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07/05/2024 | FRANCE | N°19/11196

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 8ème chambre 1ère section, 07 mai 2024, 19/11196


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :
à Maître KOUDOYOR
et Maître ANCELET

Copies certifiées conformes
délivrées le :
à Maître FAURE,
Maître ZANATI et
Maître HILTZER-
HUTTEAU





8ème chambre
1ère section


N° RG 19/11196
N° Portalis 352J-W-B7D-CQYCH


N° MINUTE :


Assignation du :
08 Juillet 2019










JUGEMENT
rendu le 07 Mai 2024

DEMANDERESSE

Madame [K] [U]
[Adresse

1]
[Localité 14]

représentée par Maître Philippe LAPILLE, avocat au barreau de SAINT MALO-DINAN, avocat plaidant et par Maître Aurélie FAURE, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #E1190


DÉFENDEURS...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :
à Maître KOUDOYOR
et Maître ANCELET

Copies certifiées conformes
délivrées le :
à Maître FAURE,
Maître ZANATI et
Maître HILTZER-
HUTTEAU

8ème chambre
1ère section


N° RG 19/11196
N° Portalis 352J-W-B7D-CQYCH

N° MINUTE :

Assignation du :
08 Juillet 2019

JUGEMENT
rendu le 07 Mai 2024

DEMANDERESSE

Madame [K] [U]
[Adresse 1]
[Localité 14]

représentée par Maître Philippe LAPILLE, avocat au barreau de SAINT MALO-DINAN, avocat plaidant et par Maître Aurélie FAURE, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #E1190

DÉFENDEURS

Syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] représenté par son syndic, le cabinet Jean CHARPENTIER - SOPAGI
[Adresse 4]
[Localité 11]

représenté par Maître Guillaume ANCELET de la Société Civile Professionnelle ANCELET ELIE SAUDUBRAY ou ADES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0501

Société MUTUELLE ASSURANCE DES INSTITUTEURS DE FRANCE (MAIF)
[Adresse 3]
[Localité 13]

représentée par Maître Averèle KOUDOYOR, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D1635

S.A. AXA FRANCE IARD
[Adresse 7]
[Localité 16]

représentée par Maître Jean-Marc ZANATI de la SELAS COMOLET ZANATI AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0435

Société d’Assurance La Mutuelle Assurances des Commerçants et Industriels de France (MACIF)
[Adresse 17]
[Adresse 2]
[Localité 13]

représentée par Maître Anne HILTZER HUTTEAU, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E1321

Monsieur [O] [E]
[Adresse 8]
[Localité 10]

non représenté

S.C.I. KARUKERA, représentée par son gérant Monsieur [O] [E]
[Adresse 8]
[Localité 10]

non représentée

Madame [G] [W]
domiciliée : chez FONCIA LAPORTE
[Adresse 15]
[Localité 9]

défaillant

Monsieur [B] [P]
domicilié chez Cabinet YAR IMMOBILIER
[Adresse 6]
[Localité 12]

non représenté

Monsieur [A] [V] [Z]
[Adresse 5]
[Localité 11]

non représenté

Décision du 07 Mai 2024
8ème chambre
1ère section
N° RG 19/11196 - N° Portalis 352J-W-B7D-CQYCH

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Laure BERNARD, Vice-Présidente
Madame Elyda MEY, Juge
Monsieur Julien FEVRIER, Juge

assistés de Madame Lucie RAGOT, Greffière

DÉBATS

A l’audience du 08 Février 2024
tenue en audience publique, avis a été donné aux parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 07 Mai 2024

JUGEMENT

Prononcé par mise à disposition au greffe
Réputé contradictoire
en premier ressort

EXPOSÉ DU LITIGE

Mme [K] [U] était, jusqu'en novembre 2019, propriétaire non-occupante d'un studio au premier étage de l'immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 11], soumis au statut de la copropriété des immeubles bâtis.

Au sein de cet immeuble sont également copropriétaires :

- la SCI Karukera, dont le gérant est M. [O] [E], propriétaire non-occupante d'un studio au deuxième étage, donné à bail à M. [A] [Z],
- Mme [G] [W], propriétaire non-occupante d'un studio au 3ème étage,
- M. [B] [P], propriétaire d'un studio au 4ème étage.

Dénonçant subir des dégâts des eaux répétés depuis 2005, Mme [U] a saisi le juge des référés qui, par ordonnance du 14 janvier 2015, a prononcé une mesure d'expertise judiciaire et commis pour y procéder Mme [X], laquelle a déposé son rapport le 10 octobre 2018.

C'est dans ces conditions que, par actes d'huissier des 08 - 12 - 15 juillet 2019 et 09 août 2019, Mme [U] a assigné en ouverture de rapport, devant la présente juridiction, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble en cause, représenté par son syndic en exercice (ci-après "le syndicat des copropriétaires"), la SA AXA en sa qualité d'assureur de l'immeuble, son propre assureur la Mutuelle Assurance des Instituteurs de France (ci-après "la MAIF"), la Mutuelle Assurances des Commerçants et Industriels (ci-après "la MACIF") en sa qualité d'assureur de la société Karukera, ainsi que la SCI Karukera, Mme [G] [W], M. [B] [P], M. [A] [Z],

et M. [O] [E], afin d'obtenir l'indemnisation de ses préjudices.
Par acte authentique du 12 novembre 2019, Mme [U] a vendu son studio à M. [M] [S] et à Mme [F] [T].

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 27 décembre 2022, Mme [U] demande au tribunal de :

"Dire et juger recevable et bien fondée Mme [U] en ses demandes, y faisant droit,
Vu le rapport d'expertise du 10 octobre 2018,
Vu les articles 7 et 12 du code de procédure civile,
Vu les articles 2240 et 2270 du code civil,
Vu l'article 515 du code de procédure civile,
- Condamner solidairement les défendeurs à verser à Mme [U] la somme de 18.830,90 € au titre des travaux de réhabilitation du studio,
- Les condamner par même voie de solidarité au paiement de la somme de 1.348,22 € au titre des frais d'architecte,
- Les condamner par même voie de solidarité au paiement de la somme de 429,20 € au titre des frais de procès-verbal d'huissier,
- Les condamner par même voie de solidarité au paiement de la somme de 70.465,33 € au titre des frais induits,
- Prononcer l'exécution provisoire de la décision à intervenir,
- Condamner les défendeurs aux entiers dépens qui comprendront les frais d'expertise,
- Condamner les défendeurs au paiement d'une somme de 5.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile".

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 03 mars 2023, le syndicat des copropriétaires demande au tribunal de :

"Au visa du rapport d'expertise de Mme [X], expert, du 10 octobre 2018,
Au visa des dispositions de l'article 1240 du code civil,
Au visa des dispositions de l'article 64 du code de procédure civile,
- Débouter Mme [U] de tous moyens et prétentions dirigés contre le syndicat des copropriétaires,
En conséquence, juger que les désordres subis par le studio de Mme [U] sont imputables exclusivement aux parties privatives des troisième et quatrième étages,
En conséquence,
- Condamner Mme [U] à payer au syndicat des copropriétaires à titre de dommages intérêts la somme de 6.000 euros,
- Recevoir le syndicat des copropriétaires en sa demande reconventionnelle,
En conséquence,
- Condamner in solidum la SCI Karukera, copropriétaire du studio du 2ème étage, Mme [W], son épouse (sic), copropriétaire du 3ème étage, et M. [P], copropriétaire du studio du 4ème étage, à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 9.253,20 euros au titre des travaux de remise en état de la structure bois du mur séparatif entre les deux studios du premier étage et partie commune avec intérêts au taux légal à compter de la date de dépôt du rapport de l'expert,

soit le 10 octobre 2018,
- Juger que la SCI Karukera sera garantie par son assureur, la MACIF,
- Condamner Mme [U] à payer in solidum avec la SCI Karukera, Mme [W] et M. [P] la somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- Ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir,
- Condamner Mme [U] à payer in solidum avec la SCI Karukera, Mme [W] et M. [P] au paiement des entiers dépens d'instance et laisser à la charge de Mme [U] les frais d'expertise judiciaire".

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 14 décembre 2022, la société AXA , assureur du syndicat des copropriétaires, demande au tribunal de :

"Vu l'assignation introductive d'instance du 8 juillet 2019,
Vu le rapport d'expertise judiciaire de Mme [C] [X] du 10 octobre 2018,
- Juger que les dommages subis par le studio, propriété de Mme [U] sont imputables exclusivement aux parties privatives,
- Débouter en conséquence Mme [U] de l'intégralité de ses demandes en ce qu'elles sont dirigées à l'encontre de la compagnie AXA France sans la moindre motivation,
- Juger hors de cause la compagnie AXA France,
Très subsidiairement et dans l'hypothèse où une quelconque condamnation serait prononcée à son encontre,
- Condamner in solidum la SCI Karukera copropriétaire du studio du 2ème étage, ainsi que son assureur la MACIF, Mme [W] copropriétaire au 3ème étage et M. [P] copropriétaire au 4ème étage, à garantir la compagnie AXA France de toutes condamnations qui interviendraient à son encontre,
- Ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir
- Condamner Mme [U] à payer à la compagnie AXA France une indemnité d'un montant de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile".

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 07 février 2020, la MAIF, assureur de Mme [U], demande au tribunal de :

"Vu l'article 1242 du code civil,
Vu les articles L.124-1, L.124-1-1, L.124-3 et L.121-12 du code des assurances,
Vu le principe que nul ne peut causer à autrui un trouble anormal de voisinage,
Vu le rapport d'expertise de Mme [C] [X] du 10/10/2018,
Vu les pièces versées aux débats,
- Dire et juger la MAIF recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,
Y faisant droit,
A titre principal,
- Débouter Mme [U] de l'intégralité de ses demandes dirigées à tort contre la MAIF,
A titre subsidiaire,

- Condamner in solidum la SCI Karukera, la MACIF à garantir et relever indemne la MAIF de toutes condamnations qui pourraient être mises à sa charge, tant en principal, intérêts, frais, dépens et accessoires,
En tout état de cause,
A titre reconventionnel,
- Condamner in solidum la SCI Karukera et la MACIF à verser à la MAIF la somme de 12.472 euros au titre de son droit de subrogation légale,
- Condamner Mme [U] ou toutes parties succombantes in solidum à verser à la MAIF la somme de 6.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamner toutes parties succombantes in solidum aux entiers dépens de l'instance, en ce compris le coût de l'expertise judiciaire, dont distraction sera faite au profit de Maître Koudoyor en application de l'article 699 du code de procédure civile,
- Ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir,"

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 04 mai 2020, la MACIF, assureur de la société Kakukera, demande au tribunal de :

"Vu l'article 2224 du code civil,
Vu la jurisprudence,
Vu les pièces versées au débat,
Vu le rapport d'expertise de Mme [X],
In limine litis,
- Dire et juger l'action initiée à l'encontre de la MACIF irrecevable comme étant prescrite,
- Prononcer, en conséquence, la mise hors de cause pure et simple de la MACIF,
Subsidiairement,
- Limiter les condamnations à l'encontre de la MACIF à hauteur de 5.544,30 euros TTC,
En tout état de cause et statuant sur la demande reconventionnelle de la MACIF,
- Condamner Mme [U] au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, au bénéfice de la MACIF,
- Condamner Mme [U] aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Anne Hiltzer Hutteau, avocat aux offres de droit".

Pour un exposé plus détaillé des moyens et prétentions des parties, il convient de renvoyer aux termes de leurs dernières écritures susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

Mme [G] [W] (citée à étude), M. [B] [P] (cité dans les formes de l'article 659 du code de procédure civile), M. [A] [V] [Z] (cité à étude), M. [O] [E] (cité à domicile), et la SCI Karukera (citée par remise de l'acte à son gérant), n'ont pas constitué avocat.

Concernant M. [P], l'huissier mentionne sur le procès-verbal que le cabinet Yar Immobilier, au sein duquel il avait élu domicile, a indiqué que l'intéressé avait vendu son bien et qu'il n'en avait donc plus la gestion, et que ses recherches sur l'annuaire électronique et sur internet ne lui ont pas permis d'obtenir plus amples renseignements concernant sa nouvelle adresse.

La décision sera réputée contradictoire en application de l'article 473 du code de procédure civile.

L'instruction a été close par ordonnance du 15 mai 2023.

L'affaire, appelée à l'audience du 08 février 2024, a été mise en délibéré au 07 mai 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les demandes de "juger" et de " dire et juger "

Il n'y a pas lieu de statuer sur ces demandes, lesquelles ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile mais sont la reprise des arguments développés dans les écritures des parties.

Sur la recevabilité de l'action engagée à l'encontre de la MACIF

La MACIF soulève, à titre principal, l'irrecevabilité des demandes dirigées à son encontre par Mme [U] au motif de leur prescription, arguant de ce que le sinistre ayant pour origine le lot propriété de son assurée la SCI Karukera est survenu le 12 décembre 2012, que Mme [U] avait jusqu'au 12 décembre 2017 pour agir et qu'ayant agi postérieurement à cette date elle est irrecevable, aucun événement n'étant venu interrompre ou suspendre ledit délai.

Mme [U] réplique que l'instance en référé a interrompu le délai de prescription, d'une part, et qu'au demeurant elle n'a pu agir utilement au fond qu'après avoir pris connaissance des causes des désordres, mises en lumière par la mesure expertale, d'autre part.

***

Aux termes de l'article 122 du code de procédure civile "Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée."

L'article 2224 du code civil énonce que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Il résulte de ce texte que le point de départ de la prescription ne peut dépendre des seules diligences de celui qui entend mettre en œuvre un droit.

L'article 2231 du code civil dispose que "l'interruption efface le délai de prescription acquis. Elle fait courir un nouveau délai de même durée de que l'ancien", et l'article 2232 du même code précise que "l'interruption ne peut avoir pour effet de porter le délai de prescription extinctive à vingt ans à compter du jour de la naissance de ce droit".

L'article 2241 du code civil dispose que "la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription".
L'article 2239 du code civil dispose que "la prescription est suspendue lorsque le juge fait droit à une demande de mesure d'instruction présentée avant tout procès", et l'article 2230 du même code précise que "la suspension de la prescription en arrête temporairement le cours sans effacer le délai couru".

Sur ce,

Il ressort des éléments versés au débat que Mme [U] a subi des infiltrations au sein de son lot, de façon répétée à compter de l'année 2005, et notamment le 12 décembre 2012.

Si l'expert judiciaire a mentionné (page 15 du rapport) comme origine de ce sinistre, une défaillance du joint sur robinet d'arrêt général de l'appartement appartenant à la société Karukera, aucun élément ne permet de considérer que Mme [U] connaissait cette donnée dès l'apparition du sinistre, d'une part, ni le cas échéant qu'elle connaissait le nom de l'assureur de cette société, d'autre part.

En effet le rapport d'expertise amiable contradictoire établi par la société EUREXO, mandaté par l'assureur la MAIF, s'il retient notamment la responsabilité "du copropriétaire non-occupant du 2ème étage", ne comporte aucune mention relative à l'assureur de la société Karukera.

Ce n'est que par un écrit daté du 08 avril 2013 émanant du cabinet [R] [Y] expert mandaté par la MACIF, adressé syndic de l'immeuble, dont une copie a été adressée à Mme [U], que l'assureur s'est manifesté pour la première fois en cette qualité.

Il doit en être déduit que c'est à partir de cette date, au plus tôt, que la demanderesse a eu connaissance de l'identité de l'assureur du lot appartenant à la société Karukera ; elle avait donc jusqu'au 08 avril 2018 pour agir en justice à son encontre.

Or, si l'instance en référé introduite par acte du 20 novembre 2014 n'a pas eu d'effet interruptif à l'encontre de la MACIF qui n'était alors pas dans la cause, le délai de prescription quinquennale a néanmoins été interrompue par la délivrance à son encontre de l'acte d'assignation aux fins de lui rendre communes les opérations expertales, ayant donné lieu à l'ordonnance du 30 mars 2018, date à partir de laquelle un nouveau délai quinquennal de prescription a commencé à courir.

Par suite, Mme [U] ayant agi au fond à l'égard de la MACIF par acte du 12 juillet 2019, elle est recevable en ses demandes la concernant.

L'irrecevabilité soulevée par l'assureur de la société Karukera sera donc rejetée.

Sur les demandes principales de Mme [U] en indemnisation

Se prévalant des conclusions du rapport d'expertise judiciaire ainsi que des rapports d'expertise amiables et des constats dressés, Mme [U] s'estime fondée à solliciter l'engagement de la responsabilité tant du syndicat des copropriétaires que des copropriétaires défendeurs dans la survenance des désordres ayant affecté son lot, et leur condamnation "solidaire" à l'indemniser de ses différents préjudices subséquents.

Mme [U] excipe également de l'inertie fautive du syndicat des copropriétaires dans la gestion du sinistre, soutenant que cette attitude a participé à l'aggravation des dommages, ainsi que de l'inertie coupable de son assureur, la MAIF, qui a mis plus d'un an avant d'admettre la nécessité d'une mesure d'expertise judiciaire, tardant son indemnisation, malgré ses écrits et ses relances.

Elle réclame ainsi le remboursement des frais de travaux de remise en état de son lot, ainsi que des frais annexes induits par la situation de sinistre dont elle affirme qu'elle a rendu le studio impropre à sa destination à compter de 2005 puis inhabitable en 2012 (frais d'hôtel, de repas, de box de gardiennage de meubles et objets personnels).

Le syndicat des copropriétaires soutient, au visa des conclusions du rapport d'expertise judiciaire, que les désordres dénoncés par Mme [U] sont d'origine purement privative, qu'aucune partie commune n'est concernée, et conclut au rejet de toute responsabilité lui incombant.
Il conteste toute inertie fautive, soulignant qu'en raison de l'origine privative des désordres, il ne lui revenait pas d'intervenir de quelque manière que ce soit, et qu'il appartenait à la demanderesse de faire le nécessaire, au besoin en saisissant plus rapidement le juge des référés, pour remédier à la situation de sinistralité qu'elle dénonçait.

La société AXA, assureur de l'immeuble, reprend en substance le même argumentaire que le syndicat des copropriétaires pour conclure au rejet des demandes indemnitaires formées à son encontre par Mme [U] et solliciter sa mise hors de cause.

A titre subsidiaire, elle forme un appel en garantie à l'encontre des défendeurs responsables des désordres objets du litige, à savoir la SCI Karukera, assurée par la MACIF, Mme [W] et M. [P].

La MAIF, assureur de Mme [U], conteste la prétendue "inertie coupable" alléguée par Mme [U], rappelant avoir missionné dès le mois d'avril 2013 la société EUREXO aux fins de recherche de la cause des désordres et d'évaluation des préjudices.

Elle souligne par ailleurs l'absence de caractérisation, par son assurée, du lien de causalité entre cette attitude fautive, à la supposer avérée, et les préjudices dont elle sollicite réparation.

A titre subsidiaire, la MAIF sollicite d'être garantie par la SCI Karukera et la MACIF, l'expert ayant désigné les installations sanitaires défectueuses et non conformes de l'appartement de cette dernière comme constituant la cause principale des désordres subis par la demanderesse au sein de son lot.

La MACIF sollicite de limiter sa condamnation en paiement aux termes du rapport d'expertise, et de retenir la ventilation des imputabilités proposée par l'expert.

***

Sur les désordres, leur matérialité et leur(s) cause(s)

Il ressort des éléments versés au débat, dont notamment le rapport d 'expertise judiciaire, que Mme [U] a subi, au sein de son lot, des infiltrations de façon répétée à compter de l'année 2005, et jusqu'au mois d'août 2013.

Ainsi, un premier dégât des eaux a fait l'objet d'une déclaration de sinistre le 23 août 2005, occasionnant, selon l'expertise amiable diligentée par l'assureur de la demanderesse, des dégradations des entrevous de la salle de bains, de l'entrevous au dessus de la kitchenette et du coffrage carrelé dans la salle de bains, ainsi que sur les embellissements ( au niveau de la peinture du plafond et des murs de la salle de bains, ainsi que du plafond et de l'intérieur du placard du séjour).

Des infiltrations ont également été dénoncées en octobre/novembre 2005, puis en décembre 2006 ainsi qu'en mai et juin 2009.

Le 15 novembre 2010, Mme [U] a fait établi un procès-verbal de constat d'huissier, selon lequel il est noté, principalement :

- au niveau de la salle d'eau : des écoulements d'eau continus, gouttes-à-gouttes, sur différentes poutres du plafond ; des écoulements d'eau dans la baignoire située à l'aplomb ; des éclats et traces de moisissures sur les murs ; des cloisons imbibées d'eau et humides au toucher ;
- au niveau de la pièce principale : un écoulement d'eau sur une fissuration entre deux poutres apparentes du plafond ; plusieurs poutres du plafond imbibées et trempées d'eau ; des auréoles d'humidité visibles en plusieurs endroits ainsi que des traces de moisissures.

Le 12 décembre 2012, Mme [U] a dénoncé un nouveau dégât des eaux, et fait constater par huissier le 14 décembre suivant les désordres subséquents, concernant la pièce principale et la salle de bains, consistant en "un ruissellement d'eau en plusieurs points à partir du plafond dans le placard coin cuisine. Les poutres bois sont détrempées en plusieurs points. Les ruissellements se font goutte à goutte, à forte cadence et sans discontinuer".

Un nouveau procès-verbal de constat d'huissier établi le 02 janvier 2013 fait état de la persistance des ruissellements, "de moindre importance mais significatifs".

Aux termes de son rapport judiciaire, l'expert conclut, en page 25, que :

"Les constats, les sondages sur place et l'analyse des pièces fournies par les parties ont permis d'identifier l'origine et les causes des désordres
- Les dégradations constatées sur la structure à pans de bois contre lequel est adossé la baignoire de la salle de bains de Mme [U] (et l'ensemble des salles de bains des studios de la cage d'escalier) résultent de la combinaison d'une série de fuites et d'infiltrations insidieuses de longue date.
- Les désordres constatés sur le second œuvre du studio de Mme [U] sont le résultat de la conjonction de plusieurs faits :
* Des fuites multiples qui se sont produites entre 2005 et 2009 dont l'origine au vu des documents transmis est triple (fuite sur robinet d'arrêt du WC du 4ème étage, joint de la baignoire de la salle de bains du 2ème étage et joint du robinet d'arrêt du 2ème étage),
* Une fuite sur robinet d'arrêt du studio du 2ème étage le 12-12-2012 qui a donné lieu, au vu du procès-verbal d'huissier du 14 décembre 2012 à des écoulements conséquents,
* De la vétusté des installations sanitaires des studios des 2ème, 3ème et 4ème étages non contestés puisque les propriétaires de ces studios ont fait des réparations avant notre nomination.
- L'abandon dans lequel a été laissé le studio depuis la première fuite identifiée en 2005 ; qui depuis lors n'a donné lieu à aucun travaux de remise en état, ne permet pas d'établir clairement la corrélation entre les dégâts des eaux identifiés entre les différentes dates et les désordres provoqués.

De ce fait, l'imputabilité est à répartir entre les différentes causes en distinguant les causes principales et les causes secondaires.

Parmi les causes principales, figure le mauvais état des joints de la baignoire du deuxième étage et des deux fuites sur le robinet d'arrêt du deuxième étage (fuite identifiée par EUREXO lors du sinistre du 07 juin 2009, pièce 28, fuite du 12 décembre 2012).
Parmi les causes secondaires, figurent les infiltrations en provenance des installations privatives des salles de bains du troisième et quatrième étages".

L'expert précise, en page 18 de son rapport, que "la fuite privative du 12 décembre 2012 en provenance du joint du robinet d'arrêt de l'appartement du 2ème étage, propriété de la SCI Karukera, a été réparée 5 jours après", et que la salle de bains dudit lot a été remise à neuf en 2013".

Elle souligne enfin que les fuites des joints de baignoire du studio du 2ème étage avant 2013, celle du robinet d'arrêt en juin 2009 et celle du 12 décembre 2012 "ont participé entre 60% et 70% aux dégradations sans pour autant qu'il soit possible de déterminer la part de chacune d'entre elles d'autant plus qu'aucune réparation n'ayant été entreprises les fuites les plus récentes ont aggravé les désordres des plus anciennes".

Sur les responsabilités engagées

Aux termes de l'article 768 du code de procédure civile, tel que modifié par le décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019 et applicables aux instances en cours à cette date : "Les conclusions doivent formuler expressément les prétentions des parties ainsi que les moyens en fait et en droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. Un bordereau énumérant les pièces justifiant ces prétentions est annexé aux conclusions.
Les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions. Les moyens qui n'auraient pas été formulés dans les conclusions précédentes doivent être présentés de manière formellement distincte. Le tribunal ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
Les parties doivent reprendre dans leurs dernières conclusions les prétentions et moyens présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et le tribunal ne statue que sur les dernières conclusions déposées."

Aux termes de l'article 12 du code de procédure civile,"Le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables. Il doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée."

Si, parmi les principes directeurs du procès, l'article 12 du code de procédure civile précité oblige le juge à donner ou à restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux invoqués par les parties au soutien de leurs prétentions, il ne lui fait pas obligation, sauf règles particulières, de changer la dénomination ou le fondement juridique de leurs demandes (Cass ass.plèn. 21 décembre 2007).

Aux termes de l'article 1240 du code civil, "tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer."

Enfin, l'article 9 du code de procédure civile dispose que "il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention."

Sur ce,

Le tribunal relève, à titre liminaire, qu'aux termes de ses dernières écritures Mme [U] ne précise aucun fondement juridique à l'appui de sa demande tendant à l'engagement de la responsabilité de l'ensemble des défendeurs dans la survenance des désordres subis au sein de son lot.

Au regard des moyens de fait qu'elle allègue, évoquant notamment une faute du syndicat des copropriétaires et de son assureur, le tribunal considère qu'il lui revient d'examiner l'ensemble de ses demandes sous l'angle de la responsabilité délictuelle.

Sur le fond, concernant l'origine du sinistre, il ressort de l'analyse combinée des constats et conclusions du rapport d'expertise judiciaire précités que les désordres dénoncés par Mme [U] depuis 2005 trouvent leur origine dans la vétusté et la défectuosité des parties privatives des studios situés aux 2ème, 3ème et 4ème étages de l'immeuble, appartenant donc à la société Karukera, à Mme [W] et à M. [P].

Pour autant, cette donnée objective ne saurait à elle seule constituer une faute délictuelle de ces propriétaires pouvant engager leur responsabilité.

Or, force est de constater qu'il n'est établi ni par le rapport d'expertise judiciaire ni par les autres éléments versés au débat une quelconque attitude de ces copropriétaires défendeurs pouvant constituer une faute au sens de l'article 1240 du code civil précité.

A l'inverse, il est à souligner que des travaux de réfection et de remise en état ont été effectués par les intéressés, ce qui démontre leur bonne foi et leur volonté de remédier à la situation, le fait que les travaux menés n'aient pas toujours permis de faire cesser immédiatement les infiltrations ne pouvant être mis à leur charge, ceux-ci étant profanes en la matière et ayant recouru à des sociétés spécialisées, non-attraites.

Ainsi, faute pour Mme [U] de rapporter la preuve, qui lui incombe, d'une faute de la société Kaurkera, de Mme [W] ou de M. [P], leur responsabilité délictuelle dans la survenance des désordres objets du litige ne saurait être retenue.

Il en est de même concernant M. [Z], locataire de la société Karukera, à propos duquel ni l'expertise judiciaire ni aucune autre pièce des débats n'est de nature à établir un comportement fautif à son endroit.

La responsabilité de M. [E], gérant de la société Karukera, sera également écartée dès lors qu'il n'est ni prétendu ni établi qu'il aurait commis une faute dans l'exercice de sa mission de gérant ayant, le cas échéant, contribué à la survenance des désordres.

Concernant l'aggravation des désordres, si Mme [U] se prévaut d'une prétendue "inertie fautive" du syndicat des copropriétaires, rappelons que les désordres ayant une origine purement privative il ne saurait être reproché utilement audit syndicat un quelconque défaut de gestion de la situation, les différents écrits envoyés par la demanderesse au syndic et/ou au président du conseil syndical étant dès lors inopérants.

En outre, si elle excipe d'un manque de sérieux quant à la prise en compte par le syndicat des copropriétaires d'un risque d'atteinte à la structure de l'immeuble, il doit être relevé que ce point a été évoqué par le cabinet d'expertise [R] [Y], mandaté par la MACIF, dans son écrit du 08 avril 2013, en ces termes :

"Lors de nos opérations d'expertise effectués sur place le 1er mars 2013, nous avons constatés un affaissement de la sous-face en plâtre dans le logement de Mme [U] au 1er étage.

Afin de prévenir tout risque pour les occupants, nous vous invitons à mandater un architecte afin de vérifier l'état de la structure et de prendre les dispositions de sécurité nécessaire en conséquence".

Ainsi, la nécessité alléguée d'une vérification de l'état de la structure de l'immeuble se rapportait uniquement à la sous-face en plâtre du lot de Mme [U], partie privative, et il ne saurait être déduit de ce seul écrit que la structure globale de l'immeuble était dégradée.

Ce d'autant plus qu'à l'issue des opérations expertales, l'expert judiciaire n'a pas retenu comme causes du sinistre une atteinte à ladite structure de l'immeuble.
En conséquence, aucune attitude fautive caractérisée ne saurait être retenue à l'encontre du syndicat des copropriétaires.

S'agissant de la MAIF, le tribunal relève que celle-ci a, pour les sinistres déclarés en août 2005 - juin 2009 et décembre 2012, à chaque fois fait diligenter une expertise amiable dans les mois suivants, soit un délai raisonnable, et qu'elle a, dès 2016, indemnisé, à titre d'avance, Mme [U] à hauteur de 12.472 euros recouvrant des travaux de remise en état et des frais de relogement.

Le fait, non contesté, que la MAIF n'ait pas, dès 2013, conseillé à la demanderesse de faire diligenter une expertise judiciaire ne saurait être constitutif d'une inertie fautive dès lors qu'il émane de la lecture des divers écrits de l'assureur, adressés à Mme [U] entre avril et octobre 2013, la volonté de celui-ci de favoriser, autant que possible, une issue amiable au règlement de la situation, ce qui ne saurait lui être reproché, l'assureur ayant à plusieurs reprises attiré l'attention de son assurée sur les risques de lenteur d'une procédure judiciaire.

Il sera en outre relevé qu'il n'est pas contesté que les infiltrations ont cessé à compter du mois d'août 2013 de sorte que Mme [U] ne saurait utilement alléguer d'une inertie blâmable de son assureur, à la supposer avérée, entre août 2013 et juin 2014, date à laquelle elle a donné son accord pour une procédure judiciaire, qui aurait eu pour conséquence l'aggravation des désordres.

Aucune faute n'étant caractérisée à l'encontre de la MAIF, sa responsabilité ne saurait être davantage retenue.

Enfin, la propre négligence de Mme [U] dans la gestion du sinistre a également contribué largement à l'aggravation des dégradations de son lot, comme relevé par l'expert judiciaire, celle-ci n'ayant pas fait procéder, après les premiers désordres dénoncés, à des travaux de réfection, nonobstant l'indemnisation perçue par son assureur, qui auraient permis de limiter les conséquences des désordres postérieurs.

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, Mme [U] succombant dans l'administration de la preuve qui lui incombe d'une faute délictuelle des défendeurs dans la survenance des désordres subis au sein de son lot et ayant elle-même contribué à leur aggravation, elle doit être déboutée de ses demandes en indemnisation formées à leur encontre.

Sur les demandes reconventionnelles en paiement du syndicat des copropriétaires

A titre reconventionnel, au visa de l'article 1240 du code civil, le syndicat des copropriétaires sollicite la condamnation in solidum de M et Mme [W], de la SCI Karukera et de M. [P] à prendre en charge les frais de remise en état des parties communes affectées par des infiltrations provenant de leurs lots.

Il forme en outre une demande indemnitaire à l'encontre de Mme [U], à hauteur de 6.000 euros, compte tenu de son attitude vindicative à son encontre.

***

Comme précédemment exposé, aux termes de l'article 1240 du code civil, "tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer."

Sur ce fondement, il incombe à la partie demanderesse, de rapporter la triple preuve de l'existence, d'une faute d'un préjudice et d'un lien causal entre les deux.

Sur ce,

La demande formée par le syndicat des copropriétaires à l'encontre des copropriétaires défendeurs de prendre en charge les frais de de remise en état des parties communes subséquents aux infiltrations ne saurait aboutir dès lors qu'elle est formée au titre de la responsabilité délictuelle et que, comme retenu aux termes des précédents développements, aucune faute de nature délictuelle n'est caractérisée à l'encontre de la société Karukera, de Mme [W] ou de M. [P].
Sa demande indemnitaire formée à l'encontre de Mme [U] au titre d'une prétendue attitude vindicative ne saurait davantage prospérer dès lors qu'il ne produit aux débats aucune pièce de nature à justifier le préjudice dont il sollicite réparation.

Le syndicat des copropriétaires sera donc débouté de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles en paiement.

Sur le recours subrogatoire de l'assureur

La MAIF forme une demande reconventionnelle en paiement à l'encontre de la SCI Karukera et de son assureur, au visa de l'article L.121-12 du code des assurances, soutenant être subrogée dans les droits de son assurée pour la somme totale de 12.472 euros, et arguant de la théorie des troubles anormaux du voisinage.

La MACIF ne répond pas sur le principe de la subrogation légale, mais rappelons qu'aux termes de ses écritures, elle sollicite de limiter le quantum des préjudices allégués et de retenir la ventilation des imputabilités proposée par l'expert, soit 65% la concernant.

***

Aux termes de l'article L.121-12 du code des assurances, alinéa premier, "L'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur".

La subrogation légale au sens de l'article L.121-12 du code des assurances suppose l'existence d'un paiement effectué par l'assureur, ainsi que la preuve de ce que le paiement a été effectué non à titre commercial mais en application du contrat d'assurance.

L'article 9 alinéa 1er de la loi du 10 juillet 1965 dispose en outre que "chaque copropriétaire dispose des parties privatives comprises dans son lot ; il use et jouit librement des parties privatives et des parties communes sous la condition de ne porter atteinte ni aux droits des autres copropriétaires ni à la destination de l'immeuble."

La responsabilité résultant de troubles qui dépassent les inconvénients normaux de voisinage, lesquels doivent être prouvés par celui qui les invoque, est établie objectivement, sans que la preuve d'une faute soit exigée.

Le propriétaire est responsable de plein droit des troubles anormaux de voisinage provenant de son fonds, que ceux-ci aient été causés par son fait ou par celui de personnes avec lesquelles il est lié par contrat, notamment par le preneur de son lot.

Sur ce,

La MAIF produit au débat deux quittances subrogatives datées du 15 juillet 2016, d'un montant respectif de 11.501 € et de 971 €, ainsi que les conditions générales et particulières souscrites par cette dernière et en application desquelles ces paiements sont intervenus.

La subrogation de la MAIF dans les droits de son assurée est dès lors établie, étant relevé au surplus, en toute hypothèse, qu'elle n'est pas contestée.

Rappelons qu'aux termes de son rapport judiciaire, l'expert retient que "Les désordres constatés sur le second œuvre du studio de Mme [U] sont le résultat de la conjonction de plusieurs faits " et que " Parmi les causes principales, figure le mauvais état des joints de la baignoire du deuxième étage et des deux fuites sur le robinet d'arrêt du deuxième étage (fuite identifiée par EUREXO lors du sinistre du 07 juin 2009, pièce 28, fuite du 12 décembre 2012). Parmi les causes secondaires, figurent les infiltrations en provenance des installations privatives des salles de bains du troisième et quatrième étages".

Comme précédemment exposé, si ces éléments sont insuffisants à caractériser une faute délictuelle de la société Karukera comme le prétend à tort Mme [U], ils permettent en revanche, dans le cadre du recours subrogatoire de la MAIF,

de retenir sa responsabilité objective en sa qualité de propriétaire du studio du 2ème étage dès lors que les infiltrations litigieuses trouvant leur origine notamment dans ce studio constituent, par leur caractère répétitif et leur durée, un trouble excédant les inconvénients normaux du voisinage.

La demande en paiement formée par la MAIF sur ce fondement, en sa qualité de subrogée dans les droits de son assurée, est donc justifiée dans son principe.

Néanmoins, comme retenu par l'expert, il convient de tenir compte de ce que les fuites issues du lot de la société Karukera "ont participé entre 60% et 70% aux dégradations sans pour autant qu'il soit possible de déterminer la part de chacune d'entre elles d'autant plus qu'aucune réparation n'ayant été entreprises les fuites les plus récentes ont aggravé les désordres des plus anciennes".

Par conséquent, il convient de condamner in solidum la société Karukera et son assureur la MACIF, à rembourser à la MAIF l'indemnité provisionnelle à hauteur de sa part d'imputabilité dans la survenance du sinistre soit 65%, conformément à la proposition de l'assureur de la société Karukera sur ce point.

La société Karukera et la MACIF sont donc condamnées in solidum à régler à la MAIF la somme de 8.106,80 euros.

Sur les demandes accessoires

Partie succombant principalement au litige, Mme [U] doit être condamnée aux dépens, incluant les frais d'expertise judiciaire et dont distraction au profit des avocats en ayant fait la demande, ainsi qu'à payer au syndicat des copropriétaires une somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il convient en revanche, en équité, de rejeter les demandes formées par les assureurs AXA, la MAIF et la MACIF au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La nature et l'ancienneté du litige commandent d'ordonner l'exécution provisoire.

Les parties seront déboutées du surplus de leurs demandes formées au titre des dépens et des frais irrépétibles ainsi que de leurs autres demandes plus amples ou contraires.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par jugement réputé contradictoire, mis à disposition au greffe et en premier ressort,

REJETTE le moyen d'irrecevabilité soulevé par la Mutuelle Assurances des Commerçants et industriels,

DEBOUTE Mme [K] [U] de l'ensemble de ses prétentions,

DEBOUTE le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 11], représenté par son syndic en exercice, de ses demandes reconventionnelles en paiement,

CONDAMNE in solidum la SCI Karukera et la Mutuelle Assurances des Commerçants et industriels à payer à la Mutuelle Assurance des Instituteurs de France la somme de 8.106,80 euros,

REJETTE le surplus des demandes en paiement de la Mutuelle Assurance des Instituteurs de France,

CONDAMNE Mme [K] [U] à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 11], représenté par son syndic en exercice, une somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

REJETTE le surplus des demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Mme [K] [U] aux dépens,

DIT que les avocats en la cause en ayant fait la demande, pourront, chacun en ce qui le concerne, recouvrer sur la partie condamnée ceux des dépens dont ils auraient fait l'avance sans avoir reçu provision en application de l'article 699 du code de procédure civile,

PRONONCE l'exécution provisoire de la présente décision,

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes formées au titre des dépens et des frais irrépétibles ainsi que de leurs autres demandes.

Fait et jugé à Paris le 07 Mai 2024.

La GreffièreLa Présidente


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 8ème chambre 1ère section
Numéro d'arrêt : 19/11196
Date de la décision : 07/05/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 15/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-07;19.11196 ?
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