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30/04/2024 | FRANCE | N°22/08681

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 8ème chambre 1ère section, 30 avril 2024, 22/08681


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expédition exécutoire
délivrée le:
à Maître TURBE

Copie certifiée conforme
délivrée le :
à Maître SCHAEFFER





8ème chambre
1ère section


N° RG 22/08681
N° Portalis 352J-W-B7G-CXNY6


N° MINUTE :


Assignation du :
12 Juillet 2022








JUGEMENT
rendu le 30 Avril 2024

DEMANDERESSE

Madame [L] [R]
[Adresse 1]
[Localité 4]

représentée par Maître Wilfried SCHAEFFER de la SELEURL SCHAEFF

ER AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D0615


DÉFENDEUR

Syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] représenté par son syndic, la société STARES FRANCE
[Adresse 2]
[Localité 3]

représenté par M...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expédition exécutoire
délivrée le:
à Maître TURBE

Copie certifiée conforme
délivrée le :
à Maître SCHAEFFER

8ème chambre
1ère section


N° RG 22/08681
N° Portalis 352J-W-B7G-CXNY6

N° MINUTE :

Assignation du :
12 Juillet 2022

JUGEMENT
rendu le 30 Avril 2024

DEMANDERESSE

Madame [L] [R]
[Adresse 1]
[Localité 4]

représentée par Maître Wilfried SCHAEFFER de la SELEURL SCHAEFFER AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D0615

DÉFENDEUR

Syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] représenté par son syndic, la société STARES FRANCE
[Adresse 2]
[Localité 3]

représenté par Maître Bruno TURBÉ, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #B0237

Décision du 30 Avril 2024
8ème chambre
1ère section
N° RG 22/08681 - N° Portalis 352J-W-B7G-CXNY6

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Par application des articles R.212-9 du Code de l’Organisation Judiciaire et 812 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été attribuée au Juge unique.

Avis en a été donné aux avocats constitués qui ne s’y sont pas opposés.

Monsieur Julien FEVRIER, Juge, statuant en juge unique.

assisté de Madame Lucie RAGOT, Greffier,

DÉBATS

A l’audience du 31 Janvier 2024
tenue en audience publique

JUGEMENT

Prononcé par mise à disposition au greffe
Contradictoire
en premier ressort

EXPOSÉ DU LITIGE

L'immeuble situé [Adresse 1] est constitué en copropriété.

L'assemblée générale des copropriétaires de l'immeuble en date du 12 mai 2022 a voté en faveur de la création d'un appentis au dessus des containers dans la cour commune par les résolutions n° 18.1 à 18.6 (principe des travaux, choix des entreprises, honoraires syndic sur travaux votés, fixation du budget, mandat au conseil syndical pour choix entreprise, financement).

Soutenant être propriétaire du lot n° 2 de l'immeuble (appartement au rez de chaussée incluant deux chambres sur cour) et avoir voté contre les résolutions litigieuses précitées, Mme [L] [X] a assigné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] devant le tribunal par acte d'huissier de justice du 12 juillet 2022 afin d'obtenir l'annulation de celles-ci et la démolition de l'appentis dont la construction a été votée.

*

Dans ses dernières écritures notifiées par le réseau privé des avocats le 17 octobre 2022, Mme [L] [X] demande au tribunal, au visa des articles 26 et 42 de la loi du 10 juillet 1965 et 1231-1 du code civil, de :

- la déclarer recevable et bien fondée en son action ;

- dire que les résolutions n° 18.1 à 18.6 de l'assemblée générale du 12 mai 2022 portent atteinte aux modalités de jouissance de ses parties privatives et auraient dû être votées à l'unanimité, au minimum à la majorité de l'article 26 de la loi du 11 juillet 1965 ;
- annuler les résolutions n° 18.1 à 18.6 de l'assemblée générale du 12 mai 2022 ;
- en cas d'exécution des résolutions contestées sans attendre l'issue de la présente procédure, condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] à procéder à la démolition de l'appentis litigieux, sous astreinte de 200 € par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir et à lui verser la somme de 10.000 €, en réparation de son préjudice du fait des nuisances et du trouble de jouissance subis ;
- débouter le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;
- condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] à lui payer la somme de 3.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir nonobstant appel et sans caution ;
- condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] en tous les dépens dont distraction au profit de la Selarl Schaeffer Avocats, représentée par maître Wilfried Schaeffer, avocat au barreau de Paris, qui pourra les recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

*

Dans ses dernières écritures notifiées par le réseau privé des avocats le 1er octobre 2022, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] demande au tribunal, au visa de la loi du 10 juillet 1965 et de son décret d'application, de :

- le recevoir en ses présentes écritures ;
Y faisant droit
- à titre principal, juger que Mme [L] [X] irrecevable en ses demandes, fins et conclusions ;
- à titre subsidiaire, juger Mme [L] [X] mal fondée en ses demandes, fins et conclusions ;
- en conséquence, l'en débouter ;
- en tout état de cause, condamner Mme [L] [X] à lui payer une somme de 5.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de la présente instance dont distraction au profit de maître Bruno Turbe.

*

Il est renvoyé aux conclusions récapitulatives des parties pour l'exposé des moyens de droit et de fait à l'appui de leurs prétentions conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

La clôture de la procédure a été ordonnée le 17 avril 2023 et l'affaire a été plaidée le 31 janvier 2024. La décision a été mise en délibéré au 30 avril 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les demandes principales de Mme [X]

A l'appui de ses demandes principales, Mme [X] fait valoir que :

- les fenêtres de ses chambres donnent directement sur la cour de l'immeuble ;
- la résolution litigieuse a voté les travaux de création d'un local destiné à abriter les poubelles des copropriétaires et occupants de l'immeuble, lequel doit être installé directement en face de ses fenêtres ;
- la résolution litigieuse doit être annulée car elle porte atteinte aux modalités de jouissance de ses parties privatives et est de nature à lui causer un préjudice certain en raison de la moins-value occasionnée à son bien ;
- elle a voté contre les résolutions litigieuses et a engagé son action dans le délai de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965 ;
- elle justifie de sa qualité de propriétaire en versant aux débats son acte de propriété ;
- la demande de démolition est soumise à la condition que l'abri poubelles soit créé en cours de procédure ;
- ses demandes sont recevables ;
- actuellement les containers d'ordures ménagères sont situés dans la cour à l'écart de son appartement ;
- le projet est de nature à lui causer un trouble de jouissance dans sa vie quotidienne ;
- le règlement de copropriété comporte une clause d'habitation bourgeoise à laquelle la résolution litigieuse est de nature à contrevenir ;
- la résolution litigieuse devait être votée à l'unanimité et au minimum à la majorité de l'article 26 ;
- seule la majorité de l'article 25 a été atteinte par le vote litigieux ;
- les résolutions litigieuses doivent être annulées ;
- il n'y a aucune amélioration par rapport à la situation actuelle du fait de la création de l'appentis.

En défense, le syndicat des copropriétaires fait valoir que :

- les 4 poubelles de l'immeuble ont toujours été entreposées dans la petite cour commune intérieure le long du mur du fond à l'endroit où la cour ne comporte pas de fenêtres ;
- il a envisagé la création d'un appentis destiné à les protéger de la pluie et des intempéries et améliorer l'esthétique et le visuel de la petite cour commune ;
- l'abri doit être installé sur le côté du mur de la cour ne disposant pas de fenêtres (mur du fond de la cour) et non sous les fenêtres de la demanderesse ;
- la demanderesse ne justifie pas d'un intérêt et d'une qualité à agir puisqu'elle ne justifie pas de sa qualité de propriétaire ;
- la demanderesse ne justifie pas d'un intérêt à agir pour demander la démolition sous astreinte de l'abri poubelles qui n'a pas même été créé ;
- la majorité de l'article 24 et celle de l'article 25 est atteinte ;
- il n'existe aucune atteinte aux modalités de jouissance des parties privatives de la demanderesse ;

- l'objet de la résolution contestée vise à fixer un emplacement aux poubelles qui soit au mieux des intérêts de tous ;
- la création d'un appentis ne nécessite pas un vote à la majorité de l'article 26 ;
- il n'appartient pas aux juges du fond d'apprécier l'opportunité de l'emplacement des poubelles.

Sur ce

Vu l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965 qui prévoit que les actions en contestation des décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants dans un délai de deux mois à compter de la notification du procès-verbal d'assemblée, sans ses annexes.

En l'espèce, Mme [X] verse aux débats un acte authentique du 11 janvier 2017 qui démontre sa qualité de copropriétaire dans l'immeuble.

Le procès-verbal de l'assemblée générale du 12 mai 2022 qu'elle produit atteste de sa qualité de copropriétaire opposant aux résolutions litigieuses.

Le procès-verbal précité lui a été envoyé le 19 mai 2022 selon tampon de la poste sur l'enveloppe produite et l'assignation a été délivrée le 12 juillet 2022, c'est à dire dans le délai de deux mois pour agir.

Il en ressort que les conditions de recevabilité de l'article 42 précité sont réunies.

En outre, Mme [X] justifie d'un intérêt à agir puisqu'elle fait valoir que la construction d'un abri de stockage des poubelles communes lui causera un trouble de jouissance.

Son action visant à solliciter l'annulation des résolutions 18.1 à 18.6 est donc parfaitement recevable.

*

Vu l'article 26 de la loi du 10 juillet 1965 qui précise que "sont prises à la majorité des membres du syndicat représentant au moins les deux tiers des voix les décisions concernant : b) la modification ou éventuellement l'établissement, du règlement de copropriété dans la mesure où il concerne la jouissance, l'usage et l'administration des parties communes...

L'assemblée générale ne peut, à quelque majorité que ce soit, imposer à un copropriétaire une modification à la destination de ses parties privatives ou aux modalités de leur jouissance, telles qu'elles résultent du règlement de copropriété...".

Vu l'article 25 de la loi du 10 juillet 1965 qui dispose que "ne sont adoptées qu'à la majorité des voix de tous les copropriétaires les décisions concernant: n) l'ensemble des travaux comportant transformation, addition ou amélioration...".

Vu l'article 30 de la même loi qui prévoit que "l'assemblée générale des copropriétaires, statuant à la majorité prévue à l'article 25 peut, à condition qu'elle soit conforme à la destination de l'immeuble, décider toute amélioration, telle que la transformation d'un ou de plusieurs éléments d'équipement existants, l'adjonction d'éléments nouveaux, l'aménagement de locaux affectés à l'usage commun ou la création de tels locaux".

En l'espèce, selon procès-verbal de l'assemblée générale des copropriétaires de l'immeuble du 12 mai 2022, les résolutions litigieuses portent sur la création d'un appentis au dessus des containers dans la cour commune (principe des travaux, choix des entreprises, honoraires syndic sur travaux votés, fixation du budget, mandat au conseil syndical pour choix entreprise, financement).

Elles ont été votées à la majorité de l'article 24 de la loi du 10 juillet 1965, à l'exception de la résolution 18.5 votée à la majorité de l'article 25.

Alors que les poubelles sont déjà stockées dans une cour commune de l'immeuble et qu'il ne s'agit que de créer un petit bâtiment au même emplacement pour les stocker et les protéger des intempéries notamment, il n'est pas démontré que ce projet porte atteinte à la clause d'habitation bourgeoise du règlement de copropriété, ni qu'il serait de nature à modifier réellement la jouissance des parties privatives de la demanderesse.

Le règlement de copropriété versé aux débats ne fixe pas l'emplacement du stockage des poubelles communes. Dès lors, la décision litigieuse n'entraîne pas la modification du règlement de copropriété. La majorité de l'article 26 ne s'applique donc pas aux résolutions litigieuses.

Les résolutions litigieuses relèvent de la majorité de l'article 25 au titre de travaux comportant amélioration (depuis la loi Alur du 24 mars 2014). En effet, l'assemblée générale pouvait parfaitement considérer que la création d'un appentis au dessus des containers dans la cour commune apporte une amélioration à la situation actuelle, tant d'un point de vue sanitaire qu'esthétique.

Les résolutions litigieuses ont été votées à la majorité de 5524 tantièmes sur 10.000, de sorte que la majorité de l'article 25 a bien été atteinte ainsi que le reconnaît la demanderesse dans ses écritures. La circonstance que le procès-verbal fasse état d'une majorité erronée " article 24 " est indifférente.

Dès lors, la demande d'annulation des résolutions litigieuses sera rejetée.

*

S'agissant des demandes de démolition et de dommages-intérêts "en cas d'exécution des résolutions contestées sans attendre l'issue de la présente procédure", le syndicat des copropriétaires défendeur indique qu'il n'a pas encore réalisé les travaux votés et Mme [X] ne le conteste pas,

de sorte ces demandes présentées dans l'hypothèse d'une réalisation des travaux en cours de procédure sont finalement sans objet. Il n'y a dès lors pas lieu de statuer sur leur recevabilité, ni leur bien fondé.

Sur les demandes accessoires

En application de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

Mme [X], partie perdante, supportera les dépens.

Maître Bruno Turbe sera autorisé à recouvrer les dépens dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée et il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation.

Mme [X] sera condamnée à verser au syndicat des copropriétaires défendeur une somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La demande de Mme [X] à ce titre sera rejetée.

En application des articles 514 et 515 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement. Le juge peut écarter l'exécution provisoire de droit, en tout ou partie, s'il estime qu'elle est incompatible avec la nature de l'affaire. Il statue d'office ou à la demande d'une partie.

En l'espèce, il n'y a pas lieu de suspendre l'exécution provisoire du jugement.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant après débats en audience publique, en premier ressort et par jugement contradictoire, par mise à disposition au greffe :

DECLARE recevable la demande de Mme [L] [X] d'annulation des résolutions n° 18.1 à 18.6 de l'assemblée générale du 12 mai 2022 du syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] ;

REJETTE la demande de Mme [L] [X] d'annulation des résolutions n° 18.1 à 18.6 de l'assemblée générale du 12 mai 2022 du syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] ;

DECLARE sans objet les demandes de Mme [L] [X] de démolition et de dommages-intérêts "en cas d'exécution des résolutions contestées sans attendre l'issue de la présente procédure" ;

CONDAMNE Mme [L] [X] à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] une somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE la demande de Mme [L] [X] au titre des frais irrépétibles ;

CONDAMNE Mme [L] [X] aux dépens ;

AUTORISE maître Bruno Turbe à recouvrer les dépens dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile ;

DIT n'y avoir lieu à suspendre l'exécution provisoire.

Fait et jugé à Paris le 30 Avril 2024.

Le GreffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 8ème chambre 1ère section
Numéro d'arrêt : 22/08681
Date de la décision : 30/04/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 07/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-30;22.08681 ?
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