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21/05/2024 | FRANCE | N°22/11266

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 19ème chambre civile, 21 mai 2024, 22/11266


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :


19ème chambre civile


N° RG 22/11266

N° MINUTE :


Assignation du :
15 et 16 Septembre 2022

CONDAMNE


ON










JUGEMENT
rendu le 21 Mai 2024
DEMANDEUR

Monsieur [U] [J]
[Adresse 2]
[Adresse 2]

représenté par Maître Colin LE BONNOIS de la SELARL Cabinet Rémy LE BONNOIS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #L0299



DÉFENDEURS

BPCE ASSURANCES IARD


[Adresse 3]
[Adresse 3]

représentée par Maître Myriam HOUFANI de la SELARL CHAUVIN DE LA ROCHE- HOUFANI , avocat au barreau de PARIS, vestiaire #L0089

CPAM DES [Localité 4] venant au droit du RSI BRET...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :

19ème chambre civile


N° RG 22/11266

N° MINUTE :

Assignation du :
15 et 16 Septembre 2022

CONDAMNE

ON

JUGEMENT
rendu le 21 Mai 2024
DEMANDEUR

Monsieur [U] [J]
[Adresse 2]
[Adresse 2]

représenté par Maître Colin LE BONNOIS de la SELARL Cabinet Rémy LE BONNOIS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #L0299

DÉFENDEURS

BPCE ASSURANCES IARD
[Adresse 3]
[Adresse 3]

représentée par Maître Myriam HOUFANI de la SELARL CHAUVIN DE LA ROCHE- HOUFANI , avocat au barreau de PARIS, vestiaire #L0089

CPAM DES [Localité 4] venant au droit du RSI BRETAGNE
[Adresse 1]
[Adresse 1]

non représentée

Décision du 21 Mai 2024
19ème chambre civile
N°RG 22/11266

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Monsieur Olivier NOËL, Vice-Président
Président de la formation

Madame Emmanuelle GENDRE, Vice-Présidente
Madame Mabé LE CHATELIER, Magistrate à titre temporaire
Assesseurs

Assistés de Madame Célestine BLIEZ, greffière, lors des débats et au jour de la mise à disposition.

DEBATS

A l’audience du 12 Mars 2024 présidée par Olivier NOËL, tenue en audience publique, avis a été donné aux parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 21 Mai 2024.

JUGEMENT

- Réputé contradictoire
- En premier ressort
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE

Le 19 juin 2015, [U] [J] circulait à moto sur la commune de [Localité 5] avec Madame [R] [C] en qualité de passagère lorsqu’ils ont été percutés par le véhicule de Mme [S] [O], assurée par la BPCE Assurances.
[U] [J], de même que sa compagne [R] [C], ont été secourus par le SAMU et transportés par les pompiers à l’hôpital [6] à [Localité 7], où Monsieur [J] a séjourné du 29 juin au 3 juillet 2015.
Les lésions initiales suivantes ont été décrites ainsi : « présente les lésions suivantes : traumatisme =
- Rachidien
-Thoracique
-Hépatique
-Surrénalien.
Son état de santé nécessite une ITT de 120 jours sauf complications à dater du 19/06/2015 »

Par un jugement rendu en date du 15 novembre 2017, le TGI de SAINT MALO a estimé que : « Il résulte de l’ensemble des éléments sus-évoqués que l’accident dont a été victime [U] [J] au volant de sa moto, s’est produit alors qu’il roulait dans un virage à gauche, à une vitesse excessive (au lieu de son bord droit), que son comportement fautif a donc contribué à son dommage. Par conséquent, eu égard à l’importance de la faute commise par M. [J], il convient de limiter son droit à réparation à 30 %. »

Par arrêt rendu en date du 9 mars 2022, la Cour d’Appel de RENNES a infirmé la décision déférée et jugé que Monsieur [J] avait droit à réparation intégrale de ses préjudices.

Monsieur [J] a fait l'objet d'un examen médical amiable post consolidation dont les conclusions sont les suivantes :
« ▪ Blessures :
- Une contusion dorsale avec fracture épineuse de T3 à T4, une fracture du corps vertébral de T5 associée à une atteinte des pédicules postérieurs droit et gauche sans signe d’instabilité, une fracture tassement de T6 avec fracture de l’apophyse transverse, une fracture des apophyses transverses droites en T7, T8 et T9
- Une contusion thoracique avec une fracture de l’arc postérieur des 10ème, 11ème et 12ème cotes droites, un pneumothorax droit avec une contusion gauche
- Une contusion abdominale avec un volumineux hématome de la surrénale droite
▪ DFT du 19 juin 2015 au 15 septembre 2015 et du 8 au 12 janvier 2017
▪ DFTP à 50% pendant trois mois du 15 septembre 2015 au 15 décembre 2015
▪ DFTP à 25% jusqu’au 15 septembre 2017, date de la consolidation
▪ Tierce personne temporaire :
- 01h00 par jour pendant trois mois du 15 septembre 2015 au 15 décembre 2015
- 05h00 par semaine du 16 décembre 2015 au 15 mars 2016
▪ Arrêt de travail jusqu’à la date de consolidation du 15 septembre 2017
▪ Consolidation : 15 septembre 2017
▪ AIPP : 20% (soit de l’ordre de 11% sur le plan orthopédique et de 9% sur le plan psychiatrique)
▪ Souffrances endurées : 4 sur 7
▪ Préjudice esthétique définitif : 2 sur 7
▪ Préjudice d’agrément : contre-indication pour la pratique du motocross et du quad de cross. Pratique restreinte de la moto et du jardinage
▪ Préjudice professionnel : Inapte au métier de menuisier. Une reconversion est nécessaire. »

Au vu de ce rapport, par acte du 15 et 16 septembre 2022 assignant la BPCE ASSURANCES S.A. et la CPAM DES [Localité 4] venant au droit du RSI BRETAGNE, auquel il est référé expressément conformément aux dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile, Monsieur [U] [J] demande au Tribunal de :

Juger [U] [J] recevable et bien fondée en toutes ses demandes, fins et conclusions ;
Condamner la BPCE ASSURANCES à verser à [U] [J] les sommes suivantes :
o 4 980 € au titre des frais divers ;
o 10 032 € au titre de l’assistance par tierce personne temporaire ;
o 21 571,68 € au titre des PGPA ;
o 688 832 € au titre des PGPF ;
o 50 000 € au titre de l’incidence professionnelle ;
o 8 955 € au titre du déficit fonctionnel temporaire ;
o 51 200 € au titre du déficit fonctionnel permanent ;
o 30 000 € au titre des souffrances endurées ;
o 1 000 € au titre du préjudice esthétique temporaire ;
o 4 000 € au titre du préjudice esthétique permanent ;
o 15 000 € au titre du préjudice d’agrément ;
Condamner la BPCE ASSURANCES à verser à Monsieur [U] [J] la somme de 6.000 € en application des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile
Condamner la BPCE ASSURANCES aux entiers dépens.
Dire que dans l’hypothèse où, à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par le présent jugement, l’exécution forcée serait réalisée par l’intermédiaire d’un huissier, le montant des sommes retenues par l’huissier en application du tarif des huissiers devra être supporté par la BPCE ASSURANCES en sus de l’article 700 du CPC.
Déclarer le présent arrêt commun à la CPAM des [Localité 4].

Aux termes de leurs dernières écritures signifiées le 28 juin 2023, auxquelles il est référé expressément conformément aux dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile, la SA BPCE ASSURANCES IARD demande au Tribunal de :

Fixer le préjudice de Monsieur [J] de la façon suivante :
3 240 € au titre des frais divers ;
2 567 € au titre de la tierce personne temporaire ;
12 718,68 € au titre de la perte de gains professionnels actuels ;
20 000 € au titre de l’incidence professionnelle ;
7 425 € au titre du déficit fonctionnel temporaire ;
69 000 € au titre du déficit fonctionnel permanent ;
15 000 € au titre des souffrances endurées ;
1 000 € au titre du préjudice esthétique temporaire ;
3 000 € au titre du préjudice esthétique permanent ;
3 000 € au titre du préjudice d’agrément.
Débouter Monsieur [J] de sa demande au titre des PGPF,
Déduire des indemnités qui seront allouées à Monsieur [J] les provisions d’ores et déjà versées d’un montant total de 102.100€,
Limiter l’indemnisation au titre de l’article 700 du CPC,
Statuer ce que de droit sur les dépens.

La clôture de la procédure a été prononcée le 19 janvier 2024. L’affaire a été évoquée à l’audience du 12 mars 2024 et mise en délibéré au 21 mai 2024.

La CPAM des [Localité 4], régulièrement assignée, n'ayant pas constitué avocat, le présent jugement susceptible d'appel, sera réputé contradictoire à l'égard de toutes les parties.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le droit à indemnisation

Sur le fondement de la loi du 5 juillet 1985, la SA BPCE ASSURANCES IARD ne conteste plus le droit à indemnisation de Monsieur [U] [J] et sera tenue de réparer son entier préjudice comme indiqué dans l’arrêt de la Cour d’appel de RENNES cité ci-dessus.

Réalisé dans un cadre amiable, le rapport d’expertise précité, présente un caractère complet, informatif et objectif. Il est corroboré par d’autres pièces médicales et la défenderesse, appelée à la procédure en un temps lui permettant d’en discuter librement les conclusions, n’y apporte aucune critique fondamentale.

Dès lors, ce rapport apporte un éclairage suffisant pour statuer sur les demandes d’indemnisation.

Sur l'évaluation du préjudice

Au vu de l'ensemble des éléments produits aux débats, le préjudice subi par Monsieur [U] [J], âgé de 33 ans et exerçant la profession de menuisier lors des faits, sera réparé ainsi que suit, étant observé qu'en application de l'article 25 de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006, d'application immédiate, le recours subrogatoire des tiers payeurs s'exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'ils ont pris en charge.

Il sera utilisé le barème de capitalisation 2020 publié dans la Gazette du Palais, le mieux adapté aux données sociologiques et économiques actuelles, à savoir celui fondé sur les tables d'espérance de vie définitive les plus récentes publiées par l'INSEE et sur un taux d'intérêt de 0 %.

Il sera indiqué que les indemnisations dues seront calculées au regard des pièces effectivement communiquées au Tribunal, qu’en l’espèce le demandeur n’a remis à la juridiction que les 15 premières pièces visées par son bordereau de communication de pièces, que seules ces 15 pièces seront donc prises en compte, le surplus étant inconnu du Tribunal.

– PREJUDICES PATRIMONIAUX

- Assistance tierce personne

Il convient d'indemniser les dépenses destinées à compenser les activités non professionnelles particulières qui ne peuvent être assumées par la victime directe durant sa maladie traumatique, comme l'assistance temporaire d'une tierce personne pour les besoins de la vie courante, étant rappelé que l’indemnisation s'entend en fonction des besoins et non en fonction de la dépense justifiée. Le montant de l'indemnité allouée au titre de l'assistance d'une tierce personne ne saurait être subordonné à la production de justificatifs des dépenses effectives.

L’expertise indique que sont utiles une heure par jour pendant trois mois du 15 septembre 2015 au 15 décembre 2015 puis 5 heures par semaine du 16 décembre 2015 au 15 mars 2016.

Sur la base d’un taux horaire de 17 euros, s’agissant d’une aide non professionnelle et non médicalisée et n’ayant pas donné lieu à facturation, il sera accordé :
(1 heure x 17 € x 91 jours) + (5 h x 17 € x 13 semaines) = 2.652 €
- Perte de gains professionnels avant consolidation

Il s'agit de compenser les répercussions de l'invalidité sur la sphère professionnelle de la victime jusqu'à la consolidation de son état de santé. L'évaluation de ces pertes de gains doit être effectuée in concreto au regard de la preuve d'une perte de revenus établie par la victime jusqu'au jour de sa consolidation, à savoir jusqu'au 15 septembre 2017.

Il était menuisier à son compte et exerçait seul son activité au sein d’une EURL. Les experts ont indiqué qu’il était « Inapte au métier de menuisier. Une reconversion est nécessaire. »
Il serait à ce jour radié du Registre du commerce (à noter la pièce n°16 , qui attesterait de cette radiation, n’est pas versée dans le dossier du Tribunal- de même que les pièces suivantes- pièces qui semblent cependant connues de la défenderesse).

C’est par erreur que Monsieur [J] croit pouvoir indiquer que les PGPA devrait se calculer sur la base d’un salaire annuel moyen de 16.000 €, soit 1.330 € par mois alors même que ses revenus ont été les suivants, selon ses propres avis d’imposition, pour les temps précédant l’accident :
• 15 528 € en 2012 ;
• 7 092 € en 2013 ;
• 13 457 € en 2014 ;
• 12 091 € en 2015.
Jamais le montant de 16.000 € n’a été atteint. Il n’est pas sérieux de prétendre intégrer les bénéfices non distribués de l’EURL alors même que l’assureur, pièce 4 de cette partie, démontre, en produisant la fiche info greffe de cette EURL que, dès 2013, la situation de cette entreprise était des plus fragile puisque l’activité se poursuivait « malgré un actif net devenu inférieur à la moitié du capital social », capital qui est de 500 €.

En conséquence, et conformément à la jurisprudence de ce Tribunal qui essaie de se rapprocher au plus près de la réalité économique des parties, il sera calculé le revenu moyen du demandeur sur la base des trois dernières années de revenus avant l’accident et le revenu annuel moyen est donc de 12.025 €, soit 1.002 € par mois.

L’indemnisation due sera donc calculée au regard du montant des salaires qui auraient dû être perçus moins le montant des indemnités journalières effectivement reçues soit :
(1.002 € x 27 mois) – 14.338,32 € = 12.718,68 €.

L’indemnisation due à ce titre sera donc fixée à 12.718,68 €.

- Perte de gains professionnels future

Ce poste indemnise la victime de la perte ou de la diminution de ses revenus consécutive à l'incapacité permanente à laquelle elle est confrontée du fait du dommage dans la sphère professionnelle après la consolidation de son état de santé.

Monsieur [J] a été invité par les experts à se reconvertir. Il n’a jamais été déclaré inapte à toute activité professionnelle ;

Or, le demandeur ne démontre pas qu’il aurait effectué la moindre formation ou même seulement démarche en vue d’une reconversion professionnelle, il ne démontre pas plus qu’il serait inscrit à Pôle emploi puisqu’il n’a pas communiqué au Tribunal la pièce 17 qui n’est donc qu’alléguée.

Il sera rappelé que le DFP n’est que de 20 % (11 % sur le plan orthopédique et 9 % sur le plan psychiatrique), que Monsieur [J] est un homme jeune, de 36 ans à la date de consolidation, qu’il apparaît que, contrairement à ses affirmations selon lesquelles il n’aurait pas repris d’activité et percevrait le RSA uniquement, il a indiqué au Docteur [L], sapiteur spécialisé en psychiatrie, lors de son examen le 10 janvier 2018 (avis annexé au rapport du Docteur [X], pièce demandeur n° 4) : « Avec sa fougue et ses mots à lui, Monsieur N. [J] dit qu’il est dans un état d’esprit de marche ou crève, qu’il lui faut de l’énergie pour faire marcher sa petite entreprise. »
La création de cette entreprise est corroborée par les déclarations de Monsieur [J] lors de l’expertise architecturale de Monsieur [E], expert désigné par le Tribunal en vue d’examiner les besoins de Madame [R] [C], passagère transportée de la motocyclette conduite par Monsieur [J] (Page 11). En effet, aux termes de la note aux parties n° 1 rédigée par l’expert précitée le 2 novembre 2019, reprenant les constatations et discussions réalisées lors d’une réunion d’expertise qui s’est déroulée le vendredi 18 octobre 2019, Monsieur [U] [J] s’est présenté comme le maître d’ouvrage en charge de la construction de la maison de Madame [R] [C] (page 5 de la pièce défendeur n° 3).
Ainsi, il apparaît que Monsieur [J] a repris une activité professionnelle, qu’il présente des écritures qui ne sont pas conformes à la réalité puisqu’il occulte les revenus qu’il tirerait de cette entreprise et que, ce faisant, il empêche le Tribunal d’apprécier avec exactitude sa situation.
Cette attitude, soulignée par la partie défenderesse qui aurait pu évoquer une loyauté défaillante des échanges entre les parties, est confortée par une absence de communication des éléments fiscaux d’appréciation de la situation financière du demandeur après la date de consolidation.

Dans ces conditions, et au regard du manque de fiabilité des informations communiquées par le demandeur, cette demande sera rejetée, Monsieur [J] ayant succombé dans son obligation d’apporter les éléments prouvant le bien fondé de ses prétentions.

- Incidence professionnelle

Ce poste d'indemnisation a pour objet d'indemniser les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle comme le préjudice subi par la victime en raison de sa dévalorisation sur le marché du travail, de sa perte d'une chance professionnelle, ou de l'augmentation de la pénibilité de l'emploi qu'elle occupe imputable au dommage ou encore du préjudice subi qui a trait à sa nécessité de devoir abandonner la profession qu'elle exerçait avant le dommage au profit d'une autre qu'elle a dû choisir en raison de la survenance de son handicap.

Ce poste indemnise également la perte de retraite que la victime va devoir supporter en raison de son handicap, c'est-à-dire le déficit de revenus futurs, estimé imputable à l'accident, qui va avoir une incidence sur le montant de la pension auquel pourra prétendre la victime au moment de sa prise de retraite.

Dans la présente espèce, il est sollicité une somme de 50.000 € en faisant valoir que Monsieur [J] ne participe pas à la vie active et sociale qu’apporte une activité professionnelle, que de plus il était passionné par sa profession de menuisier qu’il a été contraint d’abandonner.

Il est offert 20.000 € par l’assureur qui souligne que la demande apparaît liée à une perte de qualité de vie qui ne relève pas de ce chef de préjudice, mais retient la pénibilité pour accorder le montant offert.

Il sera rappelé qu’il a été démontré que Monsieur [J] ne paraît pas avoir cessé toute activité professionnelle, que ce faisant il ne peut se prévaloir que de la pénibilité que lui reconnaît son adversaire et la contrainte que constitue l’obligation de se reconvertir, soulignée dans l’expertise, et que constate le Tribunal.

Ainsi il sera dû à ce titre une somme de 30.000 € à titre d’indemnisation.

- Frais divers

L'assistance de la victime lors des opérations d'expertise par un, ou des, médecin conseil en fonction de la complexité du dossier, en ce qu'elle permet l'égalité des armes entre les parties à un moment crucial du processus d'indemnisation, doit être prise en charge dans sa totalité.
Il est sollicité à ce titre 4.980 € et offert 3.240 €.

La pièce n°5 regroupe les différentes factures dont il convient de faire le total en constatant ainsi que le total se fixe à : 600 + 600 + 840 + 1200 + 1740 = 4.980 €.

– PRÉJUDICES EXTRA-PATRIMONIAUX

- Préjudices extra-patrimoniaux temporaires

- Déficit fonctionnel temporaire

Ce poste de préjudice indemnise l'invalidité subie par la victime dans sa sphère personnelle pendant la maladie traumatique. Le déficit fonctionnel temporaire inclut pour la période antérieure à la date de consolidation, l'incapacité fonctionnelle totale ou partielle ainsi que le temps d'hospitalisation et les pertes de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique.

L’expert retient les éléments suivants : le DFT a été total du 19 juin 2015 au 15 septembre 2015 et du 8 au 12 janvier 2017, puis partiel à 50% pendant trois mois du 15 septembre 2015 au 15 décembre 2015 et pour finir à 25% jusqu’au 15 septembre 2017, date de la consolidation.

Sur la base d’une indemnisation de 27 € par jour pour un déficit total, les troubles dans les conditions d'existence subis par Monsieur [J] jusqu'à la consolidation, justifient l'octroi d'une somme de : (93 j x 27 €) + (91 j x 27€) / 2 + (634 j x 27€) /4 = 8.019 €.

- Souffrances endurées

Il s'agit de toutes les souffrances physiques et psychiques, ainsi que des troubles associés, que doit endurer la victime durant la maladie traumatique, c'est-à-dire du jour de l'accident à celui de sa consolidation. A compter de la consolidation, les souffrances endurées vont relever du déficit fonctionnel permanent et seront donc indemnisées à ce titre.

En l'espèce, elles sont caractérisées par le traumatisme initial et les traitements subis, s’agissant notamment d’un traumatisme de la colonne vertébrale avec fractures, d’un traumatisme abdominal avec hématome du foie ayant entraîné une hospitalisation de plus de trois mois, outre, le retentissement psychiatrique.

Cotées à 4/7 par l’expert, elles seront réparées par l'allocation de la somme de 15.000 €.

- Préjudice esthétique temporaire

Les parties s’accordent pour fixer l’indemnisation à ce titre à 1.000 €, somme qui sera donc retenue.

- Préjudices extra-patrimoniaux permanents

- Déficit fonctionnel permanent

Ce préjudice a pour composante les atteintes aux fonctions physiologiques de la victime, les douleurs qui persistent depuis la consolidation, la perte de la qualité de la vie et les troubles définitifs apportés à ces conditions d'existence.

La victime souffrant d’un déficit fonctionnel permanent évalué à 20 % (et non 30 % comme indiqué à tort par l’assureur) par l’expert compte-tenu des séquelles relevées et étant âgée de 35 ans lors de la consolidation de son état, il lui sera alloué une indemnité de 51.200 € calculée selon une valeur du point d’incapacité de 2.560 € au regard de l’âge à la consolidation et du taux de déficit retenu.

- Préjudice esthétique permanent

Fixé à 2/7, à raison de l’aspect des cicatrices et de la statique rachidienne, il justifie l'octroi de la somme de 3.000 €.

- Préjudice d'agrément

Ce préjudice vise exclusivement à réparer le préjudice spécifique “lié à l’impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité spécifique, sportive ou de loisirs”. La jurisprudence des cours d’appel ne limite pas l’indemnisation du préjudice d’agrément à l’impossibilité de pratiquer une activité sportive ou de loisirs exercée antérieurement à l’accident. Elle indemnise également les limitations ou les difficultés à poursuivre ces activités.

Les experts ont indiqué une contre-indication pour la pratique du moto-cross et au quad-cross. Monsieur [J] sollicite à ce titre une somme de 15.000 €. L’assureur indique qu’il pourrait accorder à ce titre une somme de 3.000 €.

Il sera indiqué que le dossier remis au Tribunal ne comprend pas toutes les pièces indiquées dans le bordereau de communication de pièces puisqu’au lieu de 18 pièces ne sont communiquées que les 15 premières et, notamment, pas la pièce 18 qui serait composée d’attestations dont l’assureur a eu connaissance.

Le Tribunal, qui n’a pas eu le loisir de consulter cette pièce, retiendra en conséquence une indemnisation à hauteur de ce qui est offert, soit 3.000 €.

Sur le débiteur de l'indemnisation

Il résulte de la l’arrêt de la Cour d’appel de RENNES que l'indemnisation de la victime d'un accident de la circulation dans lequel est impliqué un véhicule terrestre à moteur ne peut être fondée que sur les dispositions de la loi du 5 juillet 1985. Dès lors, en vertu de l'application combinée des articles 1er de ce texte et L 211-9 et suivants du code des assurances, le seul débiteur de l'indemnisation est la SA BPCE ASSURANCES IARD, assureur du véhicule impliqué dans la survenance de l'accident.

Sur les demandes accessoires

La SA BPCE ASSURANCES IARD, qui succombe en la présente instance, sera condamnée aux dépens.

En outre, elle devra supporter les frais irrépétibles engagés par Monsieur [J] dans la présente instance et que l'équité commande de réparer à raison de la somme de 2.000 €.

Par contre, rien ne justifie de faire exception aux règles de tarification des émoluments des huissiers de justice en matière d'exécution forcée en application de l'article 10 du décret du 12 décembre 1996.

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL,

Statuant publiquement, par jugement mis à disposition au greffe, réputé contradictoire et en premier ressort,

VU l’arrêt rendu en date du 9 mars 2022 de la Cour d’Appel de RENNES,

RAPPELLE que le droit à indemnisation de Monsieur [U] [J] des suites de l’accident de la circulation en date du 19 juin 2015 est entier ;

CONDAMNE la SA BPCE ASSURANCES IARD à payer à Monsieur [U] [J] les sommes suivantes, à titre de réparation de son préjudice corporel, en deniers ou quittances, provisions non déduites, en réparation des préjudices suivants :

o au titre des frais divers : 4.980 €
o au titre de l’assistance par tierce personne temporaire : 2.652 €
o au titre des PGPA : 12.718,68 €
o au titre de l’incidence professionnelle : 30.000 €
o au titre du déficit fonctionnel temporaire : 8.019 €
o au titre du déficit fonctionnel permanent : 51.200 €
o au titre des souffrances endurées : 15.000 €
o au titre du préjudice esthétique temporaire : 1.000 €
o au titre du préjudice esthétique permanent : 3.000 €
o au titre du préjudice d’agrément : 3.000 € ;

DÉBOUTE Monsieur [U] [J] de sa demande au titre des Pertes de gains professionnels futures ;

DÉCLARE le présent jugement commun à la CPAM des [Localité 4] ;

REJETTE la demande relative à la prise en charge exclusive du débiteur des frais d'exécution forcée ;

CONDAMNE la SA BPCE ASSURANCES IARD aux dépens et à payer à Monsieur [U] [J] la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Fait et jugé à Paris le 21 Mai 2024

Le GreffierLe Président
Célestine BLIEZOlivier NOËL


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 19ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/11266
Date de la décision : 21/05/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 02/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-21;22.11266 ?
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