rénovation de l'immeuble et à l'état des locaux (bruit insupportable, saleté des parties communes et des ascenseurs, pannes fréquentes des ascenseurs, inondation, écoulement de liquide de ragréage depuis le 5ème étage, panne d'éclairage dans les escaliers fréquente, fuite et buée sur les fenêtres, fuites et délabrement des sanitaires, dysfonctionnement du chauffage) et se plaignant de l'absence de résolution des problèmes, a indiqué arrêter le versement des loyers et charges dus.

Par un courrier en date du 19 février 2020, la société SURISNAE a répondu à la société AXONE qu'elle avait entrepris à sa charge exclusive des travaux "visant à améliorer à terme le cadre de vie des locataires" (comprenant notamment le remplacement des ascenseurs) et s'agissant des nuisances pouvant résulter des travaux, a invoqué l'article 5.1.2 du contrat de bail qui oblige le preneur à souffrir des travaux effectués par le bailleur même au-delà de 21 jours sans indemnisation.

Le 27 février 2020, la société SURISNAE a fait délivrer à la société AXONE un commandement de payer portant sur la somme de 33.764,72 euros au titre de la dette locative et du coût de l'acte et visant la clause résolutoire stipulée à l'article 20 du bail.

La société AXONE a procédé au paiement de la totalité de son impayé au cours de l'année 2020.

En parallèle, les parties ont entrepris des négociations pour la location de nouveaux locaux au 5ème étage, lesquelles n'ont finalement pas abouti.

Soutenant que les nuisances liées aux travaux perduraient encore en décembre 2020, par courrier recommandé daté du 7 décembre 2020 et reçu le 17 décembre suivant, la société AXONE a donné congé au bailleur "pour le 25 juin 2021".

Par acte du 2 février 2021, la société AXONE a fait assigner la société SURISNAE devant ce tribunal en indemnisation de ses troubles de jouissance et des nuisances.

Par courrier recommandé du 17 mars 2021, le bailleur a rappelé à la société AXONE les stipulations du bail applicables à la restitution des locaux, à savoir :

- la durée du bail, expirant à l'issue de la période triennale en cours, soit le 5 août 2021 à minuit (articles 27.2 et 27.12.1) ;
- l'obligation pour le preneur de restituer les locaux "dans un état neuf d'entretien, de propreté, de réparations locatives et en parfaite conformité avec les obligations issues du Bail", les travaux de rénovation lui incombant étant expressément visés (article 27.12.5) ;
- l'obligation pour le preneur, dans les six mois précédant la restitution des locaux, d'autoriser les visites des représentants du bailleur afin de procéder au chiffrage des travaux de remise en état et lui permettre de "faire établir des devis comportant le descriptif desdits travaux, ainsi que les temps de réalisation nécessaires" (article 27.12.5).

A la suite du rendez-vous de pré-état des lieux, qui s'est tenu le 2 juin 2021, le bailleur a fait établir un devis par la société OCELLIS chiffrant le montant des travaux de remise en état à la somme de 57.495,70 euros hors taxes. Ce devis a été adressé à la société AXONE par courriels des 12 et 15 juillet 2021.

Par courrier recommandé du 22 juillet 2021 (daté par erreur au 19 avril 2021), la société AXONE a contesté la nature et le montant des travaux à réaliser pour la remise en état des locaux.

Le 5 août 2021, un état des lieux de sortie a été contradictoirement établi par Maître [F] [B], huissier de justice, en présence de Monsieur [W] [N] représentant le bailleur et de Monsieur [V] [G] représentant la société AXONE.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 31 mars 2022, la société AXONE demande au tribunal de :

Vu les articles 1217, 1719, 1720, 1721, 1755, et 1170 du code civil,

- Déclarer son action en réparation recevable et bien fondée ;
- Condamner la société SURISNAE au paiement des sommes suivantes :
-200.000 euros "au titre du préjudice de jouissance",
-30.000 euros "à titre de dommages et intérêts",
-34.562,37 euros en restitution du dépôt de garantie,
-10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Débouter la société SURISNAE de l'intégralité de ses demandes reconventionnelles ;
- Dire n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire de la décision à intervenir ;
- Condamner la société SURISNAE aux entiers dépens.

A titre subsidiaire, si la société AXONE devait être condamnée à payer une quelconque somme au titre des frais de remise en état et de l'indemnité d'occupation assimilée à une clause pénale, elle demande de ramener ces sommes au montant du dépôt de garantie qui s'élève à la somme de 34.562,37 euros et d'écarter l'exécution provisoire de droit concernant cette condamnation.

Elle fonde ses demandes sur l'obligation de délivrance à laquelle le bailleur est tenu en application de l'article 1719 du code civil. Soutenant que les divers troubles subi ont affecté gravement le fonctionnement normal de l'activité de la société AXONE, elle sollicite des dommages intérêts sur le fondement de l'article 1217 du code civil. Sur leur quantum, elle expose que la première somme de 200.000 euros qu'elle sollicite est à mettre en corrélation avec le loyer annuel qu'elle réglait de 198.798,12 euros. S'agissant de la seconde somme de 30.000 euros, elle a vocation à réparer son préjudice résultant du fait que le bailleur ait tardé à remédier ou n'ait pas mis fin aux nuisances qu'elle dénonçait.

Elle fait valoir que la clause de souffrance insérée au contrat de bail connaît des limites jurisprudentielles notamment en cas d'impossibilité totale d'utiliser les lieux loués qui mérite une indemnisation à ce titre.

Elle s'oppose aux demandes reconventionnelles notamment parce qu'elle soutient avoir rendu les locaux en meilleur état que celui constaté lors de l'état des lieux d'entrée ; que le parfait état exigé dans le contrat ne correspond pas à une remise à neuf.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 30 mai 2022, la société SURISNAE demande au tribunal de :

Vu les articles 789 et 791 du code de procédure civile,
Vu l'assignation,
Vu le contrat de bail commercial du 25 juin 2018,

- Débouter la société AXONE de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;
- Donner acte à la société SURISNAE que la société AXONE a abandonné ses prétentions aux fins de désignation d'un expert et de consignation des loyers, charges et accessoires dus ;

A titre reconventionnel,

- Condamner la société AXONE à lui payer les sommes suivantes :
-57.495,70 euros hors taxes au titre des travaux de remise état des locaux à la suite de leur restitution par le preneur, assortie des intérêts au taux légal à compter du jugement à intervenir,
-une indemnité d'occupation égale à 29.387,12 euros hors taxes (correspondant au montant du dernier loyer trimestriel d'un montant de 32.688,51 euros en principal et de 1.873,87 euros RIE, majoré de 100 %, outre les charges et taxes et ce, pendant la durée de cinq semaines pour les travaux de remise en état), assortie des intérêts au taux légal à compter du jugement à intervenir,
-8.847,39 euros hors taxes, soit 10.616,87 euros TTC au titre du remboursement de la taxe foncière pour 2021, assortie des intérêts au taux légal à compter du jugement à intervenir;

En tout état de cause,

- Juger qu'elle est fondée à conserver le dépôt de garantie d'un montant de 34.562,37 euros au titre du paiement des sommes dues par la société AXONE ;
- Condamner la société AXONE à lui payer la somme de 10.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner la société AXONE aux entiers dépens de l'instance incluant les frais du commandement de payer délivré le 27 févier 2020 ;
- Ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir.

* * *

Ainsi que le permet l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux dernières conclusions des parties pour l'exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.

La clôture a été prononcée le 10 juin 2022. L'affaire a été appelée pour plaidoiries à l'audience collégiale du 18 janvier 2024 et mise en délibéré au 04 avril 2024 puis au 30 mai 2024 et prorogé à ce jour.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les demandes indemnitaires de la société AXONE

-Sur les obligations respectives des parties

L'article 1719 du code civil dispose que le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière, de délivrer la chose louée, de l'entretenir en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée et d'en faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail.

Il est rappelé que la responsabilité du bailleur ne peut être engagée s'agissant de vices apparus en cours de bail, que si informé de leur survenance, il n'a pas pris les dispositions pour y remédier.

L'article 1720 du code civil énonce que le bailleur est tenu de délivrer la chose en bon état de réparations de toute espèce. Il doit y faire, pendant la durée du bail, toutes les réparations qui peuvent devenir nécessaires, autres que les locatives.

Selon l'article 1724 du code civil, "si, durant le bail, la chose louée a besoin de réparations urgentes et qui ne puissent être différées jusqu'à sa fin, le preneur doit les souffrir, quelque incommodité qu'elles lui causent, et quoiqu'il soit privé, pendant qu'elles se font, d'une partie de la chose louée.
Mais, si ces réparations durent plus de vingt et un jours, le prix du bail sera diminué à proportion du temps et de la partie de la chose louée dont il aura été privé (...)."

Ces dispositions ne sont pas d'ordre public et les parties peuvent y déroger conventionnellement.

En l'espèce, les articles 3.1 et 7.1 du bail conclu entre les parties stipulent que le preneur prend les locaux dans l'état où ils se trouvent à son entrée dans les lieux.

L'état des lieux d'entrée réalisé le 27 juin 2018 mentionne que les locaux situés au 4ème étage n'ont pas été refaits, et notamment que le sol est en mauvais état, les sanitaires, en très mauvais état avec des travaux à prévoir, et que l'éclairage ne fonctionne pas.

Le contrat prévoit s'agissant de la répartition des travaux que :

Sont à la charge du preneur :

- Selon l'article 6.1.1 du bail, les travaux d'entretien et ceux de mise en conformité lorsqu'ils ne relèvent pas de l'article 606 du code civil. La clause stipule que :
"Le Preneur devra en tout temps, à ses frais et sous sa responsabilité :
- Maintenir en parfait état l'ensemble des Locaux, y réaliser tous travaux, réparations, réfections et remplacements dès qu'ils s'avéreront nécessaires,
- Entretenir à ses frais en parfait état de fonctionnement, de sécurité et de conformité aux normes applicables l'ensemble des Locaux ainsi que l'ensemble des installations et équipements spécifiques tels que notamment climatisation, ventilation, ascenseur, installations électriques, sanitaires, etc. existant dans les Locaux et procéder à leur remplacement si nécessaire. A cette fin, il souscrira à ses frais tous contrats d'entretien et s'engage à en fournir copie annuellement au Bailleur et, de manière générale, sur simple demande de celui-ci,
- Maintenir les vitrines, les fermetures, glaces, parquets, carrelages, boiseries, revêtements de sols et muraux, peintures, volets, vitreries, verrières, serrurerie, appareils, conduits et canalisations d'eau, de gaz, de chauffage ou autres, en parfait état d'entretien, d'étanchéité et de fonctionnement et procéder aux remplacements nécessaires,
- Procéder à tous travaux, réparations, réfections et remplacements de tout élément et de tout système, même dans son entier, qui ne pourrait être réparé, dès qu'ils s'avéreront nécessaires et pour quelque cause que ce soit, y compris s'ils sont nécessités par l'usage, la vétusté et la force majeure, et ce par dérogation à l'article 1755 du Code civil (...)".

Sont à la charge du bailleur :

- Selon l'article 5 et l'annexe 1 du bail, les grosses réparations et travaux énumérés à l'article 606 du code civil et les dépenses relatives aux travaux ayant pour objet de remédier à la vétusté ou de mettre en conformité avec la réglementation dès lors qu'ils relèvent des grosses réparations de l'article 606.

Si le bail comprend en annexe "un état prévisionnel des travaux que le Bailleur envisage de réaliser dans les trois années suivantes", il est précisé à l'article 5.1.2, que "le Bailleur aura la faculté discrétionnaire de réaliser les travaux mentionnés dans ledit état (...). Il est ainsi rappelé au Preneur que les états des travaux susmentionnés n'ont qu'une valeur informative. Le Preneur renonce donc d'ores et déjà à tout recours contre le Bailleur à ce titre".

Aux termes de l'article 11 du bail, "le Preneur renonce à tout recours en responsabilité ou réclamation contre le Bailleur et les mandataires du Bailleur chargés de la gestion de l'Ensemble Immobilier, pour les cas suivants :
(...)
- En cas d'irrégularités ou d'interruption, même prolongée, des ascenseurs, du service de l'eau, de l'électricité, du téléphone, de la climatisation, des groupes électrogènes, et tous systèmes automatiques d'accès et systèmes informatiques dépendant de l'Ensemble Immobilier. Par ailleurs, toute suppression d'un service collectif ou non, ne pourra donner lieu à aucune indemnisation ni réduction de loyer et/ou redevance RIE au bénéfice du Preneur.
Le Bailleur s'engage de son côté à faire toutes diligences pour faire rétablir le fonctionnement desdits équipements et la fourniture desdits fluides pour autant qu'il ait conservé la charge de la gestion desdits équipements ou soit titulaire des contrats de fourniture desdits fluides ;
(...)
- En cas de dégâts causés aux Locaux et/ou à tous éléments mobiliers s'y trouvant, par suite de fuites, d'infiltrations, d'humidité, remontées d'eau ou autres circonstances ;
(...)
- En cas de vice ou défaut de la chose louée, apparent ou caché, le Preneur renonçant particulièrement à se prévaloir des dispositions de l'article 1721 du code civil.
Le Preneur fera son affaire personnelle des cas ci-dessus et généralement de tous autres cas fortuits et imprévus, sauf son recours contre qui de droit en dehors du Bailleur".

En outre, l'article 5.1.2 du bail prévoit une clause dite de souffrance qui stipule que :
"Le Preneur devra souffrir et laisser faire sans pouvoir prétendre à aucune indemnité, ni diminution de loyer et/ou redevance RIE, tous travaux de réparation et d'amélioration en ce compris les travaux d'amélioration des performances environnementales que le Bailleur ou toute entité en charge du foncier (syndic, Président d'AFUL ou d'ASL) serait amené à faire exécuter dans les Locaux et/ou les Parties Communes de l'Ensemble Immobilier qu'elles qu'en soient la nature et la durée, cette dernière excédât-elle vingt et un jours, par dérogation à l'article 1724 du Code Civil.

Décision du 13 Juin 2024
18° chambre 2ème section
N° RG 21/01924 - N° Portalis 352J-W-B7F-CTYUD

Le Preneur devra par ailleurs laisser le Bailleur ou toute entité en charge du foncier faire toute modification des Parties Communes, ceci sans recours contre le Bailleur et sans baisse de loyer et/ou redevance RIE, ni indemnité. A cet égard, le Bailleur ou les propriétaires de l'Ensemble Immobilier, ou leurs substitués, conservent la faculté de réaliser toute construction, addition, surélévation, toutes modifications des accès et liaisons, toute modification ou extension des Parties Communes et privatives (à l'exception des Locaux) (...). Le Preneur déclare renoncer en conséquence au bénéfice des dispositions de l'article 1723 du Code civil.
(...)
Le Bailleur s'engage pour sa part à mettre tous les moyens en oeuvre pour gêner le moins possible l'activité du Preneur pendant les travaux (...)".

Enfin, et ainsi qu'il a été dit dans l'exposé du litige, le contrat prévoit une participation financière du bailleur aux travaux de rénovation entrepris par la société AXONE à son entrée dans les lieux.

-Sur les manquements à l'obligation de délivrance reprochés au bailleur par la société AXONE

* Les pannes d'ascenseurs récurrentes

La société AXONE se plaint d'un trouble de jouissance lié aux pannes récurrentes des ascenseurs depuis son entrée dans les lieux. Elle justifie avoir signalé au gestionnaire du bailleur par courrier électronique en date du 9 octobre 2018 une panne des deux ascenseurs exposant que le personnel doit se relayer pour "monter les colis des livreurs qui refusent de monter les quatre étages" et sollicitant que des mesures soient prises pour résoudre la situation, puis s'est plaint à nouveau d'une panne des deux ascenseurs les 2 mai 2019 et 19 août 2019. Elle expose que ce n'est que par courrier électronique du 6 février 2020 que le bailleur l'a informée d'un remplacement des ascenseurs dans le cadre des travaux d'aménagement du bâtiment.
La société AXONE soutient que depuis cette date d'autres pannes ont été signalées, notamment le jour du constat d'huissier effectué en juillet 2020 et à la suite de la grave inondation survenue en août 2020 précisant qu'à la date de sortie des lieux, seul un ascenseur fonctionnait correctement.

La société SURISNAE réplique que les clauses 6.1.1 et 11 du bail imposent au preneur l'entretien des ascenseurs et qu'aux termes du contrat, le locataire a renoncé à tout recours contre le bailleur en raison des dysfonctionnements de l'ascenseur ; qu'en contrepartie de l'état des locaux, le bailleur a consenti au preneur des avantages. Elle conclut que ces stipulations font obstacle à toute demande du locataire en raison du trouble de jouissance résultant du dysfonctionnement des ascenseurs ; qu'en tout état de cause, elle a été diligente et a pris les mesures nécessaires afin de réduire au maximum les nuisances occasionnées à son locataire.

* * *

En l'absence de tout élément probant sur les causes des pannes des ascenseurs, de la justification par la société AXONE de l'entretien des ascenseurs mis à sa charge en application des stipulations contractuelles susvisées, de l'article 11 du bail qui exclut toute action en responsabilité du bailleur en cas "d'interruption, même prolongée, des ascenseurs", aucun manquement du bailleur à son obligation de délivrance n'est démontré du fait des pannes répétées des ascenseurs dès lors que la société SURISNAE est devenue propriétaire de l'immeuble à compter du 29 novembre 2018 et justifie avoir mandaté une entreprise pour la réparation des ascenseurs en novembre 2019 puis avoir engagé des travaux de remplacement de ceux-ci en février 2020, avec diligence. Elle justifie également avoir pris en compte les besoins des locataires en organisant les travaux afin de permettre le fonctionnement d'un ascenseur sur deux par duplex.

* Sur l'état des sanitaires

La société AXONE soutient qu'aux termes du contrat de bail, le bailleur devait procéder à la rénovation totale des sanitaires situés au 4ème étage, ce qu'il n'a pas fait. Elle se plaint de mauvaises odeurs dans les sanitaires en raison de la panne des VMC qui n'ont été remises en fonctionnement qu'au début de l'année 2019, de fuites des canalisations d'évacuation et d'alimentation d'eau dans les toilettes, de la vétusté générale des toilettes.
Pour étayer ses allégations, la société AXONE produit un constat d'huissier du 25 février 2019.
Elle expose que chaque fois qu'un problème était résolu, un autre apparaissait et qu'elle a subi après les mauvaises odeurs et les fuites, des débordements des toilettes qui ont trempé les tapis des locaux qu'elle occupait, ce qu'elle a fait constater par un huissier le 5 novembre 2019.
Elle ajoute qu'en décembre 2019, une fuite de liquide de ragréage a eu lieu dans les toilettes des femmes, ce qu'elle a signalé au gestionnaire du bailleur le 27 décembre 2019.

La société SURISNAE oppose que le preneur est tenu contractuellement à l'entretien des locaux et qu'il n'est pas démontré que les nuisances dénoncées excèdent l'état de vétusté constaté lors de l'état des lieux d'entrée réalisé le 27 juin 2018. Par ailleurs, elle soutient avoir été toujours diligente.

* * *

L'état des lieux d'entrée réalisé le 27 juin 2018 mentionne effectivement que les sanitaires sont en très mauvais état avec des travaux à prévoir. La locataire a donc accepté l'état des sanitaires à son entrée dans les lieux, lesquels nécessitaient des travaux.
Force est de constater que la société AXONE ne démontre pas que l'état des sanitaires a évolué depuis l'état des lieux d'entrée, ni que les désordres dans les sanitaires ne relèvent pas de son obligation d'entretien.

De plus, si le "remplacement des descentes EP sanitaires" figurait dans l'état prévisionnel de travaux envisagés par le bailleur, le contrat de bail prévoit également que les travaux prévisionnels cités sont réalisés à la discrétion du bailleur (article 5.1.2), de sorte que la société AXONE ne justifie pas d'un engagement contractuel du bailleur de réaliser lesdits travaux.

Enfin, il ressort des pièces produites que si la société AXONE s'est plainte dès le 10 octobre 2018 auprès de l'ancien bailleur que "la VMC des sanitaires ne fonctionne pas et l'odeur nauséabonde qui y règne pose de gros problèmes d'hygiène et d'inconfort. Son fonctionnement est une obligation réglementaire !", elle reconnaît dans son courrier en date du 19 août 2019 que le système de recyclage de l'air a été remis en état début 2019. Elle admet également que les canalisations fuyardes ont été réparées. De même suite à des fuites dans les toilettes pour hommes signalées le 5 juin 2019, le gestionnaire du bailleur a répondu le même jour : "je suis demain sur site avec un plombier". Suite à une inondation dans les toilettes pour femmes ayant mouillé la moquette et étant malodorante signalée les 4 et 5 novembre 2019, le bailleur a également réagi avec diligence, le constat d'huissier établi le 5 novembre 2019 à la demande de la locataire permettant de relever qu'une affiche était apposée sur la porte des toilettes mentionnant : "ne pas utiliser jusqu'à réparation (intervention prévue le 5 novembre matin)". En outre, par courrier électronique en date du 28 novembre 2019, le gestionnaire du bailleur a informé la locataire des travaux entrepris, notamment le changement de toutes les canalisations du 3ème au 7ème étage. Enfin, le bailleur est intervenu sur l'urinoir en nettoyant le siphon, et la société a confirmé le 30 avril 2021 le bon écoulement de cette installation.

Par conséquent, le bailleur justifie avoir effectué avec diligence les travaux à sa charge permettant à défaut d'élément établissant le contraire, de mettre fin aux fuites dans les toilettes et aucun manquement à ses obligations contractuelles n'est donc caractérisé.

* Sur les vitrages non étanches, systématiquement recouverts de buée et les infiltrations

La société AXONE dénonce avoir subi un phénomène de formation récurrente de buée sur les parties vitrées de ses locaux, obstruant ainsi le champ de vision vers l'extérieur alors que l'intérêt des locaux était de disposer d'une vue, avoir constaté que le double vitrage des fenêtres n'était pas étanche et que des infiltrations se produisaient chaque fois qu'il pleuvait, ce qu'elle a fait constater par un huissier.
Elle précise avoir alerté à plusieurs reprises le bailleur qui n'a pas résolu le problème.
La société AXONE dénonce en outre entre décembre 2019 et janvier 2020, une inondation dans ses locaux en raison de l'oubli de fermeture d'une trappe de désenfumage par les ouvriers.

La société SURISNAE répond que la présence de condensation sur certaines vitres a été relevée lors de l'état des lieux d'entrée ; qu'elle a demandé au gestionnaire de l'immeuble de procéder à un appel d'offres pour le remplacement des vitrages et qu'elle a informé sa locataire de ce que les travaux seraient réalisés en même temps que ceux sur la façade dans la mesure où ils nécessitaient la mise en place d'échafaudages ; qu'il s'est avéré par la suite que des infiltrations étaient liées au défaut d'entretien de la terrasse par la locataire et aux travaux de climatisation réalisés par celle-ci lors de son entrée dans les lieux, et qu'elle est donc seule responsable des troubles qu'elle dénonce.

* * *

S'agissant des infiltrations dans les locaux, il est exact comme le rappelle la société AXONE, que le bailleur est tenu de réaliser les travaux nécessaires pour mettre fin aux inondations lorsqu'il a été informé de leur existence ; que ce n'est qu'à partir du moment où il est mis en demeure de faire cesser le trouble et qu'il ne fait aucune diligence pour y remédier, qu'il peut être condamné à prendre en charge le préjudice subi du fait dudit trouble.

Il ressort des pièces produites que la société AXONE a dénoncé le 4 juin 2019 "une pénétration d'eau dans nos locaux" à l'occasion d'une forte pluie et le gestionnaire a répondu le même jour : "je passerai ce jeudi matin avec un plombier".
La locataire a dénoncé une nouvelle infiltration le 6 août 2019 puis a adressé un courrier au gestionnaire du bailleur le 19 août 2019.

Par courrier électronique en date du 28 novembre 2019, le gestionnaire du bailleur a informé la locataire que tous les repérages avaient été faits et qu'un retour des entreprises pour chiffrage et délai d'intervention était attendu d'ici deux semaines.

Par la suite le bailleur a informé sa locataire qu'en raison de la crise sanitaire, les travaux ne pourraient être réalisés avant le 2ème trimestre 2020 et les travaux ont été effectivement réalisés durant l'automne 2020. Il n'est pas contesté qu'ils ont mis fin à la buée sur les fenêtres, de sorte qu'aucun manquement du bailleur n'est établi.

La société AXONE soutient que ces travaux n'ont eu aucune efficacité quant aux infiltrations puisque dans son constat du 21 décembre 2020, l'huissier de justice qu'elle avait mandaté a constaté au niveau des vitrages une "moquette totalement imprégnée d'eau, détrempée" et un risque compte tenu de la présence de câbles électriques, d'ordinateurs et de différents relais et équipements informatiques. Pour autant, elle ne justifie pas avoir alors alerté le bailleur, de sorte qu'elle ne peut lui reprocher de manquement à ses obligations.

La société AXONE a écrit au bailleur par courrier en date du 14 septembre 2021 pour dénoncer son inaction. Il est fait référence dans ce courrier à l'inefficacité des interventions notamment du nettoyage de la dalle située sous la terrasse mi-juin 2021 et à une nouvelle inondation dénoncée au gestionnaire du bailleur par courriel du 22 juin 2021.

Or, ce courrier est postérieur au départ des lieux de la locataire, de sorte qu'il ne peut établir un manquement du bailleur à son obligations de réaliser les travaux remédiant aux désordres qui lui ont été dénoncés.

* Sur le dysfonctionnement des dispositifs de chauffage

La société AXONE dénonce des problèmes de chauffage depuis son entrée dans les locaux, et l'absence de possibilité de régler la température.

Elle ne justifie cependant d'aucune plainte avant le 15 novembre 2019. Or, par courrier électronique en date du 28 novembre 2019, le gestionnaire du bailleur a informé la locataire des travaux entrepris, notamment la purge de tous les radiateurs le 18 novembre et en parallèle échanger "avec Vinci afin de régler définitivement les problèmes de chauffage dans l'immeuble".

La société AXONE ne justifie pas avoir repris contact avec son bailleur pour le dysfonctionnement du chauffage avant son courrier du 31 janvier 2020 dans lequel elle indique : "les radiateurs ne chauffent pas et certaines pièces de passage, notamment la salle de repos qui donne sur la terrasse, restent en permanence froides".

Par un courrier en date du 19 février 2020, la société SURISNAE a répondu : "à réception de votre courrier, la société iGestion a sollicité Vinci Facilities pour déterminer l'origine de ces éventuels dysfonctionnements. D'après ce prestataire, il serait nécessaire de remplacer une dizaine de flexibles et vannes sur vos unités terminales. Nous avons d'ores et déjà demandé au mainteneur de l'immeuble de chiffrer le coût de cette intervention".

Postérieurement, la société AXONE ne justifie d'aucune plainte au sujet du chauffage, de sorte qu'elle n'établit ni que le bailleur n'a pas été diligent, ni qu'en tout état de cause, les travaux à réaliser étaient à la charge du bailleur compte tenu des stipulations contractuelles liant les parties. Dès lors, aucun manquement de ce chef n'est caractérisé.

* Sur les pannes d'éclairage et les coupures d'électricité

La société AXONE expose avoir subi des pannes d'éclairages fréquents de nature à impacter de manière importante son activité.
Elle produit :
- des courriers électroniques en date du 8 février 2019 dont il ressort que la moitié du plateau n'a plus d'éclairage et que la société VINCI FACILITIES est intervenue, celle-ci écrivant que le disjoncteur est tombé en panne pour un défaut d'isolement mais que "ce dernier ne disjoncte plus, il est impossible pour moi de déterminer quel équipement est en défaut. Il faut attendre que l'équipement soit complètement HS pour pouvoir l'isoler",
- une coupure de tous les appareils électriques de l'immeuble le 13 décembre 2019 dont elle indique elle-même qu'elle est vraisemblablement due aux travaux alors en cours dans l'immeuble.

Deux pannes d'électricité dont l'une dans un contexte de travaux d'ampleur en cours dans l'immeuble ne peuvent suffire à caractériser un manquement du bailleur à son obligation de délivrance, d'autant que la société SURISNAE justifie des diligences effectuées à chaque réclamation de sa locataire.

* Sur les infestations de rongeurs

Par courrier en date du 10 octobre 2018, la société AXONE a dénoncé auprès de l'ancien bailleur que "l'immeuble a besoin d'une opération de dératisation. Nous retrouvons régulièrement des déjections de rats dans les sanitaires du 4ème étage". Elle ne justifie pas de plainte postérieure à ce sujet.

Le gestionnaire de la société SURISNAE a annoncé des opérations de désourisation des parties communes de l'immeuble en novembre 2019, décembre 2019 ainsi qu'en janvier 2020, rappelant qu'il appartenait à chaque locataire de faire son affaire personnelle du traitement de ses locaux.

La société AXONE qui ne justifie pas du traitement de ses locaux, et indique dans son courriel du 4 novembre 2019 "pouvez-vous nous indiquer quelles parties de l'immeuble sont susceptibles de "loger" des souris ? Nous n'avons pour l'instant fait aucune observation dans ce sens au 4ème étage...", est défaillante dans l’administration de la preuve d'un manquement du bailleur et d'un préjudice.

* Sur la coupure d'eau et l'entretien de la terrasse

Par courrier électronique en date du 26 novembre 2018, la société AXONE a écrit au gestionnaire de l'ancien bailleur que "le robinet d'eau de la terrasse principale a été coupé car il fuyait mais rien n'a été fait pour le réparer". Elle a dénoncé une nouvelle coupure d'eau depuis une semaine par courrier électronique du 22 août 2019, toujours persistante en novembre 2019 et constatée par constat d'huissier en date du 29 juillet 2020.
Elle incrimine également le descellement de la rambarde du garde-corps sur toute la longueur de la terrasse, ce qui présente un risque important, constaté en février 2019.

La société SURISNAE répond qu'à la suite d'infiltrations d'eau constatées à l'étage du dessous refait à neuf (3ème étage), la société IMPER ETANCHÉITÉ, spécialisée en entretien et en réfection d'étanchéité de toits et terrasses, a été mandatée et a indiqué que les infiltrations étaient dues à des difficultés d'écoulement des eaux pluviales liées à une accumulation de déchets végétaux entre les dalles sur plot et le complexe étanche sur la terrasse des locaux donnés à bail à la société AXONE, soit un défaut d'entretien de la part de la locataire. Elle explique que son gestionnaire a été contraint de mandater une société pour dégager les végétaux afin d'éviter que les infiltrations d'eau ne détériorent l'étage du dessous refait à neuf ; qu'elle a demandé à plusieurs reprises à la société AXONE de lui transmettre la copie du contrat d'entretien des terrasses, sa souscription étant une condition essentielle du bail (article 6.1.1.), en vain. Elle en conclut que le preneur est particulièrement mal fondé à invoquer des troubles de jouissance à ce titre, dès lors qu'à supposer qu'ils existent, ils résultent de sa propre négligence fautive, susceptible de créer des dommages aux étages inférieurs, récemment refaits à neuf.
S'agissant des garde-corps des terrasses, la société SURISNAE expose qu'ils ont été déposés en janvier 2021 dans le cadre des travaux réalisés sur l'immeuble ; que la société AXONE a été informée le 18 janvier 2021 que les portes d'accès à la terrasse avaient été balisées par du ruban de chantier, afin qu'elles ne soient pas utilisées, pour la protection des salariés, pendant la durée de la rénovation de la façade. Elle précise que les garde-corps ont été réinstallés le 20 avril 2021 ; que leur présence a été constatée lors de l'état des lieux de sortie ; qu'après avoir soutenu que les garde-corps auraient été absents "toute la durée de la location", la société AXONE prétend désormais que les garde-corps ne répondraient pas aux normes de sécurité, sans le démontrer, le constat d'huissier étant à cet égard insuffisant. Elle conclut donc à son absence de faute, compte tenu de la clause de souffrance insérée dans le bail et de l'absence de preuve du défaut de conformité allégué. Elle ajoute au surplus qu'aucun préjudice n'est caractérisé, l'impossibilité d'accès temporaire à des terrasses d'agrément ne rendant pas les locaux impropres à leur destination de bureaux.

* * *

S'agissant des garde-corps, l'état des lieux d'entrée permet d'établir leur présence, contrairement à ce qu'affirme la société AXONE. Leur présence est constatée sur la photographie transmise par la locataire le 13 janvier 2021 (pièce 17 du défendeur). Il n'est pas contesté qu'ils ont été déposés dans le cadre des travaux de façade du bâtiment initiés par la bailleresse et réinstallés le 20 avril 2021, de sorte qu'en application de la clause de souffrance insérée dans le bail, la société AXONE est mal fondée à se prévaloir d'un préjudice. Elle ne produit aucun élément probant, un huissier de justice n'étant pas un technicien du bâtiment pour établir que ces garde-corps ne seraient pas conformes.

Quant aux coupures d'eau sur la terrasse dont la ou les causes ne sont pas établies, aux termes de l'article 11 du bail, "le Preneur renonce à tout recours en responsabilité ou réclamation contre le Bailleur et les mandataires du Bailleur chargés de la gestion de l'Ensemble Immobilier (..) En cas d'irrégularités ou d'interruption, même prolongée, (...) du service de l'eau", de sorte que la société AXONE n'est pas fondée à se prévaloir d'un manquement du bailleur à ce titre.

* Le trouble de jouissance résultant des travaux de rénovation réalisés par le bailleur

La société AXONE, qui se plaint de l'état de l'immeuble et des locaux, reproche également au bailleur d'avoir entrepris des travaux de rénovation à compter de septembre 2019 qui n'étaient toujours pas terminés lors de son départ en juillet 2021. Elle soutient que ces travaux lui ont causé des troubles de jouissance et ont perturbé son activité.
Elle conclut que la clause de souffrance incluse dans le bail ne permet pas au bailleur de s'exonérer de toute responsabilité notamment lorsqu'il a commis une faute et en l'espèce compte tenu de l'importance du trouble de jouissance subi.

S'agissant de la société SURISNAE, elle ne conteste pas que les travaux ont pu générer des nuisances, mais estime qu'elles ne sont pas anormales et qu'elle a tout mis en oeuvre pour limiter le trouble de jouissance de sa locataire. Elle invoque également la clause de souffrance prévue par l'article 5.1.2 du contrat de bail.

* * *

La clause de souffrance a été rappelée dans le paragraphe relatif aux obligations respectives des parties.

La licéité de la clause dite de souffrance n'est pas discutée, de sorte qu'il est de principe que le preneur doit supporter sans indemnité les travaux nécessaires, même ceux qui excèdent 21 jours.

Il appartient à la société AXONE qui sollicite, nonobstant l'existence de la clause de souffrance, l'indemnisation du préjudice subi pendant les travaux de rénovation de l'immeuble d'établir que le bailleur lui a, par son fait, occasionné une gêne anormale excédant les prévisions de la clause de souffrance.

Or, au titre du trouble de jouissance anormal dont elle se plaint, la société AXONE dénonce :

- des bruits de percement de 8 à 16 heures, empêchant ses salariés de s'entendre ou de communiquer au téléphone avec des clients, générant des absences de ses employés et ayant terni l'image de la société auprès de sa clientèle ; qu'alors que le bailleur s'était engagé à les réduire sensiblement à compter de décembre 2019, ceux-ci ont persisté jusqu'en février 2020,
Décision du 13 Juin 2024
18° chambre 2ème section
N° RG 21/01924 - N° Portalis 352J-W-B7F-CTYUD

- des traces de pas et de peinture sur la moquette de son couloir car les ouvriers utilisaient ses sanitaires,
- les coupures électriques, notamment à la suite d'un dégât des eaux en août 2020,
- l'usage abusif du signal d'alarme par les ouvriers qui l'ont actionné à trois reprises dans la même journée, en octobre 2019,
- la dégradation importante de l'état de sa terrasse lié aux travaux de rénovation et signalée en octobre 2020,
- l'obstruction des places de parking par la présence d'une barre amovible et la présence de câbles suspendus au-dessus des emplacements arguant d'un procès-verbal de constat d'huissier établi le 14 avril 2021, mentionnant : "Dans les parkings, une barrière a été installée au droit de la place n°88, empêchant le stationnement d'une voiture à cet emplacement, seul un véhicule deux roues pouvant y être garé", ce qui est le cas, "le sol est jonché de fragments de flocage en provenance du plafond" et au niveau des places 91 et 92, en partie haute, des câbles électriques pendent et "à l'état d'attente".

Or, aucun de ces éléments n'établit un trouble de jouissance anormal, dès lors qu'il ressort des seules pièces versées au débat que les nuisances sonores ont été limitées dans le temps et que les autres nuisances dénoncées, inhérentes à tous travaux, ont été ponctuelles et ont donné lieu avec diligence à des rappels aux ouvriers de la part de la bailleresse. Celle-ci justifie en outre avoir pris des précautions pour favoriser l'information de ses locataires en mandatant une entreprise chargée d'effectuer l'interface et de relayer les informations du chantier ou les plaintes des locataires. Dès lors, aucun manquement n'est caractérisé.

Faute de tout manquement du bailleur établi, la société AXONE est déboutée de ses deux demandes de dommages-intérêts.

Sur les demandes reconventionnelles de la société SURISNAE

-Au titre du remboursement de la taxe foncière 2021

Le bail conclu entre les parties met à la charge du preneur la taxe foncière au titre des locaux (article 18.4.1.2 et annexe 2).

La demande est justifiée par la production de l'avis de taxes foncières pour 2021 et de la facture adressée à la société AXONE le 5 octobre 2021 pour un montant de 8.847,39 hors taxes soit 10.616,87 euros TTC correspondant à la taxe foncière 2021 et n'est au demeurant pas spécialement contestée par la société AXONE.

La société AXONE sera donc condamnée à verser à la société SURISNAE la somme de 10.616,87 euros TTC au titre du remboursement de la taxe foncière pour 2021, assortie des intérêts au taux légal à compter du jugement à intervenir.

-Au titre des travaux de remise en état

Aux termes de l'article 27.12.5 intitulé "Restitution des Locaux" du bail, les parties sont convenues qu’"entendant déroger à l'article 1755 du Code Civil, le preneur devra rendre les Locaux dans un état d'entretien, de propreté et de réparations locatives qui dépendra de la durée d'occupation desdits locaux", distinguant l'hypothèse d'un congé délivré par le preneur à l'expiration de la première période triennale du bail de celle d'un congé délivré ultérieurement.

En l'espèce, la société AXONE a délivré congé à l'expiration de sa première période triennale, de sorte que selon le bail, elle est tenue de "restituer les Locaux en état neuf d'entretien, de propreté, de réparations locatives et en parfaite conformité avec les obligations issues du Bail.
En outre, le Preneur restituera les locaux dans un état neuf après les avoir curés, rendus libres de tout mobilier, agencement, câblage et cloisonnement, même ayant fait accession au Bailleur et mis aux normes électriques. Il est convenu que le Preneur devra également réaliser les travaux de rénovation de la moquette, des faux plafonds et de la peinture en utilisant les produits des marques et gammes suivantes :
- Faux plafonds de marque AMSTRONG gamme PERLA OP 0.95 ou équivalent ;
- Dalle de moquette de marque DESSOS gamme STRATOS ou équivalent ;
- Peinture de marque TOLLENS gamme SATINEE et de finition A ou équivalent".

La clause prévoit que trois mois avant l'expiration du bail, un pré-état des lieux est établi comportant le relevé des réparations à effectuer et incombant au preneur ; que les parties disposent d'un délai de 5 semaines après communication des devis par le bailleur pour s'entendre.

Contrairement à ce que soutient la société AXONE, elle est tenue contractuellement de restituer les locaux à l'état neuf, et non pas seulement en bon état ou en meilleur état que lors de l'entrée dans les lieux.

Par ailleurs, l'article 27.12.2 du bail précise que pour l'application de l'article Restitution des locaux, il est convenu que l'état initial des locaux correspondra à l'état des lieux d'entrée initial et non celui réalisé après les travaux d'aménagement de la société AXONE, qui ne semble pas avoir été réalisés.

Le contenu de ces clauses a été expressément rappelé par la société SURISNAE à la société AXONE par courrier en date du 17 mars 2021. De plus, une visite des locaux a été effectuée préalablement à l'état des lieux de sortie le 2 juin 2021 afin de chiffrer les travaux de remise en état.

Aux termes du constat d'état des lieux de sortie contradictoire, il apparaît que :
- le curage des locaux n'a pas été effectué et que notamment les cloisons amovibles n'ont pas été déposées ;
- les faux plafonds, moquette et murs n'ont pas été repeints ou remplacés.

La société SURISNAE a fait établir un devis par la société OCELLIS, chiffrant les travaux de remise en état à la somme de 57.495,70 euros hors taxes, qu'elle a transmis à la société AXONE dès le 12 juillet 2021.

L'argument de la société AXONE selon lequel elle a sollicité des devis concurrents moins chers (23.736,78 euros hors taxes et 19.218,14 euros hors taxes) et que la somme réclamée ne serait dès lors pas justifiée, est inopérant dans la mesure où il lui appartenait, si tel était le cas, de financer les travaux de remise en état sur la base du devis de son choix.

En revanche, il sera fait droit à sa demande de retrancher du devis les postes ne correspondant pas au curage et à la remise en état à neuf prévus contractuellement, soit :
- fourniture et pose de BAES (Blocs autonomes d'éclairage de sécurité) à drapeaux selon nouvelle implantation : 925 €,
- remaniement et modification des allumages existants : 1.450 €,
- lessivage des châssis aluminium en façade : 1.470 €,
- réalisation de profils en tôle pour finition sur les fenêtres : 4.515 €.

La société AXONE sera donc condamnée à payer à la société SURISNAE la somme de 49.135,70 euros hors taxes (57.495,70 € - 925 € - 1.450 € - 1.470 € - 4.515 €) au titre des travaux de la remise en état des locaux, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision.

-Au titre de l'indemnité d'occupation pendant les travaux de remise en état

L'article 27.12.5 du bail prévoit que le preneur s'engage à restituer les locaux après complète réalisation des travaux ; qu'il "pourra encore restituer les Locaux en l'état, à charge pour le Bailleur de faire lui-même les travaux définis, aux frais du Preneur, qui devra alors payer une indemnité d'occupation pendant le temps nécessaire à leur réalisation, y compris au-delà de la date de fin du Bail et sur une période ne dépassant pas deux ans, sur la base du dernier loyer contractuel facturé, majoré de 100 %, charges et taxes en sus".

La société SURISNAE expose que la société qui a émis le devis évalue la durée des travaux de remise en état à 5 semaines et a transmis un planning détaillé. Elle demande le paiement au titre de la clause contractuelle précitée de la somme de 29.387,12 euros hors taxes calculée ainsi :
- Montant annuel du loyer hors taxes au jour de la fin du bail : 138.249,52 euros,
- Montant annuel de la provision sur charges hors taxes au jour de la fin du bail : 29.966,67 euros,
- Majoration applicable sur le loyer : 100 %
- Durée de l'occupation due à la remise en état : 5 x 7 = 35 jours
Soit [(5 x 7) / 365] x [(138 249,52 x (1 + 100%)) + 29 966,67] = 29.387,12.

La société AXONE sollicite le rejet de cette demande. Elle fait valoir que la clause s'analyse comme une clause pénale excessive, qui doit être réduite à 0 en application de l'article 1231-5 du code civil. Elle soutient que le planning n'est pas sérieux, que la société SURISNAE ne justifie d'aucun préjudice dès lors que la société AXONE est partie depuis 2021 et qu'il n'est pas justifié de la réalisation des travaux ni de l'absence de relocation des locaux, qu'elle a réalisé des travaux d'aménagement importants lors de son entrée dans les lieux et les a restitués en bon état.

Compte tenu du planning communiqué par l'entreprise de travaux, des travaux de remise en état qui n'ont pas été mis à la charge de la société AXONE, le tribunal peut raisonnablement évaluer la durée des travaux de remise en état à un mois.

Le contrat faisant la loi des parties, il n'est pas possible comme le demande la société AXONE de ne pas faire application de la clause contractuelle qui prévoit de manière claire et précise une indemnité d'immobilisation pendant la durée des travaux de remise en état, qu'il lui appartenait de réaliser avant son départ des lieux.

En revanche, la majoration de cette indemnité d'immobilisation prévue par le contrat de bail s'analyse en une clause pénale qui apparaît manifestement excessive en l'absence de démonstration d'un préjudice pour la bailleresse excédant l'impossibilité de relouer les locaux. Elle sera, au vu des éléments du dossier, ramenée à 10 %.

L'indemnité d'immobilisation due par la société AXONE à la société SURISNAE sera donc fixée à la somme : [(5 x 7) / 365] x [(138 249,52 +10%) + 29 966,67] = 17.743,35 euros. Et, la société AXONE sera condamnée à son paiement, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision.

Sur le dépôt de garantie

La société SURISNAE est fondée à conserver le dépôt de garantie d'un montant de 34.562,37 euros qui viendra en déduction des sommes dues par la société AXONE.

La demande de restitution du dépôt de garantie formée par la société AXONE sera donc rejetée.

Sur les demandes accessoires

Succombant, la société AXONE est condamnée aux dépens de la présente instance, étant précisé que les dépens sont définis par l'article 695 du code de procédure civile et qu'il n'est pas justifié du lien entre le coût du commandement de payer délivré le 27 février 2020 et la présente instance, de sorte qu'il ne sera pas compris dans les dépens.

La société AXONE sera condamnée à verser à la société SURISNAE une somme qu'il est équitable de fixer à 5.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Elle sera corrélativement déboutée de sa demande de ce chef.

Enfin aucun motif ne conduit à écarter l'exécution provisoire de droit.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et rendu en premier ressort,

DÉBOUTE la S.A.S. AXONE de toutes ses demandes,

CONDAMNE la S.A.S. AXONE à verser à la S.A.S. SURISNAE la somme de 10.616,87 euros TTC (dix mille six cent seize euros et quatre-vingt-sept centimes) au titre du remboursement de la taxe foncière pour 2021, assortie des intérêts au taux légal à compter du présent jugement,

CONDAMNE la S.A.S. AXONE à verser à la S.A.S. SURISNAE la somme de 49.135,70 euros hors taxes (quarante-neuf mille cent trente-cinq euros et soixante-dix centimes) au titre des travaux de la remise en état des locaux, assortie des intérêts au taux légal à compter du présent jugement,

CONDAMNE la S.A.S. AXONE à verser à la S.A.S. SURISNAE la somme de 17.743,35 euros (dix-sept mille sept cent quarante-trois euros et trente-cinq centimes) au titre de l'indemnité d'immobilisation pendant les travaux de remise en état, assortie des intérêts au taux légal à compter du présent jugement,

AUTORISE la S.A.S. SURISNAE à conserver le dépôt de garantie d'un montant de 34.562,37 euros (trente-quatre mille cinq cent soixante-deux euros et trente-sept centimes) qui viendra en déduction des sommes dues par la S.A.S. AXONE,

CONDAMNE la S.A.S. AXONE à verser à la S.A.S. SURISNAE la somme de 5.000 (cinq mille) euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la S.A.S. AXONE aux dépens, qui ne comprennent le coût du commandement de payer délivré le 27 février 2020,

Dit n'y avoir lieu d'écarter l'exécution provisoire de la présente décision.

Fait et jugé à Paris le 13 Juin 2024

Le GreffierLe Président
Henriette DUROLucie FONTANELLA


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 18° chambre 2ème section
Numéro d'arrêt : 21/01924
Date de la décision : 13/06/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 22/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-13;21.01924 ?
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