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02/05/2024 | FRANCE | N°20/02942

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Ps ctx protection soc 3, 02 mai 2024, 20/02942


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] 2 Expéditions exécutoires délivrées aux parties en LRAR le :
1 Expéditions délivrées aux avocats en LS le :




PS ctx protection soc 3

N° RG 20/02942 - N° Portalis 352J-W-B7E-CTG74

N° MINUTE :


Requête du :

18 Novembre 2020













JUGEMENT
rendu le 02 Mai 2024
DEMANDEUR

Monsieur [P] [C]
[Adresse 1]
[Localité 2]

Représenté par Maître Dragan IVANOVIC, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant


DÉFENDERESSE

ASSURANCE MALADIE DE [Localité 5] DIRECTION CONTENTIEUX ET LUTTE CONTRE LA FRAUDE
POLE CONTENTIEUX GENERAL
[Adresse 4]
[Localité 3]

Représentée par Maître Amy TABOURE de la SELA...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] 2 Expéditions exécutoires délivrées aux parties en LRAR le :
1 Expéditions délivrées aux avocats en LS le :

PS ctx protection soc 3

N° RG 20/02942 - N° Portalis 352J-W-B7E-CTG74

N° MINUTE :

Requête du :

18 Novembre 2020

JUGEMENT
rendu le 02 Mai 2024
DEMANDEUR

Monsieur [P] [C]
[Adresse 1]
[Localité 2]

Représenté par Maître Dragan IVANOVIC, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

DÉFENDERESSE

ASSURANCE MALADIE DE [Localité 5] DIRECTION CONTENTIEUX ET LUTTE CONTRE LA FRAUDE
POLE CONTENTIEUX GENERAL
[Adresse 4]
[Localité 3]

Représentée par Maître Amy TABOURE de la SELARL KATO & LEFEBVRE ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, avocats plaidant

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Mathilde SEZER, Juge
Laurent BARROO, Assesseur
Marion FRANCOIS, Assesseur

assistés de Marie LEFEVRE, Greffière

Décision du 02 Mai 2024
PS ctx protection soc 3
N° RG 20/02942 - N° Portalis 352J-W-B7E-CTG74

DEBATS

A l’audience du 13 Mars 2024 tenue en audience publique, avis a été donné aux parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 02 Mai 2024.

JUGEMENT

Prononcé en audience publique
Contradictoire
en premier ressort

EXPOSE DU LITIGE

Par lettre recommandée avec avis de réception adressée le 18 novembre 2020 avant d'être réceptionnée le lendemain au greffe, Monsieur [P] [C] a contesté devant le Pôle Social du Tribunal Judiciaire de Paris une décision rendue par la Commission de Recours Amiable de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de [Localité 5] (la caisse) lors de sa séance du 15 septembre 2020 lui refusant la reconnaissance du caractère professionnel d'une affection - hypoacousie de perception - déclarée le 30 novembre 2018 au titre du tableau n° 42 des maladies professionnelles.

Par jugement avant-dire droit en date du 28 septembre 2021, le Tribunal a notamment, déclaré le recours de Monsieur [C] recevable, désigné le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP) de la région Bretagne afin qu’il donne son avis sur l’origine professionnelle de la maladie déclarée le 30 novembre 2018 et sursis à statuer dans l’attente du dépôt de l’avis du CRRMP.

Après plusieurs renvois dans l’attente de l’avis du CRRMP, l’affaire a été plaidée à l’audience du 13 mars 2023.

A l’audience, Monsieur [C], représenté par son conseil, demande au tribunal de dire que sa pathologie relève de la législation sur les risques professionnels.

Il fait valoir qu’il exerce la profession de peintre en bâtiment, activité dans le cadre de laquelle il a été régulièrement appelé à utiliser des appareils électriques bruyants et à évoluer dans un contexte de nuisances sonores. Son étant de santé s’est dégradé avec l’apparition d’une gêne à l’audition et de la perception de bruits « anormaux ». C’est dans ce contexte qu’il a réalisé un examen audiométrique le 4 juin 2018 qui révèle un déficit de 37 décibels qui s’est par la suite accru.
Le CRRMP motive son avis par le dépassement du délai de prise en charge, or, il rappelle que le délai prévu par le tableau n° 42 est d’un an et soutient que la date première constatation de l’affection est le 18 mai 2018, son médecin ayant à cette date constaté une chute de l’audition et l’examen du 4 juin n’ayant fait que confirmer le diagnostic. En outre, il n’a cessé son activité que le 31 mai 2017 de sorte que le délai règlementaire est en réalité respecté de sorte que doit être retenu l’existence d’un lien de causalité entre la pathologie et l’exposition professionnelle.

En défense, la caisse, également représentée par son conseil, demande au tribunal d’entériner l’avis du second CRRMP et ainsi de rejeter les demandes de Monsieur [C].

Elle fait valoir que l’avis du CRRMP est précis et motivé. Elle ajoute que la caisse a retenu la date de l’audiométrie comme première constatation de la pathologie, soit le 4 juin 2018 et relève que Monsieur [C] invoque une cessation d’activité et non une fin d’exposition au risque qui constituent deux notions distinctes. Elle confirme que l’enquête a permis d’établir que la fin de l’exposition au risque était le 1er janvier 2016 et soutient que le requérant n’apporte aux débats aucun éléments de nature à remettre en cause l’avis du CRRMP.

L’affaire a été mise en délibéré au 2 mai 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

L'article L.461-1 du code de la sécurité sociale dispose que « les dispositions du présent livre sont applicables aux maladies d'origine professionnelle sous réserve des dispositions du présent titre. En ce qui concerne les maladies professionnelles, est assimilée à la date de l'accident :
1° La date de la première constatation médicale de la maladie ;
2° Lorsqu'elle est postérieure, la date qui précède de deux années la déclaration de maladie professionnelle mentionnée au premier alinéa de l'article L. 461-5 ;
3° Pour l'application des règles de prescription de l'article L. 431-2, la date à laquelle la victime est informée par un certificat médical du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle.
Est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau.
Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime.
Peut être également reconnue d'origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles lorsqu'il est établi qu'elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu'elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d'un taux évalué dans les conditions mentionnées à l'article L. 434-2 et au moins égal à un pourcentage déterminé.
Dans les cas mentionnés aux deux alinéas précédents, la caisse primaire reconnaît l'origine professionnelle de la maladie après avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles. La composition, le fonctionnement et le ressort territorial de ce comité ainsi que les éléments du dossier au vu duquel il rend son avis sont fixés par décret. L'avis du comité s'impose à la caisse dans les mêmes conditions que celles fixées à l'article L. 315-1.
Les pathologies psychiques peuvent être reconnues comme maladies d'origine professionnelle, dans les conditions prévues aux septième et avant-dernier alinéas du présent article. Les modalités spécifiques de traitement de ces dossiers sont fixées par voie réglementaire ».

En application de l'article R.142-17-2 du code de la sécurité sociale, lorsque le différend porte sur la reconnaissance de l'origine professionnelle d'une maladie relevant d’un des tableaux annexés à la partie réglementaire du code de la sécurité sociale dont l’une ou plusieurs conditions ne sont pas remplies, il incombe au tribunal de recueillir préalablement l'avis d'un comité régional autre que celui qui a déjà été saisi par la caisse. Le tribunal désigne alors le comité d'une des régions les plus proches.

En l’espèce, Monsieur [C] était gérant salarié de la SARL [6] lorsqu'il a complété le 30 novembre 2018 une déclaration de maladie professionnelle, accompagnée d'un certificat médical initial en date du 30 novembre 2018 faisant mention d'une « hypoacousie de perception par lésion cochléaire irréversible accompagnée d’acouphènes ».

Cette maladie figure au tableau n° 42 des maladies professionnelles, lequel prévoit un délai de prise en charge d’un an sous réserve d’un délai d’exposition d’un an ainsi qu’une liste limitative de vingt-cinq travaux susceptibles de provoquer la pathologie.

Monsieur [C] fait valoir qu’il a été exposé à des bruits lésionnels dans le cadre de son métier de peintre en bâtiment. Il est constant que cette activité ne figure pas dans la liste précitée.

En outre, la caisse a fixé la date de fin d’exposition au risque au 1er janvier 2016 et retient comme date de première constatation de la pathologie, la date du 4 juin 2018 à laquelle a été réalisé l’examen audiométrique ayant révélé la perte d’audition.

Deux des conditions du tableau n’étant ainsi pas remplies, la caisse a transmis le dossier au CRRMP de la Région Ile-de-France.

Le CRRMP d’Ile-de-France a conclu au rejet de la demande de reconnaissance d’une maladie professionnelle formée par Monsieur [C] aux motifs que : « la seule audiométrie communiquée datant du 04/06/2018 met en évidence en conduction osseuse un déficit moyen de 38.75 dB à droite et 36.25 dB à gauche soit légèrement supérieur aux 35 décibels sur la meilleure oreille exigés par la désignation de la maladie du tableau 42.
Les courbes vocales sont un peu plus mauvaises.
Compte tenu de l’importance du délai par rapport à la fin de l’activité professionnelle le 1er janvier 2016 (2 ans 5mois), le comité ne retient pas de lien direct entre le travail habituel et la maladie déclarée par certificat médical du 30/11/2018 ».

Saisi par la juridiction, le CRRMP de la région Bretagne a également rendu un avis défavorable à la prise en charge de la pathologie déclarée par Monsieur [C], considérant que : « il s’agit d’un homme de 57 ans à la date de la constatation médicale, exerçant la profession de peintre en bâtiment. L’avis du médecin du travail n’a pas été reçu. Le délai observé est de 2 ans et 5 mois au lieu du délai requis dans le tableau de 1 an (soit 1 an et 5 mois de dépassement. Le dernier jour de travail exposant est le 1er janvier 2016.
L’histoire ne permet pas de faire remonter cette pathologie à une date antérieure à la date de première constatation médicale. (…) Le comité ne retrouve pas d’élément objectif permettant de réduire le délai de prise en charge. En conséquence, il ne peut être retenu de lien direct entre l’affection présentée et le travail habituel de la victime. »

Si, en tout état de cause, le tribunal n’est pas lié par l’avis des CRRMP, il appartient au requérant de rapporter la preuve du lien direct et essentiel qu’il invoque entre sa pathologie et son travail.

En l’espèce, le demandeur soutient que la date de première constatation de la pathologie doit être fixée au 18 mai 2018 et la fin de l’exposition au 31 mai 2017 de sorte que le délai de prise en charge est respecté.

Or, si Monsieur [C] verse aux débats une attestation du docteur [H] (ORL) aux termes de laquelle celui-ci indique avoir constaté une perte d’audition lors de sa consultation du 18 mai 2018, il n’en demeure pas moins que malgré une fin d’activité de son entreprise au 31 mai 2017 (selon extrait kbis), Monsieur [C] a lui-même indiqué lors de l’enquête diligentée par la caisse qu’il n’avait plus participé à aucun chantier depuis décembre 2015-janvier 2016, ce qui justifie que la caisse ait fixé la date de fin de l’exposition au risque au 1er janvier 2016.

En conséquence, le délai de prise en charge prévu au tableau n°42 n’est pas respecté.

Monsieur [C] n’apportant par ailleurs aucun nouvel élément de nature à remettre en cause les avis rendus par les CRRMP, il convient de rejeter son recours, en l’absence de démonstration d’un lien de causalité direct entre la maladie en cause et son travail habituel.

Eu égard à la nature du litige, chaque partie conservera la charge de ses dépens.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal judiciaire de Paris, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par décision contradictoire, rendue en premier ressort et mise à disposition au greffe,

DIT que la pathologie (hypoacousie de perception) déclarée par Monsieur [P] [C] le 30 novembre 2018 ne peut être prise en charge au titre de la législation sur les maladies professionnelles ;

DEBOUTE Monsieur [P] [C] de son recours à l’encontre de la décision de refus de prise en charge de la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 5] ;

DIT que chaque partie conserve la charge de ses dépens ;

Ainsi jugé et mis à disposition au greffe du tribunal le 2 mai 2024, et signé par la présidente et la greffière.

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE
N° RG 20/02942 - N° Portalis 352J-W-B7E-CTG74

EXPÉDITION exécutoire dans l’affaire :

Demandeur : M. [P] [C]

Défendeur : ASSURANCE MALADIE DE [Localité 5] DIRECTION CONTENTIEUX ET LUTTE CONTRE LA FRAUDE

EN CONSÉQUENCE, LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE mande et ordonne :

A tous les huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ladite décision à exécution,
Aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux judiciaires d`y tenir la main,
A tous commandants et officiers de la force publique de prêter main forte lorsqu`ils en seront légalement requis.

En foi de quoi la présente a été signée et délivrée par nous, Directeur de greffe soussigné au greffe du Tribunal judiciaire de Paris.

P/Le Directeur de Greffe

7ème page et dernière


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Ps ctx protection soc 3
Numéro d'arrêt : 20/02942
Date de la décision : 02/05/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 08/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-02;20.02942 ?
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