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24/05/2024 | FRANCE | N°22/10199

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 19ème chambre civile, 24 mai 2024, 22/10199


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le:



19ème chambre civile


N° RG 22/10199

N° MINUTE :


CONDAMNE

Assignation du :
03 Août 2022


EG






JUGEMENT
rendu le 24 Mai 2024
DEMANDERESSES

REALE SEGUROS GENERALES SA
[Adresse 8]
[Localité 5] (ESPAGNE)

ET

AINTRA S.L.
[Adresse 12]
[Localité 4] (ESPAGNE)

représentés par Maître Sandrine DOREL, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P73



r>DÉFENDERESSE

BUREAU CENTRAL FRANCAIS es qualité de débiteur délégué en France de ETHIAS SA
[Adresse 2]
[Localité 6]

représentée par Maître Micheline SZWEC-GELLER, avocat au barreau de PARIS,vestiaire #D0684...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le:

19ème chambre civile


N° RG 22/10199

N° MINUTE :

CONDAMNE

Assignation du :
03 Août 2022

EG

JUGEMENT
rendu le 24 Mai 2024
DEMANDERESSES

REALE SEGUROS GENERALES SA
[Adresse 8]
[Localité 5] (ESPAGNE)

ET

AINTRA S.L.
[Adresse 12]
[Localité 4] (ESPAGNE)

représentés par Maître Sandrine DOREL, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P73

DÉFENDERESSE

BUREAU CENTRAL FRANCAIS es qualité de débiteur délégué en France de ETHIAS SA
[Adresse 2]
[Localité 6]

représentée par Maître Micheline SZWEC-GELLER, avocat au barreau de PARIS,vestiaire #D0684

Décision du 24 Mai 2024
19ème chambre civile
N° RG 22/10199

PARTIES INTERVENANTES

La Société de droit belge FRAIKIN BELGIUM TRUCK RENTING
[Adresse 9]
[Localité 3] (BELGIQUE)

ET

La Société DACHSER
[Adresse 1]
[Localité 7] (BELGIQUE)

représentée par Maître Micheline SZWEC-GELLER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D0684

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Par application des articles R.212-9 du Code de l’Organisation Judiciaire et 812 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été attribuée au Juge unique.

Avis en a été donné aux avocats constitués qui ne s’y sont pas opposés.

Madame Emmanuelle GENDRE, Vice-Présidente, statuant en juge unique.

Assistée de Madame Célestine BLIEZ, greffière, lors des débats et au jour de la mise à disposition.

DÉBATS

A l’audience du 29 Mars 2024, tenue en audience publique, avis a été donné aux avocats que la décision serait rendue le 24 Mai 2024.

JUGEMENT

- Contradictoire
- En premier ressort
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE

Le 20 septembre 2017, sur l’autoroute A1 [Localité 11]-[Localité 10], à hauteur de [Localité 13], un accident de la circulation a eu lieu entre M.[P] [X] qui conduisait un ensemble routier immatriculé en Espagne, appartenant à la société AINTRA SL et assuré par la société espagnole REALE SEGUROS GENERALES SA et M.[E] [U] conduisant un poids lourd immatriculé en Belgique (tracteur appartenant à FRAIKIN BELGIUM TRUCK RENTING-remorque appartenant à DACHSER) et assuré auprès de la société belge ETHIAS SA, accident lors duquel M.[P] [X] est décédé.

La compagnie CED France, correspondante de la compagnie espagnole REALE SEGUROS GENERALES SA, a mis en cause la DEKRA, correspondante de la compagnie belge ETHIAS SA qui n’a pas répondu aux demandes d’indemnisation.

Par acte du 3 août 2022, les sociétés REALE SEGUROS GENERALES SA et AINTRA SL ont fait assigner le BUREAU CENTRAL FRANÇAIS ès qualité de débiteur délégué en France de ETHIAS SA (BCF) pour obtenir l’indemnisation de leur préjudice.

Par conclusions signifiées le 14 septembre 2023, auxquelles il est référé expressément conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, REALE SEGUROS GENERALES SA et AINTRA SL demandent au tribunal de :
Condamner le BCF, ès qualité de débiteur délégué en France de ETHIAS, in solidum avec FRAIKIN BELGIUM et DACHSER à payer à :. AINTRA SL : 27.459,19 euros outre intérêts au taux légal à compter de l’assignation se capitalisant par année entière en application de l’article 1343-2 du code civil ;
. REALE SEGUROS GENERALES SA : 71.134,67 euros outre intérêts au taux légal à compter de l’assignation, se capitalisant par année entière en application de l’article 1343-2 du code civil ;
Condamner le BCF à leur payer 5.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;Dire que la faute commise par M.[E] [U] exclut tout droit à indemnisation des sociétés FRAIKIN BELGIUM et DACHSER ;En conséquence les débouter de l’intégralité de leurs demandes, fins et conclusions ;Condamner encore le BCF, FRAIKIN BELGIUM et DACHSER aux dépens de l’instance.
Aux termes de leurs conclusions récapitulatives signifiées le 1er décembre 2023, auxquelles il est référé expressément conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, le BUREAU CENTRAL FRANÇAIS ès qualité de représentant de la société d’assurance de droit belge ETHIAS, la société FRAIKIN BELGIUM TRUCK RENTING et la société DACHSER demandent notamment au tribunal de :
Juger que M.[X], conducteur de l’ensemble routier appartenant à la société AINTRA et assuré par la société REALE SEGUROS GENERALES a eu un comportement fautif à l’origine de l’accident survenu le 20 septembre 2017 de nature à exclure le droit à indemnisation de la propriétaire du véhicule qu’il pilotait et de son assureur en application des dispositions de l’article 4 de la loi du 5 juillet 1985 ;Débouter en conséquence la société AINTRA SL et la société REALE SEGUROS GENERALES SA de l’intégralité de ses demandes ;Subsidiairement,
Juger que le comportement fautif de M.[X], conducteur du véhicule appartenant à la société AINTRA et assuré par la société REALE SEGUROS GENERALES SA, est de nature à réduire de 90% le droit à indemnisation des demanderesses, en applications des dispositions de l’article 4 de la loi du 5 juillet 1985 ;Recevoir la société FRAIKIN BELGIUM TRUCK RENTING en son intervention volontaire et en sa demande reconventionnelle ;Y faisant droit,
Condamner in solidum les sociétés AINTRA et REALE SEGUROS GENERALES SA à lui payer la somme de 2.250 euros ;Recevoir la société DACHSER en son intervention volontaire et en sa demande reconventionnelle ;Y faisant droit,
Condamner in solidum les sociétés AINTRA et REALE SEGUROS GENERALES SA à lui payer la somme 6.100 euros ;Condamner in solidum les sociétés AINTRA et REALE SEGUROS GENERALES SA à lui payer la somme de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
La clôture de la présente procédure a été prononcée le 2 février 2024.

L'affaire a été plaidée le 29 mars 2024 mise en délibéré au 24 mai 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il y a lieu de recevoir les société FRAIKIN BELGIUM TRUCK RENTING et DACHSER, propriétaires de l’ensemble routier conduit par M.[E] [U] en leurs interventions volontaires.

I – Sur les demandes de REALE SEGUROS GENERALES SA et AINTRA SL :

Sur le droit à indemnisation :
La loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation, dite « loi Badinter » dispose :En son article 1er que les dispositions du présent chapitre s'appliquent, même lorsqu'elles sont transportées en vertu d'un contrat, aux victimes d'un accident de la circulation dans lequel est impliqué un véhicule terrestre à moteur ainsi que ses remorques ou semi-remorques, à l'exception des chemins de fer et des tramways circulant sur des voies qui leur sont propres.

En son article 2 que les victimes, y compris les conducteurs, ne peuvent se voir opposer la force majeure ou le fait d'un tiers par le conducteur ou le gardien d'un véhicule mentionné à l'article 1er.

Est impliqué dans un accident, au sens des dispositions précitées tout véhicule intervenu, à quelque titre que ce soit, dans la survenance de cet accident. Le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur ne peut se dégager de son obligation d'indemnisation que s'il établit que cet accident est sans relation avec le dommage.

L’article 4 de la loi du 5 juillet 1985 dispose que la faute commise par le conducteur du véhicule terrestre à moteur a pour effet de limiter ou d’exclure l’indemnisation des dommages qu’il a subis. Aux termes de l’article 5 de la même loi, la faute commise par la victime a pour effet de limiter ou d’exclure l’indemnisation des dommages aux biens qu’elle a subis. Cette faute doit avoir contribué à la réalisation du préjudice et être appréciée en faisant abstraction du comportement des autres conducteurs.

La société REALE SEGUROS GENERALES SA et la société AINTRA SL font valoir que la preuve de la faute du chauffeur du semi-remorque immatriculé en Espagne n’est pas rapportée de sorte qu’elles disposent d’un entier droit à indemnisation alors que la faute commise par M.[E] [U] chauffeur de l’ensemble routier belge est de nature à exclure tout droit à indemnisation. Elles exposent ainsi que les investigations sur le chronotachygraphe du véhicule de M. [P] [X] n’ont révélé aucune infraction à la réglementation des transports. Se référant au procès-verbal de synthèse de l’enquête, elles soulignent que M. [E] [U] circulait à une faible allure au moment du choc, que celui-ci expliquera avoir fait un malaise et ne pas s’être rendu compte du choc et que l’exploitation de son tachygraphe révèle de multiples infractions à la règlementation des transports. Elles ajoutent que les déclarations du témoin M.[N] montrent que M.[P] [X] a tenté une manœuvre d’évitement en arrivant sur le poids-lourd belge. Elles en déduisent que le véhicule de M. [E] [U] circulait à une vitesse anormalement basse et constituait un obstacle pour les autres usagers.

Le BCF et les sociétés FRAIKIN BELGIUM TRUCK RENTING et DACHSER estime que M.[P] [X] a eu un comportement fautif à l’origine de l’accident de nature à exclure tout droit à indemnisation ou à tout le moins à le limiter à hauteur de 90%. Ils rappellent que le véhicule conduit par M.[E] [U] a été percuté à l’arrière ce qui traduit un total manque de maîtrise de M.[P] [X] et un manque de respect des distances de sécurité. Ils soulignent que le témoignage de M.[N] confirme leur position lorsqu’il indique que le véhicule conduit par M.[P] [X] zigzaguait. Ils rappellent également que le comportement éventuellement fautif de M.[P] [X] doit être apprécié abstraction faite du comportement de M.[E] [U]. Ils ajoutent que le fait de « zigzaguer » ne témoigne pas d’une manœuvre d’évitement mais d’un défaut de maîtrise l’ayant conduit à percuter le véhicule devant lui alors que les véhicules suivants ont évité sans difficulté la collision.

SUR CE,

Il résulte de l’article R413-17 du code de la route que le respect des vitesses maximales autorisées ne dispense en aucun cas le conducteur de rester constamment maître de sa vitesse et de régler cette dernière en fonction de l’état de la chaussée, des difficultés de la circulation et des obstacles prévisibles.

L’article R412-12 du même code impose au conducteur qui suit un autre véhicule de maintenir une distance de sécurité suffisante pour pouvoir éviter une collision en cas de ralentissement brusque ou d’arrêt subit du véhicule qui le précède. Cette distance est d’autant plus grande que la vitesse est plus élevée et correspond à la distance parcourue par le véhicule pendant un délai d’au moins deux secondes.

Il résulte des pièces versées aux débats que l’accident est survenu le 20 septembre 2017, peu avant 5h, sur l’Autoroute A1, dans le sens [Localité 11]-[Localité 10] au niveau de [Localité 13] et a impliqué deux véhicule poids lourds.

La matérialité de la collision, et donc l’implication du véhicule conduit par M.[E] [U] assuré auprès de la compagnie belge ETHIAS SA, n’est pas contestée. Dans ces conditions, il incombe au BCF de rapporter la preuve de la faute commise par M.[P] [X] de nature à exclure ou à diminuer son droit à indemnisation.

Il ressort du procès-verbal de synthèse de la gendarmerie que l’exploitation du chronotachygraphe du véhicule conduit par M.[P] [X] n’a révélé aucune infraction au code de la route ou à la règlementation sociale européenne. En revanche le véhicule conduit par M.[E] [U] selon l’exploitation du chronotachygraphe de son véhicule circulait au moment du choc à la vitesse de 18 km/h, celui-ci ayant pu expliquer avoir fait un malaise. Un seul témoignage est produit émanant de M.[B] [N], chauffeur d’un poids lourds circulant après un autre véhicule qui suivait celui de M.[P] [X]. Celui-ci a déclaré avoir vu au loin le véhicule de M.[P] [X] « zigzaguer », puis « d’un coup » ne plus avoir vu de lumière. Compte tenu de l’état du véhicule de M.[P] [X], il pensait que celui-ci s’était endormi, puis s’était réveillé et avait mis un coup de volant mettant son véhicule « en portefeuille ».

Au regard de ces seuls éléments, il doit être retenu que M.[P] [X], qui ne circulait pas à une vitesse excessive, est entré en collision avec un véhicule circulant sur autoroute à la vitesse de 18 km/h, sans que ne soit précisé dans le procès-verbal de synthèse de gendarmerie s’il s’agissait d’une vitesse constante du véhicule percuté et donc anticipable ou d’un changement brutal d’allure qui aurait surpris M.[P] [X] et expliquant ses changements de direction observés par le témoin avant l’accident. Il n’est pas davantage précisé si les avertisseurs lumineux du véhicule le précédent avait pu l’alerter de cet obstacle. Dans ces conditions, sans tenir compte du comportement de l’autre conducteur, mais uniquement de la position du véhicule percuté constituant un obstacle, au regard de sa très faible vitesse, de nuit et sur une voie rapide, il ne peut être déduit du seul fait que M.[P] [X] ait percuté à l’arrière le véhicule conduit par M.[U] un non-respect des distances de sécurité ou un défaut de maîtrise.

Ainsi, en l’absence d’élément permettant d’apprécier les circonstances de la collision, le comportement fautif reproché à M.[P] [X] n’est pas établi.

Il y a donc lieu de considérer que le droit à indemnisation est intégral.

Sur les demandes indemnitaires :
Sur les demandes de la société REALE SEGUROS GENERALES SA
Aux termes de l’article L121-12 du code des assurances, l’assureur qui a payé l’indemnité d’assurance est subrogé, jusqu’à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l’assuré contre les tiers, qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l’assureur.

La société REALE SEGUROS sollicite la somme de 71.134 euros.

Elle expose avoir réglé la somme de 51.100 euros à la société AINTRA correspondant à la perte du véhicule. Elle verse à ce titre un rapport d’expertise traduit de l’espagnol daté du 15 décembre 2017 indiquant que la valeur de réparation dépasse la valeur vénale du véhicule et évalue le préjudice à la valeur vénale estimée du véhicule de 51.100 euros déduction faite de la franchise et de la valeur de l’épave. Elle produit également une quittance subrogatoire traduite du 24 janvier 2018 de la société AINTRA SL pour ce montant. Il sera en conséquence fait droit à sa demande pour ce montant.

Elle sollicite également la somme de 13.424,67 euros correspondant au dégagement du véhicule et aux réparations par la société SANEF. Les défendeurs contestent le bien-fondé de cette demande dès lors qu’il n’est pas justifié du règlement effectif de cette somme. Dans la mesure où la réclamation est directement adressée par la société SANEF à CED France, correspondant de la compagne REALE SEGUROS GENERALES SA, cette seule réclamation accompagnée des justificatifs des dépenses permet de considérer que la société REALE SEGUROS GENERALES SA est directement redevable de cette somme et qu’elle est légitime, même en l’absence de preuve de paiement, à en demander l’indemnisation qui n’est pas fondée sur l’action subrogatoire.

La société REALE SEGUROS GENERALES SA demande également le paiement de la somme de 6.010 euros correspondant aux sommes versées aux ayant-droit du conducteur défunt au titre d’un capital décès. Or, il est produit une lettre de la compagnie REALE SEGUROS GENERALES SA adressée à [H] [R] mentionnant un versement du montant réclamé. Comme l’indiquent le BCF et les sociétés FRAIKIN BELGIUM TRUCK RENTING et DACHSER, il n’est pas produit la police d’assurance, ni d’élément concernant les destinataires de ce règlement permettant de s’assurer de son lien avec l’accident. Elle sera en conséquence déboutée de cette demande.

Enfin la somme de 600 euros réclamée au coût de traduction des pièces correspond au frais de justice inclus dans les frais réclamés au titre de l’article 700 du code de procédure civile et la société REALE SEGUROS GENERALES SA sera déboutée de cette demande.

En conséquence, le BCF et les sociétés FRAIKIN BELGIUM TRUCK RENTING et DACHSER seront solidairement condamnés à payer à la société REALE SEGUROS GENERALES SA la somme de (51.100 euros + 13.424,67 euros) 64.524,67 euros.

Sur les demandes de AINTRA SL
La société AINTRA SL sollicite la somme de 27.459,19 euros.

Elle réclame en premier lieu l’indemnisation de la franchise de 2.500 euros concernant l’indemnisation de son véhicule. Ce montant est effectivement justifié par la déduction sur la valeur du véhicule figurant sur l’expertise produite au titre de la franchise. Cette somme lui sera en conséquence allouée.

La société AINTRA SL demande en deuxième lieu la somme de 9.772,21 euros correspondant aux frais d’intervention et de remorquage du véhicule ainsi que le gardiennage de celui-ci à hauteur de 3.000 euros. Ces sommes sont justifiées par les devis émanant du Garage Beli Auto produits et seront donc allouées.

Elle demande en outre l’indemnisation des marchandises transportées à savoir 25.540 kilos de pommes golden et perdues pour un montant de 6.217,84 euros ainsi que la somme réglée pour la destruction des marchandises de 574,74 euros. AINTRA SL produit à cet égard un document et sa traduction en date 18 septembre 2017 relatif à la livraison d’un chargement de 25.540 kg de pommes à destination des Pays-Bas pour un montant de 6.001,90 euros mentionnant la prise en charge par M.[P] [X] pour le compte la société de transport AINTRA. Par ailleurs s’il est produit une facture traduite d’un centre de tri de déchets nommé ALETRA mentionnant la facturation de 394,74 euros pour « manutention de pommes » et 180 euros de transport à la charge de la société AINTRA, cet élément ne permet pas d’établir de manière certaine le lien entre ces frais et l’accident du 20 septembre 2017. Aussi, il sera alloué au titre de la perte du chargement du véhicule la somme de 6.001,90 euros.

La société AINTRA SL demande enfin la somme de 5.394,40 euros correspondant à la perte de jouissance de l’ensemble routier durant 40 jours. L’accident ayant eu lieu le 20 septembre 2017 et le règlement par l’assureur étant intervenu le 24 janvier 2018, la réclamation de l’indemnité d’immobilisation à hauteur de 40 jours selon le barème indemnitaire des assureurs pour l’année 2017 apparaît justifiée. Il sera en conséquence alloué la somme de 134,86 euros par jour, soit 5.394,40 euros.

En conséquence, le BCF et les sociétés FRAIKIN BELGIUM TRUCK RENTING et DACHSER seront solidairement condamnés à payer à la société AINTRA SL la somme de (2.500 euros+9.772,21 euros+3.000 euros+6.001,90 euros+5.394,40 euros) = 26.668,51 euros.

II – Sur les demandes du BCF, de la société FRAIKIN BELGIUM TRUCK RENTING et de la société DACHSER :

1 – Sur le droit à indemnisation :

La société FRAIKIN BELGIUM TRUCK RENTING et la société DACHSER font valoir que M.[E] [U] avait sensiblement réduit sa vitesse après avoir eu une impression de malaise due à une chute de tension. REALE SEGUROS GENERALES SA et AINTRA SL s’opposent aux demandes en raison de la faute de conduite du chauffeur.

En application de l’article R413-8 du code de la route, la vitesse des véhicules dont le poids total autorisé en charge est supérieur à 3,5 tonnes est limitée à 90km/h sur l’autoroute. L’article R413-19 du même code prévoit qu’aucun conducteur ne doit gêner la marche normale des autres véhicules en circulant sans raison valable à une vitesse anormalement réduite.

En l’espèce, il résulte du procès-verbal de gendarmerie que M.[E] [U] circulait à une allure de 18 km/h au moment du choc, celui-ci expliquant avoir fait un malaise et ne pas s’être rendu compte d’avoir été heurté. Il en ressort également que l’exploitation des dossiers médicaux de l’intéressé n’a pas permis de confirmer ou d’infirmer ses déclarations sur ce point. Aussi, s’il est établi que la vitesse de circulation du véhicule était anormalement basse surtout sur une voie rapide et de nuit, les éléments en procédure ne permettent pas d’établir que la réduction de vitesse du chauffeur n’ait été dictée par une raison valable et que M.[E] [U] ait eu notamment l’occasion de s’arrêter sur la bande d’arrêt d’urgence afin d’éviter de gêner la marche de la circulation.

Dans ces conditions, le comportement fautif reproché à M.[E] [U] n’est pas établi.

Il y a donc lieu de considérer que le droit à indemnisation est intégral.

2- sur l’indemnisation :

Pour la société FRAIKIN BELGIUM TRUCK RENTING:
La société FRAIKIN BELGIUM TRUCK RENTING sollicite la somme de 2.250 euros au titre du coût de remise en état du véhicule tracteur endommagé par l’accident incluant une demi-journée d’immobilisation.

Elle produit un procès-verbal d’expertise à la suite du sinistre du 20 septembre 2017 chiffrant les réparations sur le véhicule à la somme de 2.245 euros et une durée d’immobilisation nécessaire d’une demie journée. Il convient en conséquence de lui allouer la somme réclamée soit 2.250 euros.

Pour la société DACHSER :
La société DACHSER sollicite la somme de 6.100 euros représentant la valeur de marché de la remorque endommagée et 10 jours d’immobilisation.

Elle produit un procès-verbal d’expertise à la suite du sinistre du 20 septembre 2017 estimant la valeur du véhicule à la somme de 6.000 euros, celui-ci n’apparaissant pas réparable. Il convient en conséquence de lui allouer la somme réclamée soit 6.100 euros incluant une durée de 10 jours d’immobilisation.

III – Sur les demandes accessoires :

Chaque partie qui succombe partiellement conservera la charge de ses propres dépens.

Compte tenu de l’équité les demandes formées par les parties au titre de l’article 700 du code de procédure civile seront rejetées.

En application de l’article 514 du code de procédure civile en vigueur au jour de l’assignation, l’exécution provisoire est de droit.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,

REÇOIT les sociétés FRAIKIN BELGIUM TRUCK RENTING et DACHSER en leur interventions volontaires ;

DIT que l’ensemble routier conduit par M. [E] [U] appartenant aux sociétés FRAIKIN BELGIUM TRUCK RENTING et DACHSER et assuré auprès de la compagnie belge ETHIAS est impliqué dans la survenance de l'accident du 20 septembre 2017 ;

DIT que l’ensemble routier conduit par M.[P] [X] appartenant à la société AINTRA SL et assuré auprès de la compagnie espagnole REALE SEGUROS GENERALES SA est impliqué dans la survenance de l'accident du 20 septembre 2017 ;

DIT qu’il n’y a pas lieu de retenir de faute de nature à réduire ou à exclure le droit à indemnisation à l’égard de M.[P] [X] et de M.[E] [U] ;

CONDAMNE le BUREAU CENTRAL FRANÇAIS ès qualité de représentant de la société d’assurance de droit belge ETHIAS, la société FRAIKIN BELGIUM TRUCK RENTING, la société DACHSER in solidum à payer à la société REALE SEGUROS GENERALES SA, en réparation de son préjudice la somme de 64.524,67 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement ;

CONDAMNE le BUREAU CENTRAL FRANÇAIS ès qualité de représentant de la société d’assurance de droit belge ETHIAS, la société FRAIKIN BELGIUM TRUCK RENTING, la société DACHSER in solidum à payer à la société AINTRA SL, en réparation de son préjudice la somme de 26.668,51 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement ;

CONDAMNE reconventionnellement la société REALE SEGUROS GENERALES SA et la société AINTRA SL à payer à la société FRAIKIN BELGIUM TRUCK RENTING la somme de 2.250 euros ;

CONDAMNE reconventionnellement la société REALE SEGUROS GENERALES SA et la société AINTRA SL à payer à la société DACHSER la somme de 6.100 euros ;

DIT que chaque partie conservera la charge de ses dépens ;

DÉBOUTE le BUREAU CENTRAL FRANÇAIS ès qualité de représentant de la société d’assurance de droit belge ETHIAS, la société FRAIKIN BELGIUM TRUCK RENTING, la société DACHSER, la société REALE SEGUROS GENERALES SA et la société AINTRA SL de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELLE que la présente décision bénéficie de l'exécution provisoire de droit ;

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Fait et jugé à Paris le 24 Mai 2024

Le GreffierLa Présidente
Célestine BLIEZEmmanuelle GENDRE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 19ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/10199
Date de la décision : 24/05/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 01/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-24;22.10199 ?
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