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21/05/2024 | FRANCE | N°21/01545

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 19eme contentieux médical, 21 mai 2024, 21/01545


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

19ème contentieux médical

N° RG 21/01545

N° MINUTE :

Assignations des :
25 et 28 Janvier 2021

REJETTE

PLL





JUGEMENT
rendu le 21 Mai 2024



DEMANDERESSE

Madame [O] [M]
[Adresse 1]
[Localité 5]

Représentée par Maître Anne-Laure TIPHAINE, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #A0251 et par la SELARL COUBRIS, COURTOIS & Associés agissant par Maître Jean-Christophe COUBRIS, avocat au Barreau de BORDEAUX, avocat plaidant

FENDERESSES

L’OFFICE NATIONAL D’INDEMNISATION DES ACCIDENTS MÉDICAUX (ONIAM)
[Adresse 11]
[Adresse 11]
[Localité 6]

Représenté par la SCP UGGC Avocats agiss...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

19ème contentieux médical

N° RG 21/01545

N° MINUTE :

Assignations des :
25 et 28 Janvier 2021

REJETTE

PLL

JUGEMENT
rendu le 21 Mai 2024

DEMANDERESSE

Madame [O] [M]
[Adresse 1]
[Localité 5]

Représentée par Maître Anne-Laure TIPHAINE, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #A0251 et par la SELARL COUBRIS, COURTOIS & Associés agissant par Maître Jean-Christophe COUBRIS, avocat au Barreau de BORDEAUX, avocat plaidant

DÉFENDERESSES

L’OFFICE NATIONAL D’INDEMNISATION DES ACCIDENTS MÉDICAUX (ONIAM)
[Adresse 11]
[Adresse 11]
[Localité 6]

Représenté par la SCP UGGC Avocats agissant par Maître Sylvie WELSCH, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0261

La CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE [Localité 8]
[Adresse 2]
[Localité 4]

Non représentée

Expéditions
exécutoires
délivrées le :

Décision du 21 Mai 2024
19ème contentieux médical
RG 21/01545

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Monsieur Pascal LE LUONG, Premier Vice-Président
Madame Laurence GIROUX, Vice-Présidente
Monsieur Maurice RICHARD, Magistrat honoraire

Assistés de Madame Erell GUILLOUËT, Greffière, lors des débats et au jour de la mise à disposition au greffe.

DEBATS

A l’audience du 11 Mars 2024 présidée par Monsieur LE LUONG tenue en audience publique, avis a été donné aux parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 21 Mai 2024.

JUGEMENT

- Réputé contradictoire
- En premier ressort
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE

Madame [O] [M], née le [Date naissance 3] 1982, assistante de direction au secrétariat du CE de Radio France, s’est vue prescrire, en 2001, pour la première fois, une contraception, à l’âge de 19 ans. Le 11 septembre 2001, le Dr [K]-[N], gynécologue, avait ainsi procédé à la pose d’un stérilet (IMPLANON), pour une durée de trois ans. Le 17 septembre 2004, cet implant avait été remplacé par un second, pour la même durée. Ce moyen contraceptif avait été parfaitement toléré par Mme [O] [M] et n’avait occasionné aucune aggravation de ses crises migraineuses.

Le 17 septembre 2007, lors de sa consultation avec le Docteur [K]-[N], la jeune femme, âgée alors de 25 ans, avait néanmoins émis des craintes quant à de potentiels effets de ce mode de contraception. Il lui semblait alors, au regard de ce qu’elle avait pu entendre dire sur le sujet, que le recul des connaissances concernant les implants n’était sans doute pas suffisant. Le Docteur [K]-[N] avait ainsi prescrit la pilule JASMINELLE® à sa patiente.

Le 27 octobre suivant, Mme [M] s’était fait délivrer ce contraceptif en pharmacie. Elle avait débuté, dans le même temps, la prise de ce contraceptif et avait accusé, quelques jours plus tard, de très fortes crises migraineuses. Le 4 novembre 2007, vers 4 heures du matin, elle avait soudainement présenté, en per-coïtal, une aphasie (mutisme) associée à une parésie brachio-faciale droite. A 11h30, à son réveil et devant la persistance des symptômes, son compagnon avait alerté les secours. Admise dans le service de neurologie du Centre hospitalier [10], les examens réalisés avaient permis d’objectiver l’existence d’un accident ischémique récent dans le territoire superficiel de l’artère cérébrale moyenne gauche, avec occlusion de la distalité de M1 gauche, sans stigmate hémorragique.

L’échocardiographie par voie trans-thoracique et trans-oesophagienne avait mis en évidence un foramen ovale perméable (FOP) à la manœuvre de Valsalva sans anévrisme du septum interauriculaire.

Le 15 novembre 2007, à la sortie de l’hôpital, Mme [O] [M] présentait toujours une aphasie sévère, associée à des troubles de compréhension. Si le déficit moteur du membre supérieur droit était partiellement récupéré, le champ visuel était décrit comme toujours difficile à explorer du fait des troubles de compréhension. Mme [M] avait regagné son domicile, bénéficiant d’un suivi dans le service de neurologie du Centre hospitalier [10] et d’une prise en charge orthophonique.

Le 2 janvier 2010, elle avait présenté une crise d’épilepsie, envisagée initialement comme une récidive d’AVC, pour laquelle elle avait été traitée et hospitalisée trois jours au Centre hospitalier de [Localité 9].
Quelques mois plus tard, au cours de la surveillance par IRM, il avait été découvert un anévrisme carotido ophtalmique gauche asymptomatique qui avait été pris en charge par voie intra-artérielle en juin 2011, au CHU de [Localité 7].

Elle saisissait la commission de conciliation et d’indemnisation (CCI) d’Ile de France qui désignait un expert : le docteur Docteur [X] [G], Neurologue, ainsi que le Pr [D]-[E] [W], Pharmacologue, afin de déterminer les causes et les conséquences de l’AVC dont elle avait été victime en novembre 2007 ainsi que les éventuelles responsabilités encourues.

Aux termes du rapport remis le 21 juillet 2017, celui-ci relevait notamment que l’association tabac-pilule est fréquemment retrouvée comme facteur de risque déterminant dans la genèse des AVC chez la femme jeune. Ces facteurs de risque ont favorisé la formation d’un thrombus chez une patiente présentant une prédisposition anatomique : un foramen ovale perméable. La pilule œstroprogestative, d’emblée mal tolérée au plan neurologique (survenue de céphalées) a donc contribué à la survenue de cet accident vasculaire même si elle n’en est pas le déterminant exclusif. Compte-tenu de l’existence préalable d’un foramen ovale perméable et des autres facteurs de risque associés, nous estimons que la contraception œstroprogestative a contribué pour 20 % à la survenue de son AVC »

La Commission s’est réunie le 4 octobre 2017. Dans son avis, elle a estimé regrettable que les premiers experts n’aient pas fait appel à un sapiteur gynécologue pour aborder le dossier sous l’angle gynécologique. Elle a ainsi ordonné une contre-expertise pour éclairer plusieurs points, notamment sur les alternatives à la contraception par pilule œstroprogestative et sur le degré d’information dont Mme [M] avait bénéficié de la part de son gynécologue.

La CCI a missionné le Pr [X] [C], Gynécologue obstétricien, et le Docteur [V] [L], Neurologue, pour mener à bien cette nouvelle mission. Les opérations d’expertise se sont tenues le 17 avril 2018 et les experts ont déposé leur rapport le 20 juin 2018, aux termes duquel ils ont conclu : « Le comportement de Madame le Docteur [K] [N] a été conforme aux règles de l’art et aux données acquises de la science à l’époque du fait générateur. Compte tenu de la pluralité des causes pouvant rendre compte de l’infarctus sylvien gauche (foramen ovale perméable ; tabagisme ; contraception orale ; addiction au cannabis), on peut évaluer la contribution de la contraception orale à 20% dans survenue de l’infarctus sylvien gauche».

La CCI s’est de nouveau réunie le 20 septembre 2018. L’avis rendu a cependant rejeté la demande d’indemnisation présentée par Mme [O] [M]. La Commission a considéré que : « La responsabilité du praticien et du fabricant mis en cause n’étant pas engagée et le dommage ne remplissant pas les conditions ouvrant droit à réparation par l’ONIAM au titre de la solidarité nationale, la demande d’indemnisation présentée par Madame [M] ne peut être accueillie ».

Par actes des 25 et 28 janvier 2021, Mme [O] [M] a assigné l’ONIAM ainsi que la CPAM de [Localité 8] aux fins d’obtenir l’indemnisation par la solidarité nationale de l’ensemble de ses préjudices en lien avec l’AVC dont elle a été victime le 4 novembre 2007.

Elle estime que son action n’est pas prescrite et que l’ONIAM devra être tenu d’indemniser Mme [M] de ses préjudices en lien avec l’accident médical non fautif dont elle a été victime, toute faute du laboratoire BAYER ou du Docteur [K]-[N] ayant été écartée par les experts, dans la mesure où les critères de gravité et donc d’intervention de l’ONIAM seraient réunis et qu’il y a un lien de causalité direct et certain entre la prise du contraceptif JASMINELLE® et la survenue de l’AVC dont a été victime Mme [M] en novembre 2007.

Les derniers experts retenaient les postes de préjudice suivants :

Infarctus dans le territoire superficiel de l’artère cérébrale moyenne gauche ;

Consolidation : 4 janvier 2010 ;

Le dommage subi constitue pour 20 %, un évènement indésirable d’une contraception orale.

- Préjudices patrimoniaux avant consolidation :

Frais divers : nécessité d’une aide humaine de 2 heures par semaine pour aide dans la gestion administrative et financière.

- Préjudices extra patrimoniaux avant consolidation :

Déficit fonctionnel temporaire total : du 04/11/2007 au 15/11/2007 puis du 02/01/2010 au 04/01/2010,
Déficit fonctionnel temporaire partiel : 40% : du 16/11/2007 au 01/01/2010,
Souffrances endurées :3 /7,
Préjudice esthétique temporaire : 1,5/7,

- Préjudices permanents après consolidation :

Préjudices patrimoniaux :

Tierce personne : 2H/semaine,
PGPF : et incidence professionelle : oui

Préjudices extra patrimoniaux :

Deficit fonctionnel permanent : 20 %,
Préjudice esthétique permanent : 0,5/7 ,
Préjudice sexuel : aucun
Préjudice d’établissement : non,
Préjudice d’agrément : non.

Elle demande au tribunal de :

- CONSTATER qu’elle a été victime, dans les suites de la prise de la pilule contraceptive JASMINELLE ® d’un accident vasculaire cérébral survenu le 4 novembre 2007,

- CONSTATER que cet accident vasculaire cérébral constitue un accident médical non fautif dont les conséquences doivent être intégralement réparées par l’ONIAM au titre de la solidarité nationale,
- CONDAMNER par conséquent l’ONIAM à verser à Mme [M], au titre de cet accident médical non fautif, des sommes non inférieures à :

• Sur les préjudices temporaires :

Dépenses de santé actuelles ………………………143 € sauf Mémoire
Frais divers ..……………………….……… 33 967,92 € sauf Mémoire
Perte de gains professionnels actuels…………………… 31 776,40 €
Déficit fonctionnel temporaire. ..……………………….. 10 941 €
Souffrances endurées ……………………….………… 25 000 €
Préjudice esthétique temporaire …………………………. 4 000 €

• Sur les préjudices permanents :

Dépenses de santé futures ……………………. 202,50 € sauf Mémoire
Perte de gains professionnels futurs……………………1 078 428,37 €
Incidence professionnelle …………………………………. 100 000 €
Tierce personne permanente ……………………………. 427 156,50 €
Déficit fonctionnel permanent …………………………….. 62 000 €
Préjudice d’agrément ……………………………………… 40 000 €
Préjudice sexuel …………………………………………… 60 000 €
Préjudice d’établissement………………………………… 40 000 €

TOTAL …….. 1 913 615,69 € sauf Mémoire

- ASSORTIR les indemnités dues des intérêts à compter du jour de l'introduction de la demande devant le tribunal de céans,
- RAPPELER l'exécution provisoire de droit du jugement à intervenir, en application de l’article 514 du Code de procédure civile,
- DECLARER le jugement à intervenir commun à la CPAM de [Localité 8],
DEBOUTER les défendeurs de toutes demandes contraires, en ce compris de la demande d’expertise judiciaire formulée par l’ONIAM,
- CONDAMNER l’ONIAM à verser à Mme [O] [M] la somme de 6 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- Le condamner aux entiers dépens.

Par dernières conclusions signifiées par voie électronique le 17 mars 2023, l’ONIAM estime que Madame [M] présentait d’importants facteurs de risques indépendants de présenter un AVC en dehors de toute prise de contraceptif du fait de sa malformation cardiaque, de son intoxication au tabac, au cannabis et de ses migraines qui sont des facteurs. Dès lors, il n’existe pas de lien de causalité direct et certain entre l’AVC et la prise du contraceptif et qu’au-delà de ces facteurs de risques indépendants de présenter un accident vasculaire cérébral, il apparait en outre que la prise du contraceptif était contre-indiquée dans le cas de Madame [M] ce qui ressort expressément de la notice de Jasminelle®.

Que le lien de causalité entre l’accident survenu et le médicament Jasminelle® pris isolément n’est pas établi et que Madame [M] présentait en revanche de nombreux facteurs de risques de survenue d’un AVC indépendamment du contraceptif litigieux.

L’ONIAM demande au tribunal de :

À titre principal,

Constater, dire et juger qu’aucun lien de causalité direct et certain entre la prise du contraceptif et la survenue de l’accident vasculaire cérébral n’est démontré ;

Subsidiairement, si par impossible un tel lien devait être retenu, il est nécessaire au préalable de s’interroger sur la responsabilité du Laboratoire BAYER ;

En conséquence,

Dire et juger que les conditions ouvrant droit à une indemnisation au titre de la solidarité nationale ne sont pas réunies,
Débouter Madame [O] [M] de ses demandes en ce qu’elles sont formulées à l’encontre de l’ONIAM,

À titre subsidiaire,

Ordonner une expertise complète contradictoire à l’ensemble des parties en cause, en tout état de cause,

Débouter Madame [O] [M] de sa demande formulée au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Débouter Madame [O] [M] de toute autre demande,
Statuer ce que de droit sur les dépens.

La CPAM de [Localité 8], régulièrement assignée, n’a pas consitué avocat.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties quant à l'exposé détaillé de leurs prétentions et moyens.

La décision sera réputée contradictoire.

L’ordonnance de clôture était rendue le 23 octobre 2023 et l’audience de plaidoiries se tenait le 11 mars 2024. La décision était mise en délibéré au 21 mai 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les conditions permettant l’ouverture d’un droit à indemnisation par la solidarité nationale confiée à l’ONIAM

Il convient de rappeler que la loi du 4 mars 2002 a introduit dans le code de la santé publique un système de réparation des risques sanitaires en distinguant, d’une part, ce qui relève de la responsabilité pour faute des professionnels de santé et, d’autre part, ce qui relève de la solidarité nationale.

Conformément aux dispositions de l’article L. 1142-1 II du code de la santé publique, un accident médical ne peut ouvrir droit à une indemnisation au titre de la solidarité nationale que dans les conditions suivantes :

Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection
nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas dedécès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique, de la durée de l'arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire.

Ouvre droit à réparation des préjudices au titre de la solidarité nationale un taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique supérieur à un pourcentage d'un barème spécifique fixé par décret ; ce pourcentage, au plus égal à 25 %, est déterminé par ledit décret.

En l’espèce, Il est établi que le dommage subi par Madame [O] [M] est un accident vasculaire cérébral ischémique dans le territoire carotidien gauche et que le mécanisme pathologique, qui y a abouti, est un mécanisme embolique avec formation d’un thrombus, favorisée par l’existence d’une anomalie préexistante de la paroi interauriculaire (le FOP), qui a embolisé dans une artère à destination cérébrale. Il est également incontestable que l’association tabac-pilule est fréquemment retrouvée comme facteur de risque déterminant dans la genèse des AVC chez la femme jeune. Ces facteurs de risque ont favorisé la formation d’un thrombus chez une patiente présentant une prédisposition anatomique : un foramen ovale perméable. Il ressort également du dossier et des expertises que Madame [M] consommait de manière excessive du tabac (une moyenne de 15 cigarettes par jour et du cannabis), cause qui augmente le risque de thrombose artérielle dans les vaisseaux du coeur ou du cerveau et que cette dernière avait été dûment informée de ce risque, la notice d’information du médicament Jasminelle qui lui a été remise, indiquant qu’ “ il est fortement conseillé d’arrêter de fumer si vous utilisez JASMINELLE 0,02 mf / 3 mg, en particulier, si vous avez plus de 35 ans ; [...] Si vous souffrez de migraines ;”

Par ailleurs, la CCI avait déjà précisé que l’interessée présentait des facteurs de risque d’accident vasculaire cérébral. “ Il s’agissait chez elle de facteurs de risques toxiques reconnus : tabagisme actif, consommation de cannabis, contraception oestroprogestative ; ”.

Lors de la dernière expertise, Madame [M] a signalé avoir lu la notice précitée mais a considéré avoir été faussement rassurée par le fait que l’arrêt de cette contraception soit indiqué à partir de 35 ans, alors qu’elle souffrait régulièrement de migraines importantes depuis l’adolescence. Les experts ajoutent que “ le dépistage urinaire du cannabis était positif chez la patiente à l’entrée lors de son accident vasculaire cérébral, ce qui démontre que sa consommation du stupéfiant était récente et importante et concluent “qu’il ne semble pas que l’on puisse reprocher de défaut d’information de la part du Docteur [K] [N] et que Madame [M] a bien pris connaissance dans la notice comme elle l’a indiqué durant l’expertise, du conseil d’arrêter de fumer lors de la prise de la contraception ainsi que des risques vasculaires possibles de ces contraceptifs oraux, recommandation, qu’elle ne semble pas avoir scrupuleusement respectée.” ”.

Il apparait donc établi, comme le soulignent les experts, que la survenue de l’accident vasculaire de la patiente est liée à une association de facteurs de risques : tabagisme important, foramen ovale perméable, consommation régulière de cannabis, sans qu’une faute puisse être reprochée à sa gynécologue qui a, aux termes du rapport d’expertise, “ mis en route une contraception de manière adaptée depuis plusieurs années ” et que l’information délivrée par la gynécologue a été correcte sur la durée de la prise en charge de la contraception de Madame [M].

Enfin, les experts ont estimé que le dommage subi par cette dernière, constitue pour 20%, un évènement indésirable d’une contraception orale et qu’elle était plus particulièrement exposée qu’une autre patiente à cet évènement indésirable compte tenu de ses autres facteurs de risques rappelés ci-dessus, ce qui signifie que le taux de 20 % retenu par les experts ne doit pas être considéré comme un lien causal exclusif dans la survenue de la complication mais l’existence d’un facteur de risque supplémentaire probable. Ainsi, le caractère direct et certain n’est nullement démontré, en présence d’autres facteurs de risques intervenant pour 80 % dans l’AVC.

Dans ces conditions, il convient de rejeter l’intégralité des demandes de Madame [O] [M]. Les dépens seront laissés à la charge de cette dernière.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire mis à disposition au greffe et rendu en premier ressort,

REJETTE les demandes de Madame [O] [M];

LAISSE la charge des dépens à Madame [O] [M].

Fait et jugé à Paris le 21 Mai 2024.

La GreffièreLe Président

Erell GUILLOUËTPascal LE LUONG


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 19eme contentieux médical
Numéro d'arrêt : 21/01545
Date de la décision : 21/05/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 02/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-21;21.01545 ?
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