La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/06/2024 | FRANCE | N°22/12998

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 19eme contentieux médical, 10 juin 2024, 22/12998


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

19ème contentieux médical

N° RG 22/12998

N° MINUTE :

Assignations des :
20, 24, 26 et 27 Octobre 2022

CONDAMNE

EG




JUGEMENT
rendu le 10 Juin 2024
DEMANDERESSES

Madame [B] [A]
[Adresse 8]
[Localité 15]

ET

Madame [M] [A]
[Adresse 2]
[Localité 13]

Agissant en leurs noms personnels et en qualité d’ayants droit de Monsieur [K] [A]

Représentées par Maître Elsa CROZATIER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E1873

DÉFENDERESS

ES

La CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DES YVELINES
[Adresse 17]
[Localité 14]

Représentée par Maître Maher NEMER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #R0295

L’INSTI...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

19ème contentieux médical

N° RG 22/12998

N° MINUTE :

Assignations des :
20, 24, 26 et 27 Octobre 2022

CONDAMNE

EG

JUGEMENT
rendu le 10 Juin 2024
DEMANDERESSES

Madame [B] [A]
[Adresse 8]
[Localité 15]

ET

Madame [M] [A]
[Adresse 2]
[Localité 13]

Agissant en leurs noms personnels et en qualité d’ayants droit de Monsieur [K] [A]

Représentées par Maître Elsa CROZATIER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E1873

DÉFENDERESSES

La CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DES YVELINES
[Adresse 17]
[Localité 14]

Représentée par Maître Maher NEMER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #R0295

L’INSTITUT [19]
[Adresse 6]
[Localité 10]

ET

RELYENS MUTUAL INSURANCE anciennement dénommée Société Hospitalière d’Assurances Mutuelles (SHAM)
[Adresse 3]
Expéditions
exécutoires
délivrées le :
[Localité 9]

Décision du 10 Juin 2024
19ème contentieux médical
RG 22/12998

Représentés par la SELARLU RENAN BUDET, membre de l’AARPI APEX AVOCATS, agissant par Maître Renan BUDET, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E1485

La SOCIÉTÉ EXTERION MEDIA (FRANCE) SA
[Adresse 1]
[Localité 18]

Représentée par la SELARL ACTANCE agissant par Maître Eliane CHATEAUVIEUX, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #K0168

Mutuelle MUTUELLE MALAKOFF HUMANIS
[Adresse 5]
[Localité 11]

Non représentée

La S.A.S. AON FRANCE
[Adresse 7]
[Localité 12]

Non représentée

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Laurence GIROUX, Vice-Présidente
Madame Emmanuelle GENDRE, Vice-Présidente
Monsieur Maurice RICHARD, Magistrat honoraire

Assistés de Madame Erell GUILLOUËT, Greffière, lors des débats et au jour de la mise à disposition au greffe.

DEBATS

A l’audience du 02 Avril 2024 présidée par Madame Laurence GIROUX tenue en audience publique, avis a été donné aux parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 10 Juin 2024.

JUGEMENT

- Réputé contradictoire
- En premier ressort
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE

M. [K] [A], né le [Date naissance 16] 1963, a été pris en charge au sein de l’institut [19] en avril 2017 pour un hémangioendothéliome épithélioïde infiltrant de la plèvre gauche découvert lors d’une biopsie pleurale le 22 mars 2017 pour lequel un traitement par chimiothérapie a été retenu.

M. [K] [A] a connu plusieurs complications infectieuses liées à la pose de cathéters veineux centraux (CVC) pour l’administration de la cure, conduisant à des retraits les 7 juin 2017, 28 août 2017, 5 septembre 2017 et à des poses d’autres CVC.

Un nouveau cathéter veineux central avec chambre implantable a été posé sous anesthésie générale le 19 septembre 2017. Des complications ont toutefois eu lieu durant l’intervention en raison d’une perforation carotidienne ayant nécessité une compression temporaire, puis de difficultés pour faire descendre le guide métallique dans la veine cave supérieure. Deux heures après son réveil, M. [K] [A] a présenté une parésie brachiofaciale droite, une aphasie, une hémononégligence droite et l’imagerie cérébrale a mis en évidence un accident ischémique subaigu du territoire sylvien gauche et jonctionnel. M. [K] [A] a été transféré à l’hôpital [23] pour une thrombectomie. Il a toutefois continué à présenter une aphasie et un déficit moteur des membres inférieurs au niveau des releveurs du pied. Il a ensuite été transféré au Centre de rééducation du Vésinet. Il a repris la chimiothérapie en janvier 2018.

Le 14 mars 2018, M. [K] [A] a saisi la Commission régionale de Conciliation et d’Indemnisation (CCI) qui a désigné en qualité d’experts le docteur [S] [X], neurologue, le docteur [Z] [I], cancérologue et le docteur [U] [H], infectiologue, lesquels ont déposé leur rapport le 19 novembre 2018 après un examen du 22 juin 2018. Les experts ont estimé que le comportement de l’opérateur, l’Institut [19], n’avait pas été conforme aux règles de l’art en ce qui concerne les modalités de réalisation de l’acte de soin, pose du CVC avec chambre implantable du 19 septembre 2019 et qu’il existait un lien de causalité entre le dommage (les conséquences neurologiques de la thrombose carotidienne) et les modalités de réalisation de cet acte de soins (perforation carotidienne et compression de la perforation carotidienne). Ils ont par ailleurs considéré que la consolidation n’était pas acquise au jour de l’expertise précisant que « le délai entre la présente expertise et la survenue du dommage neurologique est trop court pour permettre une consolidation. Monsieur [A] devra être revu au minimum d’ici 12 à 18 mois à compter de la présente expertise afin de pouvoir statuer sur les séquelles définitives. »

Au vu de ces éléments, le 24 janvier 2019, la Commission de conciliation et d’indemnisation d’Ile de France a retenu que la réparation des préjudices subis par M. [K] [A] incombait entièrement à l’Institut [19].

M. [K] [A] est décédé le [Date décès 4] 2019.

A la suite d’une nouvelle saisine de la CCI, le docteur [X] et la docteur [I] ont remis un rapport complémentaire le 28 novembre 2021 retenant notamment les conclusions suivantes :
Consolidation au 1er mai 2019, à la veille du décès, le décès étant lié à la pathologie cancéreuse et non à la complication neurologiqueDFP : 75% prenant en compte l’hémiplégie droite, ne permettant qu’une fonctionnalité très limitée au niveau de la main droite, permettant un déplacement limité avec un périmètre de marche inférieur à 200 m, prenant en compte les troubles de la parole gênant toute communication ;Préjudice d’agrément : M. [A] ne peut plus s’adonner à un certain nombre d’activités d’agrément et de loisirs qui pouvaient déjà être quelque peu limitées par la maladie causale mais qui, du fait de l’hémiplégie et de l’aphasie, sont encore plus importantes. Les facultés de communication interpersonnelles sont réduites. La part respective du retentissement sur les activités d’agrément est de 60% pour l’accident neurologique et de 40% ;Préjudice esthétique permanent : le préjudice esthétique permanent imputable au seul accident vasculaire cérébral prenant en compte la période des soins, les investigations, la rééducation, la boiterie, l’utilisation de cannes, l’hémiplégie résiduelle avec le membre supérieur droit impotent, le trouble du langage, la déformation faciale, est de 6/7 ;Préjudice sexuel : l’hémiplégie et l’aphasie représentent un handicap certain pour réaliser un acte de relation sexuelle. On doit tenir compte que la pathologie cancéreuse préalable pouvait avoir un retentissement également sur l’activité sexuelle notamment en termes de libido. L’hémiplégie constitue certainement un handicap supplémentaire qui gêne la réalisation de l’acte sexuel ;Dépenses de santé actuelles : tous les soins d’hospitalisation complète, hospitalisation de jour, rééducation en relation avec l’hémiplégie et l’aphasie sont à prendre en compte de la complication.Frais de logement adapté : achats en lien avec l’hémiplégie ;Tierce personne : 6h par jour de tierce personne active non médicalisée, le jour où M. [A] n’était pas en hôpital de jour et 4h par jour de tierce personne active non médicalisée lorsqu’il était en hôpital de jour. Il a eu une période où il a été en hôpital de jour 5 jours par semaine et une autre période où il n’y avait que plus que 3 jours par semaine. A compter de la date de retour définitif à domicile le 20 juillet 2018, les besoins sont de 6h par jour de tierce personne active non médicalisée ;Pertes de gains professionnels futurs et incidence professionnelle : l’hémiplégie est venue s’ajouter à la pathologie cancéreuse qui justifiait l’arrêt de travail. Néanmoins on doit admettre que si la pathologie cancéreuse avait été stabilisée, l’hémiplégie et l’aphasie auraient été un obstacle définitif à toute reprise professionnelle. Cependant, compte tenu du pronostic de la pathologie cancéreuse, il est peu probable que M. [A] aurait pu reprendre son travail.
Au vu de ces conclusions, le 3 février 2022, la CCI a retenu que le décès de M. [K] [A] a résulté de l’évolution défavorable du cancer qu’il présentait et que les séquelles neurologiques en lien avec l’accident médical fautif du 19 septembre 2017 n’ont pas eu d’incidence sur la survenue du décès. Elle émet donc un avis sur l’indemnisation des préjudices jusqu’au décès.

Par actes en date des 20, 24, 26 et 27 octobre 2022 Mme [B] [A], et Mme [M] [A], épouse et fille de M. [K] [A] ont ainsi fait assigner, l’Institut [19], la Société hospitalière d’Assurances Mutuelles (SHAM), la Caisse primaire d’Assurance Maladie (CPAM) des Yvelines, EXTERION MEDIA SA, la MUTUELLE MALAKOFF HUMANIS et AON France devant le tribunal de céans aux fins de voir liquider leurs préjudices personnels et en qualité d’ayants droit de M. [K] [A].

Aux termes de leurs conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 26 septembre 2023, auxquelles il est référé expressément conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, Mme [B] [A] et Mme [M] [A] demandent au tribunal de :

Condamner in solidum l’institut [19] et la SHAM à indemniser les préjudices subis en raison de l’accident vasculaire cérébral dont a été victime M. [K] [A] le 19 septembre 2017 ;Condamner in solidum l’institut [19] et la SHAM à leur verser au titre de l’action successorale les sommes suivantes en réparation des préjudices subis par M. [K] [A] :. Dépenses de santé actuelles : 1.225 euros ;
. Frais divers : 5.958 euros ;
. Frais divers assistance tierce personne : 74.163,84 euros ;
. Frais divers logement : 23.793,99 euros ;
. Déficit fonctionnel temporaire : 15.306 euros ;
. Préjudice esthétique temporaire : 30.000 euros ;
. Souffrances endurées : 40.000 euros ;
. Préjudice d’anxiété : 35.000 euros ;
. Subsidiairement souffrances endurées : 75.000 euros ;
Fixer la créance des tiers payeurs ;Parfaire les sommes à la date du jugement à intervenir ;Condamner in solidum l’institut [19] et la SHAM à verser à Mme [P] [A] à titre personnel :. Préjudice d’accompagnement : 30.000 euros,
. Préjudice d’affection : 50.000 euros ;
. Perte de revenus des proches : 519.005 euros
. Dépenses de santé : 7.772,56 euros ;
. Pertes de gains professionnels : 1.176 euros ;
. Incidence professionnelle : 10.000 euros ;
Condamner in solidum l’institut [19] et la SHAM à verser à Mme [M] [A] à titre personnel :. Préjudice d’accompagnement : 15.000 euros ;
. Préjudice d’affection : 30.000 euros ;
. Perte de revenus des proches : 2.972 euros.
Ordonner que ces sommes portent intérêts au taux légal à compter de la signification de la présente décision et ordonner leur capitalisation par année entière ;Condamner in solidum l’institut [19] et la SHAM à leur verser la somme de 5.000 euros chacune au titre de l’article 700 du code de procédure civile,Condamner in solidum l’institut [19] et la SHAM aux entiers dépens ainsi qu’aux émoluments des articles L441-1 et A444-32 du code du commerce ;Dire n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire du jugement.
Aux termes de ses dernières écritures récapitulatives notifiées par voie électronique le 19 décembre 2022, auxquelles il est référé expressément conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM) des Yvelines demande au tribunal de :
La recevoir en ses demandes et l’y déclarer bien fondée ;Condamner solidairement l’INSTITUT [19] et son assureur la SHAM à lui verser la somme de 99.254,12 euros à due concurrence de l’indemnité réparant le préjudice corporel de la victime, toutes réserves étant faites pour les prestations non connues à ce jour et pour celles qui pourraient être versées ultérieurement ;Dire que cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la demande ; Condamner solidairement l’INSTITUT [19] et son assureur la SHAM à lui verser la somme de 3.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile ;Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir nonobstant l’appel et sans constitution de garantie ;Condamner également la même en tous les dépens dont distraction au profit de la SARL BOSSU&ASSOCIES, avocats, et ce en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Aux termes de leurs dernières écritures récapitulatives notifiées par voie électronique le 21 novembre 2023, auxquelles il est référé expressément conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, l’INSTITUT [19] et RELYENS MUTUAL INSURANCE anciennement dénommée société hospitalière d’assurances mutuelles (SHAM) demandent au tribunal de :
Constater que l’Institut [19] et son assureur RELYENS MUTUAL INSURANCE, offrent d’indemniser les préjudices suivants, dont il conviendra de déduire la provision de 125.000 euros déjà versée :. Déficit fonctionnel temporaire total : 12.755 euros ;
. Souffrances endurées : 30.000 euros ;
. Préjudice esthétique temporaire : 15.000 euros ;
. Dépenses de santé actuelles : 895 euros ;
. Frais divers : 23.793,99 euros ;
. Assistance par tierce personne temporaire : 45.184 euros ;
. Préjudice d’accompagnement de Mme [P] [A] : 15.000 euros ;
Préjudice d’accompagnement de Mme [M] [A] : 7.500 euros ;
Débouter les consorts [A] de toutes demandes plus amples ou contraires formulées à leur encontre ;Débouter la CPAM des Yvelines de l’intégralité de ses demandes ;Réduire à de plus justes proportions la demande formulée par les consorts [A] au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;Écarter l’exécution provisoire de droit.
Par conclusions signifiées le 9 décembre 2022, auxquelles il est référé expressément conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la société EXTERION MEDIA demande au tribunal de :
Constater que Mme [P] [A] et Mme [M] [A] ne formulent aucune demande à son encontre ;Constater au surplus que la société EXTERION MEDIA n’a aucun lien de près ou de loin avec M. [K] [A] dont les circonstances du décès sont à l’origine du présent litige ; Prononcer en conséquence sa mise hors de cause.
AON France et la MUTUELLE MALAKOFF HUMANIS, quoique régulièrement assignées, n’ont pas constitué avocat. Le présent jugement, susceptible d’appel, sera donc réputé contradictoire.

La clôture de la présente procédure a été prononcée le 27 novembre 2023.

L'affaire a été plaidée à l’audience du 2 avril 2024 et mise en délibéré au 10 juin 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire sur la demande de mise hors de cause de la société EXTERION MEDIA SA, il y a lieu de relever qu’aucune demande n’est formulée par cette société et à l’encontre de celle-ci et qu’il y a dès lors lieu de faire droit à cette demande.

I-SUR L'ACTION EN RESPONSABILITÉ INTENTEE

1. Sur la responsabilité de l’établissement de soins :

Il résulte des dispositions des articles L.1142-1-I et R.4127-32 du code de la santé publique que, hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute.

Tout manquement à cette obligation qui n'est que de moyens, n'engage la responsabilité du praticien que s'il en résulte pour le patient un préjudice en relation de causalité directe et certaine.

Le contrat d'hospitalisation et de soins met à la charge de l'établissement de santé l'obligation :
- de mettre à la disposition du patient un personnel qualifié (personnel paramédical et médecins) et en nombre suffisant, pour qu'il puisse intervenir dans les délais imposés par son état,
- de fournir pour l'accomplissement des actes médicaux des locaux adaptés et des appareils sans défaut ayant fait l'objet de mesures d'aseptisation imposées par les données acquises de la science,
- de fournir une information sur l'état de ses locaux (inadaptation de ceux-ci à l'état du patient, notamment en l'absence de service de réanimation),
- d'exercer une surveillance sur les patients hospitalisés ;

En vertu du contrat le liant au patient, l'établissement de santé est responsable des fautes commises tant par lui-même que par ses substitués ou ses préposés qui ont causé un préjudice à ce patient.

Il est constant que n’engage pas sa responsabilité à l’égard des tiers le préposé qui agit sans excéder les limites de la mission qui lui a été impartie par son commettant.
Mme [B] [A] et Mme [M] [A] se réfèrent à l’avis de la CCI d’Ile de France en date du 24 janvier 2019 selon lequel l’accident vasculaire cérébral subi par M. [K] [A] est directement imputable aux fautes commises par l’équipe médicale de l’Institut [19].

L’institut [19] et RELYENS MUTUAL INSURANCE ne contestent pas le principe de la responsabilité de l’établissement dans la survenue de l’accident vasculaire cérébral et les séquelles neurologiques consécutives.

Il ressort du rapport d’expertise déposé avant consolidation le 19 novembre 2018 et qui n’est pas remis en cause par le rapport déposé le 28 novembre 2021, que la prise en charge des infections associées aux CVC avec chambre implantable, le diagnostic et le traitement ont été conduits conformément aux règles de l’art. En revanche les experts ont considéré que le comportement de l’opérateur n’était pas conforme s’agissant des modalités de réalisation de l’acte de soin de pose du CVC avec chambre implantable du 19 septembre 2017 ayant conduit à un accident ischémique en raison de :
l’absence de prise en compte des difficultés de poses antérieures de CVC conduisant à exclure l’abord de la jugulaire interne gauche ;de l’insistance anormale pour tenter de ponctionner la jugulaire interne gauche alors que d’autres alternatives existaient et qu’il ne s’agissait pas d’un contexte d’urgence ;du geste délétère de compression durant 10 minutes de la région carotidienne, chez un patient en anesthésie générale, pour contrôler la fuite sanguine à partir de la ponction carotidienne, dans la mesure où il interrompait le flux carotidien et en l’absence de possibilité du patient de manifester une intolérance à la manœuvre ;de la surveillance post procédure qui n’a pas été attentive, la complication neurologique n’ayant été suspectée qu’au moins deux heures après la fin de la procédure.
Par ailleurs, les experts ont retenu un lien de causalité entre le dommage (les conséquences neurologiques de la thrombose carotidienne) et les modalités de réalisation de cet acte de soins.

Ainsi, il ressort clairement de cette expertise et il n’est pas contesté par les parties que les modalités de l’intervention du 19 septembre 2017 constituent une faute de l’équipe médicale engageant la responsabilité de l’établissement qui sera tenu de réparer les conséquences dommageables pour M. [K] [A] et ses ayants-droits.

2. Sur le préjudice imputable à l’acte médical et le lien de causalité :

Mme [B] [A] et Mme [M] [A] font valoir qu’en application du principe de l’équivalence des conditions, l’établissement doit être tenu pour responsable non seulement du dommage neurologique, mais également du décès prématuré de M. [K] [A] estimant que l’accident vasculaire fautif a concouru à ce décès survenu le [Date décès 4] 2019. Elles rappellent qu’aux termes de leur rapport les experts ont conclu que la cause directe du décès a été un choc septique mais que les séquelles neurologiques ont nécessité l’arrêt du traitement anti-cancéreux et ont eu une incidence sur les décisions thérapeutiques. Elles font ainsi valoir que la chimiothérapie a été suspendue durant quatre mois ce qui a conduit à l’aggravation de la maladie cancéreuse. Elles relèvent également que le Dr [I] dans son rapport a considéré que les séquelles neurologiques présentées par [K] [A] ont pu contribuer à écarter certains choix thérapeutiques ce qui a eu une incidence sur l’évolution de la pathologique et sur le décès. Elles ajoutent que l’accident vasculaire a eu une incidence sur le « lâcher prise » et sur l’évolution de la maladie. Elles précisent que l’hémangioendothéliome épithélioïde dont [K] [A] était atteint est d’évolution relativement lente et qu’au moment de l’AVC la maladie cancéreuse était stabilisée comme l’indiquent les experts. Elles font valoir au regard de la documentation médicale qu’elles produisent que la perte de chance quant à l’évolution positive de son cancer peut être évaluée entre 100% et 59% et retiennent donc une perte de chance de 80% pour les préjudices extrapatrimoniaux.

L’institut [19] et RELYENS MUTUAL INSURANCE ne contestent pas l’imputabilité du dommage neurologique. Cependant, ils font valoir que le décès n’est aucunement imputable à cette prise en charge mais à la pathologie cancéreuse. Ils rappellent que les experts ont écarté toute relation causale entre l’accident vasculaire et le décès.

SUR CE,

La réalité du lien n’est pas contestée entre l’intervention du 19 septembre 2017 et le dommage neurologique retenu lors de l’expertise à savoir :
Initialement des troubles neurologiques consistant en une parésie brachiofaciale droite, une aphasie, une amputation du champ visuel droit et une héminégligence droite ;A trois mois d’évolution la persistance d’une aphasie et des troubles praxiques ;A 7 mois des troubles cognitifs avec altération des capacités d’attention soutenue, d’attention divisée ainsi que la vitesse de traitement et un affaiblissement des capacités d’attention divisée ainsi qu’un syndrome dysexécutif ;A 10 mois une aphasie et des troubles praxiques importants ;Au jour de l’examen d’expertise du 22 juin 2018 une hémiplégie droite avec aphasie.
Il en résulte que l’ensemble de ces conséquences, directement liées à l’acte incriminé devront être indemnisées par l’établissement et son assureur.

S’agissant du décès de M. [K] [A] survenu le [Date décès 4] 2019, il ressort des expertises que Monsieur [K] [A] présentait au moment de son AVC une hémangioendothéliome épithélioide infiltrant la plèvre avec métastases pulmonaires et osseuses pour lequel un traitement par chimiothérapie a été préconisé. Les premiers signes de la pathologie sont apparus au mois de mai 2016, mais le traitement n’a été initié qu’à compter du mois de mai 2017 en raison des difficultés de diagnostic. Le traitement a été interrompu du 19 septembre 2017 au 29 janvier 2018 en raison des complications thrombo-emboliques en rapport avec la pose du cathéter. Il a ensuite repris son traitement de chimiothérapie le 29 janvier 2018, étant précisé qu’il présentait alors des nodules sous cutanés thoraciques et sous claviculaires droits. Les comptes rendus de consultations font ensuite état d’une stabilisation des atteintes liées à la pathologie cancéreuse, d’une bonne tolérance des traitements qui pourraient être poursuivis jusqu’à 9 ou 12 cures. Il est ensuite relevé lors de la deuxième expertise une évolution de la pathologie à compter de janvier 2019 conduisant à la mise en place d’une 2ème ligne thérapeutique, puis une altération de l’état général avec troubles digestifs en mars 2019 conduisant à une 3ème ligne thérapeutique à compter du 4 avril 2019 pour laquelle une bonne tolérance est constatée. M. [K] [A] a été hospitalisé le 29 avril 2019 pour douleurs abdominales et vomissements, il a présenté le [Date décès 4] 2019 une « hypotension brutale réfractaire au remplissage » attribuée à un choc septique. Devant la persistance de l’hypotension et de l’encombrement bronchique, une décision de prise en charge palliative est prise et M. [K] [A] décèdera le jour même.

L’expertise déposée le 19 novembre 2018, avant consolidation retient les éléments suivants s’agissant de l’impact de l’accident médical imposant un arrêt momentané de la chimiothérapie, sur l’évolutivité de l’hémangioendothéliome épithéloïde (p58) : 
« - l’effet de la chimiothérapie a été relativement satisfaisant sur la maladie générale et la radiothérapie a permis de traiter les métastases osseuses douloureuses néanmoins le traitement a dû être interrompu rapidement (septembre 2017) en raison de complications thrombo-emboliques graves en rapport avec la pose de cathéter veineux centraux.
Devant une reprise évolutive de la maladie, la chimiothérapie par Taxol est à nouveau administrée à partir de janvier 2018. Lors de la consultation expertale, l’état général du patient était relativement satisfaisant dans le contexte tumoral mais surtout marqué par des séquelles neurologiques importantes des accidents vasculaires.Même si la maladie cancéreuse est actuellement stabilisée, il est impossible de parler de consolidation dans la mesure où le risque de reprise évolutives est très important. »
Sur le point de la pathologie cancéreuse, les experts ont en outre indiqué (p64) :
« Monsieur [K] [A] a une maladie sous-jacente, un hémangioendothéliome épithélioïde, qui implique actuellement une prise en charge oncologique lourde en raison de son évolutivité.
L’hémangioendothéliome épithélioïde est une tumeur d’origine vasculaire, rare, classée en potentiel d’agressivité entre les hémangiomes et les angiosarcomes. L’évolution reste principalement locale mais peut également donner des métastases
L’hémangioendothéliome épithélioïde (HEE) est une tumeur vasculaire rare d’origine endothéliale touchant préférentiellement le sexe féminin, affectant principalement les tissus mous, l’os et le foie. Sa localisation pulmonaire est rare. Elle est anciennement dénommée tumeur broncho-alvéolaire sclérosante intravasculaire. Sa présentation clinique est non spécifique et l’imagerie peut être trompeuse, simulant une métastase pulmonaire.
Le diagnostic de certitude de l’HEE repose sur la biopsie pulmonaire chirurgicale, confirmée par immunohistochimie.
Le pronostic est réservé dans le cas d’une maladie polymétastatique même si l’évolution est relativement lente (p64) »
Lors de l’expertise déposée le 28 novembre 2021 après le décès de M. [K] [A], les experts relèvent :
« (p6) l’évolution clinique de la pathologie cancéreuse de Monsieur [A] est donnée par les comptes rendus d’hospitalisation du 29/03/2019 au 11/04/2019 et du 30/04/2019 au 2/05/2019 de l’institut [20]. Ces comptes rendus permettent de bien préciser que le décès de Monsieur [A] n’est pas directement lié à l’accident vasculaire cérébral, mais à la pathologie cancéreuse dont il était atteint et dont l’évolution a commencé surtout à se faire sentir sur son état général et fonctionnel, à compter du mois de février 2019 »
« (p8)  la cause directe du décès a été un choc septique chez un sujet à l’état général très altéré avec troubles digestifs et encombrement respiratoire et une pathologique neurologique importante.
Pour l’expert cancérologue, le Docteur [Z] [I], la question se pose de l’incidence des séquelles neurologiques sur les décisions thérapeutiques cancérologiques au moment où l’état cancérologique de Monsieur [A] s’est aggravé. Ceci signifie que l’état neurologique et le handicap ont pu possiblement contribuer à ce qu’il ne soit pas entrepris au moment où Monsieur [A] s’aggrave, un traitement plus agressif ou même qu’il ne lui soit pas proposé un éventuel traitement expérimental et de ce fait constituer une perte de chance de ne pas évoluer rapidement vers un décès.
Cependant, une chimiothérapie adaptée à la pathologie cancéreuse a tout de même été effectuée et malgré le traitement, la maladie a continué à évoluer.
Il s’agit d’une pathologie rare pour laquelle les résultats thérapeutiques sont souvent peu importants malgré une prise en charge adaptée. »

Il ressort de ces éléments qu’en dépit de l’hypothèse émise par le Dr [I] lors de l’expertise, les experts n’ont pas retenu de lien de causalité entre les séquelles neurologiques présentées par M. [K] [A] et le décès qu’ils attribuent uniquement à l’évolution de la pathologie cancéreuse. Il y a lieu de relever que l’intervention à l’origine des troubles neurologiques a été pratiquée le 19 septembre 2017, que la chimiothérapie a été reprise le 29 janvier 2018 et que l’aggravation de l’état de santé de M. [K] [A] est survenue au mois de février 2019, indiquant que la reprise du traitement en dépit de son interruption de quatre mois a initialement permis de stabiliser l’évolution du cancer. Aucun élément produit ne permet ainsi d’indiquer que l’interruption du traitement durant cette période a réduit son efficacité après sa reprise et ait eu une incidence dans l’évolution de la pathologie cancéreuse ayant conduit au décès de M. [K] [A] le [Date décès 4] 2019.

Par ailleurs, il ressort des comptes rendus médicaux reproduits dans le corps de l’expertise qu’à compter de la dégradation de l’état de santé de M. [K] [A] en début d’année 2019, de nouvelles lignes thérapeutiques ont été initiées afin d’adapter la chimiothérapie à l’évolution de la pathologie cancéreuse. Il n’est produit aucun élément permettant de confirmer l’hypothèse émise par le Dr [I] établissant que les choix thérapeutiques au moment de l’aggravation de l’état de santé de M. [K] [A] auraient été dictés par les séquelles neurologiques qu’il présentait et il n’est apporté aucune précision sur la nature du traitement qui aurait été écarté du fait de ces séquelles permettant d’éviter ou à tout le moins de retarder le décès de M. [K] [A]. De même le lien entre le décès de M. [K] [A] et les conséquences psychologiques de ses troubles neurologiques n’apparaît pas établi alors qu’il ressort des comptes rendus médicaux et de l’expertise qu’il a suivi un traitement de manière quasi ininterrompue, acceptant les nouveaux protocoles qui lui ont été proposés.

Par ailleurs, l’extrait de l’étude médicale portant sur l’hémangioendothéliome épithélioïde à laquelle Mme [B] [A] et Mme [M] [A] se réfèrent pour retenir une perte de chance de 80% quant à l’évolution positive de sa pathologie cancéreuse, indique un taux de survie en cas d’exérèse d’une tumeur isolée selon la taille de la tumeur. Aucun élément ne permet de considérer que ce pronostic est applicable à la pathologie dont M. [K] [A] était atteint et qui a conduit à un traitement par chimiothérapie. Cette documentation ne permet pas de déduire une évolution anormalement rapide de la pathologie particulière de M. [K] [A] liée aux séquelles neurologiques qu’il présentait et de contredire les conclusions de l’expertise sur ce point.

Or, la perte de chance se définit comme la disparition actuelle et certaine d’une évolution favorable. Compte tenu des éléments précédemment indiqués, de la gravité de la pathologie dont M. [K] [A] était atteint, de son caractère évolutif et rare, de la durée de la période écoulée entre la reprise du traitement et le décès, de l’évolution de la prise en charge thérapeutique durant cette période, il ne peut être retenu de manière suffisamment certaine une perte de chance d’évolution favorable de la pathologie cancéreuse liée à l’accident vasculaire cérébral. Aussi, sans minimiser l’importance des séquelles neurologiques consécutives à l’intervention du 19 septembre 2017 et leur impact sur la qualité de vie de M. [K] [A] jusqu’à son décès, il ne sera pas fait droit aux demandes d’indemnisation en lien avec la perte de chance d’une évolution positive du cancer de M. [K] [A] et avec son décès prématuré.

En conséquence, l’INSTITUT [19] et la société RELYENS MUTUAL INSURANCE (anciennement SHAM) seront déclarés responsables in solidum uniquement des conséquences dommageables directement liées à l'intervention chirurgicale subie par [K] [A], le 19 septembre 2017.

II- SUR LE PRÉJUDICE DE M. [K] [A] AU TITRE DE L’ACTION SUCCESSORALE

Au vu de l'ensemble des éléments produits aux débats, le préjudice subi par [K] [A], né le [Date naissance 16] 1963 et décédé le [Date décès 4] 2019, sera réparé ainsi que suit, étant observé qu'en application de l'article 25 de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006, d'application immédiate, le recours subrogatoire des tiers payeurs s'exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'ils ont pris en charge.

Il est produit un acte de notoriété dressé le 24 juillet 2019 indiquant que la dévolution successorale s’établit entre Mme [B] [A], conjointe survivante bénéficiaire d’une donation entre époux et Mme [M] [A], sa fille. Il y a lieu de dire qu’en présence de plusieurs héritiers, les sommes allouées au titre du préjudice de M. [K] [A] seront allouées à sa succession.

1-Préjudices patrimoniaux :

- Dépenses de santé avant consolidation

Aux termes du relevé de créance définitive daté du 23 novembre 2022, le montant définitif des débours de la CPAM s'est élevé à 99.254,12 euros, avec notamment :
Frais hospitaliers : . Hôpital [22] du 19/09/2017 au 2/10/2017 : 16.133 euros
. Centre le Vésinet du 2/10/2017 au 14/11/2017 : 23.280 euros
. Centre le Vésinet – HDJ du 15/11/2017 au 20/07/2018 : 40.096 euros
. Hôpital [21] du 23/11/2018 au 24/11/2018 : 1.452 euros
Frais médicaux : du 24/10/2017 au 19/04/2019 : 6.296,85 eurosFrais d’appareillage du 02/02/2018 au 13/04/2019 : 386,02 eurosFrais de transport du 20/09/2017 au 24/04/2019 : 11.610,25 euros.
Sur la demande au titre des frais de santé restés à charge :

Mme [B] [A] et Mme [M] [A] sollicitent la somme de 1.225 euros au titre des dépenses de santé restées à charge correspondant à une facture d’IRM, des séances d’ostéopathie, de sophrologie, d’hypnothérapie, de pédicure.

L’institut [19] et RELYENS MUTUAL INSURANCE offrent la somme de 895 euros s’opposant à la prise en charge des frais de sophrologie d’un montant de 330 euros.

Au regard de l’accord de l’institut [19] et de son assureur, la somme de 895 euros sera allouée au titre des frais d’IRM, d’ostéopathie, d’hypnothérapie et de pédicure. S’agissant des dépenses de sophrologie, il est produit des factures correspondant à des consultations du 20 février 2018 au 25 avril 2018 pour un montant de 330 euros au total. Aux termes de l’expertise du 19 novembre 2018, il est relevé que les troubles neurologiques de M. [K] [A] ont eu un impact psychologique important. Ces consultations qui, en l’espèce, relèvent de la prise en charge psychologique doivent être regardées comme directement imputables à l’acte de soins fautif et seront en conséquence indemnisées.

Il sera en conséquence alloué la somme sollicitée de 1.225 euros au titre des dépenses de santés restées à charge.

Sur la demande de la CPAM de YVELINES :

En application de l'article L.376-1 du Code de la Sécurité Sociale, la CPAM dispose d'un recours subrogatoire sur les sommes versées à la victime en réparation de son préjudice corporel.

La CPAM des YVELINES fait valoir une créance de 99.254,12 euros au titre des dépenses de santé prises en charge selon état des créances en date du 23 novembre 2022. Cette créance est étayée par l'attestation d'imputabilité du docteur [D] et correspond aux frais exposés au regard du seul acte médical du 19 septembre 2017 ressortant de l’expertise menée par la CCI. L’institut [19] et RELYENS MUTUEL INSURANCE s’opposent à cette demande indiquant que la notification définitive des débours ne permet pas de justifier de l’ensemble des prestations versées notamment au titre des frais médicaux et d’appareillage et que l’attestation d’imputabilité d’un médecin est insuffisante à cet égard. Ils notent à titre d’exemple que les frais de rééducation ont débuté antérieurement au fait générateur du 19 septembre 2017.

Il convient de rappeler que la CPAM est soumise aux règles de la comptabilité publique sous contrôle de la Cour des Comptes, que ses décomptes sont vérifiés par un agent comptable sous sa responsabilité personnelle et qu’en vertu des dispositions des articles R. 315-1 et suivants du code de la sécurité sociale, les médecins contrôleurs appartiennent au service du contrôle médical qui est un service national, totalement indépendant et détaché des caisses primaires d’assurance maladie.

Il s’ensuit que les défendeurs ne sont pas fondés à soutenir que l’attestation délivrée par le médecin conseil du contrôle médical ne permet pas d’attester de l’imputabilité des débours à l’intervention du 19 septembre 2017, l’attestation d’imputabilité se présentant comme l’avis d’un tiers technicien dont le caractère précisément motivé permet la critique et une discussion contradictoire, spécialement sur l’imputabilité des frais à l’accident médical litigieux. Dans ces conditions, cette attestation d’imputabilité constitue un élément de débat recevable et pertinent au soutien de l’action de la CPAM et qu’il incombe aux défendeurs, qui ont la possibilité de mobiliser des moyens propres à le critiquer, de discuter. Ainsi il leur appartenait, dans le cas où ils estimaient insuffisants les éléments produits et en particulier l’attestation du médecin-conseil, d’inviter la CPAM à faire préciser par ce dernier la méthode mise en œuvre pour établir le montant réclamé et, au besoin, de solliciter une mesure d’expertise ou toute autre mesure d’instruction afin de vérifier l’imputabilité des dépenses. La seule mention erronée de l’attestation concernant la date de début des frais de rééducation au 18 août 2017 au lieu du 2 octobre 2017, date de début de son séjour au Centre le Vésinet n’est pas suffisante pour remettre en cause la fiabilité de cette pièce.

Il y a lieu, dans ces conditions et au vu des documents produits de fixer l’indemnité due à ce titre à la somme de 99.254,12 euros.

Par ailleurs, en application de l’article 1231-6 du code civil, le point de départ des intérêts pour les créances des organismes sociaux est celui du jour de leur première demande en justice et à partir de leur règlement pour les débours effectués postérieurement.

Il convient en conséquence de fixer la condamnation avec intérêts au taux légal à compter du 19 décembre 2022, date de signification de ses premières conclusions au fond.

Il n’y a pas lieu en revanche de réserver les prestations non connues à ce jour et celles qui pourraient être versées ultérieurement alors que la CPAM a produit ses débours définitifs le 23 novembre 2022 et que M. [K] [A] est décédé le [Date décès 4] 2019.

- Frais divers

L'assistance de la victime lors des opérations d'expertise par un, ou des, médecin conseil en fonction de la complexité du dossier, en ce qu'elle permet l'égalité des armes entre les parties à un moment crucial du processus d'indemnisation, doit être prise en charge dans sa totalité. De même, ces données peuvent justifier d'indemniser les réunions et entretiens préparatoires. Les frais d'expertise font partie des dépens.

Mme [B] [A] et Mme [M] [A] sollicitent la somme de 5.958 euros au titre des frais de médecin conseil. L’institut [19] et RELYENS MUTUAL INSURANCE s’y opposent estimant qu’il n’est pas établi que ces frais n’ont pas fait l’objet d’une prise en charge au titre d’une assurance de protection juridique.

Mme [B] [A] et Mme [M] [A] produisent les factures acquittées correspondantes et un courriel du 1er septembre 2023 de l’assureur GMF indiquant que les frais d’expertise ne sont pas pris en charge. En conséquence la somme sollicitée sera allouée.

Mme [B] [A] et Mme [M] [A] sollicitent la somme de 23.793,99 euros au titre des frais d’aménagement du domicile, somme à laquelle l’institut [19] et RELYENS MUTUAL INSURANCE ne s’opposent pas. Dans ces conditions, la somme de 23.793,99 euros correspondant aux frais d’adaptation du logement au handicap de M. [K] [A] sera allouée.

Il sera en conséquence alloué la somme de 29.751,99 euros au titre des frais divers.

- Assistance tierce personne provisoire

Il convient d'indemniser les dépenses destinées à compenser les activités non professionnelles particulières qui ne peuvent être assumées par la victime directe durant sa maladie traumatique, comme l'assistance temporaire d'une tierce personne pour les besoins de la vie courante, étant rappelé que l’indemnisation s'entend en fonction des besoins et non en fonction de la dépense justifiée. Le montant de l'indemnité allouée au titre de l'assistance d'une tierce personne ne saurait être subordonné à la production de justificatifs des dépenses effectives.

Mme [B] [A] et Mme [M] [A] sollicitent la somme de 74.163,84 euros sur la base d’un tarif horaire de 20 euros sur 459 jours incluant une aide humaine durant l’hospitalisation du 19 septembre 2017 au 15 novembre 2017 correspondant à 2h par jour, Mme [M] [A] ayant pris en charge le linge, les démarches administratives et les services non procurés par l’hôpital. Soit le calcul suivant :
. 4h par jour 5 jours sur 7 et 6h par jour 2 jours sur 7, soit 32 heures par semaine pendant 35,15 semaines = 22.496 euros
. 6h par jour du 21 juillet 2018 au 1er mai 2019, soit 285 jours x 6h x 20 euros = 34.200 euros
. 2h par jour du 19 septembre 2017 au 15 novembre 2017, soit 58 jours x 2h x 20 euros = 2.320 euros
Soit un total de 74.163,84 euros sur 459 jours.

L’institut [19] et RELYENS MUTUAL INSURANCE offrent la somme de 45.184 euros sur la base des conclusions des experts, sans tenir compte d’une aide durant l’hospitalisation en appliquant un tarif horaire de 16 euros.

En l'espèce, il ressort du 2ème rapport d'expertise remis le 28 novembre 2021 ce qui suit s'agissant de l'assistance tierce-personne provisoire :
6h par jour d’aide active non médicalisée les jours où M. [K] [A] n’était pas en hôpital de jour ;4h par jour d’aide active non médicalisée lorsqu’il était en hôpital de jourIl a eu une période où il a été en hôpital de jour 5 jours par semaine et une autre période où il n’y avait plus que 3 jours par semaineL’hospitalisation de jour s’est étendue du 15/11/2017 au 20/07/2018, la date de retour définitif au domicile est donc le 20/07/2018A compter de cette date, les besoins en tierce personne active non médicalisée sont identiques à ceux pour les jours sans hôpital de jour.
Sur la base de ces conclusions, les parties s’accordent pour retenir :
Du 16 novembre 2017 au 19 juillet 2018, soit 35,14 semaines. 4h par jour 5 jours sur 7 et 6h par jour 2 jours sur 7, soit 32 h par semaine ;
Du 20 juillet 2018 au 1er mai 2019 : 6h par jour pendant 285 jours.
Il y a lieu de retenir un taux horaire de 18 euros, sur une période de 365 jours, ce taux incluant la prise en compte des jours fériés et des congés payés et est adapté à la situation de la victime, il convient d'allouer la somme suivante :
(18 euros x 32h x 35,14 semaines) + (18 euros x 6h x 285 jours) = 20.240,64 euros + 30.780 euros = 51.020,64 euros.

En outre, l’hospitalisation n’exclut pas en soi le besoin d’assistance par tierce personne dans la mesure où ce besoin est particulièrement justifié durant cette période. Les experts interrogés sur ce point ont indiqué qu’« il peut être compris qu’un patient hospitalisé ait besoin d’une aide active pour l’entretien du linge, pour certaines démarches, et que ces aides ne sauraient dépasser 2h par semaine. La présence et le soutien psychologique de Madame [A] à son mari relèveraient plutôt du temps que l’épouse a consacré à son mari pendant cette période de soins et résultent plus d’un préjudice par ricochet ».

En l’espèce, au regard de l’importance du handicap de M. [K] [A] à la suite de l’accident vasculaire cérébral nécessitant notamment la prise en charge de l’ensemble des démarches administratives par un tiers, il sera accordé, conformément à l’appréciation des experts, une indemnité correspondant à 2 heures d’assistance par semaine durant la période d’hospitalisation, soit (18 euros x 2h x 8,29 semaines) = 298,44 euros.

Il sera donc alloué la somme totale de 51.319,08 euros au titre de l’assistance par tierce personne provisoire.

2 – Préjudices extra-patrimoniaux :

- Déficit fonctionnel temporaire

Ce poste de préjudice indemnise l'invalidité subie par la victime dans sa sphère personnelle pendant la maladie traumatique. Le déficit fonctionnel temporaire inclut pour la période antérieure à la date de consolidation, l'incapacité fonctionnelle totale ou partielle ainsi que le temps d'hospitalisation et les pertes de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique.

Mme [B] [A] et Mme [M] [A] sollicitent la somme de 15.306 euros sur la base d’un montant journalier de 30 euros pour un déficit total soit :
. 58 jours x 30 euros
. 532 jours x 30 euros x 85%

L’institut [19] et RELYENS MUTUAL INSURANCE offrent la somme de 12.755 euros sur la base d’un montant journalier de 25 euros pour un déficit total soit :
. 58 jours x 25 euros
. 532 jours x 25 euros x 85%

En l'espèce, il ressort du rapport d'expertise du 19/11/2018 ce qui suit s'agissant du déficit fonctionnel temporaire :
. Total du 19/09/2017 au 15/11/2017, soit 58 jours.
. 85% à compter du 15/11/2017 encore en cours à ce jour. M.[A] a poursuivi la rééducation en hôpital de jour, 3 jours par semaine puis en ambulatoire actuellement 3 jours par semaine.
Les parties s’accordent pour retenir un déficit fonctionnel temporaire partiel de 85% jusqu’au 1er mai 2019, soit 532 jours.

Sur la base d’une indemnisation de 30 euros par jour pour un déficit total, adaptée à la situation décrite compte tenu de l’importance des troubles neurologiques consécutifs à l’accident, il sera alloué la somme suivante : (58 jours x 30 euros) + (532 jours x 30 euros x 85%) = 1.740 euros + 13.566 euros = 15.306 euros.

- Préjudice spécifique d’anxiété

Il s’agit des préjudices spécifiques concernant les pathologies évolutives, notamment les maladies incurables dont le risque d’évolution constitue, en lui-même un chef de préjudice.

Mme [B] [A] et Mme [M] [A] sollicitent la somme de 35.000 euros à titre principal et à titre subsidiaire l’intégration au préjudice de souffrances endurées pour un montant total de 75.000 euros. Elles font valoir que l’indemnisation du préjudice d’anxiété n’est pas limitée aux seuls cas de catastrophes collectives et qu’en matière de responsabilité médicale la perte de chance d’un patient de voir retarder l’échéance fatale de sa maladie et d’avoir une fin de vie meilleure et moins douloureuse constitue un préjudice indemnisable. Elles retiennent ainsi un préjudice résultant de l’anxiété liée à la conscience de se savoir atteint d’une affection conduisant à une mort prochaine, en l’espèce l’impact de l’AVC sur la pathologie qu’il présentait. Elles rappellent qu’avant son AVC la maladie cancéreuse était stabilisée comme le rapportent les examens d’expertise et que cet accident fautif a eu une incidence sur la prise en charge oncologique en suspendant le traitement pendant 4 mois et en ne permettant pas que soit entrepris un traitement plus agressif ou expérimental au moment de l’aggravation de l’état de santé de [K] [A]. Elles en déduisent que celui-ci a subi un préjudice spécifique d’anxiété en ayant conscience de ne pas être traité pour son cancer comme il aurait dû l’être et en ayant subi la disparition actuelle et certaine d’une éventualité favorable de vivre au-delà du [Date décès 4] 2019 et d’avoir une fin de vie meilleure et moins douloureuse.

L’institut [19] et RELYENS MUTUAL INSURANCE s’opposent à cette demande. Ils rappellent que le préjudice lié au retentissement psychologique de l’AVC est déjà indemnisé par le poste des souffrances endurées. Ils ajoutent que les experts ont retenu que [K] [A] avait bénéficié d’une chimiothérapie adaptée à sa pathologie.

SUR CE,

Il a été précédemment retenu au regard des conclusions des experts qu’il n’y avait pas lieu de retenir un lien de causalité entre les conditions d’intervention fautives du 19 septembre 2017 et l’évolution de la pathologie cancéreuse de M. [K] [A]. De ce fait, la demande de Mme [B] [A] et de Mme [M] [A] au titre du préjudice d’anxiété reposant sur la conscience du défunt de la perte de chance d’une évolution favorable de sa pathologie et de l’échéance de son issue fatale ne pourra qu’être rejetée. S’agissant des conditions de sa fin de vie, celles-ci seront prises en compte et indemnisées au titre des souffrances endurées par M. [K] [A].

- Souffrances endurées

Il s'agit de toutes les souffrances physiques et psychiques, ainsi que des troubles associés, que doit endurer la victime durant la maladie traumatique, c'est-à-dire du jour de l'accident à celui de sa consolidation. A compter de la consolidation, les souffrances endurées vont relever du déficit fonctionnel permanent et seront donc indemnisées à ce titre.

Mme [B] [A] et Mme [M] [A] sollicitent la somme de 40.000 euros rappelant que les séquelles neurologiques importantes ont persisté en dépit des séjours de rééducation, qu’il demeurait dépendant et incapable de communiquer. Elles ajoutent qu’il présentait un état dépressif.

L’institut [19] et RELYENS MUTUAL INSURANCE offrent la somme de 30.000 euros rappelant que l’AVC est survenu dans un contexte de prise en charge oncologique.

En l'espèce, les souffrances ont été cotées à 5/7 par l’expert. Elles sont caractérisées par le traumatisme initial, les traitements subis, et le retentissement psychique des faits s’agissant notamment de l’intervention chirurgicale, les explorations, le séjour en unité de soins intensifs neurovasculaires, la rééducation en centre et en hôpital de jour, l’impact psychologique des conséquences neurologiques. Il y a par ailleurs lieu de tenir compte du fait qu’elles se sont ajoutées aux conséquences du traitement de la pathologie cancéreuse, rendant particulièrement difficiles les conditions de la fin de vie de M. [K] [A].

Dans ces conditions, il convient d'allouer la somme de 40.000 euros à ce titre.

- Préjudice esthétique temporaire

Ce préjudice est lié à la nécessité de se présenter dans un état physique altéré au regard des tiers, et ce jusqu'à la date de consolidation.

Mme [B] [A] et Mme [M] [A] sollicitent la somme de 30.000 euros rappelant sa cotation à 6/7 et la persistance de ce préjudice sur une période de près de 20 mois.

L’institut [19] et RELYENS MUTUAL INSURANCE offrent la somme de 15.000 euros compte tenu du caractère temporaire de ce poste de préjudice.

En l'espèce, ce préjudice a été coté à 3,5/7 dans l’expertise réalisée le 19 novembre 2018 en raison notamment de troubles de l’élocution, de troubles moteurs avec port de cannes. L’expertise réalisée après le décès fait état d’un préjudice esthétique permanent coté à 6/7 prenant en compte la période de soins, les investigations, la rééducation, la boiterie, l’utilisation de cannes, l’hémiplégie résiduelle avec le membre supérieur droit impotent, le trouble du langage, la déformation faciale. Il y a également lieu de tenir compte de la durée importante qui s’est écoulée entre l’accident vasculaire cérébral et le décès de M. [K] [A]. Il sera en conséquence alloué la somme de 20.000 euros à ce titre.

III - SUR LES PREJUDICES DES VICTIMES INDIRECTES :

1- [B] [A] :

Le préjudice d’accompagnement et d’affection :
Le préjudice d’accompagnement a pour objet d’indemniser les troubles et perturbations dans les conditions d’existence d’un proche pendant la maladie traumatique de la victime directe. Il inclut en l’espèce le préjudice d’affection c’est-à-dire le préjudice moral subi par un proche au contact de la souffrance de la victime directe.

Mme [B] [A] sollicite la somme de 30.000 euros faisant valoir qu’elle a vu son époux souffrir au quotidien en raison des séquelles de son AVC et a elle-même présenté un syndrome anxio-dépressif réactionnel pour lequel elle a bénéficié d’un suivi.

L’institut [19] et RELYENS MUTUAL INSURANCE offrent la somme de 15.000 euros.

En l’espèce, il sera rappelé que Mme [B] [A] résidait avec son époux qu’elle accompagnait certes dans sa pathologique liée à son cancer, mais a dû également faire face aux séquelles neurologiques présentées par celui-ci consécutivement à l’accident vasculaire cérébral imputable à l’intervention du 19 septembre 2017, notamment une aphasie entrainant des difficultés de communication persistantes jusqu’à son décès en dépit d’une longue période de rééducation. Il est du reste justifié d’un traitement anxiolytique de Mme [B] [A] à compter du 20 septembre 2017 et d’un suivi auprès d’un psychologue à compter du 10 octobre 2017 témoignant de l’impact des suites de l’intervention du 19 septembre 2017 sur les conditions de vie de Mme [B] [A]. Il lui sera en conséquence alloué la somme de 20.000 euros à ce titre.

En revanche, compte tenu des développements précédents ne permettant pas de retenir l’imputabilité du décès à l’accident vasculaire cérébral du 19 septembre 2017, la demande au titre du préjudice d’affection lié au décès de M. [A] sera rejetée.

Sur les dépenses de santé :
Mme [B] [A] sollicite la somme de 7.772,56 euros correspondant aux séances d’ostéopathie, d’hypnothérapie, de sophrologie, de suivi psychologique et à deux cures thermales.

L’institut [19] et RELYENS MUTUAL INSURANCE s’opposent à cette demande, ce préjudice n’ayant pas été retenu par les experts.

Mme [B] [A] justifie d’un suivi psychologique entre le 10 octobre 2017 et 23 mai 2018 pour un montant total de 770 euros. Ce suivi initié peu après l’intervention subi par son époux le 19 septembre 2017 apparaît justifié et en lien avec cet événement, cette somme lui sera dès lors allouée. En revanche il ne sera pas fait droit à l’indemnisation des séances d’hypnothérapie, de sophrologie, d’ostéopathie et de cures thermales ces frais n’apparaissant pas directement imputables à l’intervention de son époux du 19 septembre 2017.

Sur les pertes de gains :
Mme [B] [A] sollicite la somme de 1.176 euros au titre des pertes de gains professionnels précisant qu’elle a été en arrêt de travail du 20 septembre 2017 au 2 décembre 2017 puis du 29 avril 2019 au 26 mai 2019. Sur la période du 20/9/2017 au 2/12/2017 elle calcule une perte de revenus de 1.022 euros correspondant à la différence entre les revenus nets qu’elle aurait dû percevoir (11.884 euros), et les sommes perçues de son employeur (7.752 euros) et de la sécurité sociale (3.110 euros). Sur la période du 29/4/2019 au 26/05/2019 elle calcule de la même manière une perte de gains de 154 euros.

L’institut [19] et RELYENS MUTUAL INSURANCE s’opposent à cette demande.

Mme [B] [A] justifie d’un arrêt de travail du 20 septembre 2017 au 2 décembre 2017. Au regard de la concomitance entre cet arrêt et l’intervention du 19 septembre 2017, il y a lieu de retenir qu’il lui est directement imputable.

En revanche l’arrêt de travail intervenu du 29 avril 2019 au 26 mai 2019 ne peut être regardé comme imputable à l’intervention du 19 septembre 2017 et à ses conséquences et la demande de perte de gains formulée pour cette période sera rejetée.

S’agissant de la perte de gains sur la période du 20 septembre 2017 au 2 décembre 2017, Mme [B] [A] n’explique aucunement le calcul retenu pour déterminer les revenus qu’elle aurait dû percevoir sur la période et ceux qu’elle a effectivement perçus, ce d’autant que les indemnités journalières ont été directement versées à l’employeur. Ainsi pour calculer la perte de salaire, compte tenu des bulletins de paie produits d’avril à décembre 2017, il sera tenu compte de la moyenne mensuelle des revenus précédent l’arrêt et de la somme perçue durant les mois qui ont suivi l’arrêt maladie sans déduction des indemnités journalières qui figurent déjà sur les bulletins de paie.

Ainsi entre avril 2017 et août 2017, Mme [B] [A] a perçu (2.897,23 euros +2.943 euros + 2.984,53 euros + 2.948,75 euros + 2.932,06 euros) /5 mois = 2.941,11 euros en moyenne. Elle a perçu entre le septembre 2017 et décembre 2017, mois concernés par son arrêt maladie : (3.031,73 euros + 2.754,99 euros + 2.370,36 euros+2.371,14 euros) = 10.528,22 euros alors qu’elle aurait dû percevoir 2.941,11 euros x 4 mois = 11.764,45 euros. Il s’en déduit une perte de 11.764,45 euros – 10.528,22 euros = 1.236,23 euros ramenée à la somme de 1.022 euros sollicitée par Mme [B] [A] pour la période visée.

Il sera donc alloué la somme de 1.022 euros à ce titre.

Sur l’incidence professionnelle :
Mme [B] [A] sollicite la somme de 10.000 euros à ce titre précisant qu’elle travaillait comme responsable administrative du patrimoine dans une entreprise d’affichage publicitaire, que ses missions ont été transférées à l’une de ses collègues en raison de ses absences répétées.

L’institut [19] et RELYENS MUTUAL INSURANCE s’opposent à cette demande.

Mme [B] [A] produit deux attestations qui émanent de deux de ses collègues employées par l’entreprise EXERION MEDIA, témoignant de la mise à l’écart de celle-ci en raison de sa moindre disponibilité depuis l’accident vasculaire cérébral de son époux, puis de son inclusion dans un licenciement économique en 2021 pour ce même motif. Il n’est toutefois apporté aucun élément sur la situation professionnelle actuelle de Mme [B] [A] permettant de considérer que l’accompagnement de son époux en raison de ses séquelles neurologiques ait eu des répercussions durables sur son évolution professionnelle justifiant une indemnisation à ce titre. Sa demande sera en conséquence rejetée.

Perte de revenus liée au décès de [K] [A]
Mme [B] [A] sollicite la somme de 648.757,55 euros correspondant à la perte des revenus de son époux après déduction de la part revenant à Mme [M] [A] (2.972 euros) et application d’un coefficient de perte de chance de 80%.

Il ressort de l’expertise que [K] [A] travaillait comme ingénieur expert en aérospatial et a été placé en arrêt maladie longue durée en avril 2017 en raison de son cancer. L’expertise du 28 novembre 2021 relève qu’il « envisageait de reprendre son activité, ce qui était pour lui un élément de stimulation, mais que rien n’avait été décidé ni fixé en matière de reprise professionnelle. » « L’hémiplégie est venue s’ajouter à cette pathologie cancéreuse qui justifiait l’arrêt de travail. Néanmoins on doit admettre que si la pathologie cancéreuse avait été stabilisée, l’hémiplégie et l’aphasie auraient été un obstacle définitif à toute reprise professionnelle. Cependant compte tenu du pronostic de la pathologie cancéreuse, il est peu probable que M. [A] aurait pu reprendre son travail. »
Ainsi les experts, compte tenu de la pathologie cancéreuse dont était atteint M. [K] [A] retiennent une très faible possibilité de reprise d’un emploi. En outre, dans la mesure où il résulte des développements précédents que le décès prématuré de M. [K] [A] ne peut être attribué à l’accident vasculaire cérébral consécutif à l’intervention du 19 septembre 2017, la demande au titre des pertes de gains de Mme [B] [A] consécutives au décès de [K] [A] ne peut qu’être rejetée.

2- Mme [M] [A] :

Sur le préjudice d’accompagnement et d’affection :
Mme [M] [A] sollicite la somme de 15.000 euros. Elle précise qu’elle n’habitait plus avec ses parents depuis 2013 mais rentrait chez eux régulièrement le week-end et pendant les vacances, puis qu’elle s’est réinstallée chez eux en septembre 2017.

L’institut [19] et RELYENS MUTUAL INSURANCE offrent la somme de 7.500 euros.

Au regard des liens familiaux décrits, Mme [M] [A] étant enfant unique et indiquant être retournée vivre aux côtés de ses parents à compter de l’accident vasculaire cérébral de son père, il lui sera alloué la somme de 11.500 euros.

En revanche, compte tenu des développements précédents ne permettant pas de retenir l’imputabilité du décès à l’accident vasculaire cérébral du 19 septembre 2017, la demande de Mme [M] [A] au titre du préjudice d’affection lié au décès de M. [K] [A] sera rejetée.

Perte de revenus liée au décès de M. [K] [A]
Mme [M] [A] sollicite la somme de 2.972 euros correspondant à la perte de revenus jusqu’à ses 25 ans.

Dans la mesure où il résulte des développements précédents que le décès prématuré de M. [K] [A] ne peut être attribué à l’accident vasculaire cérébral consécutif à l’intervention du 19 septembre 2017, la demande au titre des pertes de gains de Mme [M] [A] consécutives au décès de [K] [A] ne peut qu’être rejetée.

IV - SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES

L’INSTITUT [19] et RELYENS MUTUAL INSURANCE, qui succombent en la présente instance, seront condamnés aux dépens et ce, avec distraction au profit de la SELARL BOSSU & ASSOCIES.

Il convient de condamner in solidum l’INSTITUT [19] et RELYENS MUTUAL INSURANCE, parties perdantes du procès, à payer à la CPAM des YVELINES une somme de 1.000 euros et à Madame [B] [A] et à Mme [M] [A] une somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Il n’est en revanche pas justifié de faire exception aux règles de tarification des émoluments des huissiers de justice en matière d'exécution forcée. 

Rien ne justifie d'écarter l'exécution provisoire dont la présente décision bénéficie de droit, conformément aux dispositions des articles 514 et 514-1 du code de procédure civile, s'agissant en effet d'une instance introduite après le 1er janvier 2020.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire mis à disposition au greffe et rendu en premier ressort,

MET hors de cause la société EXTERION MEDIA SA ;

DECLARE l’INSTITUT [19] et la société RELYENS MUTUAL INSURANCE (anciennement SHAM) responsables in solidum des conséquences dommageables directement liées à l'intervention chirurgicale subie par [K] [A], le 19 septembre 2017 ;

CONDAMNE l’INSTITUT [19] et la société RELYENS MUTUAL INSURANCE à réparer l'intégralité du préjudice subi imputable à l’intervention du 19 septembre 2017 ;

DIT n’y avoir lieu à indemniser le préjudice lié à la perte de chance d’évolution positive de la pathologie cancéreuse de M. [K] [A] ;

CONDAMNE l’INSTITUT [19] et la société RELYENS MUTUAL INSURANCE in solidum à payer à la succession de [K] [A], en deniers ou quittances, provisions non déduites, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour, les sommes suivantes en réparation de son préjudice corporel :
- dépenses de santé actuelles : 1.225 euros
- frais divers : 29.751,99 euros
- assistance par tierce personne temporaire : 51.319,08 euros
- déficit fonctionnel temporaire : 15.306 euros
- souffrances endurées : 40.000 euros
- préjudice esthétique temporaire : 20.000 euros ;

DEBOUTE Mme [B] [A] et Mme [M] [A] de leur demande d’indemnisation du préjudice spécifique d’anxiété de M. [K] [A] ;

CONDAMNE l’INSTITUT [19] et la société RELYENS MUTUAL INSURANCE in solidum à payer à Mme [B] [A], en deniers ou quittances, provisions non déduites, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour, les sommes suivantes en réparation de son préjudice en tant que victime indirecte :
Préjudice d’accompagnement : 20.000 euros ;Dépenses de santé : 770 euros ;Pertes de gains : 1.022 euros ;
DEBOUTE Mme [B] [A] de sa demande au titre de l’incidence professionnelle ;

CONDAMNE l’INSTITUT [19] et la société RELYENS MUTUAL INSURANCE in solidum à payer à Mme [M] [A], en deniers ou quittances, provisions non déduites, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour, les sommes suivantes en réparation de son préjudice en tant que victime indirecte :
Préjudice d’accompagnement et d’affection : 11.500 euros ;
DEBOUTE Mme [B] [A] et Mme [M] [A] de leurs demandes au titre des préjudices d’affection et de la perte de revenus liée au décès de [K] [A] ;

CONDAMNE in solidum l’INSTITUT [19] et la société RELYENS MUTUAL INSURANCE (anciennement SHAM), à payer à la caisse primaire d’assurance maladie des YVELINES, la somme de 99.254,12 euros avec intérêts aux taux légal à compter de ses premières écritures signifiées le 19 décembre 2022 ;

DIT n’y avoir lieu de réserver les frais pour les prestations non connues à ce jour et pour celles qui pourraient être versées ultérieurement par la CPAM de YVELINES ;

REJETTE la demande relative à la prise en charge exclusive du débiteur des frais d'exécution forcée ;

CONDAMNE in solidum l’INSTITUT [19] et la société RELYENS MUTUAL INSURANCE (anciennement SHAM) aux dépens comprenant les frais d’expertise et pouvant être recouvrés directement par la SELARL BOSSU & ASSOCIES pour ceux dont elle a fait l’avance sans avoir obtenu provision conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;

CONDAMNE in solidum l’INSTITUT [19] et la société RELYENS MUTUAL INSURANCE (anciennement SHAM) à payer à Mme [B] [A] et Mme [M] [A], ensemble, la somme de 3.000 euros et à la CPAM des YVELINES la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

DIT n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire dont la présente décision bénéficie de droit ;

DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Fait et jugé à Paris le 10 Juin 2024.

La GreffièreLa Présidente

Erell GUILLOUËTLaurence GIROUX


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 19eme contentieux médical
Numéro d'arrêt : 22/12998
Date de la décision : 10/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-10;22.12998 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award