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03/06/2024 | FRANCE | N°22/05814

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jtj proxi requêtes, 03 juin 2024, 22/05814


° TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à : Me Joyce PITCHER


Copie conforme délivrée
le :
à : Me Romain ZSCHUNKE

Pôle civil de proximité


PCP JTJ proxi requêtes

N° RG 22/05814 - N° Portalis 352J-W-B7G-CX3XC

N° MINUTE :
6/2024






JUGEMENT
rendu le lundi 03 juin 2024


DEMANDEUR
Monsieur [S] [F], demeurant [Adresse 2], représenté par Me Joyce PITCHER, avocate au barreau de Paris - Toque : D0778


DÉFENDERESSE
Société TUNI

SAIR, dont le siège social est sis [Adresse 1], représentée par Me Romain ZSCHUNKE, avocat au barreau de Paris - Toque : C1267


COMPOSITION DU TRIBUNAL
Laurence RUNYO, Juge, sta...

° TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à : Me Joyce PITCHER

Copie conforme délivrée
le :
à : Me Romain ZSCHUNKE

Pôle civil de proximité

PCP JTJ proxi requêtes

N° RG 22/05814 - N° Portalis 352J-W-B7G-CX3XC

N° MINUTE :
6/2024

JUGEMENT
rendu le lundi 03 juin 2024

DEMANDEUR
Monsieur [S] [F], demeurant [Adresse 2], représenté par Me Joyce PITCHER, avocate au barreau de Paris - Toque : D0778

DÉFENDERESSE
Société TUNISAIR, dont le siège social est sis [Adresse 1], représentée par Me Romain ZSCHUNKE, avocat au barreau de Paris - Toque : C1267

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Laurence RUNYO, Juge, statuant en juge unique,
assistée de Marie-Anaïs BELLAY, Greffière

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 28 mars 2024

JUGEMENT
contradictoire, en premier ressort, prononcé par mise à disposition le 03 juin 2024 par Laurence RUNYO, Juge assistée de Marie-Anaïs BELLAY, Greffière

Décision du 03 juin 2024
PCP JTJ proxi requêtes - N° RG 22/05814 - N° Portalis 352J-W-B7G-CX3XC

EXPOSE DU LITIGE

Par requête enregistrée au greffe le 23 août 2022, monsieur [S] [F] a demandé devant le Tribunal la condamnation de la société TUNISAIR à lui payer :

- la somme de 250 euros au titre de l’indemnisation forfaitaire pour annulation de vol ;
- la somme de 400 euros au titre du manquement à l’article 14 du règlement 261/2004 du 11 février 2004 ;
- la somme de 400 euros à titre de dommages intérêts pour résistance abusive ;
- la somme de 36 euros engagée au titre de la tentative de médiation ;
- la somme de 1000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Au soutien de ses demandes, il expose que la somme forfaitaire de 250 euros est l'indemnité à laquelle il a droit en vertu des articles 5 et 7 du règlement communautaire N° 261/2004, le vol qu'il devait effectuer le 11 septembre 2019 entre l'aéroport de [4] en France et celui de [Localité 3] ayant été retardé ce qui l’a fait arriver à destination avec plus de trois heures de retard et aucune circonstance extraordinaire n'étant de nature à exonérer la société TUNISAIR du paiement de cette somme.

Une mise en ² demeure a été envoyée en vain à la société TUNISAIR le 1er juillet 2022 et une tentative de conciliation n’a pas abouti.

L'affaire a été appelée lors de l'audience du 28 mars 2024, date à laquelle elle a été plaidée.

Lors de cette audience, monsieur [S] [F] a entendu maintenir ses demandes.

Par ailleurs, et en ce qui concerne la demande d’incompétence territoriale présentée par la société TUNISAIR, il entend la contester alors que le Tribunal de Paris est territorialement compétent pour statuer sur ses demandes en application des dispositions des articles 42 et 43 du Code de procédure civile, la société TUNISAIR étant domiciliée à Paris et la jurisprudence citée par cette dernière ne s’appliquant pas au cas d’espèce.

En effet, à la date de l’introduction de l’instance, la société TUNISAIR disposait d’un établissement principal à [Localité 5] ce qui justifie la compétence parisienne au regard de l’article 4 du règlement Bruxelles I bis, la jurisprudence concernant les gares principales devant s’appliquer et la jurisprudence invoquée par la société TUNISAIR ne concernant que les compagnies aériennes dépendant d’un état membre à l’Union Européenne ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

En réplique, la société TUNISAIR a fait valoir :

- Qu’elle entend soulever in limine litis l’incompétence territoriale du Tribunal alors qu’elle n’est pas domiciliée sur le territoire français au sens de l’article 63 du règlement UE 1215/2012, les établissements français de cette société n’étant que des représentations commerciales de sorte qu’aucun d’entre eux ne constitue ni son autorité centrale, ni son principal établissement et, à titre subsidiaire a indiqué ne pas contester le droit à indemnisation du demandeur.

- Qu’en effet, elle n’est pas domiciliée en France et que rien ne permet d’établir qu’elle dispose d’un établissement principal en France au sens de l’article 63 du règlement européen 1215/2012. Elle estime donc qu’elle ne peut être attraite devant une juridiction française sur le fondement des dispositions de l’article 4 du règlement.

- Elle ajoute qu’en application de l’article 6 du règlement et dès lors qu’elle n’est pas domiciliée en France, seules les dispositions de l’article 6 qui renvoient aux règles de compétence de la loi française et en l’espèce aux dispositions de l’article R.322-2 du code de l’aviation civile doivent recevoir application et estime que l’action ne pouvait être portée devant les tribunaux français, faute pour la société de disposer en France de son domicile, de son siège principal ou d’un établissement par le soin duquel le contrat a été conclu, ni devant le tribunal de Paris qui n’est pas le lieu de départ ou de destination du vol.

- Qu’en conséquence, le Tribunal de Paris doit se déclarer incompétent au profit de la juridiction de proximité de VILLEURBANNE ou des juridictions tunisiennes et doit condamner le demandeur à lui payer la somme de 750 euros au titre de ses frais irrépétibles outre les entiers dépens.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il y a lieu de rappeler que le champ d’application du règlement (CE) n° 261/2004 sur les droits des passagers aériens prévoit en son article 3a) que tout transporteur y est soumis, dès lors que le passager qui en revendique le bénéfice dispose d’une réservation confirmée pour un vol au départ d’un aéroport situé dans un Etat membre de l’Union Européenne.

Par ailleurs, en ce qui concerne l’incompétence territoriale soulevée par la société TUNISAIR, le Tribunal relève que la Cour de cassation a considéré dans trois arrêts rendus le 22 février 2017, en faveur d'Air France (16-11.509 et 15-27.809) et d'Air Canada (16-12.408) que « les passagers français pourront soit saisir le tribunal du siège social de la compagnie, soit le tribunal du lieu de départ ou d’arrivée du vol ».

La Cour de cassation s'appuie sur les articles 2, 15 §3 et §6 du règlement n°44/2001 du 22 décembre 2000 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale pour déclarer incompétente la juridiction du domicile du voyageur ayant un contrat de transport sans hébergement.

Il en résulte que désormais, et conformément aux dispositions de l’article 7 1er du Règlement N° 1215/2012l du 12 décembre 2012, le passager aérien souhaitant invoquer un des droits issus du règlement CE n°261/2004 sur les droits des passagers aériens, pourra assigner la compagnie aérienne, à son choix :
- Soit devant le tribunal où la compagnie a son siège ou son principal établissement,
- Soit devant le tribunal dans le ressort duquel se trouve le lieu de départ de l’avion,
- Soit devant le tribunal dans le ressort duquel se trouve le lieu d’arrivée de l’avion.

En tout état de cause, le régime de réparation standardisée des retards en matière de vols aériens est un régime autonome de sorte que les dispositions du code des transports et du code de l’aviation civile n’ont pas vocation à s’appliquer sur une demande fondée sur le règlement 261/2004.

Il en résulte que seules les règles de compétence de droit commun doivent recevoir application.

L’article 46 du code de procédure civile prévoit en effet que le demandeur peut choisir à son choix, outre la juridiction du lieu où demeure le défendeur, en matière contractuelle, la juridiction du lieu de la livraison effective de la chose ou du lieu d’exécution de la prestation de service.

En l’espèce, il n’est pas contesté que le demandeur a acquis des billets d’avions auprès de la société TUNISAIR, et non pas un forfait touristique, le lieu de départ étant [4], le lieu d’arrivée étant [Localité 3], le siège social de la société TUNISAIR étant en TUNISIE.

En conséquence, le demandeur n’établissant pas que la société TUNISAIR dispose d’un établissement ayant pour activité l’exploitation du transport aérien situé à [Localité 5] et surtout dans la mesure où le lieu de départ et le lieu d’arrivée de l’avions doivent être considérés au même titre comme étant les lieux de fourniture principale des services conformément aux textes et décisions visés, la juridiction compétente est celle dans le ressort de laquelle se trouve le lieu de départ ou le lieu d’arrivée de l’avion.

Le demandeur se doit donc d’attraire la société TUNISAIR devant le Tribunal de proximité de VILLEURBANNE au profit duquel il convient de se déclarer incompétent.

En l’état, il n’y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.

Les dépens de la présente instance seront réservés.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,

Se déclare incompétent au profit du Tribunal de proximité de VILLEURBANNE ;

Rappelle les dispositions de l’article 83 du Code de procédure civile : « Lorsque le juge s'est prononcé sur la compétence sans statuer sur le fond du litige, sa décision peut faire l'objet d'un appel dans les conditions prévues par le présent paragraphe » ;

Dit que, passé les délais des voies de recours, l’entier dossier sera transmis par les soins du greffe de ce Tribunal à celui du Tribunal de proximité de VILLEURBANNE ;

Juge n’y avoir lieu, en l’état, à faire application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Réserve les dépens.

Fait et jugé à Paris le 3 juin 2024.

La GreffièreLa Présidente


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jtj proxi requêtes
Numéro d'arrêt : 22/05814
Date de la décision : 03/06/2024
Sens de l'arrêt : Se déclare incompétent

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-03;22.05814 ?
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