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03/06/2024 | FRANCE | N°23/10776

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 19ème chambre civile, 03 juin 2024, 23/10776


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le:



19ème chambre civile


N° RG 23/10776

N° MINUTE :


CONDAMNE

Assignation du :
08 Août 2023

SB






JUGEMENT
rendu le 03 Juin 2024
DEMANDEUR

Monsieur [P] [R]
[Adresse 5]
[Localité 8]

représenté par Maître Hadrien MULLER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E0871




DÉFENDERESSES

Compagnie d’assurance ALLIANZ
[Adresse 1]
[Localité 9]

ET<

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Société LIME
[Adresse 3]
[Localité 6]

représentée par Maître Céline DELAGNEAU de la SELAS COMOLET ZANATI AVOCATS, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P435


CPAM du VAR
[Adresse 4]
[Localité 7]

non repré...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le:

19ème chambre civile


N° RG 23/10776

N° MINUTE :

CONDAMNE

Assignation du :
08 Août 2023

SB

JUGEMENT
rendu le 03 Juin 2024
DEMANDEUR

Monsieur [P] [R]
[Adresse 5]
[Localité 8]

représenté par Maître Hadrien MULLER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E0871

DÉFENDERESSES

Compagnie d’assurance ALLIANZ
[Adresse 1]
[Localité 9]

ET

Société LIME
[Adresse 3]
[Localité 6]

représentée par Maître Céline DELAGNEAU de la SELAS COMOLET ZANATI AVOCATS, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P435

CPAM du VAR
[Adresse 4]
[Localité 7]

non représentée
Décision du 03 Juin 2024
19ème chambre civile
N° RG 23/10776

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Par application des articles R.212-9 du Code de l’Organisation Judiciaire et 812 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été attribuée au Juge unique.

Avis en a été donné aux avocats constitués qui ne s’y sont pas opposés.

Madame Sabine BOYER, Vice-Présidente, statuant en juge unique.

Assistée de Madame Célestine BLIEZ, greffière, lors des débats et au jour de la mise à disposition.

DÉBATS

A l’audience du 11 Mars 2024, tenue en audience publique, avis a été donné aux avocats que la décision serait rendue le 03 Juin 2024.

JUGEMENT

- Réputé contradictoire
- En premier ressort
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE

Madame [P] [R] née le [Date naissance 2] 1946 a été victime le 31 juillet 2020, en qualité de piéton à Paris, d’un accident de la circulation dans lequel est impliqué la trottinette électrique conduite par Mme [O] [T], appartenant à la société LIME, et assurée auprès de la compagnie d'assurance ALLIANZ.
Elle a subi un traumatisme au poignet droit ayant nécessité une intervention chirurgicale.

Elle a saisi le juge des référés qui, par ordonnance en date du 25 août 2021, a désigné en qualité d'expert le docteur [J], lequel a constaté qu’elle n’était pas consolidée le 17 décembre 2021.

Par ordonnance du 12 août 2022, le juge des référés a désigné le même expert pour examen et condamné la société LIME et ALLIANZ à lui verser une provision de 8000€.

L'expert a procédé à sa mission et, aux termes d'un rapport dressé le 27 février 2023, a conclu ainsi que suit :

blessures subies : fracture comminutive de l’extrémité distale du radius droit déplacée avec un refend sagittal intra-articulaire traité par réduction et mise en place d’une plaque antérieure au poignet ;
déficit fonctionnel temporaire : 
Total : 4/8/2020, 7/12/2020, 3 et 4/3/2022
33% du 31/7/2020 au 3/8/2020 et du 5/8/2020 au 16/9/2020, du 16/10/2020 au 6/12/2020
25% du 17/9/2020 au 15/10/2020, du 8/12/2020 au 7/1/2021 et du 5/3/2022 au 1/5/2022
15% du 8/1/2021 au 2/3/2022 et du 2/5/2022 au 18/10/2022
besoin en tierce personne : 2h par jour du 31/7/2020 au 3/8/2020 et du 5/8/2020 au 16/9/2020, du 16/10/2020 au 6/12/2020,
1 h par jour du 17/9/2020 au 15/10/2020 et du 8/12/2020 au 7/1/2021, du 5/3/2022 au 1/5/2022
4 h par semaine du 8/1/2021 au 2/3/2022
3 h par semaine du 2/5/2022 au 18/10/2022
1h par semaine à titre viager et aide au jardinage
souffrances endurées : 4/7 ;
consolidation des blessures : 18/10/2022;
déficit fonctionnel permanent : 12% ;
préjudice esthétique temporaire : 3/7 du 31/7/2020 au 16/9/2020, puis 2,5/7;
préjudice esthétique permanent : 2/7 ;
préjudice d'agrément : dysesthésies au toucher des 1et 2° rayons de la main droite chez une droitière avec raideur du poignet rendant douloureux les activités d’agrément nécessitant l’utilisation du pouce de l’index et du poignet droit ;
préjudice professionnel : non imputable ;
préjudice sexuel : positionnel et diminution de la libido ;
soins futurs : 10 séances de soutien psychiques ;
aménagement du véhicule : boite de vitesse automatique utile pour soulager ;

Par acte d'huissier régulièrement signifié le 07 Août 2023, Madame [P] [R] a fait assigner la compagnie ALLIANZ et la société LIME, ainsi que la CPAM du Var, devant ce tribunal aux fins de voir reconnaître son droit à indemnisation et de voir liquider ses préjudices.
Elle demande au tribunal de condamner in solidum de la compagnie ALLIANZ et la société LIME, à lui payer :
- au titre des préjudices patrimoniaux : 69 132,68€
- au titre des préjudices extrapatrimoniaux : 57 132,14€
- les intérêts au double du taux légal sur les indemnités allouées à compter du 31/3/2021 jusqu’à ce que la décision soit définitive
- les dépens dont distraction au profit de Maitre Hadrien MULLER et la somme de 4000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- rendre le jugement commun et opposable à la CPAM.

Aux termes de leurs conclusions récapitulatives signifiées le 10 novembre 2023, auxquelles il est référé expressément conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, ALLIANZ IARD et LIME demandent au tribunal, sous réserve de la communication des débours définitifs de la caisse, de :
Allouer à Mme [R] une indemnité globale de 53 441,04€, provision de 8000 € déduite : - dépenses de santé actuelles: 253,27€
- assistance à expertise : 900€
- frais de déplacements et hébergement : 1384,28€
-aide jardinage : 6592,51€
- tierce personne : 8076,64€
- dépenses de santé futures: 500 €
- assistance par tierce personne permanente : 8933,34€
- déficit fonctionnel temporaire: 3821€
- souffrances endurées: 10 000€
- préjudice esthétique temporaire: 1500€
- déficit fonctionnel permanent: 15 480€
- préjudice esthétique permanent: 2000€
- préjudice d’agrément: 2000€
- faire courir la pénalité du 27/7/2023 sur le montant de l’offre par la présente (61441,04€)
- rejeter les autres demandes et réduire la demande au titre de l’article 700.

La Caisse Primaire d’Assurance-Maladie du Var, quoique régulièrement assignée par acte remis à personne morale, n’a pas constitué avocat ; susceptible d'appel, le présent jugement sera donc réputé contradictoire et sera déclarée commun à la caisse.

La clôture de la présente procédure a été prononcée le 15 janvier 2024.

L'affaire a été mise en délibéré au 3 juin 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

SUR LE DROIT À INDEMNISATION

La loi du 5 juillet 1985 dispose que les victimes d’un accident de la circulation, non conducteurs d’un véhicule terrestre à moteur, ont droit à l'indemnisation des dommages résultant des atteintes à leur personne qu'elles ont subis, sauf lorsqu’elles ont commis une faute inexcusable qui a été la cause exclusive de l’accident ou qu’elles ont volontairement recherché le dommage qu’elles subissent.

Est impliqué dans un accident, au sens de la loi du 5 juillet 1985, tout véhicule intervenu, à quelque titre que ce soit, dans la survenance de cet accident.

Le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur ne peut se dégager de son obligation d'indemnisation que s'il établit que cet accident est sans relation avec le dommage.

En l'espèce, les défendeurs, qui ne contestent pas le droit à indemnisation de Mme [R] seront tenus de réparer son entier préjudice.

SUR L'ÉVALUATION DU PRÉJUDICE CORPOREL

Au vu de l'ensemble des éléments versés aux débats, le préjudice subi par Mme [R], âgée de 74 ans lors de l'accident, 76 ans à la date de consolidation de son état de santé, et 78 ans au jour du présent jugement, sera réparé ainsi que suit, étant observé qu'en application de l'article 25 de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006, d'application immédiate, le recours subrogatoire des tiers payeurs s'exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'ils ont pris en charge.

Il convient en l'espèce d'utiliser le barème de capitalisation publié dans la Gazette du Palais 2022, le mieux adapté aux données sociologiques et économiques actuelles, avec un taux d'intérêt de 0 %, comme demandé.

I. PREJUDICES PATRIMONIAUX

- Dépenses de santé

Les dépenses de santé sont constituées de l’ensemble des frais hospitaliers, de médecins, d’infirmiers, de professionnels de santé, de pharmacie et d’appareillage en lien avec l’accident.

En l'espèce, aux termes du relevé de ses débours, daté du 18/1/2023, le montant définitif des débours de la CPAM du Var s'est élevé à 7795,44 €, avec notamment 260,52 € de franchises.

Mme [R] sollicite l’allocation de la somme de 1433,52€ au titre des dépenses de santé restées à sa charge sans justifier avoir supporté in fine ces dépenses.
Les défendeurs ont sollicité en vain la production des débours de sa mutuelle.

Les franchises sont établies, toutefois les autres dépenses sont susceptibles d’être couvertes par une mutuelle. Dans la mesure où rien n’est indiqué sur ce point malgré sommation de communiquer les débours de la mutuelle des défendeurs, il sera alloué la seule somme de 260,52 € au titre des franchises.

- Frais divers

L'assistance de la victime lors des opérations d'expertise par un, ou des, médecin conseil en fonction de la complexité du dossier, en ce qu'elle permet l'égalité des armes entre les parties à un moment crucial du processus d'indemnisation, doit être prise en charge dans sa totalité. De même, ces données peuvent justifier d'indemniser les réunions et entretiens préparatoires. Les frais d'expertise font partie des dépens.

En l'espèce, les défendeurs acceptent de prendre en charge :
les frais d’assistance à expertise sollicités de 900€ les frais de taxis de 875,88€les frais d’hôtel pour elle seule à hauteur de 253,76€ au lieu de 282,52€les frais d’avion de 202,64€les frais de train pour elle seule 52 €au lieu de 104 €l’aide au jardinage de 6592,51€
Au vu des pièces versées aux débats, il convient d'allouer la somme de 8876,79 € à ce titre, la position d’ALLIANZ étant justifiée.
Les frais de psychologue seront examinés au titre des dépenses de santé futures.

- Assistance tierce personne provisoire

Il convient d'indemniser les dépenses destinées à compenser les activités non professionnelles particulières qui ne peuvent être assumées par la victime directe durant sa maladie traumatique, comme l'assistance temporaire d'une tierce personne pour les besoins de la vie courante, étant rappelé que l’indemnisation s'entend en fonction des besoins et non en fonction de la dépense justifiée. Le montant de l'indemnité allouée au titre de l'assistance d'une tierce personne ne saurait être subordonné à la production de justificatifs des dépenses effectives.

En l'espèce, il ressort du rapport d'expertise ce qui suit s'agissant de l'assistance tierce-personne temporaire :
2h par jour du 31/7/2020 au 3/8/2020 et du 5/8/2020 au 16/9/2020, du 16/10/2020 au 6/12/2020,
1 h par jour du 17/9/2020 au 15/10/2020 et du 8/12/2020 au 7/1/2021, du 5/3/2022 au 1/5/2022
4 h par semaine du 8/1/2021 au 2/3/2022
3 h par semaine du 2/5/2022 au 18/10/2022

Sur la base d’un taux horaire de 18 euros et 365 jours par an, adapté à la situation de la victime à ce stade, il convient de lui allouer la somme suivante :

dates18,00 € / heurenbre heuresnbre heuresTOTAL
31/07/2020par jourpar semaines/ 365 jours / an
03/08/20204 jours2,00 144,00 €
05/08/20202 jours 0,00 €
16/09/202042 jours2,00 1 512,00 €
15/10/202029 jours1,00 522,00 €
06/12/202052 jours2,00 1 872,00 €
08/12/20202 jours 0,00 €
07/01/202130 jours1,00 540,00 €
09/01/20212 jours 0,00 €
02/03/2022417 jours4,00 4 289,14 €
05/03/20223 jours 0,00 €
01/05/202257 jours1,00 1 026,00 €
18/10/2022170 jours3,00 1 311,43 €11 216,57 €

- Dépenses de santé futures

L’expert a retenu 10 séances de soutien psychologique et Mme [R] justifie avoir supporté un cout de 50€ pour une consultation.
En conséquence, il sera alloué la somme de 500€ sur laquelle les parties s’accordent.

- Assistance par tierce personne pérenne

Il convient d'indemniser les dépenses destinées à compenser les activités non professionnelles particulières qui ne peuvent être assumées par la victime directe après la consolidation de son état de santé, comme l'assistance temporaire d'une tierce personne pour les besoins de la vie courante, étant rappelé que l’indemnisation s'entend en fonction des besoins et non en fonction de la dépense justifiée. Le montant de l'indemnité allouée au titre de l'assistance d'une tierce personne ne saurait être subordonné à la production de justificatifs des dépenses effectives.

En l'espèce, il ressort du rapport d'expertise un besoin d’une heure par semaine à titre viager.

Sur la base d’un taux horaire de 20 euros et 52 semaines par an pour les arrérages échus et 22€ pour 57 semaines par an pour les arrérages à échoir, adapté à la situation décrite de la victime et pour lui permettre de recourir à un prestataire à l’avenir, il convient de lui allouer la somme suivante :

arrérages échus du 18/10/2022 au 11/3/2024 : 20€ x (511 j/7) = 1460 €arrérages à échoir au 11/3/2024 : 22€ x 57 semaines = 1254 € x 12,145 = 15229,83 €total : 16 689,83 €

- Aménagement du véhicule

En l'espèce, l’expert indique que Mme [R] rapporte une gêne sans impossibilité pour passer la 6e vitesse et qu’un véhicule avec boite automatique peut soulager la conduite sans être indispensable.

Mme [R] sollicite à cet égard le différentiel entre la valeur de son véhicule, non aménageable, et un véhicule de gamme équivalente aménagé en boite automatique, soit 22 475€ et renouvellement tous les 5 ans de la somme de 2500€, soit au total 24975€.

Les défendeurs considèrent que le besoin n’est pas caractérisé.

Mme [R] était propriétaire d’un véhicule Volvo depuis 2010 qui ne peut être aménagé. Elle produit une simulation d’achat d’un véhicule et la cote argus de son véhicule, mais elle ne justifie pas avoir fait l’acquisition d’un nouveau véhicule.
Dans ces conditions, le besoin ayant été plus ou moins reconnu, il y a lieu de fixer ce poste sur la base du surcoût d’acquisition moyen d’un véhicule avec boite automatique de 1500€, sans renouvellement, Mme [R] circulant avec le même véhicule depuis 14 ans et étant âgée de 78 ans.

II. PRÉJUDICES EXTRA-PATRIMONIAUX

- Déficit fonctionnel temporaire

Ce poste de préjudice indemnise l'invalidité subie par la victime dans sa sphère personnelle pendant la maladie traumatique. Le déficit fonctionnel temporaire inclut pour la période antérieure à la date de consolidation, l'incapacité fonctionnelle totale ou partielle ainsi que le temps d'hospitalisation et les pertes de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique. Par conséquent, il inclut les préjudices sexuel et d’agrément durant la période temporaire.

En l'espèce, il ressort du rapport d'expertise ce qui suit s'agissant du déficit fonctionnel temporaire : Total : 4/8/2020, 7/12/2020, 3 et 4/3/2022, soit 4 jours
33% du 31/7/2020 au 3/8/2020 et du 5/8/2020 au 16/9/2020, du 16/10/2020 au 6/12/2020, soit 98j
25% du 17/9/2020 au 15/10/2020, du 8/12/2020 au 7/1/2021 et du 5/3/2022 au 1/5/2022, soit 117j
15% du 8/1/2021 au 2/3/2022 et du 2/5/2022 au 18/10/2022, soit 587j

Sur la base d’une indemnisation de 30 € par jour pour un déficit total, au regard de la situation de la victime, il sera alloué la somme suivante :
30€ x 4j = 120€
30€ x 0,33 x 98 j = 970,20€
30€ x 0,25 x 117 j = 877,50€
30€ x 0,15 x 587 j = 2641,50 €
Total : 4 609,20 €.

- Souffrances endurées

Il s'agit de toutes les souffrances physiques et psychiques, ainsi que des troubles associés, que doit endurer la victime durant la maladie traumatique, c'est-à-dire du jour de l'accident à celui de sa consolidation. A compter de la consolidation, les souffrances endurées vont relever du déficit fonctionnel permanent et seront donc indemnisées à ce titre.

En l'espèce, elles sont caractérisées par le traumatisme initial, les traitements subis, et le retentissement psychique des faits s’agissant notamment les interventions chirurgicales les 4/8/2020, 7/12/2020 et 3/3/2022, la durée de l’immobilisation des pansements et antalgiques la rééducation l’importance des douleurs et gênes fonctionnelles. Elles ont été cotées à 4/7 par l’expert.

Dans ces conditions, il convient d'allouer la somme de 15 000 € à ce titre.
- Préjudice esthétique temporaire

Ce préjudice est lié à la nécessité de se présenter dans un état physique altéré au regard des tiers, et ce jusqu'à la date de consolidation.

En l'espèce, celui-ci a été coté à 3/7 du 31/7/2020 au 16/9/2020, puis 2,5/7 par l'expert en raison notamment de la cicatrice au poignet, la déformation et l’immobilisation.
Dans ces conditions, il convient d’allouer la somme de 1500€ de ce chef, sur laquelle les parties s’accordent.

- Déficit fonctionnel permanent

Ce préjudice a pour composante les atteintes aux fonctions physiologiques de la victime, les douleurs qui persistent depuis la consolidation, la perte de la qualité de la vie et les troubles définitifs apportés à ces conditions d'existence.

En l'espèce, l’expert a retenu un taux de déficit fonctionnel permanent de 12 % en raison des séquelles relevées suivantes : douleurs neuropathiques au niveau de la main lésée prédominant à la face dorsale de la main en regard des premier et deuxième rayons, des diminutions des amplitudes articulaires au niveau du poignet lésé, du retentissement psychique.

La méthodologie dont il est demandé l’application, basée sur une indemnisation journalière en fonction du taux de déficit retenu et de l’espérance de vie de la victime, comme pour le déficit fonctionnel temporaire, ne tient pas compte du fait que ce poste est un poste permanent qui est distinct des autres préjudices permanents comme le préjudice d’agrément et le préjudice sexuel, qui font l’objet d’un examen autonome, ce qui n’est pas le cas du poste de déficit fonctionnel temporaire qui englobe ces préjudices temporaires. 
Dès lors, il convient d’écarter la méthodologie appliquée par le demandeur et d’apprécier ce préjudice en fonction de l’âge de la victime au jour de la consolidation, des séquelles décrites et du taux de déficit retenu.

La victime étant âgée de 76 ans lors de la consolidation de son état, il lui sera alloué une indemnité de 15 480 € (valeur du point fixée à 1290 €), comme le proposent les défendeurs.

- Préjudice esthétique permanent

Ce préjudice est lié à la nécessité de se présenter dans un état physique altéré au regard des tiers, et ce de manière pérenne à compter la date de consolidation.

En l'espèce, il est coté à 2/7 par l'expert en raison notamment des cicatrices chirurgicales et de la déformation du poignet.

Dans ces conditions, il convient d'allouer une somme de 3000 € à ce titre.

- Préjudice d'agrément

Ce préjudice vise à réparer le préjudice spécifique lié à l’impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité spécifique, sportive ou de loisirs ainsi que les limitations ou difficultés à poursuivre ces activités. Ce préjudice particulier peut être réparé, en sus du déficit fonctionnel permanent, sous réserve de la production de pièces justifiant de la pratique antérieure de sports ou d’activités de loisirs particuliers.

En l'espèce, il convient de noter que l’expert a retenu ce qui suit : dysesthésies au toucher des 1et 2° rayons de la main droite chez une droitière avec raideur du poignet rendant douloureux les activités d’agrément nécessitant l’utilisation du pouce de l’index et du poignet droit.

L’attestation de la fille de Mme [R] ne figure pas au dossier, de sorte que le préjudice n’est pas justifié autrement que par le constat de l’expert.
Dans ces conditions, il convient d'allouer la somme de 2000 € offerte en défense.

- Préjudice sexuel

La victime peut être indemnisée si l’accident a atteint, séparément ou cumulativement mais de manière définitive, la morphologie des organes sexuels, la capacité de la victime à accomplir l’acte sexuel (perte de l'envie ou de la libido, perte de la capacité physique de réaliser l'acte sexuel, perte de la capacité à accéder au plaisir), et la fertilité de la victime.

En l'espèce, l'expert a retenu à ce sujet un préjudice positionnel et une diminution déclarée de la libido.

Dans ces conditions, il convient d'allouer la somme de 4000 € à ce titre.

SUR LE DOUBLEMENT DES INTÉRÊTS AU TAUX LÉGAL ET L'ANATOCISME

Aux termes de l'article L 211-9 du code des assurances, (après août 2003) une offre d'indemnité, comprenant tous les éléments indemnisables du préjudice, doit être faite à la victime qui a subi une atteinte à sa personne dans le délai maximal de 8 mois à compter de l'accident. Cette offre peut avoir un caractère provisionnel lorsque l'assureur n'a pas, dans les trois mois de l'accident, été informé de la consolidation de l'état de la victime. L'offre définitive doit alors être faite dans un délai de 5 mois suivant la date à laquelle l'assureur a été informé de cette consolidation. En tout état de cause, le délai le plus favorable à la victime s'applique.

Lorsque l'assureur n'est pas informé de la consolidation de l'état de la victime dans les trois mois suivant l'accident, il doit faire une offre d'indemnisation provisionnelle dans un délai de huit mois à compter de l'accident. L'offre définitive doit être faite dans un délai de 5 mois suivant la date à laquelle l'assureur a été informé de la consolidation.

A défaut d'offre dans les délais impartis par l'article L 211-9 du code des assurances, le montant de l'indemnité offerte par l'assureur ou allouée par le juge, produit, en vertu de l'article L 211-13 du même code, des intérêts de plein droit au double du taux de l'intérêt légal à compter de l'expiration du délai et jusqu'au jour de l'offre ou du jugement devenu définitif.

En l’espèce, l’accident a eu lieu le 31 juillet 2020 et l’assureur ne conteste pas n’avoir fait aucune offre provisionnelle dans les 8 mois de l’accident dont il était informé, ni d’offre dans les 5 mois du dépôt du rapport d’expertise fixant la date de consolidation.

Une offre complète ayant été effectuée par voie de conclusions le 10 novembre 2023, par application des articles ci-dessus et du délai le plus favorable, il y a lieu de dire que le montant de cette offre, avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées, produira intérêts au double du taux de l'intérêt légal du 31 mars 2021 au 10 novembre 2023.

Il convient également de dire que les intérêts échus des capitaux produiront intérêts dans les conditions fixées par l'article 1343-2 du code civil, à compter de la date de l’assignation.

SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES

Les sociétés LIME et ALLIANZ, qui sont condamnées, supporteront les dépens, comprenant les frais d’expertise et pouvant être recouvrés directement par Maître MULLER pour ceux dont il a fait l’avance sans avoir obtenu provision conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

En outre, elles devront supporter les frais irrépétibles engagés par Mme [R] dans la présente instance et que l'équité commande de réparer à raison de la somme de 2000 €.

En application de l’article 514 du code de procédure civile en vigueur au jour de l’assignation, l’exécution provisoire est de droit.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par jugement mis à disposition au greffe, réputé contradictoire et en premier ressort,

DIT que le droit à indemnisation de Madame [P] [R] des suites de l’accident de la circulation survenu le 31 juillet 2020 est entier ;

CONDAMNE la société LIME et ALLIANZ in solidum à payer à Madame [P] [R], à titre de réparation de son préjudice corporel, en deniers ou quittances, provisions non déduites, les sommes suivantes :
- dépenses de santé actuelles : 260,52 €
- frais divers : 8876,79 €
- assistance par tierce personne temporaire : 11 216,57 €
- dépenses de santé futures : 500 €
- assistance par tierce personne permanente : 16 689,83 €
- frais de véhicule adapté : 1500 €
- déficit fonctionnel temporaire : 4 609,20 €
- souffrances endurées : 15 000 €
- préjudice esthétique temporaire : 1500 €
- déficit fonctionnel permanent : 15 480 €
- préjudice esthétique permanent : 3000 €
- préjudice d’agrément : 2000 €
- préjudice sexuel : 4 000€

CONDAMNE la société LIME et ALLIANZ in solidum à payer à Madame [P] [R] les intérêts au double du taux de l'intérêt légal sur le montant de l'offre effectuée le 10 novembre 2023, avant imputation de la créance des tiers payeurs et avant déduction des provisions versées, à compter du 31 mars 2020 et jusqu'au 10 novembre 2023 .

DIT que les intérêts échus des capitaux produiront intérêts dans les conditions fixées par l'article 1343-2 du code civil à compter de l’assignation ;

DÉCLARE le présent jugement commun à la Caisse Primaire d'Assurance-Maladie du Var ;

CONDAMNE la société LIME et ALLIANZ in solidum aux dépens comprenant les frais d’expertise et pouvant être recouvrés directement par Maître MULLER pour ceux dont il a fait l’avance sans avoir obtenu provision conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile

CONDAMNE la société LIME et ALLIANZ in solidum à payer à Madame [P] [R] la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELLE que la présente décision bénéficie de l'exécution provisoire de droit ;

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Fait et jugé à Paris le 03 Juin 2024

La GreffièreLa Présidente
Célestine BLIEZSabine BOYER


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 19ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 23/10776
Date de la décision : 03/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 09/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-03;23.10776 ?
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