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02/05/2024 | FRANCE | N°21/00658

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Ps ctx protection soc 3, 02 mai 2024, 21/00658


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] 2 Expéditions exécutoires délivrées aux parties en LRAR le :
2 Expéditions délivrées aux avocats en LS le :




PS ctx protection soc 3

N° RG 21/00658 - N° Portalis 352J-W-B7F-CUDPL

N° MINUTE :


Requête du :
26 Mars 2021













JUGEMENT
rendu le 02 Mai 2024
DEMANDERESSE

C.I.P.A.V.
[Adresse 4]
[Localité 3]

Représentée par Maître Kévin BOUTHIER, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant


DÉFEN

DERESSE

Madame [J] [K]
[Adresse 1]
[Localité 2]

Représentée par Maître Arnaud MARGUET, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant


COMPOSITION DU TRIBUNAL

Mathilde SEZER, Juge
Laurent BARRO...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] 2 Expéditions exécutoires délivrées aux parties en LRAR le :
2 Expéditions délivrées aux avocats en LS le :

PS ctx protection soc 3

N° RG 21/00658 - N° Portalis 352J-W-B7F-CUDPL

N° MINUTE :

Requête du :
26 Mars 2021

JUGEMENT
rendu le 02 Mai 2024
DEMANDERESSE

C.I.P.A.V.
[Adresse 4]
[Localité 3]

Représentée par Maître Kévin BOUTHIER, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

DÉFENDERESSE

Madame [J] [K]
[Adresse 1]
[Localité 2]

Représentée par Maître Arnaud MARGUET, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Mathilde SEZER, Juge
Laurent BARROO, Assesseur
Marion FRANCOIS, Assesseur

assistés de Marie LEFEVRE, Greffière

Décision du 02 Mai 2024
PS ctx protection soc 3
N° RG 21/00658 - N° Portalis 352J-W-B7F-CUDPL

DEBATS

A l’audience du 13 Mars 2024 tenue en audience publique, avis a été donné aux parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 02 Mai 2024.

JUGEMENT

Rendu par mise à disposition au greffe
Contradictoire
en dernier ressort

EXPOSE DU LITIGE

Par courrier recommandé du 26 mars 2021, Madame [J] [K] a saisi le tribunal judiciaire de Paris aux fins de former opposition à la contrainte établie le 22 février 2021 par le directeur de la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse (la CIPAV) et signifiée le 15 mars 2021, pour un montant de 2 089, 22 euros au titre de cotisations et majorations de retard pour l’année 2019.

Après de nombreux renvois, à la demande du conseil de Madame [K], l’affaire a été plaidée à l’audience du 13 mars 2024 à laquelle les parties étaient toutes deux représentées.

Représentée par son conseil, la CIPAV conclut à la validation de la contrainte pour le montant de 2 089, 22 euros, et à la condamnation de Madame [K] à lui payer cette somme, ainsi que les frais de signification de la contrainte et la somme de 250 euros au titre des frais irrépétibles.

Elle fait valoir que la contrainte a bien été précédée de l’envoi d’une mise en demeure, régulièrement adressée par courrier recommandé revenu avec la mention « pli avisé non réclamé ».
Elle ajoute que la signification de la contrainte à un mineur est possible dès lors que celui-ci dispose du discernement nécessaire pour recevoir l’acte ce qui était le cas du fils de Madame [K].

Sur le fond, elle indique que Madame [K] est affiliée à la CIPAV depuis le mois d’avril 2016 et qu’il ressort de son portail URSSAF qu’elle exerce toujours au jour de l’audience une activité libérale au titre de laquelle elle doit cotiser pour les trois régimes gérés par cet organisme.
Elle expose en outre les calculs effectués pour déterminer le montant des cotisations dues.

En défense, Madame [K] demande au tribunal de :
Annuler la contrainte du 22 février 2021 ;Rejeter l’ensemble des demandes de la CIPAV ; Condamner la CIPAV à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ; Condamner la CIPAV aux dépens.

Elle soutient que la contrainte émise le 22 février 2021 est nulle faute d’avoir été précédée de l’envoi d’une mise en demeure, le courrier versé par la CIPAV faisant apparaître que l’accusé de réception est revenu avec la mention pli avisé non réclamé, attestant qu’elle n’a jamais eu connaissance de cette mise en demeure.
Elle fait en outre valoir que la contrainte doit être annulée dès lors qu’elle a été signifiée à domicile, par remise de l’acte à son fils qui n’était alors âgé que de douze ans et ainsi non doté du discernement nécessaire pour recevoir un tel acte.

Elle fait valoir qu’elle a été affiliée à la CIPAV à l’époque où elle était co-gérante majoritaire de la société SARL [5] ayant une activité d’architecture d’intérieur mais qu’elle ne détient plus aucune part dans cette société depuis le 1er janvier 2017 ; que sa seule activité indépendante est désormais celle de gérante de la SARL [6] qui a pour seule activité la production audiovisuelle, activité non visée par l’article L. 640-1 du code de la sécurité sociale.

L’affaire a été mise en délibéré au 2 mai 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la régularité de la contrainte,

Aux termes de l'article R.133-3 du code de la sécurité sociale, « si la mise en demeure ou l'avertissement reste sans effet au terme du délai d'un mois à compter de sa notification, le directeur de l'organisme créancier peut décerner la contrainte mentionnée à l'article L.244-9 ou celle mentionnée à l'article L.161-1-5. La contrainte est signifiée au débiteur par acte d'huissier de justice ou par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. À peine de nullité, l'acte d'huissier ou la lettre recommandée mentionne la référence de la contrainte et son montant, le délai dans lequel l'opposition doit être formée, l'adresse du tribunal compétent et les formes requises pour sa saisine.
L'huissier de justice avise dans les huit jours l'organisme créancier de la date de signification.
Le débiteur peut former opposition par inscription au secrétariat du tribunal compétent dans le ressort duquel il est domicilié ou par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée au secrétariat dudit tribunal dans les quinze jours à compter de la signification. L'opposition doit être motivée ; une copie de la contrainte contestée doit lui être jointe. Le secrétariat du tribunal informe l'organisme créancier dans les huit jours de la réception de l'opposition.
La décision du tribunal statuant sur opposition est exécutoire de droit à titre provisoire. »

Sur l’envoi préalable d’une mise en demeure,
En l’espèce, la CIPAV justifie avoir adressé à Madame [K] une mise en demeure par courrier du 27 novembre 2020, dont l’accusé réception lui est revenu avec la « mention pli avisé non réclamé », pour un montant de 2089, 22 euros au titre des cotisations dues pour l’année 2019.

C’est à juste titre que la CIPAV soutient qu’il importe peu que l’adhérent n’ait pas réclamé la mise en demeure dès lors que la mention « pli avisé non réclamé » permet d’établir que le courrier a été délivré à l’adresse de sa destinataire et qu’il appartenait à celle-ci de retirer ce courrier afin de garantir ses droits.

La contrainte ayant été émise le 22 février 2021, soit plus d’un mois après l’envoi de la mise en demeure, celle-ci est régulière.

Sur les conditions de la signification de la contrainte,
Aux termes de l’article 655 du code de procédure civile, « si la signification à personne s'avère impossible, l'acte peut être délivré soit à domicile, soit, à défaut de domicile connu, à résidence.

L'huissier de justice doit relater dans l'acte les diligences qu'il a accomplies pour effectuer la signification à la personne de son destinataire et les circonstances caractérisant l'impossibilité d'une telle signification.

La copie peut être remise à toute personne présente au domicile ou à la résidence du destinataire.

La copie ne peut être laissée qu'à condition que la personne présente l'accepte et déclare ses nom, prénoms et qualité. (…) »

En l’espèce, par acte du 15 mars 2021, Madame [K] ne conteste pas que la signification de la contrainte ait été faite à son domicile et l’acte précise qu’il a été remis à Monsieur [C] [I]-[K], se déclarant être le fils de Madame [K] et ayant certifié la réalité du domicile.

Le mineur étant, selon les déclarations de Madame [K], alors âgé de 12 ans - et jugé apte par l’intéressée à rester seul au domicile - il était doté du discernement nécessaire pour recevoir l’acte d’huissier.

Contrairement à ce qu’affirme Madame [K], aucune disposition ne contraignait l’huissier à s’assurer de l’identité de la personne ayant accepté de recevoir l’acte dès lors que celle-ci se trouvait bien au domicile du destinataire.

Le moyen doit donc être écarté.

Sur le bien-fondé de l’affiliation de la requérante à la CIPAV,

A titre liminaire, il convient de rappeler qu’il ressort de la lecture a contrario du 11° de l’article L. 311-3 du code de la sécurité sociale que le gérant majoritaire d’une société à responsabilité limitée est considéré comme exerçant une activité indépendante et relève à ce titre du régime social des indépendants.

En outre, en vertu de l’article L. 171-2 du même code, « les personnes exerçant simultanément plusieurs activités sont affiliées et cotisent simultanément aux régimes dont relèvent ces activités » de sorte que l’exercice simultané d’une activité salariée et d’une activité indépendante ne dispense pas l’assuré de cotiser au régime des indépendants.

Une activité libérale est communément définie comme toute activité non salariée, non agricole, non artisanale et non commerciale.
Décision du 02 Mai 2024
PS ctx protection soc 3
N° RG 21/00658 - N° Portalis 352J-W-B7F-CUDPL

La CIPAV assure, pour le compte de la caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales, en application des article L. 642-1 et L. 642-5 du code de la sécurité sociale, la gestion des trois régimes obligatoires des professions libérales mentionnées à l’article 1.3 de ses statuts, à savoir : l’assurance vieillesse de base, la retraite complémentaire et le risque invalidité-décès.

A ce titre, et avant l’entrée en vigueur de la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021, elle était notamment habilitée à recouvrer les cotisations dues au titre de ces trois régimes.

L’article 15 de la loi n°2017-1836 de financement de la sécurité sociale pour 2018 du 30 décembre 2017 a réduit le périmètre d’intervention de la CIPAV de sorte que seules les professions mentionnées expressément à l’article L. 640-1 du code de la sécurité sociale relèvent désormais des trois régimes gérés par la CIPAV.

En l’espèce, Madame [K] a été affiliée à la CIPAV en qualité de co-gérante des SARL [5] et [8] à compter du 20 mars 2016.
A compter du 1er juin 2017, Madame [K] justifie de ce qu’elle a cédé ses parts de la SARL [5] et est devenue seule associée de la société [7], devenue la SARL [6].

Il est également établi que cette société a pour seule activité la production de films cinématographiques et de programmes télévisuels.

En qualité de gérante majoritaire de cette société, Madame [K] exerce une activité indépendante et une activité libérale qui ne figure pas dans la liste de l’article L. 640-1 du code de la sécurité sociale.

Cependant, il résulte des dispositions de l’article 50 X de la loi n° 2016-1827 du 23 décembre 2016, que la réduction du champ d’affiliation des professions libérales à la CIPAV ne concerne que les travailleurs indépendants créant leur activité :

« 1° A compter d'une date fixée par décret, et au plus tard le 1er janvier 2018, pour ceux qui relèvent de l'article L. 133-6-8 du code de la sécurité sociale ;

2° A compter d'une date fixée par décret, et au plus tard le 1er janvier 2019, pour ceux ne relevant pas du même article L. 133-6-8. »

Il en découle que les travailleurs indépendants exerçant une activité libérale ne relevant pas de la liste de l’article L. 640- modifiée mais ayant été affiliés à la CIPAV avant le 1er janvier 2019 y demeurent affiliés sauf à exercer le droit d’option qui leur était ouvert du 1er janvier 2019 au 31 décembre 2023 par le décret n° 2019-1358 du 13 décembre 2019 pour être affiliés à l’assurance vieillesse des travailleurs indépendants. Cette demande devait être adressée à l’URSSAF dans le délai convenu, et opérait, sous réserve que le professionnel soit à jour du paiement de ses cotisations à la CNAVPL et à la CIPAV, changement définitif de régime à compter du 1er janvier suivant l’année de la demande.

Or, dans le cadre du présent litige, Madame [K] n’invoque ni ne prouve avoir adressé une telle demande à l’URSSAF. Elle produit uniquement une décision de la commission de recours amiable de cet organisme qui semble reconnaître l’existence d’une demande implicite en date du 12 avril 2022 et préconise une nouvelle étude de son affiliation, à effet du 1er juin 2023.

Il en résulte en tout état de cause qu’avant cette date, Madame [K] relevait bien des régimes gérés par la CIPAV et devait s’acquitter des cotisations afférentes.

La contrainte litigieuse étant relative aux cotisations dues au titre des années 2019 celle-ci est fondée et Madame [K] ne contestant pas le calcul du montant des cotisations opéré par la CIPAV, la contrainte sera confirmée pour son entier montant et la requérante condamnée à verser la somme de 2 089, 22 euros.

Sur les mesures accessoires,

En vertu de l’article R. 133-6 du code de la sécurité sociale, « Les frais de signification de la contrainte faite dans les conditions prévues à l'article R133-3, ainsi que de tous actes de procédure nécessaires à son exécution, sont à la charge du débiteur, sauf lorsque l'opposition a été jugée fondée. »

En l’espèce, l’opposition n’étant pas fondée, les frais de signification de la contrainte dont il est justifié pour un montant de 73, 04 euros, sont à la charge de Madame [K].

*

Madame [K], qui succombe à la présente instance, est condamnée aux dépens en application des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile.

*

Elle sera en conséquence déboutée de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile. En revanche, il apparaît équitable, au vu de la situation respective des parties, de condamner Madame [K] à payer à la CIPAV de la somme de 150 euros au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par décision contradictoire, rendue en dernier ressort et mise à disposition au greffe,

DEBOUTE Madame [J] [K] de son opposition ;

VALIDE la contrainte émise le 22 février 2021 par le directeur de la CIPAV et signifiée le 15 mars 2021 pour un montant de 2 089, 22 euros au titre des cotisations et majorations de retard dues par Madame [J] [K] au titre de l’année 2019 ;

CONDAMNE Madame [J] [K] à payer à la CIPAV la somme de 2 089, 22 euros ;

DIT que les frais de signification de la contrainte (73, 04 euros) sont à la charge de Madame [J] [K] ;

CONDAMNE Madame [J] [K] au paiement des dépens de l’instance ;

DEBOUTE Madame [J] [K] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Madame [J] [K] à payer à la CIPAV la somme de 150 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Fait et signé à Paris, le 2 mai 2024.

La greffièreLa présidente

N° RG 21/00658 - N° Portalis 352J-W-B7F-CUDPL

EXPÉDITION exécutoire dans l’affaire :

Demandeur : C.I.P.A.V.

Défendeur : Mme [J] [K]

EN CONSÉQUENCE, LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE mande et ordonne :

A tous les huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ladite décision à exécution,
Aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux judiciaires d`y tenir la main,
A tous commandants et officiers de la force publique de prêter main forte lorsqu`ils en seront légalement requis.

En foi de quoi la présente a été signée et délivrée par nous, Directeur de greffe soussigné au greffe du Tribunal judiciaire de Paris.

P/Le Directeur de Greffe

8ème page et dernière


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Ps ctx protection soc 3
Numéro d'arrêt : 21/00658
Date de la décision : 02/05/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à l'ensemble des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 08/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-02;21.00658 ?
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