La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/05/2024 | FRANCE | N°23/04375

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jtj proxi requêtes, 21 mai 2024, 23/04375


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Le :

Copie conforme délivrée
à : TUNISAIR

Copie exécutoire délivrée
à : CANIVET

Pôle civil de proximité


PCP JTJ proxi requêtes

N° RG 23/04375 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2D6M

N° MINUTE :
20/2024






JUGEMENT
rendu le mardi 21 mai 2024


DEMANDEUR
Monsieur [H] [U], demeurant [Adresse 6]
représenté par Me Geoffroy CANIVET, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #D0010



DÉFENDERESSE
Société TUNIS-AIR, dont le

siège social est sis [Adresse 1]
non comparante, ni représentée



COMPOSITION DU TRIBUNAL
Yanaël KARSENTY, juge, statuant en juge unique assisté d’Arjun JEYARAJAH, Greffier, lors ...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Le :

Copie conforme délivrée
à : TUNISAIR

Copie exécutoire délivrée
à : CANIVET

Pôle civil de proximité

PCP JTJ proxi requêtes

N° RG 23/04375 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2D6M

N° MINUTE :
20/2024

JUGEMENT
rendu le mardi 21 mai 2024

DEMANDEUR
Monsieur [H] [U], demeurant [Adresse 6]
représenté par Me Geoffroy CANIVET, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #D0010

DÉFENDERESSE
Société TUNIS-AIR, dont le siège social est sis [Adresse 1]
non comparante, ni représentée

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Yanaël KARSENTY, juge, statuant en juge unique assisté d’Arjun JEYARAJAH, Greffier, lors des débats et Marie-Anaïs BELLAY, Greffière, lors du délibéré

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 15 février 2024

JUGEMENT
réputé contradictoire, en dernier ressort, prononcé par mise à disposition le 21 mai 2024.

Décision du 21 mai 2024
PCP JTJ proxi requêtes - N° RG 23/04375 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2D6M

EXPOSÉ DU LITIGE

Par requête reçue au greffe le 2 juin 2023, Monsieur [H] [U] a sollicité, à la suite du retard de plus de trois heures d’un vol prévu le 27 février 2020 en provenance de Marseille et en direction de Tunis, la convocation de la société TUNISAIR devant le Tribunal judicaire de Paris aux fins :

- qu’il déclare les demandeurs recevables et fondés en leur demande d'indemnisation titre de l'application du règlement 261/2004 du 11 février 2004 les textes précités,
- de dire et juger que la société TUNISAIR a manqué à ses obligations au titre du règlement 261/2004 du 11 février 2004,
- de dire et juger que la société TUNISAIR a fait preuve de résistance abusive dans le traitement de ses réclamations refusant sans le moindre justificatif de répondre favorablement à ses demandes d'indemnisation.

En conséquence :

De condamner la société TUNISAIR au titre de son manquement dispositions du règlement CE 261/2004 du 11 février 2004 à payer aux demandeurs les sommes suivantes :
- 250 € pour indemnisation pour retard du vol,
- 400 € chacun au titre de la résistance abusive,
- 1000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

A l’audience du 15 février 2024, Monsieur [H] [U], représenté par son conseil, soulève in limine litis l’incompétence territorial du tribunal de Paris, notamment au profit du tribunal de Longjumeau, la société TUNISAIR ayant transféré son « premier » établissement en France de Paris à [Localité 4]. A titre subsidiaire, il sollicite de faire droit à ses demandes.

Bien que régulièrement convoquée à l’audience du 15 février 2024, la société TUNISAIR n’a pas comparu ni personne pour elle.

Pour de plus amples exposés des faits, demandes et moyens développés par les parties, il sera fait référence, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, à leurs écritures visées et débattues à l'audience.

L’affaire a été mise en délibéré au 21 mai 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

En application de l'article 472 du Code de procédure civile, « Si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée ».

L'article 9 du code de procédure civile énonce qu'il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

I – IN LIMINE LITIS SUR LA COMPÉTENCE DU TRIBUNAL

A/ Sur l’incompétence territoriale du tribunal de Paris au regard de l’article 4 du règlement UE n°1215/2012

Monsieur [H] [U] a acquis un billet de la compagnie TUNISAIR via le site de voyages SATGURU pour un vol [Localité 3] – Tunis le 03 février 2023.

L’article 4 du règlement européen prévoit que les personnes domiciliées sur le territoire d’un Etat membre sont attraites, quelle que soit leur nationalité devant les juridictions de cet Etat membre.

Concernant les personnes morales, l’article 63 dispose que l’application du règlement est conditionnée à ce que le défendeur soit domicilié là où est situé son siège statutaire, son administration centrale ou son principal établissement.

En l’espèce, il n’est pas contesté que la société TUNISAIR, détenue très majoritairement par l’Etat Tunisien, a son siège social à Tunis, siège qui est en même temps son principal établissement tant sur le plan directionnel qu’exécutif. Aucun élément n’est apporté permettant d’affirmer que la société TUNISAIR disposerait en France d’une administration centrale ou de son principal établissement. S’il est fait état d’une adresse et d’un numéro d’inscription au RCS de [Localité 2] (13 janvier 2023) en qualité de « premier » établissement en France de la société TUNISAIR au moment des faits, il n’est n’apporté aucun élément susceptible de caractériser l’existence d’un établissement principal au sens du règlement UE n°1215/2012.

Par conséquent, l’existence d’une succursale à Paris ou à [Localité 5], même immatriculée en qualité de « premier établissement », de la société TUNISAIR en France ne permettant de considérer qu’elle y est domiciliée au sens des articles 4 et 63 du règlement UE 1215/2012, la compétence de la juridiction parisienne ne saurait être retenue.

B/ Sur la compétence territoriale au regard de l’article 6 du règlement UE n°1215/2012

L’article 6 du règlement 1215/2012, prévoit que si le défendeur n’est pas domicilié sur le territoire d’un Etat membre, la compétence est dans chaque état membre réglée par la loi de cet Etat membre, en l’espèce la loi française.

Ainsi, il convient de préciser que dans le cadre d’une demande indemnitaire fondée sur le règlement UE n°261/2004, régime de réparation standardisée au caractère autonome, les dispositions du code des transports et du code de l’aviation civile n’ont pas vocation à s’appliquer.

Il en résulte que seules les règles de compétence de droit commun, notamment celle du code de procédure civile, doivent recevoir application.

L’article 46 du code de procédure civile donne la possibilité au demandeur de saisir à son choix, outre la juridiction du lieu du domicile du défendeur, la juridiction du lieu de la livraison effective de la chose ou du lieu d’exécution de la prestation de service (lequel s'entend, pour un transport aérien de passagers, soit du lieu de départ, soit du lieu d'arrivée de l'avion).

Au regard de l’application prétorienne de la théorie des « gares principales », il est admis que le demandeur peut saisir la juridiction dans laquelle le défendeur dispose d’une succursale. Néanmoins, cette faculté s’apprécie d’une part selon l’importance de la succursale et son autonomie tant financière qu’administrative, notamment par le fait qu’elle soit dotée d’un représentant ayant le pouvoir de représenter la société mère à l’égard des tiers, de l’engager et d’agir en son nom, et d’autre part selon que le litige entretienne des liens suffisants avec l'établissement concerné (litige est né de l’activité ou d'affaires traitées par l'intermédiaire de cette succursale ou faits produits dans son ressort territorial).

En l’espèce, il n’est pas contesté que le siège social de la société TUNISAIR est situé à Tunis-Carthage en Tunisie. Par ailleurs, aucun élément n’est produit permettant de déduire que l’établissement parisien (fermé en 2023) ou l’établissement de [Localité 5] était ou est doté d’organes de direction et de services administratifs : aucune pièce ne permet d’établir l’autonomie financière et administrative de ces établissements, notamment cellui de [Localité 5] immatriculé comme « premier » en France, dont les actes auraient été susceptibles d’engager la société mère de droit tunisien. De plus, rien ne permet de démontrer l’implication de l’établissement de [Localité 5] de la société TUNISAIR dans le litige constitué par le retard du vol, ni même que les faits se soient produits dans le ressort territorial de Paris ou celui de l’Essonne. En outre, le trajet était au départ de l’aéroport de [Localité 3] et les billets ont été achetés sur un site internet tiers.

Par conséquent, au regard de l’absence de démonstration de l’autonomie de la succursale de Paray-Vieille-Poste caractérisant un rôle effectif vis-à-vis des tiers et de l’absence de preuve de lien direct du litige avec l’activité de cette succursale, il convient au tribunal judicaire de Paris de se déclarer incompétent au profit, non pas du tribunal de Longjumeau, mais du tribunal de Martigues, compétent selon l’article 46 du CPC à raison du lieu de départ de l’avion.

II - SUR LES DEMANDES SUBSÉQUENTES

1) Sur les frais irrépétibles :

Il n'y a pas matière à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

2) Sur les dépens :

Conformément à l'article 696 du code de procédure civile, les dépens de la présente instance resteront à la charge du requérant.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal judiciaire de Paris statuant, après débats publics, par jugement prononcé par mise à disposition au greffe, réputé contradictoire et susceptible d'appel dans les conditions prévues aux articles 83 et suivants du code de procédure civile,

SE DECLARE incompétent au profit du tribunal de proximité Martigues, compétent selon l’article 46 du CPC à raison du lieu de départ de l’avion,

RAPPELLE qu’à l’expiration des délais de recours, le greffe de ce tribunal transmettra l’entier dossier au greffe du tribunal de Martigues,

JUGE n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Monsieur [H] [U] aux dépens de la présente instance,

REJETTE toute demande plus ample ou contraire.

Fait et jugé à Paris le 21 mai 2024

La GreffièreLe Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jtj proxi requêtes
Numéro d'arrêt : 23/04375
Date de la décision : 21/05/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 02/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-21;23.04375 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award