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07/05/2024 | FRANCE | N°23/54867

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Service des référés, 07 mai 2024, 23/54867


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS








N° RG 23/54867 -
N° Portalis 352J-W-B7H-CZ7WQ

N° : 1-DB

Assignation du :
05, 08 Juin 2023

[1]

[1] 3 Copies exécutoires
délivrées le:


JUGEMENT RENDU SELON LA PROCEDURE ACCELEREE AU FOND
le 07 mai 2024



par Anne-Charlotte MEIGNAN, Vice-Président au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,

Assistée de Anne-Sophie MOREL, Greffier.
DEMANDERESSE

La VILLE DE [Localité 11] Représentée par Ma

dame la Maire de [Localité 11], Madame [K] [B]
[Adresse 9]
[Localité 5]

représentée par Maître Fabienne DELECROIX de la SELARL DELECROIX-GUBLIN, avocats au barreau de ...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS


N° RG 23/54867 -
N° Portalis 352J-W-B7H-CZ7WQ

N° : 1-DB

Assignation du :
05, 08 Juin 2023

[1]

[1] 3 Copies exécutoires
délivrées le:

JUGEMENT RENDU SELON LA PROCEDURE ACCELEREE AU FOND
le 07 mai 2024

par Anne-Charlotte MEIGNAN, Vice-Président au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,

Assistée de Anne-Sophie MOREL, Greffier.
DEMANDERESSE

La VILLE DE [Localité 11] Représentée par Madame la Maire de [Localité 11], Madame [K] [B]
[Adresse 9]
[Localité 5]

représentée par Maître Fabienne DELECROIX de la SELARL DELECROIX-GUBLIN, avocats au barreau de PARIS - #R0229

DEFENDERESSES

S.A.R.L. LA SOCIETE DU TRESOR
[Adresse 1]
[Localité 7]

représentée par Me Xavier DEMEUZOY, avocat au barreau de PARIS - #D1735

S.A.S. GLOBAL SHARING PARTNERS
[Adresse 2]
[Localité 6]

représentée par Me Raphaël RICHEMOND, avocat au barreau de PARIS - #G0400

DÉBATS

A l’audience du 26 Mars 2024, tenue publiquement, présidée par Anne-Charlotte MEIGNAN, Vice-Président, assistée de Daouia BOUTLELIS, Greffier,

Nous, Président,

Après avoir entendu les conseils des parties,

EXPOSE DU LITIGE

Vu l'assignation délivrée les 5 et 8 juin 2023 par la Ville de [Localité 11] à l'encontre de la SARL LA SOCIETE DU TRESOR, immatriculée au RCS de Toulon sous le numéro 833 348 436 et de la SAS GLOBAL SHARING PARTNERS, immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 809 186 323, devant le président du tribunal judiciaire de Paris saisi selon la procédure accélérée au fond, sur le fondement notamment des dispositions de l’article L. 631-7 du code de la construction et de l’habitation, concernant un appartement situé [Adresse 4] ;

Vu les écritures soutenues oralement par la Ville de [Localité 11] à l'audience du 26 mars 2024 ;

Vu les écritures de la SARL LA SOCIETE DU TRESOR soutenues oralement à cette même audience ;

Vu les écritures de la SAS GLOBAL SHARING PARTNERS soutenues oralement à cette audience ;

Vu les dispositions des articles 446-1 et 455 du code de procédure civile ;

SUR CE,

Sur la demande de condamnation sur le fondement des dispositions des articles L. 631-7 et L.651-2 du code de la construction et de l'habitation

L'article L.631-7 du code de la construction et de l'habitation dispose que « La présente section est applicable aux communes de plus de 200 000 habitants et à celles des départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne. Dans ces communes, le changement d'usage des locaux destinés à l'habitation est, dans les conditions fixées par l'article L.631-7-1, soumis à autorisation préalable.

Constituent des locaux destinés à l'habitation toutes catégories de logements et leurs annexes, y compris les logements-foyers, logements de gardien, chambres de service, logements de fonction, logements inclus dans un bail commercial, locaux meublés donnés en location dans les conditions de l'article L. 632-1 ou dans le cadre d'un bail mobilité conclu dans les conditions prévues au titre Ier ter de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986.
Pour l'application de la présente section, un local est réputé à usage d'habitation s'il était affecté à cet usage au 1er janvier 1970. Cette affectation peut être établie par tout mode de preuve. Les locaux construits ou faisant l'objet de travaux ayant pour conséquence d'en changer la destination postérieurement au 1er janvier 1970 sont réputés avoir l'usage pour lequel la construction ou les travaux sont autorisés.

Toutefois, lorsqu'une autorisation administrative subordonnée à une compensation a été accordée après le 1er janvier 1970 pour changer l'usage d'un local mentionné à l'alinéa précédent, le local autorisé à changer d'usage et le local ayant servi de compensation sont réputés avoir l'usage résultant de l'autorisation.

Sont nuls de plein droit tous accords ou conventions conclus en violation du présent article.

Le fait de louer un local meublé destiné à l'habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n'y élit pas domicile constitue un changement d'usage au sens du présent article ».

L'alinéa premier de l'article L.651-2 du même code prévoit que « Toute personne qui enfreint les dispositions de l'article L. 631-7 ou qui ne se conforme pas aux conditions ou obligations imposées en application dudit article est condamnée à une amende civile dont le montant ne peut excéder 50 000 euros par local irrégulièrement transformé. »

Conformément aux dispositions de l’article 9 du code de procédure civile, il incombe à la Ville de [Localité 11], d’établir :

l’existence d’un local à usage d’habitation, un local étant réputé à usage d’habitation si la preuve est apportée par tout moyen qu'il était affecté à cet usage au 1er janvier 1970, sauf pour les locaux construits ou faisant l’objet de travaux ayant pour conséquence d’en changer la destination postérieurement au 1er janvier 1970 qui sont réputés avoir l’usage pour lequel la construction ou les travaux sont autorisés ;
un changement illicite, sans autorisation préalable, de cet usage, un tel changement étant notamment établi par le fait de louer un local meublé destiné à l’habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile.
Il est en outre constant que, s’agissant des conditions de délivrance des autorisations, la Ville de [Localité 11] a adopté, par règlement municipal et en application de l’article L.631-7-1 du code de la construction et de l’habitation, le principe d’une obligation de compensation par transformation concomitante en habitation de locaux ayant un autre usage, obligation de compensation dont il n'est pas allégué qu'elle a été mise en œuvre.

Sur la qualification de résidence principale ou secondaire

Aux termes de l’article L.631-7-1 A du code de la construction et de l’habitation, lorsque le local à usage d'habitation constitue la résidence principale du loueur, au sens de l'article 2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, l'autorisation de changement d'usage prévue à l'article L. 631-7 du présent code ou celle prévue au présent article n'est pas nécessaire pour le louer pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n'y élit pas domicile.

Il appartient à la partie défenderesse qui invoque les dispositions susvisées de démontrer que le local litigieux constitue sa résidence principale, la preuve étant libre.

Aux termes des dispositions de l'article 2 de la loi du 6 juillet 1989, la résidence principale est entendue comme le logement occupé au moins huit mois par an, sauf obligation professionnelle, raison de santé ou cas de force majeure, soit par le preneur ou son conjoint, soit par une personne à charge au sens du code de la construction et de l'habitation.

La SOCIETE DU TRESOR soutient que le local litigieux constitue la résidence principale de Monsieur [P] [H], associé de la société, le bien ayant été acquis afin de lui permettre d'effectuer ses études à [Localité 11].

En l'espèce, il est produit un certificat de scolarité pour l'année 2019/2020 à l'[8], située [Localité 13], au nom de Monsieur [H], ainsi qu'un compte-rendu d'hospitalisation au sein du service des urgences du CHU [10] du 1er octobre 2019, lesquelles permettent d'établir la réalité de l'occupation des lieux par Monsieur [P] [H] à titre de résidence principale pour l'année scolaire 2019/2020.

Le contrat Imagine R pour l'année 2021/2022, signé le 7 janvier 2022, précise que l'établissement fréquenté par Monsieur [H] est l'[8] à [Localité 12], ce qui établit une continuité de scolarité au sein de cet établissement entre 2020 et 2022.

Les bulletins de salaire établis au nom de ce dernier en qualité de stagiaire, adressés au [Adresse 3] du mois de mai à juillet 2021, puis d'août à décembre 2022, confirment les éléments ci-dessus, et sont en outre corroborés par les déclarations de revenus ainsi que par la carte électorale établie le 19 janvier 2022, qui justifie du domicile de Monsieur [H] au [Adresse 3], en vertu de l'article L.11.I.- du code électoral qui dispose que :
« Sont inscrits sur la liste électorale de la commune, sur leur demande :
1° Tous les électeurs qui ont leur domicile réel dans la commune ou y habitent depuis six mois au moins et leurs enfants de moins de 26 ans ; »

L'ensemble des éléments produits par la défenderesse suffit à démontrer la réalité de l'occupation des lieux par Monsieur [H] à titre de résidence principale du mois de septembre 2019 à fin 2022.

La Ville de [Localité 11] soutient que le local ne peut constituer la résidence principale de ce dernier compte tenu du fait qu'il a été loué plus de 120 jours par an et que le local est taxé en résidence secondaire.

Toutefois, à l'appui de son argument, la Ville de [Localité 11] verse aux débats un relevé Oféa du 22 décembre 2023 dont il résulte que l'occupant des lieux serait Monsieur [X] [E], selon la taxe d'habitation 2022, alors que Monsieur [X] [E] était l'ancien propriétaire des lieux qui les a vendus en 2017 à la SOCIETE DU TRESOR, et qui habitait à l'époque en Italie. Dès lors, la valeur probante et actualisée de ce document apparaît limitée.

En outre, le fait que le bien ait été loué plus de 120 jours par mois ne permet pas d'établir que le local est une résidence secondaire, des dispositions particulières du code du tourisme envisageant le dépassement des locations touristiques de plus de 120 jours pour des résidences principales.

En revanche, le seul élément produit au titre de l'année 2018 est insuffisant pour démontrer un usage d'habitation à titre de résidence principale entre 2018 et le mois d'août 2019. Il est d'autant plus insuffisant que le relevé des nuitées transmis par la société Airbnb mentionne 120 nuitées pour l'année 2018 alors que la mise en location a commencé au mois d'août 2018, ce qui représente 90% du temps de location touristique sur la période considérée.

Dès lors, l'examen du litige doit se limiter à la période comprise entre le mois d'août 2018 et le mois d'août 2019.

Sur l'usage d’habitation du local

En l'espèce, la Ville de [Localité 11] verse aux débats trois fiches H2 datées d'octobre 1970 sur trois locaux situés au 5ème étage de l'immeuble, respectivement porte D, porte F et porte G, qui précisent toutes trois la présence dans les lieux d'un locataire ainsi qu’un montant de loyer fixé, pour les trois appartements, sous le régime de la loi du 1er septembre 1948.

La fiche de révision foncière R établie en octobre 1970 permet de constater que se trouvaient au 5ème étage trois locaux, dont le nom des occupants correspond à celui se trouvant sur les fiches H2.

Dès lors, dans la mesure où il est établi que ces trois locaux et dès lors, l'intégralité du 5ème étage, étaient à usage d'habitation au 1er janvier 1970, l’affectation du local à un usage d'habitation du local litigieux est suffisamment établie au 1er janvier 1970.

Sur le changement illicite sans autorisation de l’usage 

En l'espèce, le constat de location meublée touristique du 11 avril 2022 établi par l'agent assermenté du service du logement de la mairie de [Localité 11] fait état de deux annonces postées sur le site airbnb.fr pour la location courte durée d’un logement, dont les hôtes se nomment respectivement [W] et [R].

Ce même constat mentionne, pour la première annonce, que le premier commentaire date du mois d'août 2018 et pour la seconde, que le premier commentaire date du mois de mars 2021. Dans la mesure où le caractère de résidence principale est établi à compter du mois de septembre 2019, seules les constatations relatives à la première annonce seront examinées.

A ce titre, 143 commentaires sont recensés au titre de la première annonce entre le mois d'août 2018 et le mois de décembre 2021.

Et il n'est pas contesté par la SOCIETE DU TRESOR que le local a été donné en location touristique de courte durée, la SOCIETE DU TRESOR ayant confié à la société GLOBAL SHARING PARTNERS, par contrat signé le 26 novembre 2018, le soin de rechercher des locataires français ou étrangers susceptibles de louer l'appartement.

Il s’ensuit que la SARL LA SOCIETE DU TRESOR a changé sans autorisation préalable l’usage du lot en cause, au sens de l'article L. 631-7 alinéa 1er du code de la construction et de l'habitation, en louant son appartement meublé destiné à l'habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n'y élit pas domicile entre le mois d'août 2018 et le mois d'août 2019.

Sur l’imputabilité des manquements

Seul le propriétaire d'un bien immobilier a qualité pour solliciter l'autorisation de changement d'usage et ne peut reporter sur le locataire l'obligation légale de demander les autorisations nécessaires au changement d'affectation.

Il s'ensuit et il est désormais acquis que celui qui se livre ou prête son concours à la mise en location, par une activité d'entremise ou de négociation, en méconnaissance de l'article L.631-7 du code de la construction et de l'habitation d'interprétation stricte, et dont les obligations spécifiques sont prévues par l'article L.324-2-1 du code du tourisme, n'encourt pas l'amende civile prévue par l'article L.651-2, puisqu'il n'est pas à l'origine de la faute résultant du changement d'usage, de sorte que les demandes formulées à l'encontre de la société GLOBAL SHARING PARTNERS, qui a agi en tant qu'intermédiaire, seront rejetées.

Sur le montant de l’amende

La loi n°2014-366 du 24 mars 2014 entrée en vigueur le 27 mars 2014, a introduit l’obligation de changement d’usage dont le manquement est sanctionné par l’article L.651-2 du code de la construction et de l’habitation. L'article L. 651-2 dans sa rédaction issue de la loi du 18 novembre 2016, applicable au 20 novembre 2016, a porté l’amende encourue de 25.000 à 50.000 euros.

L’amende civile doit être fixée en fonction de l’objectif d’intérêt général poursuivi par la législation dont elle vise à garantir le respect dans une ville comme [Localité 11] où il existe une grande disparité entre l’offre et la demande de logements à la location, des revenus procurés par les locations illicites, de la durée des locations, le cas échéant des diligences du propriétaire pour le retour à un usage d'habitation, de la bonne foi dont l’intéressé a fait preuve et de sa situation personnelle et financière.

En l’espèce, il ressort du constat de location touristique et des commentaires des locataires de passage, que la SARL LA SOCIETE DU TRESOR a proposé à la location le local en cause du mois d'août 2018 au mois d'août 2019, soit sur une période d'un an.

Le relevé de nuitées fait état de 120 nuitées en 2018 et de 242 nuitées en 2019, le relevé de l'année 2019 ne permettant toutefois pas d'établir avec exactitude le nombre de nuitées pour la période du 1er janvier au 31 août 2019, période où il n'est pas démontré l'occupation à titre de résidence principale.

Concernant les gains tirés des locations illicites, le constat de location touristique fait apparaître que le local était loué pour un montant moyen de 300 euros la nuit, alors que selon la Ville de [Localité 11], le loyer de référence du quartier pour 55m² est de 1892€.

Cette référence à l'arrêté d'encadrement des loyers est toutefois inopérant concernant les années 2018 et 2019, l'encadrement des loyers n'ayant été expérimenté à [Localité 11] qu'à compter du 1er juillet 2019 (application du dispositif aux contrats conclus à compter de cette date, arrêté du 28 mai 2019) en application de la loi n°2018-1021 du 23 novembre 2018.

En tout état de cause, il n'en demeure pas moins que le montant pratiqué à la nuitée est objectivement supérieur au marché locatif tel qu'il existait en 2018 et 2019 et la mise en location touristique a nécessairement généré, pour la propriétaire, un revenu substantiel.

Il doit être porté au crédit de la défenderesse qu'elle a collaboré avec la Ville de [Localité 11].

Dès lors, en considération de la durée relativement limitée de la période incriminée, de l'ancienneté des faits, du profit généré par la location courtes durées au regard d'une location classique et du fait que le local litigieux est retourné à un usage d'habitation depuis le mois de septembre 2019, il convient de fixer l’amende civile à 13.000 euros.

Sur le retour du local à l'habitation

Il résulte des dispositions de l'article 651-2 du code de la construction et de l'habitation que le président du tribunal ordonne le retour à l'usage d'habitation du local transformé sans autorisation, dans un délai qu'il fixe. A l'expiration de celui-ci, il prononce une astreinte d'un montant maximal de 1 000 euros par jour et par mètre carré utile du local irrégulièrement transformé. Le produit en est intégralement versé à la commune dans laquelle est situé le local irrégulièrement transformé.

Dans la mesure où il est démontré que le local est retourné à l'usage d'habitation dès le mois de septembre 2019 et alors qu'aucune location touristique n'est démontrée postérieurement à l'année 2022, la demande sera rejetée.

Sur la demande de condamnation de la partie défenderesse sur le fondement des dispositions de l’article L. 324-1-1 du code du tourisme

L’article L.324-1-1 du code du tourisme dispose :
“I.-Pour l'application du présent article, les meublés de tourisme sont des villas, appartements ou studios meublés, à l'usage exclusif du locataire, offerts à la location à une clientèle de passage qui n'y élit pas domicile et qui y effectue un séjour caractérisé par une location à la journée, à la semaine ou au mois.

II.-Toute personne qui offre à la location un meublé de tourisme, que celui-ci soit classé ou non au sens du présent code, doit en avoir préalablement fait la déclaration auprès du maire de la commune où est situé le meublé.
Cette déclaration préalable n'est pas obligatoire lorsque le local à usage d'habitation constitue la résidence principale du loueur, au sens de l'article 2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986.
III.-Par dérogation au II, dans les communes où le changement d'usage des locaux destinés à l'habitation est soumis à autorisation préalable au sens des articles L. 631-7 à L. 631-9 du code de la construction et de l'habitation une délibération du conseil municipal peut décider de soumettre à une déclaration préalable soumise à enregistrement auprès de la commune toute location d'un meublé de tourisme.
La déclaration indique si le meublé de tourisme offert à la location constitue la résidence principale du loueur au sens de l'article 2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 précitée.
Un téléservice permet d'effectuer la déclaration. La déclaration peut également être faite par tout autre moyen de dépôt prévu par la délibération susmentionnée.
Dès réception, la déclaration donne lieu à la délivrance sans délai par la commune d'un accusé-réception comprenant un numéro de déclaration.
Un décret détermine les informations qui peuvent être exigées pour l'enregistrement.
IV.-Dans les communes ayant mis en œuvre la procédure d'enregistrement de la déclaration préalable mentionnée au III, toute personne qui offre à la location un meublé de tourisme qui est déclaré comme sa résidence principale ne peut le faire au-delà de cent vingt jours au cours d'une même année civile, sauf obligation professionnelle, raison de santé ou cas de force majeure.
La commune peut, jusqu'au 31 décembre de l'année suivant celle au cours de laquelle un meublé de tourisme a été mis en location, demander au loueur de lui transmettre le nombre de jours au cours desquels ce meublé a été loué. Le loueur transmet ces informations dans un délai d'un mois, en rappelant l'adresse du meublé et son numéro de déclaration. [...]
V.-Toute personne qui ne se conforme pas aux obligations résultant du III est passible d'une amende civile dont le montant ne peut excéder 5 000 euros.
Toute personne qui ne se conforme pas aux obligations résultant du IV est passible d'une amende civile dont le montant ne peut excéder 10 000 euros. [...]”

Il résulte des débats parlementaires que les alinéas 13 à 16 de l'article 51 du projet de loi portant évolution du logement s'inscrivent dans le souhait de responsabiliser le loueur dans le cadre de la location de sa résidence principale, l'alinéa 12 intégrant le plafond de 120 jours et les alinéas 13 à 16, créant un système de sanctions contre les propriétaires ne procédant pas à l'enregistrement de leur logement ou ne transmettant pas à une commune qui le demande le nombre de nuitées louées.

Ainsi, la transmission du nombre de nuitées à la commune, et la sanction qui l'accompagne, ont pour objectif de permettre aux agents de la commune d'identifier une résidence secondaire qui aurait improprement été qualifiée de résidence principale par son propriétaire, lorsque le décompte de nuitées excèdent quatre mois.

Les amendements proposés permettent d'ailleurs de constater que le paragraphe IV ajouté à l'article L.324-1-1 du code du tourisme ne concerne que l'encadrement de la location des résidences principales en meublé touristique.

Dès lors, la sanction du défaut de transmission du décompte des nuitées à la commune ne peut s'appliquer qu'aux loueurs de résidences principales et non à l'intermédiaire de location.

Le local étant occupé à titre de résidence principale pour l'année 2021, correspondant à la demande de transmission du nombre de nuitées, les dispositions sont applicables à la présente espèce.

Il résulte du constat de location touristiques que le relevé de nuitées pour les années 2020 et 2021 a bien été transmis à la Ville de [Localité 11] le 14 avril 2022, par la société GLOBAL SHARING PARTNERS, intermédiaire, à la suite du courrier adressé à la SOCIETE DU TRESOR le 20 janvier 2022.

Dès lors, il n'est pas justifié d'un manquement à son obligation par la défenderesse et la Ville de [Localité 11] sera déboutée de ses demandes.

Sur les mesures accessoires

Succombant à l'instance, la SOCIETE DU TRESOR sera condamnée au paiement des dépens, ainsi qu'à verser à la Ville de [Localité 11] la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles, en vertu des articles 696 et 700 du code de procédure civile. La Ville de [Localité 11] sera, quant à elle, condamnée à verser à la société GLOBAL SHARING PARTNERS la somme de 1200 euros au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS,

Le tribunal, statuant publiquement par jugement contradictoire rendu en premier ressort, par mise à disposition au greffe le jour du délibéré, après débats en audience publique,

Condamne la SARL LA SOCIETE DU TRESOR au paiement :
* d’une amende civile de treize mille euros (13.000€), sur le fondement des articles L. 631-7 et L. 651-2 du code de la construction et de l’habitation, dont le produit sera versé à la Ville de [Localité 11] ;
* de la somme de 2000 euros à la Ville de [Localité 11], au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette le surplus des demandes ;

Condamne la Ville de [Localité 11] à verser à la SAS GLOBAL SHARING PARTNERS la somme de 1200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SARL LA SOCIETE DU TRESOR aux dépens ;

Rappelle que la présente décision bénéficie de l'exécution provisoire de plein droit.

Fait à Paris le 07 mai 2024

Le Greffier,Le Président,

Anne-Sophie MORELAnne-Charlotte MEIGNAN


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Service des référés
Numéro d'arrêt : 23/54867
Date de la décision : 07/05/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 15/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-07;23.54867 ?
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