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04/06/2024 | FRANCE | N°23/09162

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp acr fond, 04 juin 2024, 23/09162


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à : Maître Julien ESTRADE


Copie exécutoire délivrée
le :
à : Maître Catherine BERLANDE

Pôle civil de proximité


PCP JCP ACR fond

N° RG 23/09162 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3MNT

N° MINUTE : 1







JUGEMENT
rendu le 04 juin 2024

DEMANDERESSE

S.C.I. PHILGEN,
dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Maître Catherine BERLANDE de la SELARL 3B2C, avocats au barreau de PARIS, ves

tiaire : #B0678

DÉFENDEUR

Monsieur [V] [D],
demeurant [Adresse 2]
représenté par Maître Julien ESTRADE de la SELARL ESTRADE, AZAD & HARUTYUNYAN, avocats au barreau de PA...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à : Maître Julien ESTRADE

Copie exécutoire délivrée
le :
à : Maître Catherine BERLANDE

Pôle civil de proximité

PCP JCP ACR fond

N° RG 23/09162 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3MNT

N° MINUTE : 1

JUGEMENT
rendu le 04 juin 2024

DEMANDERESSE

S.C.I. PHILGEN,
dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Maître Catherine BERLANDE de la SELARL 3B2C, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : #B0678

DÉFENDEUR

Monsieur [V] [D],
demeurant [Adresse 2]
représenté par Maître Julien ESTRADE de la SELARL ESTRADE, AZAD & HARUTYUNYAN, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : #E1856

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Marie-Laure KESSLER, Vice-Présidente, juge des contentieux de la protection assistée de Aurélia DENIS, Greffière

DATE DES DÉBATS

Audience publique du 19 mars 2024

JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort prononcé par mise à disposition le 04 juin 2024 par Marie-Laure KESSLER, juge des contentieux de la protection assistée de Sanaâ AOURIK, Greffière

Décision du 04 juin 2024
PCP JCP ACR fond - N° RG 23/09162 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3MNT

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Par acte sous seing privé du 23 septembre 2015, la SCI PHILGEN a consenti un bail d’habitation à M. [V] [D] sur des locaux situés [Adresse 2] à [Localité 3], moyennant le paiement d’un loyer mensuel de 1.084,26 euros et d’une provision pour charges de 263 euros.

Par acte de commissaire de justice du 25 juillet 2023, la bailleresse a fait délivrer au locataire un commandement de payer la somme principale de 10.108,58 euros au titre de l'arriéré locatif, visant la clause résolutoire prévue dans le contrat.

La commission de coordination des actions prévention des expulsions locatives a été informée de la situation de M. [V] [D] le 26 juillet 2023.

Par assignation du 10 octobre 2023, la SCI PHILGEN a ensuite saisi le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris pour faire constater l’acquisition de la clause résolutoire, être autorisée à faire procéder à l’expulsion de M. [V] [D] et obtenir sa condamnation au paiement des sommes suivantes:
une indemnité mensuelle d’occupation d’un montant égal à celui du loyer et des charges, tout mois commencé étant dû, à compter de la résiliation du bail et jusqu’à libération des lieux,11.887,13 euros au titre de l’arriéré locatif arrêté au 10 octobre 2023,2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
L’assignation a été notifiée au représentant de l’État dans le département le 10 octobre 2023, mais aucun diagnostic social et financier n'est parvenu au greffe avant l'audience.

Prétentions et moyens des parties

À l'audience du 19 mars 2024, la SCI PHILGEN, représentée par son conseil, maintient l'intégralité de ses demandes, et précise que la dette locative, actualisée au 19 mars 2024, s'élève désormais à 16.080,50 euros. Elle déclare, par ailleurs, accepter le plan d'apurement de cette dette proposé par le défendeur. La SCI PHILGEN considère enfin qu'il y a bien eu une reprise du paiement intégral du loyer courant avant l'audience, au sens de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989.

M. [V] [D], représenté par son conseil, reconnaît en effet le montant de la dette locative et demande à pouvoir se maintenir dans les lieux moyennant le versement d'une mensualité d'apurement de 1.000 euros, en plus du loyer courant.

M. [V] [D] sollicite la suspension des effets de la clause résolutoire pendant le cours des délais de paiement.

En application de l'article 24 V de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, les parties ont été invitées à produire tous éléments relatifs à l’existence d’une procédure de traitement du surendettement au sens du livre VII du code de la consommation.

M. [V] [D] a indiqué ne pas faire l’objet d’une telle procédure.

À l’issue des débats, la décision a été mise en délibéré jusqu’à ce jour, où elle a été mise à disposition des parties au greffe.

MOTIVATION

1. Sur la demande de constat de la résiliation du bail

1.1. Sur la recevabilité de la demande

La SCI PHILGEN justifie avoir notifié l’assignation au représentant de l’État dans le département plus de six semaines avant l’audience.

Elle justifie également avoir saisi la commission de coordination des actions prévention des expulsions locatives deux mois au moins avant la délivrance de l’assignation.

Son action est donc recevable au regard des dispositions de l’article 24 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989.

1.2. Sur la résiliation du bail

Aux termes de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989, dans sa version en vigueur à la date de la conclusion du contrat de bail litigieux, toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux.

En l’espèce, un commandement de payer reproduisant textuellement les dispositions légales et la clause résolutoire contenue dans le contrat de location a été signifié au locataire le 25 juillet 2023. Or, d’après l'historique des versements, la somme de 10.108,58 euros n’a pas été réglée par ce dernier dans le délai de deux mois suivant la signification de ce commandement et aucun plan d’apurement n’a été conclu dans ce délai entre les parties.

La bailleresse est donc bien fondée à se prévaloir des effets de la clause résolutoire, dont les conditions sont réunies depuis le 26 septembre 2023.

Cependant, eu égard à la volonté du locataire de s’acquitter de sa dette et à l’accord de la bailleresse, il convient de suspendre la résiliation du bail au respect du plan d’apurement précisé ci-après.

En cas de respect des modalités du plan d’apurement, la clause résolutoire sera, à l’issue de ce plan, réputée n’avoir pas joué, et l’exécution du contrat de bail pourra se poursuivre. En revanche, à défaut de paiement d’une seule échéance comprenant le loyer et la mensualité d’apurement, la clause résolutoire sera acquise, et le bail sera résilié de plein droit, sans qu’une nouvelle procédure judiciaire ne soit nécessaire. Dans ce cas, il est ordonné au locataire ainsi qu’à tous les occupants de son chef de quitter les lieux, et, pour le cas où les lieux ne seraient pas libérés spontanément, la bailleresse sera autorisée à faire procéder à l’expulsion de toute personne y subsistant, dès l’expiration d’un délai de deux mois après la signification d’un commandement de quitter les lieux.

2. Sur la dette locative

Aux termes de l’article 1353 du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver tandis que celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement.

L'article 1103 du même code prévoit, par ailleurs, que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

En l’espèce, la SCI PHILGEN verse aux débats un décompte démontrant qu’à la date du 19 mars 2024, M. [V] [D] lui devait la somme de 15.383,28 euros euros, soustraction faite du règlement de 1.633,96 euros effectué le 15 mars 2023 et des frais de procédure, comprenant la condamnation à l’article 700 de la précédente procédure.

M. [V] [D] n’apportant aucun élément de nature à remettre en cause ce montant, il sera condamné à payer cette somme à la bailleresse.

Toutefois, eu égard aux délais de paiement évoqués ci-avant, il convient de différer l'exigibilité de cette somme en autorisant M. [V] [D] à se libérer de cette dette selon les modalités détaillées ci-après.

3. Sur l’indemnité d’occupation

En cas de maintien dans les lieux du locataire ou de toute personne de son chef malgré la résiliation du bail, une indemnité d’occupation sera due. Au regard du montant actuel du loyer et des charges, son montant sera fixé à la somme mensuelle de 1.633,96 euros.

L’indemnité d’occupation est payable et révisable dans les mêmes conditions que l’étaient le loyer et les charges, à partir du 26 septembre 2023, et ne cessera d’être due qu’à la libération effective des locaux avec remise des clés à la SCI PHILGEN ou à son mandataire.

4. Sur les frais du procès et l'exécution provisoire

Aux termes de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité et de la situation économique de la partie condamnée.

M. [V] [D], qui succombe à la cause, sera condamné aux dépens de la présente instance, conformément à l’article 696 du code de procédure civile.

L’équité commande par ailleurs de faire droit à hauteur de 1000 euros à la demande de la SCI PHILGEN concernant les frais non compris dans les dépens, en application des dispositions précitées.

Selon l'article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

Toutefois, selon l’article 514-1 du même code, le juge peut écarter l'exécution provisoire de droit, en tout ou partie, s'il estime qu'elle est incompatible avec la nature de l'affaire. Il statue, d'office ou à la demande d'une partie, par décision spécialement motivée.

En l'espèce, compte tenu du montant et de l'ancienneté de la dette et de la mise en place d'un plan d'apurement, il n'y a pas lieu d'écarter l'exécution provisoire de la présente décision.

PAR CES MOTIFS,

La juge des contentieux de la protection, statuant après débats publics, par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,

CONSTATE que la dette locative visée dans le commandement de payer du 25 juillet 2023 n’a pas été réglée dans le délai de deux mois,

CONSTATE, en conséquence, que le contrat conclu le 23 septembre 2015 entre la SCI PHILGEN, d’une part, et M. [V] [D], d’autre part, concernant les locaux situés au [Adresse 2] à [Localité 3] est résilié depuis le 26 septembre 2023,

CONDAMNE M. [V] [D] à payer à la SCI PHILGEN la somme de 15.383,28 euros (quinze mille trois cent quatre-vingt-trois euros et vingt-huit centimes) au titre de l’arriéré locatif arrêté au 19 mars 2024,

AUTORISE M. [V] [D] à se libérer de sa dette en réglant chaque mois pendant 15 mois, en plus du loyer courant, une somme minimale de 1.000 euros (mille euros), la dernière échéance étant majorée du solde de la dette en principal, intérêts et frais,

DIT que le premier règlement devra intervenir dans les dix jours suivant la signification de la présente décision, puis, pour les paiements suivants, en même temps que le loyer, au plus tard le dixième jour de chaque mois, sauf meilleur accord entre les parties,

SUSPEND les effets de la clause résolutoire pendant l’exécution des délais de paiement accordés à M. [V] [D],

DIT que si les délais accordés sont entièrement respectés, la clause résolutoire sera réputée n’avoir jamais été acquise,

DIT qu’en revanche, pour le cas où une mensualité, qu'elle soit due au titre du loyer et des charges courants ou de l’arriéré, resterait impayée quinze jours après l’envoi d'une mise en demeure par lettre recommandée avec avis de réception,

le bail sera considéré comme résilié de plein droit depuis le 26 septembre 2023,
le solde de la dette deviendra immédiatement exigible,
la bailleresse pourra, à défaut de libération spontanée des lieux et dès l’expiration d’un délai de deux mois suivant la délivrance d’un commandement d’avoir à libérer les lieux, faire procéder à l’expulsion de M. [V] [D] et à celle de tous occupants de son chef, au besoin avec l’assistance de la force publique,
le sort des meubles sera régi conformément aux dispositions des articles L. 433-1 et L. 433-2 du code des procédures civiles d'exécution,
M. [V] [D] sera condamné à verser à la SCI PHILGEN une indemnité d’occupation mensuelle égale au montant des loyers et charges qui auraient été dus en cas de poursuite du bail, et ce, jusqu’à la date de libération effective et définitive des lieux,
DIT n’y avoir lieu d’écarter l’exécution provisoire de droit de la présente décision,

CONDAMNE M. [V] [D] à payer à la SCI PHILGEN la somme de 1.000 euros (mille euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. [V] [D] aux dépens comprenant notamment le coût du commandement de payer du 25 juillet 2023 et celui de l'assignation du 10 octobre 2023.

Ainsi jugé par mise à disposition au greffe le 4 juin 2024, et signé par la juge et la greffière susnommées.

La Greffière La Juge


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp acr fond
Numéro d'arrêt : 23/09162
Date de la décision : 04/06/2024
Sens de l'arrêt : Expulsion "conditionnelle" ordonnée au fond avec suspension des effets de la clause résolutoire

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-04;23.09162 ?
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