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27/05/2024 | FRANCE | N°21/14839

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 19eme contentieux médical, 27 mai 2024, 21/14839


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

19ème contentieux médical

N° RG 21/14839

N° MINUTE :

Assignation du :
24 et 25 Novembre 2021

DEBOUTE

ON






JUGEMENT
rendu le 27 Mai 2024



DEMANDERESSE

Madame [H] [U] épouse [W]
Agissant en sa qualité de représentante de sa fille [C] [W] [U]
[Adresse 1]
[Localité 7]

Représentée par Maître Florence PETER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D0934

DÉFENDEURS

Monsieur [K] [S]
[Adresse 2]
[Localité 5]

Représe

nté par Maître Paul BESSIS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0424

La CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE D’ILE DE FRANCE
[Adresse 3]
[Localité 6]

Non représentée









Expédit...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

19ème contentieux médical

N° RG 21/14839

N° MINUTE :

Assignation du :
24 et 25 Novembre 2021

DEBOUTE

ON

JUGEMENT
rendu le 27 Mai 2024

DEMANDERESSE

Madame [H] [U] épouse [W]
Agissant en sa qualité de représentante de sa fille [C] [W] [U]
[Adresse 1]
[Localité 7]

Représentée par Maître Florence PETER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D0934

DÉFENDEURS

Monsieur [K] [S]
[Adresse 2]
[Localité 5]

Représenté par Maître Paul BESSIS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0424

La CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE D’ILE DE FRANCE
[Adresse 3]
[Localité 6]

Non représentée

Expéditions
exécutoires
délivrées le :

Décision du 27 Mai 2024
19ème contentieux médical
RG 21/14839

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Monsieur Olivier NOËL, Vice-Président
Madame Laurence GIROUX, Vice-Présidente
Madame Géraldine CHABONAT, Juge

Assistés de Madame Erell GUILLOUËT, Greffière, lors des débats et au jour de la mise à disposition au greffe.

DÉBATS

A l’audience du 18 Mars 2024 tenue en audience publique devant Monsieur Olivier NOËL, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seul l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile. Avis a été donné aux avocats que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 27 Mai 2024.

JUGEMENT

- Réputé contradictoire
- En premier ressort
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE

[C] [W], née le 4 août 2004, est suivie depuis avril 2004 par le Docteur [P], chirurgien-dentiste exerçant [Adresse 4] à [Localité 7].
A compter de novembre 2014, elle a été suivie pour son traitement orthodontique par le Docteur [S], collaborateur libéral du Docteur [P].
Un traitement orthodontique de la sœur aînée de [C] [W] avait précédemment été effectué par le Docteur [S].
A l’évaluation clinique, le Docteur [S] a constaté que [C] [W] avait plusieurs dents incluses avec manque d’espace avancé et un encombrement sévère qui a été confirmé par une radio et des empreintes.
Le Docteur [S] a considéré que ce cas ne présentait pas de difficulté clinique particulière.
Il a considéré qu’il pouvait sans avoir recours à des actes invasifs obtenir un parfait résultat sans aucune extraction.
C’est ainsi qu’il a décidé de mettre en œuvre un traitement non invasif par la pose d’un appareil sans bague avec un boîtier collé sur la dent afin de ne pas irriter la gencive, afin notamment d’éviter de provoquer des saignements de la gencive, une rétention alimentaire gingivale et de permettre un brossage et nettoyage complet.
Le contrôle et l'ajustement de l'appareil a ensuite été constant, la patiente [C] [W] qui a toujours présenté une parfaite hygiène buccale, a été régulièrement contrôlée dans l’attente de l’éruption naturelle de ses dents.
Le traitement de [C] [W] qui présentait des dents incluses multiples a été caractérisé par une évolution lente sans trop d’activation pour éviter les extractions.
A la demande du cardiologue de la jeune patiente, médecin qui devait procéder à une intervention cardiaque, l’appareil dentaire a été retiré par le docteur [S] le 18 octobre 2018.

Madame [H] [W], en qualité de représentante de sa fille mineure [C], a sollicité en référé une expertise judiciaire.
Par ordonnance en date du 31 mai 2019, Monsieur [F] [I] a été désigné en qualité d’expert judiciaire.

Monsieur [I] a déposé son rapport le 12 février 2020.
L’expert a conclu :
- que les soins prodigués étaient bien indiqués mais qu’ils n’ont pas été attentifs, diligents et conformes aux règles de l’art et aux données avérées de la science médicale,
- que le docteur [S] n’a pas intégralement respecté son obligation d’information et n’a pas fourni une information claire et appropriée sur le traitement et les soins proposés,
- que l’imputabilité entre les faits dommageables et les séquelles est impossible à déterminer voire à prouver scientifiquement.
L’expert a ensuite quantifié les divers chefs de ce préjudice corporel.

Au vu de ce rapport, par actes des 24 et 25 novembre 2021 assignant le Docteur [K] [S], Chirurgien dentiste et la CPAM Ile de FRANCE, suivi de conclusions récapitulatives signifiées le 22 janvier 2023, auxquelles il est référé expressément conformément aux dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile, Madame [H] [W] née [U], es qualité de représentante de sa fille mineure [C] [W], née le 4 août 2004, demande au Tribunal de :

RECEVOIR Madame [W] en sa qualité de représentante de sa fille mineure [C] [W] en ses demandes et les dire bien fondées.
DIRE ET JUGER que le Docteur [K] [S] a bien commis une faute professionnelle ayant utilisé un traitement inadapté, les actes, soins et leur suivi n’ont pas été attentifs, diligents et conformes aux données acquises de la science médicale et ont contribué à la réalisation du dommage de Mademoiselle [W].
DIRE que la faute professionnelle du Dr [S] a augmenté les risques de réalisation du dommage de Mademoiselle [W] et entraîné une perte de chance justifiant la réparation intégrale
de son préjudice.
VOIR condamner la partie adverse à payer à Mademoiselle [C] [W] représentée par sa mère Madame [W] les sommes suivantes :
10 000 euros au titre du défaut d’information du Docteur [K] [S]
1900 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire total
1300 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire partiel.
4000 euros au titre des dépenses de santé futures.
12 000 euros au titre des souffrances endurées.
10 000 euros au titre du préjudice esthétique.
10 000 euros au titre du préjudice d’agrément.
DIRE ET JUGER qu’il serait inéquitable de laisser à la charge du demandeur les frais irrépétibles qu’il a été contraint d’exposer en justice aux fins de défendre ses intérêts
En conséquence,
CONDAMNER Docteur [K] [S] au paiement de la somme de 8000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNER Docteur [K] [S] aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître PETER, avocat, en application de l'article 699 du Code de procédure civile ;
Ordonner l’exécution provisoire.

***

Par dernières conclusions régulièrement notifiées par voie électronique le 2 octobre 2022, Monsieur [K] [S] demande au Tribunal de :

DEBOUTER Madame [H] [W] née [U], en sa qualité de représentante de sa fille mineure [C] [W] [U], de l’intégralité de ses demandes ;
A titre subsidiaire.
Ramener à de plus juste proportion les demandes indemnitaires en retenant :
- 760 pour le déficit fonctionnel temporaire
- 585 € pour le déficit fonctionnel temporaire.
- 500 euros pour le préjudice esthétique (1/7)
- 500 euros pour le pretium doloris (1,5 /7)
Ecarter les autres demandes indemnitaires ;
CONDAMNER Madame [H] [W] née [U], en sa qualité de représentante de sa fille mineure [C] [W] [U] à verser à Monsieur [K] [S] la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNER Madame [H] [W] née [U], en sa qualité de représentante de sa fille mineure [C] [W] [U] aux entiers dépens.

En application de l'article 455 du Code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties quant à l'exposé détaillé de leurs prétentions et moyens.
La CPAM Ile de FRANCE n'a pas constitué avocat. Le présent jugement lui sera déclaré commun.

La clôture est intervenue par ordonnance du Juge de la mise en état du 28 mars 2023, l’affaire a été évoquée à l’audience du 18 mars 2024 et mise en délibéré au 27 mai 2024.

***

MOTIFS DE LA DECISION

Il n’est pas sollicité de nouvelle mesure d’expertise. Cette mesure d’instruction judiciaire et contradictoire sera donc la base de la connaissance de cette situation par le Tribunal.

Il convient de noter que, afin d’obtenir réparation d’un préjudice subi, le demandeur doit démontrer le lien de causalité entre le fait générateur, ici les soins du dentiste le Docteur [S], et le préjudice allégué, en l’espèce les troubles cardiaques évoqués et subis par la jeune fille.
Ce lien de causalité doit être certain et direct.

Or, l’expert a spécifiquement indiqué que, si les soins dentaires ne sont peut-être pas parfaits, ce que conteste formellement le dentiste mis en cause, le lien entre ces soins et les problèmes cardiaques de la jeune fille n’est aucunement établi.
Il mentionne, page 20 du rapport : “dans aucun rapport d’hospitalisation, il n’est stipulé un lien entre le traitement et l’accident cardiaque”, il explique d’ailleurs qu’il est classique que préalablement à toute opération cardiaque la dépose d’appareil d’orthodontie soit envisagée en raison des risques infectieux, que c’est même la première précaution à prendre afin d’éviter toute atteinte à la valve mitrale, atteinte d’origine buccale, ce qui n’est pas le cas dans la présente espèce qui indique une atteinte à la valve tricuspide (pages 20 et 21 du rapport).
Dès lors, en conclusion (page 26 du rapport), l’expert indiquait de façon définitive : “l’imputabilité entre les faits dommageables et les séquelles invoquées est impossible à déterminer voire même à prouver scientifiquement”, il soulignait lui-même le tronçon de phrase “impossible à déterminer”.

En conséquence, le lien de causalité n’étant pas établi entre les soins dentaires prodigués et les événements cardiaques ultérieurs, la demanderesse sera déboutée de toutes ses prétentions.

***

Il convient de condamner la demanderesse, partie perdante du procès, à payer au Docteur [S], sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile, une somme qu’il apparaît équitable de fixer à 2.000 €, ainsi qu’aux dépens.

***
PAR CES MOTIFS

Le tribunal statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire mis à disposition au greffe et rendu en premier ressort,

VU le rapport d’expertise déposé le 12 février 2020 ;

CONSTATE que le lien de causalité entre les soins dentaire prodigués par le Docteur [K] [S] à [C] [W] à compter de novembre 2014 et le préjudice allégué n’est pas démontré ;

DECLARE que Monsieur [K] [S], chirurgien-dentiste, n’est donc pas responsable des troubles cardiaques ultérieurs subis par Mademoiselle [C] [W] ;

DEBOUTE Madame [H] [W] née [U], es qualité de représentante de sa fille [C] [W], de toutes ses prétentions à l’égard du Docteur [K] [S] ;

DECLARE le présent jugement commun à la CPAM Ile de FRANCE ;

CONDAMNE Madame [H] [W] née [U], es qualité de représentante de sa fille [C] [W] à payer au Docteur [K] [S] la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNE Madame [H] [W] née [U], es qualité de représentante de sa fille [C] [W], aux dépens qui comprendront notamment le coût de l'expertise judiciaire et les dépens du référé qui auraient été réservés, s'agissant de frais de l'instance préparatoire au fond ;

REJETTE le surplus des demandes plus amples ou contraires.

Fait et jugé à Paris le 27 Mai 2024.

La GreffièreLe Président

Erell GUILLOUËTOlivier NOËL


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 19eme contentieux médical
Numéro d'arrêt : 21/14839
Date de la décision : 27/05/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 04/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-27;21.14839 ?
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