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04/06/2024 | FRANCE | N°22/00583

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 19ème chambre civile, 04 juin 2024, 22/00583


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

19ème chambre civile

N° RG 22/00583

N° MINUTE :

Assignations des :
04 et 07 Janvier 2022

CONDAMNE

LG




JUGEMENT
rendu le 04 Juin 2024


DEMANDEUR

Monsieur [D] [Y]
[Adresse 3]
[Localité 5]

Représenté par la SELARL Cabinet Rémy LE BONNOIS prise en la personne de Maître Frédéric LE BONNOIS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #L0299

DÉFENDEURS

La MACIF
[Adresse 1]
[Localité 8]

Représentée par la SELARL CHAUVIN de LA ROCHE

– HOUFANI
par le ministère de Maître Mathilde CHAUVIN de LA ROCHE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #L089

L’AGENT JUDICIAIRE DE L’ETAT
[Adresse 10]
[Adresse 6]
[Locali...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

19ème chambre civile

N° RG 22/00583

N° MINUTE :

Assignations des :
04 et 07 Janvier 2022

CONDAMNE

LG

JUGEMENT
rendu le 04 Juin 2024

DEMANDEUR

Monsieur [D] [Y]
[Adresse 3]
[Localité 5]

Représenté par la SELARL Cabinet Rémy LE BONNOIS prise en la personne de Maître Frédéric LE BONNOIS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #L0299

DÉFENDEURS

La MACIF
[Adresse 1]
[Localité 8]

Représentée par la SELARL CHAUVIN de LA ROCHE – HOUFANI
par le ministère de Maître Mathilde CHAUVIN de LA ROCHE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #L089

L’AGENT JUDICIAIRE DE L’ETAT
[Adresse 10]
[Adresse 6]
[Localité 7]

Non représenté

Expéditions
exécutoires
délivrées le :

Décision du 04 Juin 2024
19ème chambre civile
RG 22/00583

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Laurence GIROUX, Vice-Présidente
Madame Géraldine CHABONAT, Juge
Madame Mabé LE CHATELIER, Magistrate à titre temporaire

Assistées de Madame Erell GUILLOUËT, Greffière, lors des débats et au jour de la mise à disposition au greffe.

DEBATS

A l’audience du 26 Mars 2024 présidée par Madame Laurence GIROUX tenue en audience publique, avis a été donné aux parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 04 Juin 2024.

JUGEMENT

- Réputé contradictoire
- En premier ressort
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE

Le 13 avril 2012, vers 19h25, à [Localité 2], Monsieur [D] [Y], né le [Date naissance 4] 1985 et gardien de la paix, a été victime d’un accident de la circulation, mettant en cause un véhicule assuré par la société MACIF, dont le conducteur est venu percuter le véhicule de police dans lequel il était passager.

Son droit à réparation n’est pas contesté par la société MACIF.

Par une ordonnance rendue le 22 avril 2013, le juge des référés de ce tribunal a désigné le docteur [Z] en qualité d’expert.

Le docteur [Z] a déposé son rapport définitif le 18 mai 2015 dont les conclusions sont les suivantes :
- Blessures : Fracture de l’extrémité inférieure de l’humérus gauche.
- Un déficit fonctionnel temporaire total du 13 au 19 avril 2012 et du 12 au 15 avril 2014 ;
- Un déficit fonctionnel temporaire partiel à 50% du 20 avril au 31 mai 2012 ;
- Un déficit fonctionnel temporaire partiel à 30% du 1er juin 2012 au 28 février 2013 ;
- Un déficit fonctionnel temporaire partiel à 20% du 1er mars 2013 au 11 avril 2014 et du 16 avril 2014 au 7 juillet 2014 ;
- Consolidation : 7 juillet 2014 ;
- Atteinte permanente à l'intégrité physique et/ou psychique : 12% (diminution de la mobilité de l’épaule gauche avec diminution de la force dans le membre supérieur gauche, des douleurs névralgiques au niveau du coude et de l’avant-bras gauche et un syndrome dépressif réactionnel qui tend à s’estomper) ;
- Souffrances endurées : 4/7 ;
- Préjudice esthétique : 1,5/7 ;
- Existence d’un préjudice d’agrément ;
- Existence d’un retentissement professionnel ;
- TP : 2h/jour du 20 avril 2012 au 31 mai 2012 ; 1h/jour du 1er juin 2012 au 28 février 2013.

Par acte des 4 et 7 janvier 2022, Monsieur [Y] a assigné la société MACIF et l’agent judiciaire de l’Etat (AJE) devant le tribunal judiciaire de Paris afin d’obtenir l’indemnisation de ses préjudices.

Par assignation en intervention forcée du 4 mai 2023, la société MACIF a assigné l’agent judiciaire de l’Etat aux fins de garantie.

Par décision du 13 juin 2023, les instances ont été jointes.

Par ordonnance du 17 octobre 2023, le juge de la mise en état a :
Rejeté la demande de sursis à statuer de la MACIF ;Condamné la MACIF à verser à Monsieur [D] [Y] une provision de 8000 € à valoir sur la liquidation de son préjudice corporel ;Condamné la MACIF aux dépens de l’incident ;Condamné la MACIF à verser à Monsieur [D] [Y] la somme de 1000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile.Renvoyé l’examen de l’affaire à l’audience de mise en état pour conclusions en demande au fond.
Dans ses conclusions récapitulatives signifiées le 27 novembre 2023, le requérant demande au tribunal de :
Dire et juger que [D] [Y] a droit à l’indemnisation de son entier préjudice suite à l’accident de la circulation dont il a été victime le 13 avril 2012 sur le fondement de la Loi du 5 juillet 1985.Le dire recevable et bien fondé en l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions.Condamner la MACIF à prendre en charge l’intégralité des préjudices qu’il a subi.Débouter la MACIF de sa demande de sursis à statuer ; Condamner la MACIF à payer à [D] [Y] les indemnités suivantes, après déduction de la créance des organismes sociaux :146,00 € au titre des dépenses de santé actuelles
15.070,72 € au titre des frais divers
8.925,00 € au titre de la tierce personne temporaire
283.233,00 € au titre de la tierce personne définitive (hors aide à la parentalité)
135.500 € au titre de l’aide à la parentalité
253.777,37 € au titre des pertes de gains professionnels futurs, subsidiairement : 133.948,46 € au titre des pertes de gains professionnels futurs
60.000,00 € au titre de l’incidence professionnelle, subsidiairement : 193.948,46 € au titre de l’incidence professionnelle ;
6.363,00 € au titre du déficit fonctionnel temporaire
20.000,00 € au titre des souffrances endurées
28.800,00 € au titre du déficit fonctionnel permanent
3.000,00 € au titre du préjudice esthétique permanent
15.000,00 € au titre du préjudice d’agrément
Condamner la MACIF à payer à [D] [Y] la somme de 8.000,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile (CPC).Condamner la MACIF aux entiers dépens, comprenant ceux des instances pour lesquelles ils étaient réservés et les frais d’expertises, avec distraction au profit de la SELARL Cabinet Rémy LE BONNOIS représentée par Maître Frédéric LE BONNOIS, avocat, par application des articles 699 et suivants du CPC.Condamner la MACIF aux intérêts légaux sur les indemnités allouées au requérant à compter de la signification de l’assignation à la MACIF par application des dispositions de l’article 1343-2 du code civil. Condamner la MACIF au doublement des intérêts légaux sur la totalité des indemnités que fixera le Tribunal, en ce comprises les créances des organismes sociaux et avant déduction des provisions, à compter du 19 octobre 2015 et jusqu’à ce que le jugement à intervenir devienne définitif, par application des articles L.211-9 et L.211-13 du code des assurances avec anatocisme à compter de la première année échue, par application des dispositions de l’article 1343-2 du code civil ;Débouter la MACIF de toute demande à l’encontre de Monsieur [Y] ;Rendre le jugement à intervenir commun à l’AJE.Maintenir l’exécution provisoire du jugement à intervenir.Mentionner dans le jugement que, dans l’hypothèse où, à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par le présent jugement, l’exécution forcée devra être réalisée par l’intermédiaire d’un huissier, le montant des sommes retenues par l’huissier en application du tarif des huissiers devra être supporté par la MACIF en sus de l’article 700 du CPC.
Par dernières conclusions régulièrement signifiées le 29 janvier 2024, la société MACIF demande au tribunal de :
Donner acte à la MACIF de ce qu’elle ne conteste pas le droit à indemnisation intégrale de Monsieur [D] [Y] au titre des conséquences dommageables de l’accident de la circulation dont il a été victime le 13 avril 2012 à [Localité 2], Fixer les indemnités compensatrices des différents postes de préjudice, avant imputation de la créance des organismes sociaux, dans les proportions suivantes : Dépenses de santé actuelles : débouté
Frais divers d’assistance à expertise : 2 217 €
Frais divers de déplacements : 12 853,72 €,
Tierce personne temporaire : 5 712 €
Perte de gains professionnels actuels : aucune réclamation
Tierce personne permanente : débouté
Perte de gains professionnels futurs : débouté
Incidence professionnelle : 20 000 €, avant imputation de la créance des organismes sociaux,
Déficits fonctionnels temporaires total et partiels : 5 297,50 €
Souffrances endurées : 12 000 €
Déficit fonctionnel permanent : 26 400 €
Préjudice esthétique permanent : 2 500 €
Déduire la créance définitive de l’Agent Judiciaire de l’Etat au titre de l’Allocation Temporaire d’Invalidité sur les postes Incidence professionnelle et Déficit fonctionnel permanent et le cas échéant Pertes de gains professionnels futurs, Déduire les provisions versées à Monsieur [Y] par la MACIF à hauteur de la somme totale de 16 000 €. Prononcer, à défaut, des condamnations « en deniers ou quittances » Dire et juger que la sanction du doublement des intérêts aura pour assiette l’offre de la MACIF du 24 juin 2016 et sera limitée à la période ayant couru du 19 octobre 2015 au 24 juin 2016, Débouter Monsieur [D] [Y] des réclamations qu’il présente sur le fondement de l’article 700 du CPC et au titre des dépens, Débouter Monsieur [Y] du surplus de ses demandes, Condamner l’Agent Judiciaire de l’Etat à garantir la MACIF de l’ensemble des condamnations qui seront prononcées à son encontre au profit de Monsieur [D] [Y] et des tiers payeurs de ce dernier, et ce tant en principal qu’intérêts, frais et dépens, Condamner l’Agent Judiciaire de l’Etat à verser à la MACIF la somme de 4 000 € sur le fondement de l’article 700 du CPC, Condamner l’Agent Judiciaire de l’Etat aux entiers dépens de l’instance, dont distraction au profit de la SELARL CHAUVIN DE LA ROCHE-HOUFANI, Avocat aux offres de droit, par application des dispositions de l’article 699 du CPC. A titre subsidiaire, réduire, dans de plus justes proportions les demandes de Monsieur [D] [Y] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties quant à l'exposé détaillé de leurs prétentions et moyens.

Bien que régulièrement assigné, l’AJE n’a pas constitué avocat. La présente décision sera réputée contradictoire.

La clôture est intervenue par ordonnance du juge de la mise en état du 30 janvier 2024. L’affaire a été fixée en plaidoiries le 26 mars 2024 et mise en délibéré, à cette date, au 4 juin 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

1. SUR LE DROIT À INDEMNISATION

La loi du 5 juillet 1985 dispose que les victimes d’un accident de la circulation, non conducteurs d’un véhicule terrestre à moteur, ont droit à l'indemnisation des dommages résultant des atteintes à leur personne qu'elles ont subies, sauf lorsqu’elles ont commis une faute inexcusable qui a été la cause exclusive de l’accident ou qu’elles ont volontairement recherché le dommage qu’elles subissent.

En l’espèce, le droit à indemnisation de Monsieur [Y], passager d’un des véhicules impliqués dans l’accident, n’est pas contesté.

Par conséquent, la société MACIF, assureur d’un véhicule, sera condamnée, comme il le demande, à l’indemnisation intégrale de son préjudice.

2. SUR LA RÉPARATION DES PRÉJUDICES

Au vu de l'ensemble des éléments produits aux débats, le préjudice subi par Monsieur [Y], né le [Date naissance 4] 1985 et gardien de la paix, lors des faits, sera réparé ainsi que suit, étant observé qu'en application de l'article 25 de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006, d'application immédiate, le recours subrogatoire des tiers payeurs s'exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'ils ont pris en charge.

Par ailleurs, il convient, le cas échéant, d'utiliser le barème de capitalisation publié dans la Gazette du Palais le 31 octobre 2022, en retenant le taux de 0% au lieu du taux de -1% sollicité par le requérant, qui est le mieux adapté aux données sociologiques et économiques actuelles.

– PREJUDICES PATRIMONIAUX

Préjudices patrimoniaux temporaires

- Dépenses de santé actuelles avant consolidation

Les dépenses de santé sont constituées de l’ensemble des frais hospitaliers, de médecins, d’infirmiers, de professionnels de santé, de pharmacie et d’appareillage en lien avec l’accident.

Monsieur [Y] sollicite la somme de 146 euros au titre de frais d’ostéopathie restés à charge. Il produit les notes d’honoraires réglées pour des séances en 2014, la mention « suite cervicalgies et douleurs membre supérieur gauche » étant apposée sur certaines.

La société MACIF s’y oppose considérant que ces frais non relevés dans l’expertise ne sont pas imputables à l’accident.

Aux termes du relevé de créance définitive daté du 5 août 2015 produit par l’AJE organisme social de Monsieur [Y] fonctionnaire de police, la somme de 15 913,33 euros a été versée au titre des frais médicaux.

Le rapport d’expertise judiciaire ne mentionne pas de frais d’ostéopathie, mais fait état de la poursuite d’une kinésithérapie et de doléances liées à des douleurs dans le bras et l’épaule gauche.

Au regard des notes d’honoraires produites et des séquelles constatées par l’expert, ces dépenses peuvent donc être retenues comme imputables à l’accident.

Par conséquent, il sera alloué la somme de 146 euros.

- Frais divers

L'assistance de la victime lors des opérations d'expertise par un, ou des, médecin conseil en fonction de la complexité du dossier, en ce qu'elle permet l'égalité des armes entre les parties à un moment crucial du processus d'indemnisation, doit, par exemple, être prise en charge dans sa totalité. Les frais d’expertise relèvent, en revanche, des dépens.

En l’espèce, Monsieur [Y] sollicite la somme totale de 15 070,72 euros au titre des frais de médecins-conseils et de frais de déplacement.

A l’examen des justificatifs produits, la société MACIF indique ne pas contester le montant sollicité.

Par conséquent, il sera entériné l’accord total des parties sur la somme de 15 070,72 euros.

- Assistance tierce personne avant consolidation

Il convient d'indemniser les dépenses destinées à compenser les activités non professionnelles particulières qui ne peuvent être assumées par la victime directe durant sa maladie traumatique, comme l'assistance temporaire d'une tierce personne pour les besoins de la vie courante, étant rappelé que l’indemnisation s'entend en fonction des besoins et non en fonction de la dépense justifiée. Le montant de l'indemnité allouée au titre de l'assistance d'une tierce personne ne saurait être subordonné à la production de justificatifs des dépenses effectives.

Monsieur [Y] demande une somme totale de 8 925 euros en retenant un tarif horaire de 25 euros.

La société MACIF propose une somme de 5 712 euros sur la base d’un tarif horaire de 16 euros.

L’expert a évalué le besoin de la manière suivante : « 2h/jour du 20 avril 2012 au 31 mai 2012 ; 1h/jour du 1er juin 2012 au 28 février 2013. », les parties s’accordant sur le nombre de jours indemnisables.

Sur la base d’un taux horaire de 18 euros, adapté à la situation de la victime, il convient de lui allouer la somme de 6 426 euros : (42 jours x 2heures x 18euros + 273 jours x 1heure x 18euros).

- Perte de gains professionnels avant consolidation
Il s'agit de compenser les répercussions de l'invalidité sur la sphère professionnelle de la victime jusqu'à la consolidation de son état de santé. L'évaluation de ces pertes de gains doit être effectuée in concreto au regard de la preuve d'une perte de revenus établie par la victime jusqu'au jour de sa consolidation.
Aux termes du relevé de créance définitive daté du 5 août 2015 produit par l’AJE organisme social de Monsieur [Y] fonctionnaire de police, la somme totale de 89 217,45 euros a été versée au titre des salaires et charges patronales avant la consolidation.

Monsieur [Y] ne formant aucune demande, il n’y a lieu à statuer.

Préjudices patrimoniaux permanents

- Assistance tierce personne pérenne

Il convient d'indemniser les dépenses destinées à compenser les activités non professionnelles particulières qui ne peuvent être assumées par la victime directe après la consolidation de son état de santé, comme l'assistance temporaire d'une tierce personne pour les besoins de la vie courante, étant rappelé que l’indemnisation s'entend en fonction des besoins et non en fonction de la dépense justifiée. Le montant de l'indemnité allouée au titre de l'assistance d'une tierce personne ne saurait être subordonné à la production de justificatifs des dépenses effectives.

En l'espèce, le rapport d'expertise n’a pas retenu de besoin pérenne sur ce poste. En réponse au dire formulé par le requérant, l’expert judiciaire a indiqué : « Comme je l’ai déjà écrit, un homme droitier en bonne santé gêné par un léger déficit du membre supérieur gauche, n’a pas besoin d’une aide humaine pour la vie quotidienne. D’autre part, les séquelles actuelles de Monsieur [Y] auront tendance à s’estomper avec le temps, c’est pourquoi une aide post-consolidation n’est pas justifiée. »

Monsieur [Y] sollicite une somme totale viagère de 283 233 euros en capital sur la base d’un besoin de 3 heures par semaine et d’un taux horaire de 25 euros. Alléguant la persistance de douleurs, il indique être dans l’incapacité de réaliser certains actes comme le port de courses et ne peut plus réaliser seul certaines tâches ménagères (carreaux, nettoyage de sol etc..). Il ne produit aucune pièce au soutien de ses écritures.

La société MACIF s’oppose à la demande au regard des conclusions du rapport d’expertise et d’un rapport d’enquête réalisé par ses soins.

Sur ce, il ressort, d’une part, du rapport d’expertise judiciaire que l’expert a rejeté de manière circonstanciée tout besoin en aide humaine au regard des séquelles limitées de Monsieur [Y].

D’autre part, le rapport d’enquête relève qu’à l’issue d’une surveillance, Monsieur [Y] a été vu conduisant son véhicule à boîte manuelle, ainsi que faisant des courses au supermarché seul avec ses enfants en bas âge qu’il transportait et installait dans le véhicule. Il est également vu porter des courses ou un enfant du seul bras gauche. Le rapport produit également une vidéo publiée sur internet d’un événement festif organisé pour l’anniversaire de Monsieur [Y], dans lequel il suit un cours de sport avec des amis et manipule pendant un temps certain des haltères avec les bras et ce, quel que soit le poids réel de ces haltères.

Force est, enfin, de constater que Monsieur [Y] n’apporte aucun élément probatoire au soutien de sa demande.

Au regard de ce qui précède, le besoin n’est pas établi.

Par conséquent, la demande sera rejetée.

- Aide à la parentalité

L’assistance personnelle et l’assistance parentale (aide de la victime dans sa fonction de mère ou père) peuvent être indemnisées. Cette dernière ne doit pas être évaluée par rapport au besoin de l’enfant, mais par rapport au besoin du au parent victime.

En l’espèce, Monsieur [Y], père de quatre enfants nés après l’accident en 2017, 2019 et 2021 (jumeaux), sollicite une somme totale de 135 500 euros pour un besoin évolutif jusqu’aux 5 ans de ses enfants. Il indique qu’il ne peut seul leur donner le bain, les changer ou leur donner le biberon en raison de l’impossibilité de les porter. Il verse les actes de naissance de ses enfants et une attestation de son épouse.

La société MACIF s’y oppose faisant état de l’absence de besoin établi.

Le rapport d’expertise n’a pas retenu ce poste, étant cependant précisé qu’il a été réalisé avant la naissance des enfants.

Par ailleurs, le rapport d’enquête privé a constaté que Monsieur [Y] prenait seul la voiture notamment pour faire ses courses au supermarché avec deux enfants en bas âge et qu’il était en mesure sans difficulté apparente de les transporter dans et hors du véhicule, ainsi qu’avec une poussette à deux places.

Dès lors, Monsieur [Y] n’établit pas les incapacités alléguées et le préjudice, dont il demande l’indemnisation.

Par conséquent, la demande sera rejetée.

- Perte de gains professionnels future

Ce poste indemnise la victime de la perte ou de la diminution de ses revenus consécutive à l'incapacité permanente à laquelle elle est confrontée du fait du dommage dans la sphère professionnelle après la consolidation de son état de santé.

En l’espèce, l’expert a retenu un retentissement professionnel : « Monsieur [Y] est considéré comme inapte à travailler sur la voie publique et au port d’arme, ce qui oblige à une activité très limitée ».

Monsieur [Y] sollicite une somme capitalisée de 253 777,37 euros ou subsidiairement de 133 948,46 euros. Il fait valoir qu’il n’a plus l’autorisation de port d’arme et ne peut donc plus être sur le terrain. De plus, ses séquelles (douleurs dans les transports en commun et sensibilité accrue du bras avec le risque de heurt dans la rue) incompatibles avec la vie en région parisienne l’ont contraint, selon lui, à demander une mutation en Bretagne, sa région d’origine. Pour calculer sa perte de gains liée à un poste fixe et en province, il se base sur une comparaison de salaires avec un collègue resté en région parisienne.

La société MACIF s’oppose à la demande considérant que la mutation en Bretagne n’est pas imputable à l’accident.

Par ailleurs, Monsieur [Y] justifie avoir perçu de l’AJE une allocation temporaire d’invalidité (ATI) pour un montant de 17 697 euros entre juillet 2014 et juillet 2019. Il démontre également que le versement a cessé à cette date. Dès lors, il n’y a lieu à surseoir à statuer sur la liquidation de ce poste comme l’évoque subsidiairement le défendeur dans le corps de ses écritures.

Or, d’une part, s’agissant de l’imputabilité de la mutation en province à l’accident, il convient de relever que les certificats médicaux évoqués sur le retentissement psychique et physique des faits sont antérieurs à la consolidation, de même que la demande de mutation faite environ un an après l’accident durant sa convalescence et obtenue début 2014 avec avis favorable pour motif médical. En outre, il n’est pas contesté que Monsieur [Y] a obtenu un poste dans la région dont il était originaire. Enfin, il n’apporte aucun élément pour établir qu’il serait resté en région parisienne pour l’ensemble de sa carrière tel qu’il l’allègue.

Dès lors, sans qu’il soit besoin d’examiner la réalité d’une perte de revenus au vu des pièces financières produites (primes spécifiques en région parisienne), il est impossible de retenir l’imputabilité de la mutation à l’accident et, partant, le principe de la demande formée à ce titre.

D’autre part, Monsieur [Y] établit au regard des avis de la médecine du travail et des arrêtés administratifs pris, qu’il a dû bénéficier d’un aménagement de son poste sans port d’arme et service sur la voie publique. Néanmoins, il n’établit pas pour autant une corrélation entre cette conséquence imputable à l’accident et une perte de gains précise. En effet, les pièces produites ne permettent pas de déterminer précisément si, et dans quelle mesure, sa nouvelle affectation est moins rémunératrice. Aucune perte de gains n’est donc établie. Ce préjudice-là pourra être, en revanche, indemnisé au titre de l’incidence professionnelle.

Par conséquent, Monsieur [Y] sera débouté de sa demande.

- Incidence professionnelle

Ce poste d'indemnisation a pour objet d'indemniser les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle comme le préjudice subi par la victime en raison de sa dévalorisation sur le marché du travail, de sa perte d'une chance professionnelle, ou de l'augmentation de la pénibilité de l'emploi qu'elle occupe imputable au dommage ou encore du préjudice subi qui a trait à sa nécessité de devoir abandonner la profession qu'elle exerçait avant le dommage au profit d'une autre qu'elle a du choisir en raison de la survenance de son handicap.

Il est demandé la somme de 60 000 euros et, subsidiairement, de 193 948,46 euros en tenant compte de la perte de primes.

Il est proposé la somme de 20 000 euros.

Au regard des conclusions du rapport d’expertise permettant de retenir une pénibilité légère dans l’exercice de son emploi, ainsi que des pièces produites établissant la nécessité de l’aménagement pérenne de son poste de gardien de la paix à défaut de pouvoir, de nouveau, porter une arme et d’aller sur la voie publique, l’incidence professionnelle est caractérisée au titre d’une augmentation de la pénibilité de l’emploi, mais aussi de la nécessité de devoir aménager la profession précédemment exercée sans toutefois y renoncer .

Au regard de l’âge de Monsieur [Y], en début d’une carrière de fonctionnaire au moment de l’accident, son préjudice pourra être fixé à la somme de 60 000 euros.

L’ATI perçue étant imputable sur ce poste à hauteur de 17 697 euros, il lui sera alloué la somme de 42 303 euros.

– PRÉJUDICES EXTRA-PATRIMONIAUX

- Préjudices extra-patrimoniaux temporaires

- Déficit fonctionnel temporaire

Ce poste de préjudice indemnise l'invalidité subie par la victime dans sa sphère personnelle pendant la maladie traumatique. Le déficit fonctionnel temporaire inclut pour la période antérieure à la date de consolidation, l'incapacité fonctionnelle totale ou partielle ainsi que le temps d'hospitalisation et les pertes de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique.

En l’espèce, l’expertise a retenu les éléments suivants :
- Un déficit fonctionnel temporaire total du 13 au 19 avril 2012 et du 12 au 15 avril 2014 ;
- Un déficit fonctionnel temporaire partiel à 50% du 20 avril au 31 mai 2012 ;
- Un déficit fonctionnel temporaire partiel à 30% du 1er juin 2012 au 28 février 2013 ;
- Un déficit fonctionnel temporaire partiel à 20% du 1er mars 2013 au 11 avril 2014 et du 16 avril 2014 au 7 juillet 2014.

Il est demandé au tribunal de fixer le taux journalier à 30 euros pour un montant total de 6 363 euros et offert une somme de 5 297,50 euros avec un taux de 25 euros par jour.

Sur la base d’une indemnisation de 27 euros par jour pour un déficit total, les troubles dans les conditions d'existence subis par Monsieur [Y] jusqu'à la consolidation, justifient l'octroi d'une somme de 5 726,70 euros calculée comme suit :
11 jours x 27 euros + 42 jours x 27 euros x 50% + 273 jours x 27 euros x 30% + 491 jours x 27 x 20%.

- Souffrances endurées

Il s'agit de toutes les souffrances physiques et psychiques, ainsi que des troubles associés, que doit endurer la victime durant la maladie traumatique, c'est-à-dire du jour de l'accident à celui de sa consolidation. A compter de la consolidation, les souffrances endurées vont relever du déficit fonctionnel permanent et seront donc indemnisées à ce titre.

En l'espèce, il est demandé une somme de 20 000 euros et offert 12 000 euros.

Ces souffrances ont été cotées à 4/7 par l’expert, qui a retenu l’intervention chirurgicale initiale, les soins de rééducation, les douleurs persistantes et un syndrome dépressif réactionnel.

Eu égard à ces éléments, elles seront réparées par l'allocation de la somme de 15.000 euros.

- Préjudices extra-patrimoniaux permanents

- Déficit fonctionnel permanent

Ce préjudice a pour composante les atteintes aux fonctions physiologiques de la victime, les douleurs qui persistent depuis la consolidation, la perte de la qualité de la vie et les troubles définitifs apportés à ces conditions d'existence.

En l’espèce, il est demandé la somme de 28 800 euros. Il est offert 26 400 euros.

Monsieur [Y] souffre d’un déficit fonctionnel permanent, évalué à 12 % par l’expert pour ces motifs : « diminution de la mobilité de l’épaule gauche avec diminution de la force dans le membre supérieur gauche, des douleurs névralgiques au niveau du coude et de l’avant-bras gauche et un syndrome dépressif réactionnel qui tend à s’estomper ».

L’intégralité de l’ATI effectivement versée par l’AJE a été imputée sur le poste de l’incidence professionnelle et il est démontré que Monsieur [Y] ne perçoit pas cette indemnité. Par conséquent, il n’y a lieu à surseoir à statuer dans l’attente de la décision de la Cour de cassation sur le pourvoi n°23-14.755 portant sur l’éventuelle imputation de l’allocation temporaire d’invalidité sur ce poste de préjudice.

Dès lors, la victime souffrant d’un déficit fonctionnel permanent évalué à 12% par l’expert et étant âgée de 29 ans lors de la consolidation de son état, il pourra être calculé une indemnité sur la base d’un point d’incapacité de 2550 euros.

Il sera donc alloué la somme ramenée à 28 800 euros au regard de la demande.

- Préjudice esthétique

Ce préjudice est lié à la nécessité de se présenter dans un état physique altéré au regard des tiers, et ce de manière pérenne à compter la date de consolidation.

Il est demandé la somme de 3 000 euros. Il est offert 2 500 euros.

Le préjudice a été fixé à 1,5/7 par l’expert au regard d’une cicatrice verticale à la face externe de la partie basse du bras longue de 20 cm, un peu élargie, sans adhérence osseuse.
Eu égard à ces seuls éléments, il sera alloué la somme offerte de 2 500 euros.

- Préjudice d'agrément

Ce préjudice vise à réparer le préjudice spécifique lié à l’impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité spécifique, sportive ou de loisirs, exercée antérieurement à l’accident et également les limitations ou les difficultés à poursuivre ces activités.

En l’espèce, il est demandé 15 000 euros eu égard à l’abandon de la pratique des arts martiaux et de la boxe. Il est proposé la somme de 6 000 euros.

L’expert a retenu un préjudice à ce titre.

En outre, Monsieur [Y] produit plusieurs attestations faisant état d’une pratique sportive intense dans ce domaine.

Par conséquent, la demande caractérisée sera indemnisée à hauteur de 6 000 euros.

3. SUR LE DOUBLEMENT DES INTERETS

Aux termes de l'article L 211-9 du code des assurances, une offre d'indemnité, comprenant tous les éléments indemnisables du préjudice, doit être faite à la victime qui a subi une atteinte à sa personne dans le délai maximal de 8 mois à compter de l'accident. Cette offre peut avoir un caractère provisionnel lorsque l'assureur n'a pas, dans les trois mois de l'accident, été informé de la consolidation de l'état de la victime. L'offre définitive doit alors être faite dans un délai de 5 mois suivant la date à laquelle l'assureur a été informé de cette consolidation. En tout état de cause, le délai le plus favorable à la victime s'applique.

Lorsque l'assureur n'est pas informé de la consolidation de l'état de la victime dans les trois mois suivant l'accident, il doit faire une offre d'indemnisation provisionnelle dans un délai de huit mois à compter de l'accident. L'offre définitive doit être faite dans un délai de 5 mois suivant la date à laquelle l'assureur a été informé de la consolidation.

A défaut d'offre dans les délais impartis par l'article L 211-9 du code des assurances, le montant de l'indemnité offerte par l'assureur ou allouée par le juge, produit, en vertu de l'article L 211-13 du même code, des intérêts de plein droit au double du taux de l'intérêt légal à compter de l'expiration du délai et jusqu'au jour de l'offre ou du jugement devenu définitif.

En l’espèce, il est demandé de fixer le point de départ du doublement des intérêts légaux au 19 octobre 2015 jusqu’à la décision et ce, sur l’indemnité globale allouée. Le défendeur demande de limiter la sanction à la date du 24 juin 2016, à laquelle il a formulé une offre.

Or, le rapport d’expertise a été déposé le 18 mai 2015. La société MACIF devait donc faire une offre avant le 19 octobre 2015, ce qu’elle n’a pas fait et ce qui n’est pas contesté. La sanction commence donc à courir à compter de cette date.

S’agissant de son terme, la société MACIF se prévaut d’une offre faite le 24 juin 2016, dont le demandeur conteste le caractère complet et suffisant. Or, l’offre comprend une proposition pour chacun des postes de préjudice retenus par l’expert pour des montants adaptés au moment de sa formulation. De plus, il ne peut être reproché à celle-ci un caractère incomplet, du fait de l’absence de proposition pour la tierce personne non retenue par l’expert et pour les pertes de gains professionnels futurs peu documentés dans le rapport. Une proposition de 9 000 euros est, d’ailleurs, faite pour l’incidence professionnelle. Au regard de ces éléments, l’assureur a respecté ses obligations à compter du 24 juin 2016.

Il convient par conséquent d’assortir la condamnation à indemnisation d’intérêts au double du taux de l’intérêt légal, avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées, du 19 octobre 2015 au 24 juin 2016 sur le montant de l’offre du 24 juin 2016.

Il convient également de dire que les intérêts échus des capitaux produiront intérêts dans les conditions fixées par l'article 1343-2 du code civil.

4. SUR LES RECOURS ENTRE COAUTEURS

Le conducteur d'un véhicule à moteur impliqué dans un accident de la circulation et déclaré tenu d'indemniser l'entier dommage causé à un tiers, ne peut exercer un recours contre un autre conducteur impliqué que sur le fondement des dispositions des articles 1382 et 1251 du code civil.
Le recours du conducteur d'un véhicule terrestre à moteur impliqué dans un accident de la circulation ou de son assureur qui a indemnisé les dommages causés à un tiers s'exerce contre le conducteur d'un autre véhicule impliqué sur le fondement des articles 1382 et 1251 du code civil. La contribution à la dette a lieu en proportion de leurs fautes respectives ou en l'absence de faute prouvée à parts égales.

En l’espèce, la société MACIF fait valoir que le conducteur du véhicule de police, dans lequel se trouvait Monsieur [Y] comme passager, a commis des fautes de conduite directement et exclusivement à l’origine de l’accident. S’agissant d’un véhicule de police, elle demande donc à ce que l’AJE, qui dispose d’un monopole légal s’agissant des actions indemnitaires contre l’Etat, soit condamné à la garantir de l’ensemble des condamnations prononcées.

L’AJE n’a pas constitué avocat et n’a donc pas conclu sur ce point.
Or, l’article R 432-1 du code de la route prévoit que : « Les dispositions du présent livre relatives aux règles de circulation des véhicules ne sont pas applicables aux conducteurs des véhicules d'intérêt général prioritaires lorsqu'ils font usage de leurs avertisseurs spéciaux dans les cas justifiés par l'urgence de leur mission et sous réserve de ne pas mettre en danger les autres usagers de la route. »
De plus, l’article R. 412-6 du code de la route dispose que : « Tout véhicule en mouvement ou tout ensemble de véhicules en mouvement doit avoir un conducteur. Celui-ci doit, à tout moment, adopter un comportement prudent et respectueux envers les autres usagers des voies ouvertes à la circulation. Il doit notamment faire preuve d'une prudence accrue à l'égard des usagers les plus vulnérables. ».

En l’espèce, l’accident entre les deux véhicules impliqués s’est produit de jour sur une chaussée mouillée à l’angle du [Adresse 11] et de [Adresse 12] dans le [Localité 2]. Les dépistages en matière d’alcool et de stupéfiants étaient négatifs pour les deux conducteurs.

Les véhicules se sont heurtés au niveau d’une intersection, l’avant-gauche du véhicule assuré par la société MACIF heurtant l’avant droit du véhicule de police. Le conducteur du véhicule de police, ainsi que Monsieur [Y], son passager, ont indiqué qu’ils partaient en intervention en ayant actionné leurs avertisseurs sonores et lumineux et qu’ils avaient franchi l’intersection au feu rouge à une vitesse d’environ 30 à 40 kilomètres/heure sans voir le véhicule arrivant à droite. Le conducteur de ce véhicule a indiqué pour sa part s’être engagé à une vitesse réduite d’environ 10 kilomètres/heure sur le croisement, alors que le feu tricolore était au vert pour lui. Il avait entendu l’avertisseur sonore, mais n’en avait pas identifié la provenance sur sa gauche et n’avait vu le véhicule de police qu’au dernier moment.

Aucune défaillance technique des véhicules n’est relevée. Il a également été constaté que la circulation était régie par des feux tricolores provisoires, mais synchrones.

Il ressort, cependant, tant des déclarations des deux conducteurs, que des constatations faites par les services intervenants que la visibilité au niveau du croisement était limitée par les travaux en cours du tramway T3. Aucune photographie n’a été réalisée au cours de la procédure pénale. La description des obstacles visuels est la suivante : « A proximité de cet angle, des barrières de travaux sont implantées de part et d’autre de la demi chaussée du [Adresse 11]. Ces barrières, de couleurs vert et gris font un 1,05 mètre de hauteur. Elles sont implantées successivement le long des bords de la chaussée dans des socles, le long et au sein d’un périmètre délimité par des lignes jaunes de travaux matérialisées au sol. De même, toujours à l’angle [Adresse 11]/[Adresse 9] situé à droite, sont implantés provisoirement au sein d’un périmètre de travaux des barrières en béton (…) Des panneaux indicateurs du sens de circulation (flèches réfléchissantes horizontales rouges et blanches surplombent ces barrières en béton. Ils sont posés sur des tiges métalliques portant la hauteur de ce barriérage à un mètre soixante-cinq. Toutes les barrières se trouvant sur la zone de travaux gênent la visibilité des usagers de la route. ».

Au regard de ces éléments, il apparaît que les deux conducteurs impliqués se devaient d’adopter un comportement prudent, puisqu’ils ne pouvaient ignorer l’état altéré de la visibilité sur le croisement en raison des travaux. Cette prudence devait être particulièrement renforcée, tant pour le conducteur du véhicule de police, qui savait franchir un carrefour au feu rouge pour lui et ne devait pas mettre en danger les autres usagers en particulier ceux qu’il risquait de ne pas voir, que pour le conducteur de l’autre véhicule, qui avait entendu l’arrivée d’un véhicule prioritaire sans pourtant le voir et ainsi adapter sa conduite.

Dès lors, des fautes équivalentes ont été commises par chacun des conducteurs, la contribution à la dette étant donc à partager par moitié.
En conséquence, l’AJE sera condamné à garantir la société MACIF à hauteur de 50% de l’ensemble des condamnations prononcées au titre de l’accident subi par Monsieur [Y], en ce compris celles relevant des dépens et de l’article 700 du code de procédure civile.

5. SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES

La société MACIF, qui est condamnée, supportera les dépens avec distraction au profit des avocats en ayant fait la demande.

Il convient également de dire que les intérêts échus des capitaux produiront intérêts dans les conditions fixées par l'article 1343-2 du code civil.

En outre, la société MACIF devra supporter les frais irrépétibles engagés dans la présente instance et que l'équité commande de réparer à raison de 2 500 euros au bénéfice de Monsieur [Y] au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il n’y a en revanche lieu à condamner l’AJE aux dépens ou à une somme quelconque au titre des frais irrépétibles, celui-ci ayant été condamné à garantir la société MACIF de l’ensemble des condamnations prononcées.

En application de l’article 514 du code de procédure civile en vigueur au jour de l’assignation, l’exécution provisoire est de droit.

Par contre, rien ne justifie de faire exception aux règles de tarification des émoluments des huissiers de justice en matière d'exécution forcée en application de l'article 10 du décret du 12 décembre 1996.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire mis à disposition au greffe et rendu en premier ressort,

DIT que le droit à indemnisation de Monsieur [D] [Y] des suites de l’accident de la circulation survenu le 13 avril 2012 est entier ;

DEBOUTE la société MACIF de sa demande de sursis à statuer ;

CONDAMNE la société MACIF à payer à Monsieur [D] [Y], à titre de réparation de son préjudice corporel, en deniers ou quittances, provisions non déduites, en réparation des préjudices suivants :

Patrimoniaux temporaires :
- dépenses de santé actuelles : 146 euros,
- frais divers : 15 070,72 euros,
- assistance par tierce personne temporaire : 6 426 euros,
Patrimoniaux permanents :
- incidence professionnelle : 42 303 euros (déduction faite de l’ATI),
Extrapatrimoniaux temporaires :
- déficit fonctionnel temporaire : 5 726,70 euros,
- souffrances endurées : 15 000 euros,
Extra-patrimoniaux permanents :
- déficit fonctionnel permanent : 28 800 euros,
- préjudice esthétique permanent : 2 500 euros,
- préjudice d’agrément : 6 000 euros ;

DIT que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de ce jour ;

DIT que les intérêts échus des capitaux produiront intérêts dans les conditions fixées par l'article 1343-2 du code civil ;

DEBOUTE Monsieur [D] [Y] de ses demandes au titre de la tierce personne pérenne, de l’aide à la parentalité et des pertes de gains professionnels futurs ;

CONDAMNE la société MACIF à payer à Monsieur [D] [Y] les intérêts au double du taux de l'intérêt légal sur le montant de l'offre effectuée le 24 juin 2016, avant imputation de la créance des tiers payeurs et avant déduction des provisions versées, à compter du 19 octobre 2015 jusqu’au 24 juin 2016 ;

DECLARE le présent jugement commun à l’AJE ;

CONDAMNE la société MACIF à payer à Monsieur [D] [Y] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 2 500 euros ;

CONDAMNE la société MACIF aux dépens, pouvant être recouvrés directement par la SELARL Cabinet Rémy LE BONNOIS représentée par Maître Frédéric LE BONNOIS pour ceux dont il a fait l’avance sans avoir obtenu provision conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;

CONDAMNE l’AJE à garantir la société MACIF à hauteur de 50% de l’ensemble des condamnations prononcées au titre de l’accident subi le 13 avril 2012 par Monsieur [Y], en ce compris celles relevant des dépens et de l’article 700 du code de procédure civile.

REJETTE la demande relative à la prise en charge exclusive du débiteur des frais d'exécution forcée ;

RAPPELLE que la présente décision est assortie de l'exécution provisoire ;

REJETTE le surplus des demandes, plus amples ou contraires.

Fait et jugé à Paris le 04 Juin 2024.

La GreffièreLa Présidente

Erell GUILLOUËTLaurence GIROUX


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 19ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/00583
Date de la décision : 04/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-04;22.00583 ?
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