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05/06/2024 | FRANCE | N°24/01860

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp fond, 05 juin 2024, 24/01860


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :
Monsieur [U] [M] [E]

Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Maître Coralie GOUTAIL

Pôle civil de proximité


PCP JCP fond

N° RG 24/01860 - N° Portalis 352J-W-B7I-C4A67

N° MINUTE :







JUGEMENT
rendu le mercredi 05 juin 2024


DEMANDERESSE
Société CARREFOUR BANQUE SA
dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par Maître Coralie GOUTAIL, avocats au barreau de PARIS, vestiaire :

#A0201


DÉFENDEUR
Monsieur [U] [M] [E]
demeurant [Adresse 1]
non comparant, ni représenté


COMPOSITION DU TRIBUNAL
Anne TOULEMONT, Juge des contentieux de la protection
assis...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :
Monsieur [U] [M] [E]

Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Maître Coralie GOUTAIL

Pôle civil de proximité

PCP JCP fond

N° RG 24/01860 - N° Portalis 352J-W-B7I-C4A67

N° MINUTE :

JUGEMENT
rendu le mercredi 05 juin 2024

DEMANDERESSE
Société CARREFOUR BANQUE SA
dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par Maître Coralie GOUTAIL, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : #A0201

DÉFENDEUR
Monsieur [U] [M] [E]
demeurant [Adresse 1]
non comparant, ni représenté

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Anne TOULEMONT, Juge des contentieux de la protection
assistée de Coraline LEMARQUIS, Greffier,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 15 mars 2024

JUGEMENT
réputé contradictoire, en premier ressort, prononcé par mise à disposition le 05 juin 2024 par Anne TOULEMONT, Juge des contentieux de la protection, assistée de Coraline LEMARQUIS, Greffier

Décision du 05 juin 2024
PCP JCP fond - N° RG 24/01860 - N° Portalis 352J-W-B7I-C4A67

EXPOSE DU LITIGE

Selon offre préalable acceptée le 13 juillet 2022, CARREFOUR BANQUE SA a consenti à Monsieur [U] [M] [E] un crédit personnel d'un montant en capital de 25 000 euros.

Des échéances étant demeurées impayées, la société CARREFOUR BANQUE SA a fait assigner Monsieur [U] [M] [E] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris, par acte d'huissier en date du 5 février 2024, en paiement des sommes suivantes, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :
-26549, 04 euros au titre du crédit, avec intérêts contractuels au taux de 4, 91% à compter du 4 avril 2023, avec prononcé de la résiliation judiciaire aux torts de l'emprunteur si le tribunal estimait la déchéance du terme irrégulière,
-Capitalisation des intérêts
-1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance.

Au soutien de sa demande, la société CARREFOUR BANQUE SA fait valoir que les mensualités d'emprunt n'ont pas été régulièrement payées, la contraignant à prononcer la déchéance du terme le 4 avril 2023, rendant la totalité de la dette exigible. Elle précise que le premier incident de paiement non régularisé se situe au 3 décembre 2022 et que sa créance n'est ainsi pas forclose.

A l'audience du 15 mars 2024, La société CARREFOUR BANQUE SA, représentée par son conseil, a sollicité le bénéfice de son acte introductif d'instance. La forclusion, la nullité, la déchéance du droit aux intérêts contractuels (FIPEN, notice d'assurance, FICP, vérification solvabilité et légaux ont été mis dans le débat d'office, sans que le demandeur ne présente d'observations supplémentaires sur ces points.

Bien que régulièrement assigné à personne par procès-verbal de recherches infructueuses conformément à l'article 659 du code de procédure civile, Monsieur [U] [M] [E] n'a pas comparu et ne s'est pas fait représenter.

La décision a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 5 juin 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Selon l'article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne fait droit à la demande que s'il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

Sur la demande en paiement

Le présent litige est relatif à un crédit soumis aux dispositions de la loi n°2010-737 du 1er juillet 2010 de sorte qu'il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation issue de l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 et du décret n°2016-884 du 29 juin 2016.

L'article R.632-1 du code de la consommation permet au juge de relever d'office tous les moyens tirés de l'application des dispositions du code de la consommation, sous réserve de respecter le principe du contradictoire. Il a été fait application de cette disposition par le juge à l'audience du 15 mars 2024.

L'article L.312-39 du code de la consommation prévoit qu'en cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Lorsque le prêteur exige le remboursement immédiat du capital restant dû en application de l'article L.312-39, il peut demander une indemnité égale à 8% du capital restant dû à la date de la défaillance.

Ce texte n'a toutefois vocation à être appliqué au titre du calcul des sommes dues qu'après vérification de l'absence de forclusion de la créance, et de l'absence de déchéance du droit aux intérêts conventionnels.

Sur la forclusion

L'article R. 312-35 du code de la consommation dispose que les actions en paiement à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur dans le cadre d'un crédit à la consommation, doivent être engagées devant le tribunal judiciaire dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion. Le délai de forclusion étant un délai de procédure, la règle de computation de l'article 641 du code de procédure civile s'applique, de sorte que le délai expire le jour de la dernière année qui porte le même quantième que le jour de l'évènement qui fait courir le délai (Civ 1°,17 mars 1998, 96-15.567).

En l'espèce, au regard de l'historique du compte produit, il apparaît que le premier incident de paiement non régularisé est intervenu pour l'échéance de 3 décembre 2022 de sorte que la demande effectuée le 5 février 2024 n'est pas atteinte par la forclusion.

Sur la déchéance du droit aux intérêts contractuels

Il appartient au créancier qui réclame des sommes au titre d'un crédit à la consommation de justifier du strict respect du formalisme informatif prévu par le code de la consommation, en produisant des documents contractuels conformes, ainsi que la copie des pièces nécessaires.

Parmi ces textes, l'article L.311-12 du code de la consommation impose au prêteur de joindre à son exemplaire du contrat de crédit un formulaire détachable permettant l'exercice du droit de rétractation du débiteur.

En l'espèce, la société CARREFOUR BANQUE SA ne justifie pas avoir joint ce formulaire au contrat de crédit litigieux.

En conséquence, conformément aux dispositions précitées, il convient de la déchoir totalement de son droit aux intérêts.

Sur le montant de la créance

Aux termes de l'article L.341-8 du code de la consommation, lorsque le prêteur est déchu du droit aux intérêts, l'emprunteur n'est tenu qu'au seul remboursement du capital suivant l'échéancier prévu, ainsi que, le cas échéant, au paiement des intérêts dont le prêteur n'a pas été déchu. Les sommes déjà perçues par le prêteur au titre des intérêts, qui sont productives d'intérêts au taux de l'intérêt légal à compter du jour de leur versement, sont restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû.

En l'espèce, le prêteur a été déchu du droit aux intérêts de sorte qu'il n'y a pas lieu de faire droit à sa demande formulée au titre des intérêts échus ; les sommes versées au titre des intérêts seront imputées sur le capital restant dû.

Au regard de l'historique du prêt, il y a lieu de faire droit à la demande en paiement de la société CARREFOUR BANQUE SA à hauteur de la somme de 23594, 39 euros au titre du capital restant dû (25000 - 1405, 61 euros de règlements déjà effectués).

Monsieur [U] [M] [E] est ainsi tenu au paiement de la somme totale de 23594, 39 euros correspondant au capital restant dû. La limitation légale de la créance du préteur exclut qu'il puisse prétendre au paiement de toute autre somme et notamment de la clause pénale prévue par l'article L. 311-24 devenu L. 312-39 du code de la consommation. La société CARREFOUR BANQUE SA doit donc être déboutée sur ce point.

Conformément à l'article L 311-48 du code de la consommation, en cas de déchéance du droit aux intérêts, le débiteur n'est tenu qu'au remboursement du seul capital. Cette déchéance s'étend donc aux intérêts et à tous leurs accessoires.

Par ailleurs, ces dispositions doivent être interprétées conformément à la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2008 concernant les contrats de crédit aux consommateurs, dont les dispositions nationales ne sont que la transposition, et qui prévoit en son article 23 que les sanctions définies par les États membres en cas de violation des dispositions nationales adoptées conformément à la présente directive doivent être effectives, proportionnées et dissuasives.

Au regard de cette dernière exigence, la déchéance du droit aux intérêts prononcée à l'encontre du prêteur doit donc également comprendre les intérêts au taux légal.

Il convient, en conséquence, d'écarter toute application des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil et L 313-3 du code monétaire et financier et de dire que les sommes dues au prêteur ne produiront aucun intérêt, même au taux légal.

Sur la capitalisation des intérêts

La capitalisation des intérêts, dit encore anatocisme, est prohibée concernant les crédits à la consommation, matière dans laquelle les sommes qui peuvent être réclamées sont strictement et limitativement énumérées. En effet, l'article L.312-38 du code de la consommation rappelle qu'aucune indemnité ni aucuns frais autres que ceux mentionnés aux articles L.312-39 et L.312-40 ne peuvent être mis à la charge de l'emprunteur dans les cas de défaillance prévus par ces articles.

La demande de capitalisation sera par conséquent rejetée.

Sur les demandes accessoires

Le défendeur, qui succombe, supportera les dépens, en application de l'article 696 du code de procédure civile.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la société CARREFOUR BANQUE SA les frais exposés par elle dans la présente instance et non compris dans les dépens. La somme de 300 euros lui sera donc allouée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La présente décision est exécutoire à titre provisoire, conformément à l'article 514 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Le juge des contentieux de la protection, statuant publiquement, après débats en audience publique, par jugement mis à disposition au greffe réputé contradictoire et en premier ressort,

CONDAMNE en conséquence Monsieur [U] [M] [E] à verser à la société CARREFOUR BANQUE SA la somme de 23594, 39 euros au titre du capital restant dû

DIT que la somme de 23594, 39 euros ne produira aucun intérêt et écarte la majoration de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier

DEBOUTE la société CARREFOUR BANQUE SA de sa demande de capitalisation des intérêts et de sa demande au titre de la clause pénale.

CONDAMNE Monsieur [U] [M] [E] à verser à la société CARREFOUR BANQUE SA la somme de 300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Monsieur [U] [M] [E] aux dépens ;

REJETTE le surplus des demandes ;

RAPPELLE que le présent jugement est exécutoire de plein droit à titre provisoire.

Le greffier Le juge des contentieux de la protection


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp fond
Numéro d'arrêt : 24/01860
Date de la décision : 05/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-05;24.01860 ?
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