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03/06/2024 | FRANCE | N°21/05943

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 19eme contentieux médical, 03 juin 2024, 21/05943


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :


19ème contentieux médical

N° RG 21/05943

N° MINUTE :

Assignations des :
12, 13, 14 et 15 Avril 2021

CONDAMNE

SC





JUGEMENT
rendu le 03 Juin 2024
DEMANDEURS

Monsieur [C] [D]
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 15] / LUXEMBOURG

Madame [V] [D]
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 15] / LUXEMBOURG

Monsieur [L] [D]
[Adresse 2]
[Localité 10]

Madame [I] [D]
[Adresse 4

]
[Adresse 4]
[Localité 14] / LUXEMBOURG

ET

Monsieur [F], [P] [Z]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 14] / LUXEMBOURG

Représentés par Maître Ghislaine CHAUVET LECA de la SELARLU CHAUVET-LECA ...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :

19ème contentieux médical

N° RG 21/05943

N° MINUTE :

Assignations des :
12, 13, 14 et 15 Avril 2021

CONDAMNE

SC

JUGEMENT
rendu le 03 Juin 2024
DEMANDEURS

Monsieur [C] [D]
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 15] / LUXEMBOURG

Madame [V] [D]
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 15] / LUXEMBOURG

Monsieur [L] [D]
[Adresse 2]
[Localité 10]

Madame [I] [D]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 14] / LUXEMBOURG

ET

Monsieur [F], [P] [Z]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 14] / LUXEMBOURG

Représentés par Maître Ghislaine CHAUVET LECA de la SELARLU CHAUVET-LECA AVOCAT, membre de l'AARPI AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C1525

Décision du 03 Juin 2024
19ème contentieux médical
RG 21/05943

DÉFENDEURS

L’OFFICE NATIONAL D’INDEMNISATION DES ACCIDENTS MÉDICAUX (ONIAM)
[Adresse 19]
[Adresse 19]
[Localité 12]

Représenté par la SCP UGGC Avocats agissant par Maître Sylvie WELSCH, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0261

Monsieur [R] [K]
[Adresse 1]
[Localité 8]

ET

Monsieur [H] [N]
[Adresse 7]
[Localité 11]

Représentés par la SELARL Cabinet AUBER prise en la personne de Maître Laure SOULIER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #R0281

La CAISSE NATIONALE D’ASSURANCE VIEILLESSE DES TRAVAILLEURS SALARIES DE [Localité 17]
[Adresse 5]
[Localité 9]

Non représentée

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Géraldine CHARLES, Première Vice-Présidente adjointe
Madame Sabine BOYER, Vice-Présidente
Madame Sarah CASSIUS, Vice-Présidente

Assistées de Madame Erell GUILLOUËT, Greffière, lors des débats et au jour de la mise à disposition au greffe.

DEBATS

A l’audience du 25 Mars 2024 présidée par Madame Géraldine CHARLES tenue en audience publique, avis a été donné aux parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 03 Juin 2024.

JUGEMENT

- Réputé contradictoire
- En premier ressort
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [C] [D], né le [Date naissance 3] 1934, retraité de sa profession de chimiste mais toujours actif en qualité de chef d’entreprise, a consulté le Docteur [U] [M], chirurgien orthopédiste, le 20 septembre 2017 pour des douleurs à la hanche gauche.

Le docteur [M] a recommandé alors le changement de la prothèse totale de sa hanche gauche, prothèse qu’il avait lui-même posé il y a environ 20 ans.

Le 14 novembre 2017, Monsieur [C] [D] a réalisé un examen cardiologique qui a conclu à l’absence de contre-indication cardiologique à l’intervention orthopédique.

Le 20 novembre 2017, un angio-scanner des troncs supra-aortiques a conclu à une sténose asymptomatique.

Le docteur [R] [K], chirurgien vasculaire, a posé l’indication d’une angioplastie-carotide avec protection par un filtre, ce avant le changement de prothèse de hanche de Monsieur [C] [D].

Cette intervention a eu lieu le 30 novembre 2017. Elle a été interrompue du fait de l’état neurologique de Monsieur [C] [D].

Une IRM cérébrale a été réalisée le 30 novembre 2017 après l’intervention, à la suite de laquelle le professeur [L] [W], neurologue, a conclu à une « occlusion proximale de l'artère sylvien gauche avec un accident vasculaire cérébral ischémique sylvien gauche étendu avec une traduction sur la séquence de diffusion sans traduction sur la séquence flair témoignant du caractère récent ».

Le 11 décembre 2017, Monsieur [C] [D] a quitté l’hôpital [13] pour le centre de rééducation neurologique.

C’est dans ce contexte que suivant actes en date des 29 octobre, 30 octobre et 7 novembre 2018, Monsieur [C] [D] a assigné l'Hôpital [13] de Paris, le docteur [R] [K], le docteur [L] [W], le docteur [H] [N], l'ONIAM et à la Caisse Nationale d'Assurance Vieillesse des travailleurs salariés de [Localité 17] devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris aux fins de voir organiser une mesure d'expertise judiciaire.

Par ordonnance de référé en date du 19 avril 2019, une expertise médicale a été ordonnée et confiée au professeur [G] [Y].

L’expert judiciaire a déposé son rapport d’expertise le 30 janvier 2020.

Le professeur [G] [Y] conclut au titre de la responsabilité :
Une indication à un geste carotidien « très limite » par rapport aux recommandations ;Une information faite (documents) mais probablement mal comprise ;
Le choix d’un geste « d’angioplastie avec stent » qui représente un second choix, l’endartériectomie chirurgicale étant le choix préférentiel (surtout compte-tenu de l’aspect anatomique des lésions) ;Enfin et surtout, une sous-évaluation des conséquences neurologiques (en raison probablement de la sédation) avec consignes de surveillance simple, ayant retardé la confirmation diagnostique et la mise en œuvre du traitement thrombolytique.
L’expert judiciaire précise que les trois premiers points relèvent de la responsabilité du docteur [K], le point 4 de la responsabilité conjointe des docteurs [K] et [N].
Il ajoute dans sa réponse aux dires « compte-tenu des difficultés per-opératoires, compte-tenu des déficits neurologiques constatés en per-opératoire, compte-tenu des risques neurologiques bien connus des procédures de chirurgie carotidienne (ou d’angioplastie avec stent), la responsabilité dans le défaut d’appréciation de l’état post procédure et de vigilance dans la surveillance, doit être retenue, celle de l’opérateur le docteur [K] et celle du docteur [N], anesthésiste-réanimateur, responsabilité in solidum et à part égale de cette étape procédurale ».

De plus, le professeur [Y] estime que la prise en charge par le professeur [W] est conforme aux données acquises de la science (immédiate après sollicitation et adaptée à la situation).

En réponse aux dires, l’expert judiciaire précise que « il ne peut être préjugé des résultats qui auraient été obtenus avec une thrombolyse réalisée dans les délais recommandés (avant le 3ème heure après constitution de l’AVC) mais l’on peut estimer que le retard apporté à ce traitement constitue une perte de chance de récupération : le retard apporté à la mise en route de cette thérapeutique est à mettre sur le compte d’une sous-évaluation de la gravité des difficultés per opératoires, qui auraient dû faire interrompre plus tôt la procédure… laquelle n’a été abandonnée qu’au tout dernier temps, juste au moment où il ne restait plus qu’à expandre le stent. La gravité de cette situation imposait une surveillance post opératoire approfondie et un contrôle précoce de l’état clinique (pas de retranscription précise pour une surveillance nécessitant des avis rapprochés, au minimum d’heure en heure) et de la perméabilité vasculaire…) »

Lors de l’examen clinique réalisé le 6 novembre 2019, le professeur [A] a notamment relevé que:
Le patient ne se déplace qu’avec un déambulateur et très lentement ;Il écoute, a un regard très expressif mais ne peut répondre que par oui ou non : les séquelles de l’aphasie sont majeures ;Les données de son autonomie sont apportées par son épouse : il se lève seul, il effectue sa toilette seul, son épouse l’aide pour son habillage, et il n’a pu reprendre sa conduite automobile, il peut regarder la télévision mais ne peut pas lire. Il est gêné par sa hanche, il n’a pas pu être opéré.
L’expert conclut s’agissant des séquelles :
La date de consolidation des séquelles imputables à cet accident est fixée au 6 novembre 2019. Préjudices avant consolidation :Gêne temporaire totale pendant tous les séjours en hospitalisation complète :
Hôpital [13] et suivi à [18] : 30/11/2017 au 13/03/2018Journée du 27/07/2018 (première crise d’épilepsie)Hospitalisation en rééducation à la Clinique [20] ([Localité 16]) : 27/08/2018 au 02/09/2018 puis 26/08/2019 au 23/09/2019Gêne de classe 4 pour les autres périodes.

Souffrances endurées : 4/7
Préjudice esthétique temporaire (aphasie, déficit hémiplégique, fauteuil, déambulateur) : 4/7
Préjudices patrimoniaux :
Les aménagements du domicile nécessaires pour le retour de Monsieur [D] : chambre, salle de bain, poignée de soutien dans le domicile ;Tierce personne (non spécialisée) : 4 heures/ jourPerte de gain professionnel, non pour la part retraite mais pour la part de dirigeant d’entreprise (justificatifs à fournir)
3. Préjudices après consolidation :
Déficit fonctionnel permanent de 60 % : aphasie (avec l’alexie, apraxie), séquelles déficitaires de l’hémiplégie spastique, prédominant sur le membre supérieure droit, l’épilepsie (son traitement), les troubles vésico-sphinctériens, les troubles de l’équilibre ;
Préjudice esthétique permanent : 4/ 7,
Préjudice d’agrément : activité sportive (autrement importante), voyages rendus très difficiles (y inclus pour se rendre à sa résidence secondaire), conduite automobile impossible ;
Soins futurs : surveillance neurologie et adaptation du traitement ;
Tierce personne : 3 heures par jour (non spécialisée).

Par actes en date des 12, 13, 14 et 15 avril 2021, Monsieur [C] [D], Madame [V] [D], son épouse, Monsieur [L] [D], leur fils, Madame [I] [D], leur fille, Monsieur [F] [Z], leur petit-fils, ont assigné au fond le docteur [N], le docteur [K], l’ONIAM et la CNAVTS devant le Tribunal de céans sur le fondement de l’article L. 1142-1 du code de la santé publique aux fins de voir déclarer les professionnels de santé responsables des conséquences dommageables de l’accident médical subi par Monsieur [C] [D], le 30 novembre 2017, et, subsidiairement, obtenir une indemnisation de leur dommage au titre de la solidarité nationale.

Par dernières conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 21 août 2023, Monsieur [C] [D], Madame [V] [D], Monsieur [L] [D], Madame [I] [D], Monsieur [F] [Z] demandent au tribunal sur le fondement des articles L 1142-1 (I & II) et L 1111-2 du code de la santé publique de :
Rejeter les demandes formées par les Docteurs [K] et [N] ;
Déclarer les Dr [K] et [N] responsables in solidum des conséquences dommageables de l’accident médical dont Monsieur [C] [D] a été victime le 30 novembre 2017 ; Subsidiairement :
Dire que l’accident médical dont Monsieur [C] [D] a été victime le 30 novembre 2017 est éligible à une indemnisation de ses conséquences au titre de la solidarité nationale ;Déclarer les Dr [B] et [N] responsables in solidum responsables d’un manquement au devoir d’information ; Fixer à la somme de 191 240 euros le préjudice extra patrimonial de Monsieur [C] [D] et à la somme de 260.106,79 euros son préjudice patrimonial outre les arrérages de la rente entre 6 novembre 2019 et la date de la décision à intervenir, avec capitalisation de cette rente sur la base du barème publié par l’Université Savoie Mont Blanc ; Fixer à la somme de 15 000 euros le préjudice de Madame [V] [D], à la somme de 8000 euros le préjudice de Monsieur [L] [D], à la somme de 8000 euros le préjudice de Madame [I] [D] et à la somme de 5000 euros le préjudice de Monsieur [F], [P] [Z] ;Condamner in solidum les Dr [B] et [N] aux paiements desdites sommes avec intérêts au taux légal à compter de l’exploit introductif d’instance et capitalisation des intérêts par année entière ; Condamner in solidum les Dr [B] et [N] au paiement d’une indemnité de 8000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ; Condamner in solidum les Dr [B] et [N] aux entiers dépens, comprenant ceux de l’instance en référé, les frais d’expertise judiciaire, les dépens de la présente instance et, conformément aux dispositions de l’article R 631-4 du code de la consommation, le droit de recouvrement décrit à l’article L 118 du code des procédures civiles d’exécution et autoriser de Maître Ghislaine CHAUVET-LECA, avocat au barreau de Paris, à les recouvrer, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ; Subsidiairement :
Condamner l’ONIAM au paiement des mêmes indemnités, frais et dépens.
Monsieur [C] [D] expose souffrir d’une aphasie de Bronca caractérisée par une atteinte de l’expression et du langage ainsi que des troubles de la compréhension. Il se plaint par ailleurs d’une difficulté d’utilisation du membre supérieur et relève n’avoir pu bénéficier d’une reprise de prothèse totale de hanche comme prévu initialement.

A titre principal, les consorts [D] soutiennent que les docteurs [K] et [N] ont commis respectivement des fautes qui sont à l’origine du dommage de Monsieur [C] [D] et demandent à ce qu’ils soient condamnés in solidum à en réparer les préjudices.
Ils font valoir que la prise en charge préopératoire de Monsieur [C] [D] assurée par le docteur [K] est non conforme aux données acquises de la science, les données cliniques et radiologiques n’étant pas en faveur d’une indication de type chirurgie carotidienne.
En réponse aux écritures des docteurs [K] et [N], Monsieur [C] [D] soutient que le docteur [K] a arrêté l’indication opératoire de manière individuelle et qu’il ne verse pas le compte-rendu de la réunion de concertation pluridisciplinaire dont il fait état.
Enfin, ils relèvent que l’expert judiciaire estime que l’attitude adoptée par le docteur [K] (choix d’un geste carotidien préalable) ne semble pas la plus en conformité avec les recommandations européennes de 2017 et analyse que l’endartériectomie chirurgicale était le choix préférentiel.

Les consorts [D] contestent l’affirmation des docteurs [K] et [N] sur l’évolution identique de l’état de santé de Monsieur [D] avec ou sans thrombolyse relevant que l’expert analyse que la thrombolyse a été mise en œuvre trop tardivement.

Enfin, les consorts [D] soutiennent que le docteur [K] a manqué à son devoir d’information, observant que la complexité des informations délivrées à Monsieur [C] [D] ne lui ont pas permis de comprendre l’intervention proposée et les risques inhérents. Ils relèvent que l’expert fait état que les documents d’informations distribués n’apportent pas de données claires, simples et aisément compréhensibles.

Sur la demande de nouvelle expertise, les consorts [D] concluent au débouté estimant qu’elle n’est pas utile au regard du rapport circonstancié du professeur [Y]. Ils relèvent en outre que les docteurs [K] et [N] n’apportent aucun argument qui n’aurait pas été déjà débattu dans le cadre des opérations d’expertise et qui justifierait la nécessité d’une nouvelle expertise médicale.

Subsidiairement, si le tribunal considérait que les manquements retenus par l’expert ne sont pas de nature à engager la responsabilité des docteurs [K] et [N], l’accident médical litigieux serait alors la traduction d’un aléa thérapeutique dont les conséquences ouvrent droit à l’indemnisation au titre de la solidarité nationale.

Aux termes de leurs conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 5 septembre 2023, le docteur [R] [K] et le docteur [H] [N] demandent au tribunal sur le fondement de l’article L.1142-1 du Code de la santé publique de :
A titre principal,
- Recevoir les docteurs [N] et [K] en leurs écritures, les disant bien fondées ;
- Constater l’absence de responsabilité des docteurs [N] et [K] ;
- Débouter les consorts [D], ou toute autre partie, de l’ensemble de leurs demandes dirigées à l’encontre des docteurs [N] et [K] ;

- Condamner les consorts [D], ou tout autre succombant, à verser aux docteurs [N] et [K] la somme de 4.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;
- Condamner les consorts [D], ou tout autre succombant, aux entiers dépens.
A titre subsidiaire,
- Ordonner une mesure de contre-expertise confiée à un collège d’Experts spécialisés en anesthésie-réanimation, en chirurgie vasculaire et en neurologie.
A titre infiniment subsidiaire,
- Réduire les prétentions indemnitaires des consorts [D] à de plus justes proportions, dans les limites suivantes :
o Déficit fonctionnel temporaire : 12.989,25 euros
o Souffrances endurées : 8.000 euros
o Préjudice esthétique temporaire : 8.000 euros
o Déficit fonctionnel permanent : 89.1000 euros
o Préjudice esthétique permanent : 8.000 euros
o Frais divers : 738,28 euros
o Assistance par tierce personne temporaire : 22.035 euros
o Assistance par tierce personne permanente : 96.208,94 euros
o Frais de logement adapté : 18.122,88 euros
o Préjudice d’affection et d’accompagnement de Madame [V] [D] : 8.000 euros
o Préjudice d’affection et d’accompagnement de Madame [I] [D] et Monsieur [L] [D] : 3.000 euros
- Rejeter la demande de Monsieur [C] [D] au titre des dépenses de santé actuelles, du préjudice d’agrément, du préjudice sexuel, du préjudice d’impréparation et de l’incidence professionnelle.
- Rejeter la demande de Monsieur [F] [P] [Z] au titre du préjudice d’affection.

Les docteurs [K] et [N] concluent au débouté des demandes formées à leur encontre.

Le docteur [K] fait valoir qu’une confrontation pluridisciplinaire a bien été réalisée avec le docteur [O], cardiologue (cf courrier du docteur [O] du 14 novembre 2017 et courrier du docteur [K] du 20 novembre 2017) ; et qu’il était indiscutable que Monsieur [C] [D] présentait une sténose carotidienne, qu’une angioplastie était donc nécessaire et que sa situation n’avait rien de complexe et donc n’imposait pas l’organisation d’une réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP).

Les docteurs [K] et [N] soutiennent que l’indication opératoire est bien justifiée au regard du rétrécissement supérieur à 60 % chez Monsieur [C] [D] se fondant sur les nouvelles recommandations sur la chirurgie carotidienne qui ont été publiées en janvier 2018 par la société européenne de chirurgie vasculaire ; que la Haute Autorité de santé (HAS) estime qu'une chirurgie carotidienne peut être proposée pour les sténoses asymptomatiques supérieures ou égales à 60 % en fonction de différents paramètres.

Le docteur [K] affirme avoir respecté l’obligation d’information, relevant que celle-ci est avant tout orale et doit être réalisée au cours d’un échange avec le patient en consultation pour une meilleure compréhension. Il précise avoir reçu Monsieur [C] [D] en consultation préopératoire à deux reprises le 15 novembre 2018 et le 20 novembre 2018 pour lui expliquer les alternatives thérapeutiques, l’intervention choisie, ses bénéfices et ses risques. Il expose que Monsieur [C] [D] a signé un consentement écrit après cette discussion orale et qu’un document d’informations écrit, détaillé et précis, a été remis à titre de complément d’information. Il estime qu’il appartenait à Monsieur [C] [D] de poser toutes les questions qu’il estimait nécessaires.

Le docteur [K] soutient qu’il ne peut être affirmé que le choix d’une angioplastie était contre-indiqué. Il fait valoir qu’actuellement la majorité des pays (dont les Etats-Unis, l’Angleterre et l’Allemagne) propose l’angioplastie en première intention, qui est la technique de référence, la plus pratiquée. Le docteur [K] souligne que l’angioplastie ne fait pas partie de l’expertise du professeur [A] et que de ce fait, il a eu un comportement partial et non objectif vis-à-vis de lui. Il ajoute que l’expert se fonde sur des recommandations de la HAS en date de 2007 largement dépassées, alors que lui-même a produit une bibliographie plus récente datant de 2017.

Les docteurs [N] et [K] contestent une sous-évaluation des conséquences neurologiques de la complication présentée par Monsieur [C] [D] dans la mesure où la suspicion d’AVC a été signalée immédiatement aboutissant à un arrêt de la procédure, à un transfert en soins continus ainsi qu’à une demande d’avis neurologique au professeur [W] lequel demandera lui-même une IRM cérébrale à 16h20 et non le scanner demandé par le docteur [N] dès 15h.
Ils précisent que le patient n’était pas sous sédation profonde, et ainsi, la sédation n’a pas empêché le diagnostic de l’aphasie ni masqué les signes neurologiques déficitaires présentés par Monsieur [C] [D].

Les docteurs [K] et [N] questionnent la légitimité du traitement thrombolytique décidé par le professeur [W] dans la mesure où la thrombolyse ne parait pas être le traitement opportun d’un embole arthérosclérotique sur clampage ou difficulté de franchissement de la crosse aortique et/ou de l’ostium aorto-carotidien. Ils concluent que le professeur [W] ne peut être considéré comme un expert neurologue et que sa prise en charge mérite d’être discutée par un expert neurologue.

Ils soutiennent que l’évolution aurait été la même avec ou sans thrombolyse et qu’ainsi, il ne saurait leur être reproché un retard à la mise en œuvre de ce traitement.

Le docteur [K] ajoute sur le premier point que la RCP n’est obligatoire qu’en cancérologie et que dans les autres spécialités, il peut y être recouru pour les prises en charge complexes, sans que cela ne soit obligatoire, ainsi que cela ressort des recommandations de la Haute Autorité de Santé.
A titre subsidiaire, ils sollicitent que soit ordonnée une mesure de contre-expertise confiée à un collège d’experts spécialisés en anesthésie réanimation, chirurgie vasculaire et neurologie.

Ils font valoir que l’expert ne pratique pas le type d’intervention réalisée par le docteur [K] en l’espèce, ce qui rend ses conclusions sujettes à contestation et qu’il est resté réfractaire à toute discussion ainsi qu’aux arguments de défense de la prise en charge effectuée par les docteurs [K] et [N] développés au cours des opérations d’expertise. De plus, ils ajoutent que seul un expert chirurgien vasculaire s’est prononcé dans cette affaire alors même qu’il s’agit d’une complication neurologique et que la prise en charge anesthésique est critiquée. Ils soulignent que sur l’aspect neurologique, l’expert s’est appuyé sur les déclarations du professeur [W], neurologue lui-même impliqué dans ce dossier. Ils observent que l’expert n’est pas spécialisé en anesthésie-réanimation, et qu’il a témoigné pendant la réunion d’expertise ne pas faire de différence entre les sédations. Enfin, ils font valoir que l’expert ne chiffre pas et ne justifie pas médico-légalement la perte de chance de récupération.

A titre infiniment subsidiaire, les docteurs [K] et [N] concluent que le tribunal réduira les prétentions indemnitaires des consorts [D] à de plus justes proportions soutenant que seule une perte de chance pourrait être imputable aux praticiens.

Aux termes de ses dernières écritures récapitulatives notifiées par voie électronique le 23 septembre 2022, l’Office National d’Indemnisation des Accidents Médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) demande au tribunal sur le fondement des articles L. 1142-1, L.1110-5 et R.4127-32 et 40 du code de la santé publique de :
Dire et juger que la responsabilité des docteurs [K] et [N] est engagée,Dire et juger que les conditions ouvrant droit à une indemnisation au titre de la solidarité nationale ne sont pas réunies,Débouter les consorts [D] de leurs demandes émises à titre subsidiaire à l’encontre de l’ONIAM dont la mise hors de cause sera ordonnée,Condamner tout succombant aux entiers dépens.En tout état de cause,
Constater que la mesure d’expertise sollicitée à titre subsidiaire par les docteurs [K] et [N] ne présente pas un caractère utile à la solution du litigeDébouter les docteurs [K] et [N] de leur demande de contre-expertise.
L’ONIAM conclut à titre principal à la responsabilité pour faute du docteur [K] et du docteur [N] de sorte qu’il en découle que toute indemnisation au titre de la solidarité nationale est exclue.

L’ONIAM soutient que le dommage découlant de la succession de fautes et cet accident ne pouvant être qualifié d’accident médical non fautif, il sera mis hors de cause.

De plus, l’ONIAM conclut au débouté de la contre-expertise sollicitée par le docteur [K] et le docteur [N], estimant qu’elle ne présente pas un caractère utile à la solution du litige dès lors que le tribunal dispose d’ores et déjà d’éléments suffisants pour pouvoir statuer et qu’ils ne font valoir aucun nouvel argument auquel le professeur [Y] n’aurait déjà répondu.

Suivant courrier de la CPAM de [Localité 17] en date du 18 avril 2023, Monsieur [C] [D] n’a bénéficié d’aucun remboursement entre fin novembre 2017 et novembre 2019.

Suivant courrier de la CNS d’Gesondheetskeess en date du 21 avril 2023, Monsieur [C] [D] n’a pas eu de frais d’hospitalisation ni de frais médicaux (médecins…) remboursés par leur service entre le 1er janvier 2017 et le 31 décembre 2019. Le courrier précise qu’il y a eu uniquement des frais d’orthophonie, laboratoire et pharmaceutiques remboursés directement par voie du tiers-payant au fournisseur afférent.

La Caisse Nationale d’Assurance Vieillesse des Travailleurs Salariés de [Localité 17], quoique régulièrement assignée par acte remis à personne morale, n’a pas constitué avocat ; susceptible d'appel, la présente décision sera donc réputée contradictoire et lui sera déclarée commune.

La clôture de la présente procédure a été prononcée le 6 novembre 2023.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties quant à l’exposé détaillé de leurs prétentions et moyens.

L'affaire a été mise en délibéré au 3 juin 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

SUR L'ACTION EN RESPONSABILITÉ INTENTEE

A. Sur la responsabilité du médecin (fautes techniques et éthiques)

1/ Sur la qualité des soins

Il résulte des dispositions des articles L.1142-1-I et R.4127-32 du code de la santé publique que, hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute.

Tout manquement à cette obligation qui n'est que de moyens, n'engage la responsabilité du praticien que s'il en résulte pour le patient un préjudice en relation de causalité directe et certaine.

En l’espèce, il ressort des documents médicaux produits par les parties dans le cadre de l’expertise que Monsieur [C] [D], alors âgé de 83 ans, présentait comme antécédent connu une pathologie poly-artérielle avec, notamment, une atteinte coronarienne qui avait été traitée par triple pontage aorto-coronarien en 2011.
L’échodoppler réalisé par le docteur [T] le 14 novembre 2017 conclut à une « légère évolution de la sténose carotide interne gauche depuis l’examen précédent ».

Il est constant que Monsieur [C] [D] était totalement asymptomatique.

Le docteur [K] pose l’indication d’un geste carotidien gauche relevant dans son courrier adressé au docteur [O] le 27 novembre 2017 que le « doppler sous-estime le degré de la sténose ».

Ainsi, l’intervention chirurgicale est posée à partir d’une analyse complémentaire du docteur [K] de l’échodoppler réalisé le 14 novembre 2017 adressée au docteur [O], cardiologue, sans autre échange avec ce confrère, alors même que les examens préalables réalisés (échographie du 30 janvier 2017 par le docteur [E], échographie cardiaque du 14 novembre 2017 par le docteur [O], bilan biologique février 2017, échodoppler par le docteur [T] du 14 novembre 2017 et angioscanner des troncs supra-aortiques et scanner cérébral avec injection réalisés le 20 novembre 2017 par le docteur [X]) étaient manifestement source de discussion et d’interprétation en raison de ce qui est évalué comme une discrète évolution de la sténose (45% NASCT à 50% NASCT).

L’angioplastie avec stent est choisie par le docteur [K]. Le tribunal relève qu’il n’est pas contesté par les parties qu’elle soit un second choix.
Ce choix est à confronter aux recommandations européennes « 2017 Clinical Practice Guidelines of the European Society for Vascular Surgery » citées par l’expert judiciaire, notamment :
Recommandation 90 : les patients devant subir une chirurgie majeure non cardiaque et non vasculaire doivent bénéficier d’une évaluation claire du risque péri-opératoire d’accident vasculaire cérébral : choix en matière de bénéfices-risques ;Recommandation 92 : une endartériectomie prophylactique carotidienne avec stenting n’est pas recommandée chez les patients asymptomatiques avant une chirurgie non cardiaque et non vasculaire.
Ainsi, l’indication même du geste opératoire aurait dû faire l’objet d’une analyse pluridisciplinaire bénéfices-risques au-delà même de l’échange de courrier dont se prévaut le docteur [K] avec le docteur [O], de même que la technique retenue, puisqu’en premier choix, c’est une chirurgie conventionnelle qui peut être envisagée.

Ainsi, le tribunal considère que le docteur [K] n’a pas donné à son patient des soins consciencieux, attentifs et conformes aux données acquises de la science dans l’indication d’une intervention chirurgicale puis dans le choix de la technique d’intervention.

S’agissant du processus de réalisation de l’accident vasculaire cérébral de Monsieur [C] [D], il ressort de l’expertise que l’accident d’embolisation est apparu dès la montée du cathéter dans la crosse de l’aorte.
En effet, il est noté dans le compte-rendu opératoire « survenue d’un déficit neurologique facial droit et du membre supérieur droit » et ce, lors de la montée des cathéters.
L’expertise retrace ainsi l’enchaînement des évènements :
il est alors procédé vers 10h à une artériographie qui n’identifie pas de thrombus visible ;la procédure a été poursuivie avec l’artériographie, le franchissement de la sténose avec guide pour protection de la carotide interne distale, le positionnement du filtre, le positionnement du stent ;Alors survient l’agitation du patient qui a expulsé le désilet de la carotique ;Ce dernier événement fait décider de l’interruption de la procédure, le compte-rendu opératoire mentionnant alors « du fait de l’état neurologique ». Il est précisé qu’une dose complémentaire d’analgésiques a été administrée ;Monsieur [C] [D] est admis en service de soins continus vers 12h avec noté sur les feuilles d’anesthésie de surveillance (mention « suspicion d’AVC » a lieu à 11h).Le compte-rendu d’IRM réalisé à 18h20 précise « ischémie sylvienne gauche, aspect d’occlusion de l’artère cérébrale moyenne gauche » qui conduit à l’indication de Thrombolyse IV par le professeur [W], soin analysé par l’expert comme conforme aux données acquises de la science.

L’intervention chirurgicale sur la personne de Monsieur [C] [D] est donc bien directement à l’origine de son accident vasculaire cérébral. Cet accident vasculaire cérébral a été suspecté dès 11h mais n’a donné lieu à un examen dédié par IRM qu’à 18h pour être ensuite traité par le neurologue une fois le diagnostic posé.

Ainsi, le tribunal considère que le docteur [K] et le docteur [N] n’ont pas donné à leur patient des soins consciencieux, attentifs et conformes aux données acquises de la science lors de l’intervention chirurgicale et le suivi de la suspicion d’un accident vasculaire cérébral au cours de celle-ci.

2/ Sur l'obligation d'information

Tout professionnel de santé est tenu en application des articles L.1111-2 et R.4127-35 du code de la santé publique d'un devoir de conseil et d'information ; l'information du patient doit porter de manière claire, loyale et adaptée, sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus, le texte prévoyant qu'en cas de litige c'est au professionnel d'apporter, par tous moyens en l'absence d'écrit, la preuve que l'information a été délivrée à l'intéressé.

Le droit à l'information est un droit personnel, détaché des atteintes corporelles, et accessoire au droit à l'intégrité corporelle.

Le non-respect du devoir d'information cause nécessairement à celui auquel l'information était légalement due un préjudice moral.
En l’espèce, face aux questionnements sur l’indication opératoire et la technique opératoire, l’analyse faite des documents d’information remis à Monsieur [C] [D], même s’il a été reçu par le docteur [K], a échangé oralement avec lui, et a signé le consentement à l’angioplastie avec stent, ne permettent pas de s’assurer d’une information claire et compréhensible sur les bénéfices-risques de cette intervention au regard du risque d’accident vasculaire cérébral.

De plus, le document d’informations remis à Monsieur [C] [D] par le docteur [K] est analysé par l’expert comme relevant presque d’un cours spécialisé sur la chirurgie carotidienne et l’angioplastie avec stent avec des données, en partie redondantes, qui les rendent difficilement compréhensibles à un patient.
Ce document n’était donc pas précis, clair et compréhensible et ne justifie pas que le docteur [K] a rempli son devoir d’information.

Par conséquent, Monsieur [C] [D] n’a pas été en mesure d’apprécier l’acte chirurgical décidé ainsi que le geste technique retenu.

Ce défaut d’information, dont le docteur [K] est responsable, lui cause un préjudice moral caractérisé par le défaut de préparation aux risques encourus qui sera réparé par la somme de 5000 euros.

3/ Partage de responsabilité et contribution à la dette

Chacun des co-auteurs d'un même dommage, conséquence de leurs fautes respectives, doit être condamné in solidum à la réparation de l'entier dommage.

Il ressort des développements qui précèdent que la responsabilité des deux médecins, les docteurs [K] et [N], est engagée à l’égard de Monsieur [C] [D].

Étant co-auteurs d'un même dommage, conséquence de leurs fautes respectives, ils sont tenus in solidum à la réparation de l'entier dommage.

En revanche, il y a lieu de tenir compte du fait que c’est le docteur [R] [K] qui a posé l’indication opératoire, ainsi que le choix de la technique chirurgicale à l’occasion duquel Monsieur [C] [D] a été confronté au risque d’un accident vasculaire cérébral qui s’est réalisé et a été traité avec retard par les deux praticiens.

Par conséquent, le tribunal retient la responsabilité du docteur [R] [K] à concurrence de 60 %, et celle du docteur [H] [N] à concurrence de 40 % des conséquences dommageables de l’intervention subie le 30 novembre 2017 par Monsieur [C] [D].

SUR LES DEMANDES SUBSIDIAIRES A L’EGARD DE L’ONIAM

Compte-tenu des fautes retenues à l’encontre du docteur [K] et du docteur [N], il n’y a pas lieu à statuer sur la demande subsidiaire des consorts [D] quant à l’éligibilité de Monsieur [C] [D] à l’indemnisation des conséquences de l’accident médical par l’ONIAM au titre de la solidarité nationale. CS
L’ONIAM demande de débouter les consorts [D] de leur demande subsidiaire, mais à mon sens dès lors que nous statuons et faisons droit à la demande principale, nous n’avons pas à statuer sur la demande subsidiaire, et ainsi, nous ne pouvons débouter les consorts [D] de leur demande subsidiaire.
Cela vous convient-il ?

SUR LA DEMANDE SUBSIDIAIRE D'EXPERTISE

Les docteurs [K] et [N] partagent dans leurs écritures leur ressenti, lors de cette expertise, de la fermeture de l’expert à la discussion et aux nouvelles techniques sans que cela soit établi, et ce d’autant qu’ils ont pu non seulement faire valoir leurs observations au cours de l’expertise mais également transmettre leurs dires ainsi que de la littérature médicale à l’appui de leur argumentation.

Le professeur [Y] a répondu aux dires et s’est prononcé aux termes d’un raisonnement méthodique et rigoureux. Son rapport a pu être discuté ensuite contradictoirement par les parties au litige.

Le professeur [Y] en tant que chirurgien vasculaire était en mesure d’analyser le choix d’opérer ainsi que le geste technique choisi au regard des données acquises de la science. En outre, le geste de l’angioplastie avec stent n’est pas critiqué dans sa réalisation mais bien dans le choix d’y avoir recours. De plus, c’est bien au cours de cette chirurgie qu’a eu lieu l’accident vasculaire cérébral et qu’ont été relevé les symptômes de celui-ci. Ainsi, Le professeur [Y] était en mesure d’apprécier l’analyse et la prise en charge à ce moment-là par les praticiens, tant par le chirurgien vasculaire que par l’anesthésiste.

Le compte-rendu opératoire lui-même évoque une modification de la sédation sans que les observations du professeur [Y] soient invalidées par les arguments avancés par le docteur [N].

Enfin, au vu des examens réalisés sur l’accident vasculaire cérébral de Monsieur [C] [D], le doute mis sur l’analyse neurologique ainsi que sur la perte de chance de récupération et l’indication thérapeutique de la thrombolyse ne sont pas étayés pour justifier une nouvelle mesure d’expertise.

Par conséquent, il n’y a pas lieu à ordonner une nouvelle mesure d’expertise. Les docteurs [K] et [N] seront déboutés de leur demande.

SUR L’ÉVALUATION DU PRÉJUDICE CORPOREL

Au vu de l'ensemble des éléments produits aux débats, le préjudice subi par Monsieur [C] [D], né le [Date naissance 3] 1934 et âgé par conséquent de 83 ans lors de l'accident, de 85 ans à la date de consolidation de son état de santé, et 90 ans au jour du présent jugement, et étant retraité de sa profession de chimiste mais toujours dirigeant d’entreprises lors des faits, sera réparé ainsi que suit, étant observé qu'en application de l'article 25 de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006, d'application immédiate, le recours subrogatoire des tiers payeurs s'exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'ils ont pris en charge.

Il convient en l'espèce d'utiliser le barème de capitalisation publié dans la Gazette du Palais du 31 octobre 2022, le mieux adapté aux données sociologiques et économiques actuelles, à savoir celui fondé sur les tables d'espérance de vie définitive de 2017-2019 publiées par l'INSEE et sur un taux d'intérêt de 0 %.

I. PREJUDICES PATRIMONIAUX

- Dépenses de santé avant consolidation

Monsieur [C] [D] sollicite l’allocation de la somme de 197.844, 97 euros au titre des dépenses de santé restées à sa charge.

Suivant courrier de la CPAM de [Localité 17] en date du 18 avril 2023, qui a été assigné dans la présente instance, Monsieur [C] [D] n’a bénéficié d’aucun remboursement entre fin novembre 2017 et novembre 2019.

Suivant courrier de la CNS d’Gesondheetskeess en date du 21 avril 2023, qui n’a pas été assignée dans la présente instance, Monsieur [C] [D] n’a pas eu de frais d’hospitalisation ni de frais médicaux (médecins…) remboursés par leur service entre le 1er janvier 2017 et le 31 décembre 2019. Le courrier précise qu’il y a eu uniquement des frais d’orthophonie, laboratoire et pharmaceutiques remboursés directement par voie du tiers-payant au fournisseur afférent.

Monsieur [C] [D] produit en pièce 5 un tableau récapitulatif des frais engagés et joint des factures. Il s’agit de soins orthophoniques, d’orthopédie, de rééducation, de matériel médical, mais aussi d’honoraires de médecins et de factures d’hôpital.
Il n’y a pas d’explication à l’absence de toute prise en charge des frais médicaux, notamment hospitaliers par l’assurance sociale auquel il dit être rattaché.

Monsieur [D] produit une carte d’assuré social du Grand-Duché du Luxembourg mais qui ne permet pas d’établir auprès de qui il était assuré social en 2017.

Ainsi, à défaut de justifier de son organisme social de rattachement et en conséquence de justifier de la réalité des frais restés à sa charge, il convient de réserver les demandes de Monsieur [C] [D] relativement aux dépenses de santé actuelles.

- Frais divers

L'assistance de la victime lors des opérations d'expertise par un, ou des, médecin conseil en fonction de la complexité du dossier, en ce qu'elle permet l'égalité des armes entre les parties à un moment crucial du processus d'indemnisation, doit être prise en charge dans sa totalité. De même, ces données peuvent justifier d'indemniser les réunions et entretiens préparatoires. Les frais d'expertise font partie des dépens.

Monsieur [C] [D] sollicite la somme de 738,28 euros, somme pour laquelle les docteurs [K] et [N] ne formulent pas d’observation. Cette somme sera donc retenue au titre des frais divers.

- Assistance tierce personne provisoire

Il convient d'indemniser les dépenses destinées à compenser les activités non professionnelles particulières qui ne peuvent être assumées par la victime directe durant sa maladie traumatique, comme l'assistance temporaire d'une tierce personne pour les besoins de la vie courante, étant rappelé que l’indemnisation s'entend en fonction des besoins et non en fonction de la dépense justifiée. Le montant de l'indemnité allouée au titre de l'assistance d'une tierce personne ne saurait être subordonné à la production de justificatifs des dépenses effectives.

En l'espèce, il ressort du rapport d'expertise ce qui suit s'agissant de l'assistance tierce-personne provisoire : « Tierce personne (non spécialisée) : 4 heures/ jour ».

Monsieur [C] [D] sollicite une indemnisation à hauteur de 3 heures par jour.

Il convient de retenir un taux horaire de 18 euros, adapté à la situation de la victime à ce stade s’agissant d’une aide non spécialisée, 3 heures par jour tel quel le demande Monsieur [C] [D] ainsi qu’un décompte sur 365 jours avant consolidation soit du 30 novembre 2017 au 6 novembre 2019, soit :
567 jours x 18 euros x 3h = 30 618 euros.

Il sera ainsi alloué à Monsieur [C] [D] la somme de 30 618 euros au titre de l’assistance tierce personne temporaire.

- Assistance par tierce personne pérenne

Il convient d'indemniser les dépenses destinées à compenser les activités non professionnelles particulières qui ne peuvent être assumées par la victime directe après la consolidation de son état de santé, comme l'assistance temporaire d'une tierce personne pour les besoins de la vie courante, étant rappelé que l’indemnisation s'entend en fonction des besoins et non en fonction de la dépense justifiée. Le montant de l'indemnité allouée au titre de l'assistance d'une tierce personne ne saurait être subordonné à la production de justificatifs des dépenses effectives.

En l'espèce, il ressort du rapport d'expertise ce qui suit s'agissant de l'assistance tierce-personne pérenne : « Tierce personne : 3 heures par jour (non spécialisée) ».

Sur la base d’un taux horaire de 20 euros, adapté à la situation de la victime à ce stade s’agissant d’une aide non spécialisée, en retenant 412 jours par an, il convient d'allouer à Monsieur [D] la somme suivante :
Capitaux échus du 6 novembre 2019 jusqu’à décembre 2021 :(786 jours/365 jours) x 412 jours x 20 euros x 3 heures = 53 232, 66 euros

Capitaux à échoir à compter de janvier 2022 :412 jours x 20 euros x 3 heures x 4,876 (barème GP 2020 à 0% pour un homme âgé 87 ans au 1er janvier 2022) = 120 534, 72 euros.

Il sera ainsi alloué à Monsieur [C] [D] la somme totale de 173 767, 38 euros au titre de l’assistance tierce personne pérenne.

- Incidence professionnelle

Ce poste d'indemnisation a pour objet d'indemniser les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle comme le préjudice subi par la victime en raison de sa dévalorisation sur le marché du travail, de sa perte d'une chance professionnelle, ou de l'augmentation de la pénibilité de l'emploi qu'elle occupe imputable au dommage ou encore du préjudice subi qui a trait à sa nécessité de devoir abandonner la profession qu'elle exerçait avant le dommage au profit d'une autre qu'elle a du choisir en raison de la survenance de son handicap. Ce poste indemnise également la perte de retraite que la victime va devoir supporter en raison de son handicap, c'est-à-dire le déficit de revenus futurs, estimé imputable à l'accident, qui va avoir une incidence sur le montant de la pension auquel pourra prétendre la victime au moment de sa prise de retraite.

Monsieur [D], qui est retraité de l’activité professionnelle qu’il a exercé durant sa vie active, ne produit aucun justificatif de son activité de dirigeant social.

A défaut de tout justificatif, sa demande au titre de l’incidence professionnelle sera rejetée.

- Frais de logement adapté

Le principe de réparation intégrale du préjudice lié aux séquelles d’un accident commande que les dépenses nécessaires pour permettre à la victime de bénéficier d’un habitat adapté à son handicap soient prises en charge. Les frais de logement aménagé incluent non seulement l'aménagement du domicile, mais aussi, le cas échéant, le coût découlant de l'acquisition d'un domicile mieux adapté au handicap. Il convient, toutefois, de déterminer la part du coût d’acquisition du logement et les aménagements en relation de causalité avec l’accident.

Les docteurs [K] et [N] ne formulent pas d’observation sur la somme demandée par Monsieur [D] à savoir 18 122,88 euros.

L’expert a retenu la nécessité d’un aménagement de son domicile et en particulier, de la chambre, la salle de bain, la poignée de soutien dans le domicile.

Ainsi, il sera alloué à Monsieur [D] la somme de 18 122, 88 euros au titre des frais de logement adapté.

II. PRÉJUDICES EXTRA-PATRIMONIAUX

- Déficit fonctionnel temporaire

Ce poste de préjudice indemnise l'invalidité subie par la victime dans sa sphère personnelle pendant la maladie traumatique. Le déficit fonctionnel temporaire inclut pour la période antérieure à la date de consolidation, l'incapacité fonctionnelle totale ou partielle ainsi que le temps d'hospitalisation et les pertes de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique.

En l'espèce, il ressort du rapport d'expertise ce qui suit s'agissant du déficit fonctionnel temporaire :
- Le déficit fonctionnel temporaire a été total du 30 novembre 2017 au 13 mars 2018, le 27 juillet 2018, du 27 août au 2 septembre 2018 et du 26 août au 23 septembre 2019.
- Pendant les autres périodes la gêne temporaire a été partielle à 75 %.

Sur la base d’une indemnisation de 30 euros par jour pour un déficit total, adapté à la situation décrite, il sera alloué la somme suivante :
30 novembre 2017 au 13 mars 2018 : 104 jours x 30 euros = 3120 euros ;14 mars 2018 au 26 juillet 2018 : 135 jours x 75% x 30 euros = 3037,50 euros ;27 juillet 2018 : 1 jour x 30 euros = 30 euros ;28 juillet 2018 au 26 août 2018 : 30 jours x 75% x 30 euros = 675 euros ;27 août 2018 au 2 septembre 2018 : 7 jours x 30 euros =210 euros ;3 septembre 2018 au 25 août 2019 : 357 jours x 75% x 30 euros = 8032,50 euros ;26 août 2019 au 23 septembre 2019 : 29 jours x 30 euros = 870 euros ;24 septembre 2019 au 6 novembre 2019 : 44 jours x 75 % x 30 euros =990 euros ;Soit la somme totale de 16 965 euros.

Ainsi, il sera alloué à Monsieur [C] [D] la somme de 16 965 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire.

- Souffrances endurées

Il s'agit de toutes les souffrances physiques et psychiques, ainsi que des troubles associés, que doit endurer la victime durant la maladie traumatique, c'est-à-dire du jour de l'accident à celui de sa consolidation. A compter de la consolidation, les souffrances endurées vont relever du déficit fonctionnel permanent et seront donc indemnisées à ce titre.

En l'espèce, elles sont caractérisées par le traumatisme initial, les traitements subis, notamment avec plusieurs hospitalisations, et le retentissement psychique des faits mais également des contraintes fonctionnelles qu’il subit depuis, notamment l’aphasie. Elles ont été cotées à 4/7 par l’expert.

Dans ces conditions, il convient d'allouer la somme de 15 000 euros à ce titre.

- Préjudice esthétique temporaire

Ce préjudice est lié à la nécessité de se présenter dans un état physique altéré au regard des tiers, et ce jusqu'à la date de consolidation.

En l'espèce, celui-ci a été coté à 4/7 par l'expert, qui a relevé l’aphasie, le déficit hémiplégique, le fauteuil et le déambulateur. Ce préjudice a duré de l’accident, le 30 novembre 2017, à la consolidation, le 6 novembre 2019.

Compte-tenu de la durée de ce préjudice, de ses composantes multiples, il sera alloué à Monsieur [C] [D] la somme de 2000 euros en réparation de son préjudice esthétique temporaire.

- Déficit fonctionnel permanent

Ce préjudice a pour composante les atteintes aux fonctions physiologiques de la victime, les douleurs qui persistent depuis la consolidation, la perte de la qualité de la vie et les troubles définitifs apportés à ses conditions d'existence.

En l'espèce, l’expert a retenu un taux de déficit fonctionnel permanent de 60% compte-tenu des séquelles présentées par Monsieur [C] [D] soit une aphasie (avec alexie, apraxie), des séquelles déficitaires de l’hémiplégie spastique, prédominant sur le membre supérieur droit, une épilepsie, des troubles vésico-sphinctériens, et des troubles de l’équilibre.

La victime souffrant d’un déficit fonctionnel permanent évalué à 60 % par l’expert compte-tenu des séquelles relevées et étant âgée de 85 ans lors de la consolidation de son état, il lui sera alloué une indemnité de 89 100 euros (point 1485 euros).

Il sera alloué à Monsieur [D] la somme de 89 100 euros au titre du déficit fonctionnel permanent.

- Préjudice esthétique permanent

Ce préjudice est lié à la nécessité de se présenter dans un état physique altéré au regard des tiers, et ce de manière pérenne à compter la date de consolidation.

En l'espèce, il est coté à 4/7 par l'expert en raison de notamment de l’aphasie, les séquelles de l’hémiplégie spastique et les troubles de l’équilibre.

Dans ces conditions, eu égard au changement durable de son apparence et de son comportement dans ses relations aux tiers, il convient d'allouer à Monsieur [C] [D] une somme de 12 000 euros à ce titre.

- Préjudice d'agrément

Ce préjudice vise à réparer le préjudice spécifique lié à l’impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité spécifique, sportive ou de loisirs ainsi que les limitations ou difficultés à poursuivre ces activités. Ce préjudice particulier peut être réparé, en sus du déficit fonctionnel permanent, sous réserve de la production de pièces justifiant de la pratique antérieure de sports ou d’activités de loisirs particuliers. La jurisprudence des cours d'appel ne limite pas l’indemnisation du préjudice d’agrément à l’impossibilité de pratiquer une activité sportive ou de loisirs exercée antérieurement à l’accident. Elle indemnise également les limitations ou les difficultés à poursuivre ces activités.
Monsieur [C] [D] ne produit aucun justificatif des activités sportives, ludiques ou de détente auxquelles il renonce.

Dans ces conditions, la demande formulée à ce titre ne pourra qu'être rejetée.

- Préjudice sexuel

La victime peut être indemnisée si l’accident a atteint, séparément ou cumulativement mais de manière définitive, la morphologie des organes sexuels, la capacité de la victime à accomplir l’acte sexuel (perte de l'envie ou de la libido, perte de la capacité physique de réaliser l'acte sexuel, perte de la capacité à accéder au plaisir), et la fertilité de la victime.

Si l’expert n’a pas retenu dans son rapport le préjudice sexuel, les séquelles que Monsieur [C] [D] présente ont un impact sur sa capacité à accomplir l’acte sexuel, et justifie qu’il lui soit alloué la somme de 3000 euros à ce titre.

SUR LES VICTIMES PAR RICOCHET

- Préjudice d’affection

Il s’agit du préjudice moral causé par le décès, les blessures, le handicap, les souffrances de la victime directe. Il doit être indemnisé même s’il n’a pas un caractère exceptionnel. Son montant est fixé en fonction de l’importance du dommage corporel de la victime directe et sa réparation implique l’existence d’une relation affective réelle avec le blessé.

Eu égard aux séquelles importantes de Monsieur [C] [D] qui ont modifié ses interactions à ses proches et leur ont causé un préjudice moral, il y a lieu d’allouer à Madame [V] [D] son épouse la somme de 10.000 euros, à son fils et sa fille Monsieur [L] [D] et Madame [I] [D] la somme chacun de 3000 euros et à son petit-fils Monsieur [F] [Z] la somme de 1.500 euros.

SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES

* Sur les intérêts au taux légal et la capitalisation des intérêts

En application de l’article 1231-7 du code civil, les sommes ci-dessus allouées porteront intérêt au taux légal à compter du prononcé du présent jugement.

De plus, en application de l’article 1343-2 du code civil, les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produiront intérêt.

* Sur les dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civile

Les docteurs [K] et [N], qui succombent en la présente instance, seront condamnés in solidum aux dépens de la présente instance, en ce compris frais d’expertise, dépens qui pourront être recouvrés directement par Maître Ghislaine CHAUVET-LECA en application de l’article 699 du code de procédure civile pour les frais dont elle a fait l’avance.

Les consorts [D] sont déboutés de leur demande de voir condamner les docteurs [K] et [N] aux dépens de l’instance de référé.

En outre, ils devront supporter les frais irrépétibles engagés par Monsieur [C] [D], Madame [V] [D], Monsieur [L] [D], Madame [I] [D] et Monsieur [F] [Z] dans la présente instance et que l'équité commande de réparer à raison de la somme de 3000 euros.

*Sur l’exécution provisoire

En application de l’article 514 du code de procédure civile en vigueur au jour de l’assignation, l’exécution provisoire est de droit.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire mis à disposition au greffe et rendu en premier ressort,

DIT que le docteur [R] [K] a manqué à son devoir d’information au sens des dispositions de l’article L.1111-2 et R.4127-35 du code de la santé publique ;

CONDAMNE le docteur [K] à payer à Monsieur [C] [D] à titre de réparation de son préjudice d’impréparation la somme de 5000 euros, cette somme portant intérêt au taux légal à compter du jugement ;

DIT que le docteur [R] [K] et le docteur [H] [N] ont commis plusieurs fautes au sens des dispositions des articles L.1110-5, L.1142-1-I, R.4127-32, R.4127,33, R.4127-233 du code de la santé publique ;

DÉCLARE le docteur [R] [K] et le docteur [H] [N] responsables in solidum des conséquences dommageables de l'intervention chirurgicale subie par Monsieur [C] [D] ;

DIT que dans leurs rapports entre eux chacun des co-responsables ne peut être tenu qu'à hauteur de sa part de responsabilité fixée à 60 % pour le docteur [R] [K] et à 40% pour le docteur [H] [N] ;

CONDAMNE in solidum le docteur [R] [K] et le docteur [H] [N] à réparer l'intégralité du préjudice subi,

REJETTE la demande de nouvelle expertise du docteur [R] [K] et du docteur [H] [N] ;

CONDAMNE in solidum le docteur [R] [K] et le docteur [H] [N] à payer à Monsieur [C] [D] à titre de réparation de son préjudice corporel, en deniers ou quittances, provisions non déduites, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour, les sommes suivantes :
- frais divers : 738, 28 euros ;
- assistance par tierce personne temporaire : 30 618 euros ;
- assistance par tierce personne pérenne : 173 767, 38 euros ;
- frais de logement adapté : 18 122, 88 euros ;
- déficit fonctionnel temporaire : 16 965 euros;
- souffrances endurées :15 000 euros ;
- préjudice esthétique temporaire : 2000 euros ;
- déficit fonctionnel permanent : 89 100 euros ;
- préjudice esthétique permanent : 12 000 euros ;
- préjudice sexuel : 3000 euros ;
Ces sommes portant intérêt au taux légal à compter du jugement ;

RÉSERVE les demandes de Monsieur [C] [D] au titre des dépenses de santé actuelles ;

DÉBOUTE Monsieur [C] [D] de ses demandes au titre de l’incidence professionnelle et du préjudice d’agrément ;

CONDAMNE in solidum le docteur [R] [K] et le docteur [H] [N] à payer au titre du préjudice d’affection les sommes suivantes :
A Madame [V] [D] la somme de 10.000 euros ;A Monsieur [L] [D] la somme de 3000 euros ;A Madame [I] [D] la somme de 3000 euros ;A Monsieur [F] [P] [Z] la somme de 1500 euros ;Ces sommes portant intérêts au taux légal à compter du jugement ;

CONDAMNE in solidum le docteur [R] [K] et le docteur [H] [N] à payer à Monsieur [C] [D], Madame [V] [D], Monsieur [L] [D], Madame [I] [D] et à Monsieur [F] [P] [Z] la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, cette somme portant intérêts à taux légal à compter du jugement ;

DIT que les intérêts échus des capitaux produiront intérêts dans les conditions fixées par l'article 1343-2 du code civil ;

DÉCLARE le présent jugement commun à la Caisse Nationale d’Assurance Vieillesse des Travailleurs Salariés de [Localité 17] ;

CONDAMNE in solidum le docteur [R] [K] et le docteur [H] [N] aux dépens comprenant les frais d’expertise ;

DIT que dans leurs rapports entre eux la charge définitive de la réparation tant en ce qui concerne le principal que les intérêts, les indemnités allouées en application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens sera supportée conformément au partage de responsabilité ci-dessus opéré ;

DIT que les avocats en la cause en ayant fait la demande, pourront, chacun en ce qui le concerne, recouvrer sur la partie condamnée ceux des dépens dont ils auraient fait l'avance sans avoir reçu provision en application de l'article 699 du code de procédure civile ;

RAPPELLE que la présente décision bénéficie de l'exécution provisoire de droit ;

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Fait et jugé à Paris le 03 Juin 2024.

La GreffièreLa Présidente

Erell GUILLOUËTGéraldine CHARLES


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 19eme contentieux médical
Numéro d'arrêt : 21/05943
Date de la décision : 03/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-03;21.05943 ?
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