La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/06/2024 | FRANCE | N°23/04085

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 19ème chambre civile, 11 juin 2024, 23/04085


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

19ème chambre civile

N° RG 23/04085

N° MINUTE :

Assignation du :
10, 13 et 15 Mars 2023

CONDAMNE

GCHARLES



JUGEMENT
rendu le 11 Juin 2024
DEMANDEURS

Madame [K] [E] épouse [F]
[Adresse 1]
[Localité 8]

ET

Monsieur [X] [F]
[Adresse 1]
[Localité 8]

Représentés par Maître Vanessa BRANDONE de la SELARL Jehanne COLLARD et associés, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #L0306

DÉFENDERESSES

L’ASSURANCE MUTUELLE DES MOTARDS
[Adres

se 4]
[Localité 5]

Représentée par Maître Jean-Denis GALDOS DEL CARPIO de la SELARL GALDOS & BELLON, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #R0056

AG2R PREVOYANCE venant aux...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

19ème chambre civile

N° RG 23/04085

N° MINUTE :

Assignation du :
10, 13 et 15 Mars 2023

CONDAMNE

GCHARLES

JUGEMENT
rendu le 11 Juin 2024
DEMANDEURS

Madame [K] [E] épouse [F]
[Adresse 1]
[Localité 8]

ET

Monsieur [X] [F]
[Adresse 1]
[Localité 8]

Représentés par Maître Vanessa BRANDONE de la SELARL Jehanne COLLARD et associés, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #L0306

DÉFENDERESSES

L’ASSURANCE MUTUELLE DES MOTARDS
[Adresse 4]
[Localité 5]

Représentée par Maître Jean-Denis GALDOS DEL CARPIO de la SELARL GALDOS & BELLON, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #R0056

AG2R PREVOYANCE venant aux droits et obligations de la mutuelle VIA SANTE
[Adresse 2]
[Localité 10]

Non représentée

Le PÔLE NATIONAL RECOURS CONTRE TIERS DES TRAVAILLEURS INDEPENDANTS DU PUY DE DOME (la CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DU PUY DE DOME)
Service Contentieux
[Adresse 6]
[Localité 9]
Expéditions
exécutoires
délivrées le :

Non représenté

Décision du 11 Juin 2024
19ème chambre civile
RG 23/04085

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Monsieur Pascal LE LUONG, Premier Vice-Président
Madame Géraldine CHARLES, Première Vice-Présidente adjointe
Monsieur Maurice RICHARD, Magistrat honoraire

Assistés de Madame Erell GUILLOUËT, Greffière, lors des débats et au jour de la mise à disposition au greffe.

DEBATS

A l’audience du 19 Mars 2024 présidée par Monsieur Pascal LE LUONG tenue en audience publique, avis a été donné aux parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 28 Mai 2024. Le 28 Mai 2024, avis a été donné aux avocats que le délibéré serait prorogé au 11 Juin 2024.

JUGEMENT

- Réputé contradictoire
- En premier ressort
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

EXPOSÉ DU LITIGE

Madame [K] [E] épouse [F], née le [Date naissance 7] 1962, a été victime, le 17 mars 2018 à [Localité 11], alors qu’elle traversait la chaussée sur un passage piéton, d’un accident de la circulation dans lequel est impliqué un véhicule 2 roues, assuré auprès de l’Assurance Mutuelle des Motards.

Le droit à indemnisation de Madame [K] [E] épouse [F], en sa qualité de piéton, sur son trajet-travail, est entier et n'est pas contesté par l’assureur qui a retenu sa garantie.

Le bilan lésionnel a mis en évidence des séquelles orthopédiques et dentaires :
-un traumatisme craniofacial avec perte de connaissance initiale sans lésion intracérébrale avec avulsion des dents 21 et 22
-une fracture de la styloïde radiale et de la base des troisième et quatrième métacarpiens immobilisées par manchette plâtrée
-une fracture du sternum
-une fracture ouverte de la diaphyse fémorale gauche déplacée traitée par enclouage centromédullaire verrouillé
-une fracture de la malléole interne de la cheville gauche ostéosynthésée par vis et immobilisées par botte plâtrée durant six semaines
-un syndrome anxiodépressif réactionnel sous traitement antidépresseur.

Madame [K] [E] épouse [F] a été hospitalisée jusqu’au 3 avril 2018 puis transférée en centre de rééducation à [Localité 13] où elle réside. Elle a réintégré son domicile à partir du 31 août 2018.
Elle a subi plusieurs hospitalisations postérieurement :
- du 9 au 22 septembre 2018 pour l’ablation des vis de verrouillage du clou centromédullaire avec une poursuite de rééducation en centre dédié

- du 7 au 18 février 2019 pour bénéficier d’une nouvelle ostéosynthèse avec alésage et nouvel enclouage du fémur gauche dans le cadre d’une pseudarthrose
- le 23 septembre 2020, en ambulatoire, pour une arthrolyse de cheville gauche
- le 2 février 2021, en ambulatoire, pour une infiltration radio guidée de la tibio talienne gauche pour traitement d’une arthrose

1.Sur le plan orthopédique et général

Un examen médical amiable a été pratiqué par les docteurs [P] [H] et [M] [Y], mandatés respectivement par l'assureur et la victime, dont les conclusions du 18 mars 2021 sont les suivantes :
Arrêt total d'activité : du 17 mars au 21 février 2021(date la dernière consultation auprès du professeur [S])
Déficit fonctionnel temporaire total :
- du 17 mars au 31 août 2018
- du 9 au 22 septembre 2018
- du 7 au 18 février 2019
- le 23 septembre 2020
Déficit fonctionnel temporaire :
- classe 4 : du 1er septembre au 8 septembre 2018 nécessitant une tierce personne à raison de deux heures par jour
- classe 3 : du 23 septembre 2018 au 6 février 2019 ; du 19 février 2019 au 22 septembre 2020 ; avec nécessité sur ces deux périodes d’une tierce personne à raison d’ 1heure 30 par jour
- 33 % : du 24 septembre 2020 au 21 février 2021 nécessitant une tierce personne à raison d’une heure par jour
Besoin en tierce personne viagère : 4 heures par semaine étant précisé que la patiente n’avait pas le permis de conduire avant l’accident ;
Souffrances endurées : 5/7 ;
Consolidation des blessures : 21 février 2021
séquelles : ;
Déficit fonctionnel permanent : 24 % hors AIPP dentaire, à préciser après réalisation d’une expertise amiable et contradictoire des sapiteurs dentiste et maxillofacial
Préjudice esthétique : 2.5/7
Préjudice d'agrément : il convient de retenir une gêne à la randonnée, au sport en salle et au vélo
Préjudice professionnel : il convient de retenir une gêne à la station debout prolongée, à la marche prolongée, au port de charges lourdes, à la montée et descente des escaliers
Préjudice sexuel : positionnel
Soins futurs : les soins post-consolidation doivent prendre en charge l’ablation du matériel d’ostéosynthèse si celle-ci est réalisée. Les soins dentaires seront précisés par les experts dentiste et chirurgien maxillofacial ; il convient de prendre en charge le renouvellement des béquilles tous les 10 ans avec des embouts tous les ans aménagement du logement : douche à l’italienne.

Au vu des éléments ci-dessus rappelés, le docteur [H] a demandé un avis sapiteur auprès d’un chirurgien-dentiste.

2.Sur le plan dentaire

Un premier examen non contradictoire, rédigé par le Docteur [J], a mentionné le 11 juin 2020 :
- une fracture radiculaire de la dent 12
- date de consolidation non acquise mais prévisible à la pose du stellite maxillaire définitif dans quatre mois
- dépenses de santé actuelles : en cours de chiffrage
- DFP :1,5 %
- DSF renouvellement imputable du stellite maxillaire tous les 7 ans à hauteur de 750 €.

Un examen médical amiable contradictoire a été réalisé par les docteurs [R] [A] et [U] [N] qui ont conclu, le 23 septembre 2022, ainsi que suit :
- date de consolidation non acquise
- dépenses de santé actuelles : 10 488 € sous déduction des remboursements sécurité sociale et mutuels
- préjudice esthétique temporaire : 2/7
- souffrances endurées : 2/7
- déficit fonctionnel temporaire : 5 % du 17 mars au 31 mai 2018

***
Au vu de ces 2 rapports, par actes des 10, 13 et 15 mars 2023, assignant l’Assurance Mutuelle des Motards, AG2R prévoyance et la CPAM du Puy-de-Dôme, suivis de conclusions récapitulatives signifiées le 22 novembre 2023, auxquelles il est référé expressément conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, Madame [K] [E] épouse [F] et Monsieur [X] [F] demandent au tribunal, au visa de la loi du 5 juillet 1985, du code de procédure civile, notamment ses articles 514 et suivants, 699, 700, du code du commerce, notamment ses articles A 444-31 et suivants, de :
I-CONDAMNER ASSURANCE MUTUELLE DES MOTARDS à verser à [K] [E] épouse [F] en réparation de la part de son préjudice en lien avec ses séquelles orthopédiques :
- Dépenses de santé actuelles : 345,44 €, sauf à parfaire
- Frais divers : 11.237,23 €, sauf à parfaire
- Aide humaine avant consolidation : 28.335,13 €
- Pertes de gains professionnels actuelles : 47.394,41 € avant imputation de créance
- Dépenses de santé futures : 10.853,93 €, sauf à parfaire
- Frais de logement adapté : 5.045,23 €
- Aide humaine future : 155.952,06 €
- Pertes de gains professionnels futurs : sur un total de 217.287,27 € dont créance CPAM : 36.123,69 €, soit, au titre de l’indemnisation de Madame [F], la somme de 181.163,58 €
- Incidence professionnelle : 105.775,83 €
- Déficit fonctionnel temporaire : 18.397,90 €
- Souffrances endurées : 35.000 €
- Préjudice esthétique temporaire : 5.000 €
- Déficit fonctionnel permanent : 65.000 € retenus au dispositif (80.000€ dans ses conclusions)
- Préjudice d’agrément : 20.000 €
- Préjudice esthétique définitif : 12.000 €
- Préjudice sexuel : 12.000 €

II-CONDAMNER ASSURANCE MUTUELLE DES MOTARDS à verser à [X] [F] en indemnisation de son entier préjudice :
- Préjudice matériel : 6.351,50 €
- Préjudice d’accompagnement : 9.000 €
- Préjudice moral : 15.000 €
- Préjudice sexuel par ricochet : 8.000 €

III- CONDAMNER ASSURANCE MUTUELLE DES MOTARDS à verser à [K] [E] épouse [F] et à Monsieur [X] [F] une indemnité globale et forfaitaire de 5.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile

IV- CONDAMNER ASSURANCE MUTUELLE DES MOTARDS aux entiers dépens, en ce compris les frais de signification de la présente décision, dont distraction au profit de Maître Vanessa BRANDONE, avocat au Barreau de Paris, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile

V- DIRE qu’en cas d’exécution forcée les sommes retenues par l’huissier seront supportées par le débiteur par application des articles A 444-31 et suivants du Code du commerce, en sus de l’application de l’article 700 du Code de procédure civile

VI- DIRE le jugement à intervenir commun aux organismes sociaux appelés en la cause

VII- ORDONNER l’exécution provisoire du jugement à intervenir.

***
Par ses conclusions récapitulatives signifiées par le RPVA le 8 janvier 2024, l’Assurance Mutuelle des Motards sollicite du tribunal, au visa de la loi du 5 juillet 1985 :
- REDUIRE l’indemnisation allouée à Madame [F] aux sommes suivantes :
Dépenses de santé actuelles :
- Revient à la CPAM : 32.960,34 €
- Revient à VIASANTE : 15.644,45 €
- Revient à Madame [F] : 345,44 € (accord)
Frais divers : 6.242,83 €
Assistance par tierce personne temporaire : 22.419 €
Pertes de gains professionnels actuels : 42.031,04€
- Revient à la CPAM : 22.567,62 €
- Revient à Madame [F] : 19.463,42 €
Dépenses de santé futures : 8.627,05 €
Frais de logement adapté : 379,90 €
Assistance par tierce personne permanente : 117.662,98 €
- Revient à Madame [F] :
• A titre principal : 18.841,25 €
• A titre subsidiaire : 24.425,98 €
- Revient à la CPAM : 18.771,94 €
Incidence professionnelle : 5.000 €
Déficit fonctionnel temporaire : 15.328,25 €
Souffrances endurées : 25.000 €
Préjudice esthétique temporaire : 1.000 €
Déficit fonctionnel permanent : 49.440 €
Préjudice d’agrément : 2.000 €
Préjudice esthétique permanent : 4.000 €
Préjudice sexuel : 4.000 €
- DEBOUTER Madame [F] de ses demandes formulées au titre des dépenses
de santé futures,
- REDUIRE l’indemnisation allouée à Monsieur [F] aux sommes suivantes :
Frais divers : 5.714,87 € (préjudice matériel)
Préjudice d’affection : 5.000 € (préjudice moral)
Troubles dans les conditions d’existence (préjudice sexuel) : NEANT
Préjudice d’accompagnement : NEANT
- DEBOUTER Monsieur [F] de ses demandes formulées au titre du préjudice
sexuel et du préjudice d’accompagnement,
- DEBOUTER les consorts [F] de leur demande tendant à dire qu’en cas
d’exécution forcée, les frais d’huissier seront supportés par le débiteur, - REDUIRE la somme allouée aux consorts [F] au titre de l’article 700 du
code de procédure civile à de plus justes proportions.

***
La Caisse Primaire d’Assurance-Maladie du Puy-de-Dôme a sollicité, par un courrier du 21 juin 2021 adressé à l’Assurance mutuelle des motards, l’application du protocole assureurs/ organismes sociaux « PAOS » cas 83 créance d’un montant total de 252 734,74 € pour la période du 17 mars 2018 au 21 février 2021.
Le 17 mars 2023, la caisse a précisé le montant définitif réactualisé de ses débours pour une somme totale de 271 506,68 € ainsi ventilée :
- Frais hospitaliers du 17/03/2018 au 23/09/2020 : 30 180,73 € + 153 211,08 € + 13 020,72 € + 1461,77 €+ 19 580 €+ 1482 €
- Frais médicaux du 3/4/2018 au 17/02/2021 : 10 664,25 €
- Frais pharmaceutiques du 24/01/2020 au 27/01/2021 : 340,32 €
- Frais d’appareillage du 01/07/2020 au 6/11/2020 : 62,47 €
- Franchises du 16/1/2020 au 17/02/2021 : -114 €
- Indemnités journalières -coût initial 20,86 € du 23/03/2018 au 15/01/2020 : 14 036,11 € et du 16/01/2020 au 21/02/2021 : 8531,51 €
- Frais futurs occasionnels : 193,50 €
- Frais futurs viagers : 3,66 × 23,027 : 84,28 €
- Arrérages échus en invalidité du 1/07/2021 au 28/02/2023 : 18 771,94 €.

La Mutuelle AG2R venant aux droits et obligation de la mutuelle VIA SANTE a communiqué, le 2 décembre 2021, sa déclaration de créance définitive pour un montant de 15 644,45 € détaillé comme suit :
- consultation, actes techniques médicaux : 2618, 01 €
- hospitalisation : 13 026,44 €.

La Caisse Primaire d’Assurance-Maladie du Puy-de-Dôme et la compagnie AG2R prévoyance, quoique régulièrement assignées par acte remis à personne morale, n’ont pas constitué avocat.

Susceptible d'appel, le présent jugement sera réputé contradictoire, déclaré commun à la caisse, opposable à la compagnie AG2R prévoyance.

La clôture de la présente procédure a été prononcée le 19 janvier 2024.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties quant à l’exposé détaillé de leurs prétentions et moyens.

L'affaire a été mise en délibéré au 28 mai 2024, prorogé au 11 juin 2024 pour plus ample délibéré.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1- SUR LE DROIT A INDEMNISATION

La loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation, dite " loi Badinter " dispose, en son article 3, que les victimes d'un accident de la circulation, non conducteurs d'un véhicule terrestre à moteur, ont droit à l'indemnisation des dommages résultant des atteintes à leur personne qu'elles ont subis, sauf lorsqu'elles ont commis une faute inexcusable qui a été la cause exclusive de l'accident ou qu'elles ont volontairement recherché le dommage qu'elles subissent.

Est impliqué dans un accident, au sens des dispositions précitées tout véhicule intervenu, à quelque titre que ce soit, dans la survenance de cet accident. Le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur ne peut se dégager de son obligation d'indemnisation que s'il établit que cet accident est sans relation avec le dommage.

Selon l'article R. 421-5 du code des assurances, " lorsque l'assureur entend invoquer la nullité du contrat d'assurance, sa suspension ou la suspension de la garantie, une non-assurance ou une assurance partielle opposables à la victime ou à ses ayants droit, il doit, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, le déclarer au fonds de garantie et joindre à sa déclaration les pièces justificatives de son exception ; il doit en aviser en même temps et dans les mêmes formes la victime ou ses ayants droit en précisant le numéro du contrat."

En l’espèce, le droit de Madame [K] [E] épouse [F] à l’indemnisation intégrale des conséquences dommageables de l’accident de la circulation, survenu le 17 mars 2018, alors qu’elle était piéton, n’est pas contesté et résulte des articles 1 et 2 de la loi du 5 juillet 1985 relative aux victimes d’accidents de la circulation, ainsi que de l’article L124-3 du code des assurances permettant une action directe contre l’assureur.

En conséquence de quoi, l’Assurance Mutuelle des Motards sera tenue de réparer son entier préjudice ainsi que celui de Monsieur [X] [F], victime par ricochet.

2- SUR L'EVALUATION DU PREJUDICE CORPOREL DE MADAME [K] [E] EPOUSE [F]

Réalisés dans un cadre amiable, les rapports d’expertises complétés des pièces versées aux débats présentent un caractère suffisamment complet et informatif pour apporter un éclairage suffisant afin de statuer sur les demandes d’indemnisation.

Au vu des conclusions expertales et de l'ensemble des éléments versés aux débats, le préjudice subi par Madame [K] [E] épouse [F], née le [Date naissance 7] 1962, âgée de 55 ans lors de l'accident, 58 ans à la date de consolidation de son état de santé, 61 ans à la date du présent jugement, sera réparé ainsi que suit, étant observé qu'en application de l'article 25 de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006, d'application immédiate, le recours subrogatoire des tiers payeurs s'exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'ils ont pris en charge.

Il convient en l'espèce d'utiliser le barème de capitalisation publié dans la Gazette du Palais 2022, le mieux adapté aux données sociologiques et économiques actuelles, à savoir celui fondé sur les tables d'espérance de vie définitive publiées par l'INSEE et sur un taux d'intérêt de 0 %.

I. PREJUDICES PATRIMONIAUX

- Dépenses de santé

Les dépenses de santé sont constituées de l’ensemble des frais hospitaliers, de médecins, d’infirmiers, de professionnels de santé, de pharmacie et d’appareillage en lien avec l’accident.

Aux termes du relevé du 21 juin 2021, les débours de la CPAM du Puy-de-Dôme comprennent notamment :
- Frais hospitaliers du 17/03/2018 au 23/09/2020 : 30 180,73 € + 153 211,08 € + 13 020,72 € + 1461,77 €+ 19 580 €+ 1482 €
- Frais médicaux du 3/4/2018 au 17/02/2021 : 10 664,25 €
- Frais pharmaceutiques du 24/01/2020 au 27/01/2021 : 340,32 €
- Frais d’appareillage du 01/07/2020 au 6/11/2020 : 62,47 €
- Franchises du 16/1/2020 au 17/02/2021 : -114 €.

Madame [K] [E] épouse [F] et l’Assurance Mutuelle des Motards s’accordent sur le remboursement de ses frais de santé non remboursés dont elle justifie le montant à hauteur de 345,44 €, franchises comprises.

Il sera donc alloué à Madame [K] [E] épouse [F] la somme de 345,44 € de ce chef.

- Frais divers

L'assistance de la victime lors des opérations d'expertise par un, ou des, médecin conseil en fonction de la complexité du dossier, en ce qu'elle permet l'égalité des armes entre les parties à un moment crucial du processus d'indemnisation, doit être prise en charge dans sa totalité. De même, ces données peuvent justifier d'indemniser les réunions et entretiens préparatoires. Les frais d'expertise font partie des dépens.

Madame [K] [E] épouse [F] sollicite le remboursement des sommes suivantes :
- frais de télévision : 145,55 €
- frais de reproduction des clés du domicile : 162,50 € (2 trousseaux)
- frais de reproduction de 2 vigik et un émetteur : 74,18 €
- frais d’assistance à expertise : 6000 €
- vêtements détruits durant l’accident : 4855 €.

L’Assurance Mutuelle des Motards accepte la prise en charge des frais de télévision (145,55 €), de reproduction d’un seul trousseau de clés du domicile (81,25 €) et d’un seul vigik hors émetteur (16,03 €), outre l’intégralité des frais d’assistance à expertise (6000 €).

Cette indemnisation de 6.242,83 € sera retenue par le tribunal, en ce qu’elle est satisfaisante au regard de la nature des faits et des justificatifs produits.

Pour le surplus, la défenderesse conteste les sommes réclamées au titre des vêtements détruits dans l’accident considérant que la victime doit rapporter la preuve que les vêtements ont été détériorés, à tout le moins, la preuve des vêtements portés le jour de l’accident.
Elle se réfère, de manière fondée, à l’extrait de la procédure d’accident (peu lisible), s’agissant du PV d’audition de son époux, le 18 mars 2018, les services de police mentionnant hormis la restitution d’un sac à main noir Dolce Gabana, 3 effets vestimentaires endommagés par les services de secours : un manteau noir à capuche, une écharpe bleue et des bottines léopard endommagés et non restitués.

Les factures produites sont sans rapport avec ces 3 articles de sorte qu’elles ne peuvent être intégralement remboursées à hauteur de la somme importante demandée (4855€) ; étant cependant établi, par le procès-verbal de police, que 3 vêtements de Madame [K] [E] épouse [F] ont été endommagés, le jour de l’accident, il y a lieu de l’indemniser à hauteur de 500 € de ce chef.

En conséquence de quoi, l’Assurance Mutuelle des Motards sera condamnée à verser à Madame [K] [E] épouse [F] la somme de 6.742,83 € (6.242,83 €+ 500 €) au titre de ses frais divers.

- Assistance tierce personne provisoire

Il convient d'indemniser les dépenses destinées à compenser les activités non professionnelles particulières qui ne peuvent être assumées par la victime directe durant sa maladie traumatique, comme l'assistance temporaire d'une tierce personne pour les besoins de la vie courante, étant rappelé que l'indemnisation s'entend en fonction des besoins et non en fonction de la dépense justifiée. Le montant de l'indemnité allouée au titre de l'assistance d'une tierce personne ne saurait être subordonné à la production de justificatifs des dépenses effectives.

L'expertise a retenu un besoin pour une assistance tierce-personne temporaire, non spécialisée,
- du 1er septembre au 8 septembre 2018 : 2 heures par jour (8 jours)
- du 23 septembre 2018 au 6 février 2019 et du 19 février 2019 au 22 septembre 2020 : 1heure 30 par jour (719 jours)
- du 24 septembre 2020 au 21 février 2021 : 1 heure par jour (151 jours)
Soit de 40 heures à raison de 5 heures par semaine du 25/11/2017 au 15/01/2018.

Madame [K] [E] épouse [F] sollicite la somme de 28.335,13 € au titre de son indemnisation, sur la base d'un taux horaire de 22,75€, l’assureur proposant de ramener ce taux à 16 € sans contester le nombre d’heures à servir.

En conséquence de quoi, il sera alloué à la victime la somme de 22 420€, sur la base d’un taux horaire de 18 €, adapté à sa situation, en l’absence de justificatifs de dépenses éventuellement supérieures ayant donné lieu au paiement de charges sociales.

- Perte de gains professionnels avant consolidation

Il s'agit de compenser les répercussions de l'invalidité sur la sphère professionnelle de la victime jusqu'à la consolidation de son état de santé. L'évaluation de ces pertes de gains doit être effectuée in concreto au regard de la preuve d'une perte de revenus établie par la victime jusqu'au jour de sa consolidation.
La demande qui tend à l’indemnisation de perte de gains professionnels actuels ou futurs ne constitue pas une demande tendant à réparer l’existence d’une perte de chance de percevoir ses gains.

Madame [K] [E] épouse [F] sollicite la somme de 47.394,41 € (avant imputation de créance) dans son dispositif mais 42 561,97 € dans ses conclusions, le montant non contesté des indemnités journalières s’élevant à 22 567,62 €.

L’Assurance Mutuelle des Motards retient, dans ses conclusions, la somme de 42 561,97 € (avant imputation de créance) à laquelle la victime aurait pu prétendre, à partir d’un revenu provisionnel calculé sur une marge de 7 % d’augmentation telle qu’estimée par une expertise comptable amiable du 2 septembre 2020, dans un rapport qui n’a pas non plus été contesté.

Il sera relevé que, dans le corps de ses conclusions, la victime s’accorde sur cette somme de 42 561,97 € au titre de sa perte de gains actuels, sans évoquer ni justifier une somme éventuellement supérieure de 47.394,41 €.

Les experts judiciaires ont retenu un arrêt des activités professionnelles, en lien avec l’accident, du 17 mars 2018 au 18 février 2021, date de sa consolidation.

En conséquence de quoi, une fois déduite les indemnités journalières versées par la CPAM, il revient à la victime une indemnité de 19 994,35 € (42 561,97 € - 22 567,62 €).

- Dépenses de santé futures

1. Au titre de frais de restauration dentaire, Madame [K] [E] épouse [F] sollicite le remboursement de la somme de 10 488 €, son reste à charge après déduction de la part sécurité sociale (428,71€) et mutuelle (devis joint de 2337,24€).

Les experts dentiste et chirurgien maxillofacial ont estimé que les soins dentaires imputables à l’accident étaient les suivants :
-dent 12 : fracture radiculaire nécessitant une extraction
-dent 22 : luxation de la dent liée à l’accident
avec une préconisation de 2 implants et une greffe osseuse pour les 2 dents.
Étant précisé : « l’imputabilité ne sera pas retenue pour la mise en place des deux couronnes implantoportées en position 12 et 22 car il existait d’anciennes prothèses datant de plus de 10 ans avec un renouvellement prothétique imputable. Les honoraires demandés soit 750 € par dent pour la greffe osseuse, 1500 € par implants et 450 € pour l’infrastructure coronaire se situent dans la fourchette haute mais restent acceptables ».

-dent 21 : luxation lors de l’accident, sera remplacé par un implant et une couronne implantoportée. Les honoraires demandés sont acceptables.
Étant précisé : « absence de renouvellement prothétique imputable du fait de la présence d’un volumineux composite coronaire sur la dent relatif à l’état antérieur ».
-concernant le stellite maxillaire : la perte des dents 12, 21, 22 justifie la réfection de la prothèse amovible réalisée en 2017, soit environ un an avant l’accident. Il convient donc de prendre en charge au titre de la réparation du dommage la réfection d’une nouvelle prothèse amovible 5 dents remplaçant les dents 13 14 15 16 26. Il s’agit d’un acte d’un montant de 1240 €.

In fine, selon rapport expertal, le montant des frais de restauration dentaire imputables à l’accident s’élève à 8627,05€, déduction des parts sécurité sociale et mutuelle ainsi que des dépenses non retenues (couronne dentaire pour les dents 22 et 12 : 150€x2 + 577,50€x2 / prothèse dentaire pour la dent 11), somme acceptée par l’Assurance Mutuelle des Motards qui sera donc allouée à Madame [K] [E] épouse [F].

2. Au titre des changements d’embout de béquilles, Madame [K] [E] épouse [F] sollicite le remboursement de 171,88 € correspondant au seul remboursement des embouts, qu’elle calcule sur la base de 6,10€ de reste à charge annuel, à défaut de remboursement sécurité sociale. Elle retient une date de liquidation au 29 avril 2023, à ses 60 ans (pour 1 euro de rente viagère retenu à 27,177).

L’expert a précisé notamment la nécessité de prendre en charge le renouvellement des béquilles tous les 10 ans avec des embouts tous les ans.

L’Assurance Mutuelle des Motards sollicite le débouté de la victime estimant qu’elle ne justifie pas de la part de remboursement sécurité sociale ou mutuelle.

La victime justifie pourtant d’une facture du 29 avril 2022 mentionnant une TVA de 20 % qui confirme l’absence de prise en charge de ce produit au titre de l’article L 165-1 du code de la sécurité sociale.

Il revient donc à la victime une indemnité complémentaire de 160,43 € (6,10€ x 26,301) pour le changement d’embout des béquilles, à titre viager.

En conséquence de quoi, il sera alloué la somme de 8787,48 € (8627,05€ + 160,43 €) à Madame [K] [E] épouse [F] au titre de ses dépenses de santé futures.

- Assistance par tierce personne pérenne

Il convient d'indemniser les dépenses destinées à compenser les activités non professionnelles particulières qui ne peuvent être assumées par la victime directe après la consolidation de son état de santé, comme l'assistance temporaire d'une tierce personne pour les besoins de la vie courante, étant rappelé que l’indemnisation s'entend en fonction des besoins et non en fonction de la dépense justifiée. Le montant de l'indemnité allouée au titre de l'assistance d'une tierce personne ne saurait être subordonné à la production de justificatifs des dépenses effectives.

En l'espèce, il ressort du rapport d'expertise, au titre de l'assistance tierce-personne viagère, un besoin de « 4 heures par semaine étant précisé que la patiente n’avait pas le permis de conduire avant l’accident », besoin qui n’est pas contesté en son principe mais fait l’objet d’une discussion quant à la base horaire de son indemnisation.

Madame [K] [E] épouse [F] sollicite la somme totale de 155 952,06 € ainsi calculée :
-arrérages échus du 22 février 2021 au 31 mars 2024 (date présumée du jugement à intervenir)
1134 jours/7 joursx4hx 22,75 € =14 742 €
-capitalisation de l’aide humaine future sur 59 semaines
4hx 59 semaines x 22,75 € x 26,301 (61 ans) = 141 210,06 €.

L’assurance mutuelle des motards propose la somme totale de 117 662,98 € fixée comme suit :
-arrérages échus du 22 février 2021 31 mars 2024 (date du jugement à intervenir)
1134 jours/7 jours x 4h x 16€ = 10 368 €
-arrérages à échoir
4h x 57 semaines x 18 € x 26,144 = 107 294,98 €.

Sur la base d’un taux horaire de 20 euros, pour les arrérages échus, sur 365 jours conformément à la demande, et, 22 € pour les arrérages à échoir, sur 412 jours, taux qui est adapté à la situation de la victime, il convient de lui allouer la somme totale de 133.055,42 € ainsi détaillée :
1. Arrérages échus de la consolidation à la date initialement fixée pour le délibéré (date arrêtée pour la liquidation) :
du 22 février 2021 au 27 mai 2024 :

dates
20,00 €
/ heure
nbre heures
nbre heures

TOTAL
22/02/2021

par jour
par semaine

s/ 365 jours / an
27/05/2024
1 191
jours

4,00
13 611,43 €
13 611,43 €

2. Arrérages à échoir à compter des 61 ans de Madame [K] [E] épouse [F]
4hx 59 semaines x 22€ x 26,301 (61 ans) = 136 554,79 €.
Total : 150 166,22 € (13 611,43 € + 136 554,79 €).

- Perte de gains professionnels futurs

Ce poste indemnise la victime de la perte ou de la diminution de ses revenus consécutive à l'incapacité permanente à laquelle elle est confrontée du fait du dommage dans la sphère professionnelle après la consolidation de son état de santé. La demande qui tend à l’indemnisation de perte de gains professionnels actuels ou futurs ne constitue pas une demande tendant à réparer l’existence d’une perte de chance de percevoir ses gains.

Ce préjudice est évalué à partir des revenus antérieurs afin de déterminer la perte annuelle, le revenu de référence restant le revenu net annuel imposable avant l’accident distingué sur deux périodes, de la consolidation à la décision (arrérages échus sous forme de capital), le cas échéant, à partir de la décision (arrérages à échoir).

1. Sur le rappel des demandes formulées et les pièces produites en rapport

Madame [K] [E] épouse [F] calcule ses pertes, à compter du 22 février 2021 au 4 novembre 2030, à 68 ans, âge auquel elle a estimé probable son départ à la retraite en qualité d’artisan, à la somme de 217 287,27 €, réclamant après déduction de la créance (36 123,69 €), la somme de 181 163,58 €, au titre de sa perte de gains futurs.

Madame [K] [E] épouse [F], qui a sa résidence principale à [Localité 13], expose travailler, à [Localité 12], où elle tiendrait, seule, une boutique d’esthétique (pose d’extensions de cheveux et prothèses ongulaires) à laquelle elle se rendrait par le train quotidiennement.

Elle justifie d’un extrait du registre du commerce et des sociétés en date du 20 avril 2009 par lequel elle justifie d’une exploitation, depuis le 1er novembre 2008, d’un fonds de commerce en rapport avec l’activité qu’elle a décrite situé [Adresse 3] dans le 18e arrondissement de Paris.
Elle produit, par ailleurs, un échange (pièce 31) avec la SNCF par lequel elle sollicite et obtient le 24 octobre 2018 le remboursement des mois non consommés depuis avril 2018 de son abonnement SNCF [Localité 11] [Localité 13] ; elle n’apporte aucune pièce quant à la réalité de ses trajets au quotidien pour se rendre de [Localité 13] à [Localité 11], s’agissant notamment du coût et de la date de ses trajets effectifs.

Pour justifier de son activité, elle produit un simple mail du 2 septembre 2020 de Monsieur [L], « expert perte d’exploitation indépendant », qui évoque les bénéfices industriels et commerciaux (BIC) pour 2015 /2016 /2017 -conformes à ceux déclarés sur les avis d’imposition- pour retenir une « tendance moyenne positive de 7 % d’augmentation » qu’il applique aux années 2018 /2019 /2020 et ainsi calculer une perte de revenus de 15 720,26 €.

Le document officiel « info retraite » de son relevé de carrière (pièce 50) permet non seulement d’établir son statut de travailleur indépendant, chef d’entreprise, du 1er novembre 2008 au 31 décembre 2022, en lien avec son activité d’esthétique, justifiant de revenus d’activité soumis à cotisations retraite pour les années 2009 à 2018 ; mais encore le cumul d’autres emplois, en ce que Madame [K] [E] épouse [F] a exercé parallèlement du 1er octobre 2010 au 31 mars 2011, ainsi que du 1er janvier au 31 mars 2012, un « emploi familial » pour lequel elle a été rémunérée ; a déclaré un emploi auprès de « [D] Ep [E] [G] », du 1er novembre 2010 au 29 février 2012 ; enfin a travaillé pour « [Z] [T] », et, dégagé des revenus d’activité soumis à cotisations retraite du 1er avril 2012 au 30 juin 2016.

2. Sur les données médico-légales

Ainsi que le rappelle l’Assurance Mutuelle des motards, les experts ont retenu un préjudice professionnel limité à « une gêne à la station debout prolongée, à la marche prolongée, au port de charges lourdes, à la montée et descente des escaliers. »

Il est exact, comme le soulève l’assureur, qu’aucune inaptitude n’a été retenue stricto sensu.

Madame [K] [E] épouse [F] s’est vu attribuer, à compter du 31 mai 2021, une pension d’invalidité d’un montant brut annuel de 11 318,30 € par décision de la CPAM de [Localité 13] du 16 juillet 2021, le médecin conseil ayant précisé « un état d’invalidité réduisant des deux tiers au moins sa capacité travail ou de gains ».
Elle a déclaré une pension d’invalidité en 2022 à hauteur de 10 959 € annuels net (selon avis d’imposition 2023, pas d’autre document officiel).

Ses avis d’imposition de 2022 sur les revenus 2021 ainsi que de 2023 sur 2022 attestent l’absence de reprise d’emploi, qui ne peut être strictement imputable à l’accident eu égard aux conclusions tant des experts que de la CPAM de [Localité 13].

3. Sur l’analyse stricto sensu de l’évolution des revenus et des pertes de gains in fine

Si les deux parties s’accordent quant à un revenu annuel de référence initiale de 16 358,72 €, (correspondant à l’année 2020), Madame [K] [E] épouse [F] lui applique un coefficient d’augmentation de 7 % par année, du 1er janvier 2022 au 4 novembre 2030, (portant le total des pertes de gains futurs à 217 287,27€), à la différence de l’assureur qui conserve la base de 2020, en l’état, pour calculer la somme totale de 60 549,67€ du 22 février 2021 au 4 novembre 2024 sans lui appliquer une éventuelle hausse de bénéfices.

En l’absence de pièces comptables, et de lisibilité réelle quant au périmètre de l’activité principale ou non, exercée par la victime, à l’époque de l’accident, sans document permettant de justifier la projection d’une augmentation constante de 7 % par an de sa boutique d’esthétique, le tribunal considère que Madame [K] [E] épouse [F] a subi une perte de revenus de 24 426,08€ (60 549,67€ - 18 771,84 € - 17 351,75€), calculée sur une base de revenus annuels nets à 16 358,72€ (revenus 2020 non contestés), sur une période allant de la consolidation jusqu’à son âge de départ légal à la retraite (62 ans), soit du 22 février 2021 au 4 novembre 2024, selon le détail suivant :
- pour l’année 2021, du 22 février au 31 décembre, la somme de 13 983,34 € (16 358,72/365 x 312)
- pour les années 2022 et 2023, années pleines, la somme de 32 717,44 € (16 358,72 × 2)
- pour l’année 2024, du 1er janvier au 4 novembre : 13 804,07 € (16 358,72 / 365 x 308)
Soit un total de 60 504,85 €, rectifié à 60 549,67€ tel que retenu par l’assureur, au titre de la perte de gains futurs dont déduction de la rente de la CPAM à hauteur de 18 771,84 € pour la période du 1er juillet 2021 au 28 février 2023 ainsi que celle versée, du 1er mars 2023 au 4 novembre 2024, à hauteur de 17 351,75€ (10 959€/12 x 19).

- Incidence professionnelle

Ce poste d'indemnisation a pour objet d'indemniser les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle comme le préjudice subi par la victime en raison de sa dévalorisation sur le marché du travail, de sa perte d'une chance professionnelle, ou de l'augmentation de la pénibilité de l'emploi qu'elle occupe imputable au dommage ou encore du préjudice subi qui a trait à sa nécessité de devoir abandonner la profession qu'elle exerçait avant le dommage au profit d'une autre qu'elle a du choisir en raison de la survenance de son handicap.
Ce poste indemnise également la perte de retraite que la victime va devoir supporter en raison de son handicap, c'est-à-dire le déficit de revenus futurs, estimé imputable à l'accident, qui va avoir une incidence sur le montant de la pension auquel pourra prétendre la victime au moment de sa prise de retraite.

Madame [K] [E] épouse [F] sollicite une indemnisation à hauteur de 105.775,83 € ainsi décomposée :
- 50 000 € au regard de l’abandon de sa profession de commerçante
- 15 000 € au titre de son désœuvrement social
- 40 775,83 € au titre de ses pertes de droits à la retraite.

L’Assurance Mutuelle des motards lui offre une somme forfaitaire de 5000 € maintenant, de manière fondée, que l’âge de la retraite aurait été, pour la victime née en 1962, fixé à 62 ans, qu’il lui restait uniquement 4 années d’activité professionnelle à exercer.
Concernant sa perte de droits à la retraite, l’assureur conteste son bien-fondé, estimant que le calcul adopté en demande ne correspond pas aux 15 meilleures années de la carrière de Madame [K] [E] épouse [F], qui retient exclusivement la période 2015-2030, de manière erronée, pour l’estimer. Il est exact que le mode de calcul retenu n’est pas satisfaisant ni étayé par aucun document officiel tandis que les conclusions expertales n’ont pas retenu une impossibilité stricte de Madame [K] [E] épouse [F] de travailler.

Sur ce,
Le tribunal, rappelant de nouveau le peu de pièces en rapport avec l’activité exercée et les approximations subsistant quant au calcul des droits à retraite, entend fixer une incidence professionnelle, non contestée en son principe par l’assureur, qui sera indemnisée à la somme de 20 000 € afin de tenir compte de la pénibilité induite par l’accident subi par Madame [K] [E] épouse [F] sur les 4 années lui restant à travailler jusqu’à l’âge légal présumé de sa retraite.

- Aménagement du logement

L’expert a retenu la nécessité d’aménager la douche à l’italienne.
Madame [K] [E] épouse [F] sollicite à ce titre la somme de 5045,23 € dont 4045,23 € sur factures diverses et 1000 € au titre de l’aide humaine « pour l’installation de la douche, y compris si les travaux sont réalisés par l’entourage amical et familial ».

L’Assurance Mutuelle des Motards conteste le coût de travaux, acceptant de retenir la somme de 379,90 €, justifiée pour la transformation d’une baignoire en douche à l’italienne s’agissant du coût d’acquisition d’une colonne de douche.

Sur ce,
Après examen des factures, partageant l’analyse de la défenderesse, le tribunal considère que Madame [K] [E] épouse [F] ne justifie pas de travaux en rapport avec l’installation d’une douche à l’italienne, versant aux débats des factures pour la transformation intégrale de sa salle de bains sans que ne puissent être précisément isolés les travaux en lien avec les préconisations expertales. La demande de 1000 € supplémentaires au titre de l’aide humaine hypothétique qui serait nécessaire pour réaliser ces travaux confirme le caractère trop général de cette demande.

En conséquence de quoi, faute de production d’une facture assez détaillée pour établir le coût d’une douche à l’italienne, intégrant les travaux de plomberie et de maçonnage en rapport mais pas au-delà, l’indemnisation de Madame [K] [E] épouse [F] sera limitée à la somme de 379,90 € telle que proposée par l’Assurance Mutuelle des Motards au vu des justificatifs existants.

II. PRÉJUDICES EXTRA-PATRIMONIAUX

- Déficit fonctionnel temporaire

Ce poste de préjudice indemnise l'invalidité subie par la victime dans sa sphère personnelle pendant la maladie traumatique. Le déficit fonctionnel temporaire inclut pour la période antérieure à la date de consolidation, l'incapacité fonctionnelle totale ou partielle ainsi que le temps d'hospitalisation et les pertes de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique. Par conséquent, il inclut les préjudices sexuel et d'agrément durant la période temporaire.

Les périodes de déficit fonctionnel temporaire retenues par l'expert sont les suivantes :
déficit fonctionnel temporaire total :
- du 17 mars au 31 août 2018
- du 9 au 22 septembre 2018
- du 7 au 18 février 2019
- le 23 septembre 2020
déficit fonctionnel temporaire :
- classe 4 : du 1er septembre au 8 septembre 2018
- classe 3 : du 23 septembre 2018 au 6 février 2019 ; du 19 février 2019 au 22 septembre 2020 ;
- 33 % : du 24 septembre 2020 au 21 février 2021.

À cela s’ajoute, un déficit fonctionnel temporaire fixé par les experts dentaires à 5 % du 17 mars au 31 mai 2018, sur le principe et le cumul duquel l’Assurance Mutuelle des Motards ne s’oppose pas.

Sur la base d'une indemnisation de 30 € par jour pour un déficit total, adaptée à la situation de la victime, il sera alloué à Madame [K] [E] épouse [F] la somme de 18.397,90 € conformément à sa demande.

- Souffrances endurées

Il s'agit de toutes les souffrances physiques et psychiques, ainsi que des troubles associés, que doit endurer la victime durant la maladie traumatique, c'est-à-dire du jour de l'accident à celui de sa consolidation. A compter de la consolidation, les souffrances endurées vont relever du déficit fonctionnel permanent et seront donc indemnisées à ce titre.

Elles ont été cotées à 5/7 par l'expert en raison notamment de la multiplicité des fractures et opérations chirurgicales, de la rééducation qui s’en est suivie ainsi que des répercussions psychologiques de l’accident, ayant justifié un traitement par antidépresseur.
Les experts chirurgien-dentiste ont en outre fixé un préjudice de souffrances endurées pour les dents à 2/7.

Au vu des pièces du dossier, il est établi que Madame [K] [E] épouse [F] a subi des douleurs vives au niveau de la jambe, de la face externe de la cuisse, ayant nécessité notamment une prise en charge par kinésithérapie, mésothérapie, balnéothérapie, outre plusieurs hospitalisations jusqu’en 2019, les faits ayant également favorisé l’émergence d’une arthropathie dégénérative post-traumatique révélée par un arthroscanner de la cheville gauche le 11 septembre 2019.

Elle est bien fondée à solliciter l’octroi de 35 000 € au titre des souffrances endurées, tant orthopédiques que dentaires, sur une longue période (3 ans).

En conséquence de quoi, elle sera indemnisée, pour les troubles qu'elle a endurés jusqu’à sa consolidation, à hauteur de 35.000€.

- Préjudice esthétique temporaire

Ce préjudice est lié à la nécessité de se présenter dans un état physique altéré au regard des tiers, et ce jusqu'à la date de consolidation.

Les experts dentaires ont coté un préjudice esthétique temporaire à 2/7 tandis que les experts médecins orthopédistes ont retenu un préjudice esthétique définitif de 2,5/7 sans évocation d’un préjudice temporaire.

Madame [K] [E] épouse [F] rappelle qu’elle a pourtant subi une immobilisation par botte, déclarant des cicatrices importantes et des aides pour ses déplacements. Elle sollicite une indemnisation à hauteur de 5000 €, l’Assurance Mutuelle des Motards lui offrant 1000€.

Au vu de ces éléments, Madame [K] [E] épouse [F] sera indemnisée à hauteur de 2000 €.

- Déficit fonctionnel permanent

Ce préjudice a pour composante les atteintes aux fonctions physiologiques de la victime, les douleurs qui persistent depuis la consolidation, la perte de la qualité de la vie et les troubles définitifs apportés à ses conditions d'existence.

Les experts médicaux orthopédistes ont retenu un déficit fonctionnel permanent à 24 %.

Madame [K] [E] épouse [F] sollicite une indemnisation forfaitaire à hauteur de 80 000 € dans ses conclusions (65 000 € au dispositif) considérant que les experts ont produit une évaluation sur sa seule limitation physiologique au regard d’un barème d’évaluation médicolégale des incapacités. Elle fait ainsi valoir qu’elle souffre d’un important isolement social en raison de ses difficultés à se rendre à l’extérieur de son domicile tandis que, psychologiquement, elle demeure « atteinte » et prend un traitement adapté pour pallier les troubles dépressifs.

L’Assurance Mutuelle des Motards s’oppose à une telle indemnisation rappelant, de manière fondée, que le retentissement psychologique a bien été pris en compte par les experts, qu’il est expressément intégré et calculé dans l’évaluation retenue à hauteur de 24 %.

Sur ce,
Madame [K] [E] épouse [F] était âgée de 58 ans au jour de la consolidation, au vu des séquelles décrites et du taux retenu, il lui sera alloué une indemnité de 53.280€ (valeur du point fixée à 2.220€).

- Préjudice esthétique définitif

Ce préjudice est lié à la nécessité de se présenter dans un état physique altéré au regard des tiers, au-delà de la date de consolidation.

Les experts médecins orthopédistes ont retenu un préjudice esthétique définitif de 2,5/7 évoquant la raideur des articulations, des aides à la marche ainsi que des cicatrices opératoires.

Madame [K] [E] épouse [F] ajoute qu’elle a subi une prise de poids importante tandis que la déambulation reste difficile avec deux cannes anglaises pour solliciter une somme de 12 000€ compte tenu du retentissement de ce préjudice notamment du fait de son travail dans le domaine de l’esthétique et de son apparence qu’elle estime altérée.

Au vu de ces éléments, Madame [K] [E] épouse [F] sera justement indemnisée à hauteur de 6 000 €.

- Préjudice d'agrément

Ce préjudice vise à réparer le préjudice spécifique lié à l’impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité spécifique, sportive ou de loisirs ainsi que les limitations ou difficultés à poursuivre ces activités. Ce préjudice particulier peut être réparé, en sus du déficit fonctionnel permanent, sous réserve de la production de pièces justifiant de la pratique antérieure de sports ou d’activités de loisirs particuliers.

Les experts ont retenu une gêne à la randonnée au sport en salle et au vélo étant établi, par des attestations circonstanciées de l’entourage ainsi que du médecin traitant, que Madame [K] [E] épouse [F] pratiquait, avant l’accident, des activités sportives avec ses amis ou sa famille, de façon régulière, notamment de la randonnée.

Il n’est pas contesté que Madame [K] [E] épouse [F] a dû renoncer à ses activités sportives antérieures, ceci constituant un préjudice d’agrément.

L’Assurance Mutuelle des Motards lui offre une indemnisation à hauteur de 2000 € alors qu’elle en sollicite 20 000€.

En conséquence de quoi, il convient, au regard de l’âge de la victime à la consolidation, de lui allouer la somme de 3000€ à ce titre.

- Préjudice sexuel

La victime peut être indemnisée si l’accident a atteint, séparément ou cumulativement mais de manière définitive, la morphologie des organes sexuels, la capacité de la victime à accomplir l’acte sexuel (perte de l'envie ou de la libido, perte de la capacité physique de réaliser l'acte sexuel, perte de la capacité à accéder au plaisir), et la fertilité de la victime.

Les experts ont retenu une gêne positionnelle pour laquelle Madame [K] [E] épouse [F] sollicite une indemnisation à hauteur de 12 000 € déplorant une baisse de la libido qu’elle dit lier à un traitement antidépresseur.

L’Assurance Mutuelle des Motards lui offre une indemnisation à hauteur de 4000 € estimant qu’elle ne démontre pas la prise d’un traitement, non retenu de surcroît par l’expert.

Dans ces conditions, il convient d'allouer la somme de 4000 € à ce titre selon la proposition faite par la défenderesse.

3- SUR L'EVALUATION DU PREJUDICE DE MONSIEUR [X] [F]

Il s'agit pour la partie en demande se prévalant de la qualité de victime par ricochet de démontrer qu'elle a subi un préjudice personnel en lien direct et certain avec le préjudice corporel subi par la victime directe et qu’elle entretenait avec celle-ci un lien affectif spécifique constant et singulier.

En l’espèce, Monsieur [X] [F] est l’époux de la victime directe de l’accident du 17 mars 2018, qui a eu un fort retentissement non seulement physique mais encore psychologique sur Madame [K] [E] épouse [F]. Il est parfaitement recevable en ses demandes eu égard à sa qualité et la communauté de vie des époux.

L’Assurance Mutuelle des Motards ne le conteste pas au demeurant.

- Préjudice matériel (frais divers)

Monsieur [X] [F] sollicite une indemnisation à hauteur de 6351,50 € actualisés, faisant valoir des frais kilométriques exposés avec la nécessité d’accompagner son épouse, soit une distance de 14 842,20 kms, parcourus de 2018 à 2021, avec son véhicule d’une puissance fiscale de 5 chevaux.

L’Assurance Mutuelle des Motards accepte le principe de cette indemnisation dont il sollicite cependant l’application d’un barème kilométrique de 2018.

L’actualisation sollicitée sera accordée de sorte que Monsieur [X] [F] sera indemnisé à hauteur de 6351,50 € pour les dépenses de transport engagées en lien direct avec la prise en charge de son épouse.

- Préjudice d’affection

Il s’agit du préjudice moral causé par le décès, les blessures, le handicap, les souffrances de la victime directe. Il doit être indemnisé même s’il n’a pas un caractère exceptionnel. Son montant est fixé en fonction de l’importance du dommage corporel de la victime directe et sa réparation implique l’existence d’une relation affective réelle avec le blessé.

Monsieur [X] [F] sollicite une indemnisation à hauteur de 15 000 € précisant, ce qui n’est pas contesté, qu’il a accompagné son épouse pendant toute la période traumatique, « qu’il ne la reconnaît plus » (du fait de l’accident), « inquiet de son état psychologique ».

L’Assurance Mutuelle des Motards propose une indemnisation à hauteur de 5000 € sans contester le fondement de ce préjudice d’affection qui est parfaitement caractérisé au vu des liens unissant les époux.

En conséquence de quoi, le préjudice d’affection de l’époux sera fixé à 5000 € compte tenu des séquelles de Madame [K] [E] épouse [F] et de la présente offre d’indemnisation qui est jugée satisfaisante.

- Préjudice sexuel

La victime peut être indemnisée si l’accident a atteint, séparément ou cumulativement mais de manière définitive, la morphologie des organes sexuels, la capacité de la victime à accomplir l’acte sexuel (perte de l'envie ou de la libido, perte de la capacité physique de réaliser l'acte sexuel, perte de la capacité à accéder au plaisir), et la fertilité de la victime.

Il a été retenu un préjudice sexuel à son épouse, Madame [K] [E] épouse [F], de sorte que Monsieur [X] [F] sera indemnisé, lui aussi, de ce préjudice, qui sera fixé également à la somme de 4000 €.

- Préjudice d’accompagnement

Le préjudice spécifique d’accompagnement « de fin de vie » a pour objet d’indemniser les troubles et perturbations dans les conditions d’existence d’un proche. Il s’agit d’indemniser le préjudice moral subi par les proches de la victime pendant la maladie traumatique jusqu’à son décès. On indemnisera notamment le préjudice résultant des troubles dans les conditions d’existence pour les proches qui partageaient habituellement une communauté de vie affective et effective avec le défunt, pendant cette période entre le dommage et le décès.

Monsieur [X] [F] sera débouté de sa demande formée à ce titre, en ce qu’elle n’est pas fondée en cas de survie, fort heureusement, en l’espèce, de la victime directe.

4- SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES

L’Assurance Mutuelle des Motards devra supporter les dépens, en ce compris les frais de signification de la présente décision et d'expertise, dont distraction au profit de Maître Vanessa BRANDONE, avocat au Barreau de Paris, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

L’Assurance Mutuelle des Motards sera condamnée au paiement des frais irrépétibles engagés par Madame [K] [E] épouse [F] et Monsieur [X] [F] dans la présente instance et que l'équité commande de réparer à hauteur de 3000€.

Rien ne justifie d'écarter l'exécution provisoire dont la présente décision bénéficie de droit, conformément aux dispositions des articles 514 et 514-1 du code de procédure civile, s'agissant en effet d'une instance introduite après le 1er janvier 2020.

Il n’est pas justifié de faire exception aux règles de tarification des émoluments des huissiers de justice en matière d'exécution forcée en application de l'article L111-8 du code des procédures civiles d’exécution.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire mis à disposition au greffe et rendu en premier ressort,

DIT que Madame [K] [E] épouse [F] a été victime d’un accident de la circulation le 17 mars 2018 en qualité de piéton et que son droit à indemnisation est entier ;

DIT que l’Assurance Mutuelle des Motards est tenue d'en réparer toutes les conséquences dommageables ;

CONDAMNE l’Assurance Mutuelle des Motards à payer à Madame [K] [E] épouse [F], à titre de réparation de son préjudice corporel, en deniers ou quittances, provisions non déduites, les sommes suivantes :
- Dépenses de santé actuelles : 345,44 €
- Frais divers : 6.742,83 €
- Aide humaine avant consolidation : 22 420€
- Pertes de gains professionnels actuelles : 19 994,35 €
- Dépenses de santé futures : 8.787,48 €
- Frais de logement adapté : 379,90 €
- Aide humaine future : 150 166,22 €
- Pertes de gains professionnels futurs : 24 426,08€
- Incidence professionnelle : 20.000 €
- Déficit fonctionnel temporaire : 18.397,90 €
- Souffrances endurées : 35.000 €
- Préjudice esthétique temporaire : 2.000 €
- Déficit fonctionnel permanent : 53.280 €
- Préjudice d’agrément : 3.000 €
- Préjudice esthétique définitif : 6.000 €
- Préjudice sexuel : 4.000 € ;

CONDAMNE l’Assurance Mutuelle des Motards à payer à Monsieur [X] [F], à titre de réparation de son préjudice corporel, en deniers ou quittances, provisions non déduites, les sommes suivantes :
- Préjudice matériel : 6.351,50 €
- Préjudice d’affection : 5.000 €
- Préjudice sexuel par ricochet : 4.000 € ;

DEBOUTE Monsieur [X] [F] de sa demande formée au titre de son préjudice d’accompagnement ;

DIT que les intérêts échus des capitaux produiront intérêts dans les conditions fixées par l'article 1343-2 du code civil ;

DÉCLARE le jugement à intervenir commun à la CPAM du Puy-de-Dôme et opposable à la compagnie AG2R prévoyance venant aux droits et obligation de la mutuelle VIA SANTE ;

CONDAMNE l’Assurance Mutuelle des Motards aux entiers dépens, en ce compris les frais de signification de la présente décision et d'expertise, dont distraction au profit de Maître Vanessa BRANDONE, avocat au Barreau de Paris, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;

CONDAMNE l’Assurance Mutuelle des Motards à payer à Madame [K] [E] épouse [F] et Monsieur [X] [F] la somme de 3000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile, cette somme avec intérêts au taux légal à compter de ce jour ;

RAPPELLE que la présente décision bénéficie de l'exécution provisoire de droit ;

DÉBOUTE les parties de toutes leurs demandes plus amples ou contraires.

Fait et jugé à Paris le 11 Juin 2024.

La GreffièreLe Président

Erell GUILLOUËTPascal LE LUONG


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 19ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 23/04085
Date de la décision : 11/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 17/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-11;23.04085 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award