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30/04/2024 | FRANCE | N°21/08496

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 8ème chambre 1ère section, 30 avril 2024, 21/08496


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le:





8ème chambre
1ère section


N° RG 21/08496 -
N° Portalis 352J-W-B7F-CUVYD

N° MINUTE :




Assignation du :
23 Juin 2021






JUGEMENT
rendu le 30 Avril 2024
DEMANDERESSE

Madame [F] [Z]
[Adresse 1]
[Localité 4]

représentée par Maître Marie-Dominique FRANCESCHETTI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #A0604


DÉFENDEURS

Syndicat des copropriétaires d

e l’immeuble sis [Adresse 1]), représenté par son syndic, le cabinet PROGESTRA
[Adresse 3]
[Localité 5]

représenté par Maître Eric AUDINEAU de l’AARPI AUDINEAU GUITTON, avocat au barreau de PARIS, ...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le:

8ème chambre
1ère section


N° RG 21/08496 -
N° Portalis 352J-W-B7F-CUVYD

N° MINUTE :

Assignation du :
23 Juin 2021

JUGEMENT
rendu le 30 Avril 2024
DEMANDERESSE

Madame [F] [Z]
[Adresse 1]
[Localité 4]

représentée par Maître Marie-Dominique FRANCESCHETTI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #A0604

DÉFENDEURS

Syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 1]), représenté par son syndic, le cabinet PROGESTRA
[Adresse 3]
[Localité 5]

représenté par Maître Eric AUDINEAU de l’AARPI AUDINEAU GUITTON, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D0502

S.A. AXA FRANCE IARD
[Adresse 2]
[Localité 6]

représentée par Maître Stanislas COMOLET de la SELAS COMOLET ZANATI AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0435

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Par application des articles R.212-9 du Code de l’Organisation Judiciaire et 812 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été attribuée au Juge unique.

Avis en a été donné aux avocats constitués qui ne s’y sont pas opposés.

Madame Laure BERNARD, Vice-Présidente, statuant en juge unique,

assistée de Madame Delphine PROVOST-GABORIEAU, Greffière lors des débats, et de Madame Justine EDIN, Greffière lors du prononcé.

DÉBATS

A l’audience du 07 février 2024
tenue en audience publique

JUGEMENT

Prononcé par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort

EXPOSE DU LITIGE

Mme [F] [Z] est propriétaire d'un appartement situé au 3ème étage d'un immeuble sis [Adresse 1], soumis au statut de la copropriété des immeubles bâtis.

Ayant constaté un phénomène d'affaissement du plancher haut de son salon nécessitant un étaiement, et après tentative de règlement amiable, Mme [Z] a saisi le juge des référés qui, par ordonnance du 10 septembre 2019, a prononcé une mesure d'expertise et commis M. [G] [B] pour y procéder.

L'expert judiciaire a déposé son rapport le 15 décembre 2020.

Par acte d'huissier du 23 juin 2021, Mme [Z] a assigné devant la présente juridiction, en ouverture de rapport, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble en cause, représenté par son syndic en exercice, ainsi que la SA Axa France Iard en sa qualité d'assureur de l'immeuble afin d'obtenir l'indemnisation de ses préjudices.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 08 mars 2022, Mme [Z] demande au tribunal de:
" Vu le rapport d'expertise de M. [G] [B] du 15 décembre 2020,
Vu les articles 10-I alinéa 2 et 14 de la loi n° 65-557 du 10juillet 1965,
Vu la jurisprudence et les pièces versées aux débats,
- Homologuer le rapport d'expertise de M. [G] [B] en date du 15 decembre2020 ;
- Dire et juger le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] responsable des désordres subies par Mme [F] [Z] ;
- Débouter le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et la SA AXA France IARD de leurs demandes, fins et conclusions,
En conséquence,

- Condamner in solidum le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et la SA AXA France lard à payer à Mme [F] [Z] les sommes de :
4.338,60 euros TTC en réparation de son préjudice matériel ;
30.352 euros au titre de l'indemnisation du trouble de jouissance ;
5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- Ordonner1'exécution provisoire du jugement a intervenir ;
- Dire que Mme [F] [Z] sera dispensée de toute participation aux frais afférents a la présente instance, en application de l'artic1e 10-1, alinéa 2 de la loi du 10juillet 1965 ;
- Condamner in solidum le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et la SA AXA France Iard aux entiers dépens, lesquels comprendront le coût de l'expertise de M. [G] [B], entièrement réglé par Mme [F] [Z], soit 9 712,01 euros TTC".

S'appuyant sur les constats et conclusions du rapport d'expertise judiciaire, Mme [Z] sollicite l'engagement de la responsabilité du syndicat des copropriétaires dans la survenance des désordres subis au sein de son lot, au visa de l'article 14 de loi du 10 juillet 1965.

Elle s'estime fondée à réclamer l'indemnisation de ses préjudices, tant matériel que de jouissance.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 20 décembre 2021, le syndicat des copropriétaires demande au tribunal de :
" Débouter Mme [Z] de toutes ses demandes en ce qu'elles sont dirigées à l'encontre du syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] ;
- Condamner la société Axa France Iard à relever et garantir le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 1] de toute condamnation en principal, intérêts et accessoires, sur la base du contrat multirisques immeuble, qui pourrait être prononcée à son encontre ;
- Condamner Mme [Z] et d'une manière générale toute partie succombante à payer au syndicat des copropriétaires une somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner in solidum toutes parties succombantes à supporter les entiers dépens, dont distractions au profit de Me [Y] [O], sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile ".

Le syndicat des copropriétaires conclut au rejet des prétentions de Mme [Z], soutenant qu'aux termes des opérations expertales aucune imputabilité des désordres ne peut être mise à sa charge, l'expert ayant mis en exergue un problème de surcharge des poutrelles du plancher haut du bien de la demanderesse.

Il critique en outre les prétentions indemnitaires de Mme [Z], les estimant injustifiée s'agissant de celle concernant le prétendu préjudice matériel, et excessive concernant le préjudice de jouissance des lieux.

Le syndicat des copropriétaires sollicite, le cas échéant, d'être garanti par son assureur, dont il affirme que les conditions sont réunies.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 10 février 2022, la société Axa demande au tribunal de:
" Débouter Mme [Z] de toutes ses demandes en ce qu'elles sont dirigées à l'encontre de la compagnie Axa France,
- Débouter le syndicat des copropriétaires de sa demande en garantie à l'encontre de la compagnie Axa France au visa d'un contrat n°2865946404 lequel n'est pas versé aux débats,
- Juger qu'il appartient à toute partie demanderesse de justifier du bien fondé de ses prétentions,
Subsidiairement,
- Juger que les conclusions du rapport d'expertise judiciaire de M. [G] [B] imputent l'origine des désordres aux rechargements de plafond qui ont surchargé la structure et provoqué le fléchissement des poutrelles.
- Juger que ce sont les propriétaires éventuellement successifs qui ont pu procéder à ces surcharges et non le syndicat des copropriétaires,
- Juger, en l'état, que Mme [Z] serait propriétaire depuis 1949 et qu'elle serait donc à l'origine des désordres objet du litige,
- Juger en conséquence bien fondé l'appel en garantie d'Axa France à son encontre dans le cas où une condamnation quelconque serait prononcée contre elle,
- Juger en toute hypothèse et au surplus que l'expert retient également la vétusté naturelle de l'immeuble comme cause du sinistre circonstance de nature à ôter tout aléa dans l'application d'un contrat d'assurance,
Encore plus subsidiairement, sur les préjudices :
- Juger que le préjudice matériel évalué à la somme de 4.338,60 € correspond à la rénovation totale du salon de Mme [Z] alors que l'expert judiciaire a seulement relevé que l'esthétique du salon était impacté par le fléchissement général,
- Juger que le trouble de jouissance du fait de la privation du salon doit être réduit à des proportions tenant compte de la surface du salon et de l'encadrement des loyers à [Localité 7],
- Juger qu'en l'état le préjudice retenu ne saurait dépasser la somme de 25,40 € le m² x 19 m² soit 482,60 € par mois x 24 mois = 11.582,40 €
- Débouter Mme [Z] de ses demandes accessoires relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile ".

La société Axa conclut, à titre principal, au rejet des prétentions indemnitaires de Mme [Z], se prévalant des mêmes moyens que le syndicat des copropriétaires s'agissant de la cause des désordres et du quantum des préjudices.

A titre subsidiaire, l'assureur sollicite le rejet de la demande formée à son encontre, arguant de l'absence de production des conditions générales et particulières applicables.

Pour un exposé plus détaillé des moyens et prétentions des parties, il convient de renvoyer aux termes de leurs dernières écritures susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'instruction a été close par ordonnance du 05 juin 2024.

L'affaire, appelée à l'audience du 07 février 2024, a été mise en délibéré au 23 avril 2024, prorogé au 30 avril suivant en raison de l'indisponibilité du magistrat signataire, siégeant aux assises du 22 au 24 avril 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les demandes de " juger ", de " dire " et de " dire et juger "

Il n'y a pas lieu de statuer sur ces demandes, lesquelles ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile mais sont la reprise des arguments développés dans les écritures des parties.

Sur la demande principale en indemnisation

Selon l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965, dans sa version issue de l'ordonnance n° 2019-1101 du 30 octobre 2019, le syndicat des copropriétaires a pour objet la conservation de l'immeuble et l'administration des parties communes et il est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers ayant leur origine dans les parties communes, sans préjudice de toutes actions récursoires.

La responsabilité de plein droit du syndicat est donc susceptible d'être engagée en présence de dommages causés aux copropriétaires ayant pour origine les parties communes, indépendamment de toute faute.

La responsabilité qui pèse sur le syndicat des copropriétaires en application de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 est une responsabilité objective. Le syndicat ne peut s'exonérer de cette responsabilité qu'en rapportant la preuve d'une force majeure ou d'une faute de la victime ou d'un tiers. Pour une exonération totale, la faute de la victime ou du tiers doit avoir causé l'entier dommage.

L'article 9 du code de procédure civile dispose que " il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention. "

Sur ce,

Lors des opérations expertales, il a été constaté les désordres suivants au sein du lot de Mme [Z] " diverses traces de désordres anciens liés à des dégâts des eaux en provenance de l'appartement du 4ème (...). Ces désordres ont été déclarés en leur temps et pris en charge par les assureurs.(...)
Le plancher haut du salon de Mme [Z] présente un affaissement significatif : les poutrelles en bois, d'origine, sont fléchies. Les poutrelles ne présentent pas de signe de pourrissement et le bois est sain, dur. Une poutrelle constituant le chevêtre d'une ancienne cheminée est cassée. Le plafond de Mme [Z] a été rechargé en plâtre à une date inconnue mais moderne (quelques dizaines d'année). L'épaisseur de la recharge de plâtre moderne est de 5cm environ.
Sous cette recharge de plâtre nous constatons la composition traditionnelle du plancher à poutrelles bois et augets plâtre.(...) ".

Concernant l'origine des désordres, l'expert retient que " une cause envisageable compte tenu des constatations réalisés est que le fléchissement général du plancher à l'endroit des salons de Mme [Z] (…) provient d'un rechargement cumulatif intervenu depuis l'origine de la construction :
le bois ayant une tendance naturelle à fléchir dans le temps sous charge constante (…), les occupants successifs depuis l'origine de la construction ont corrigé ce défaut d'horizontalité en rechargeant le plâtre du faux-plafond du 3ème sans curer les anciens plâtres (situation encore visible chez Mme [Z]) ; et rechargé le plancher bas du 4ème pour restituer l'horizontalité (…).
Ce phénomène de rechargement amenant plus de charges sur le plancher, celui-ci fléchit un peu plus, ce qui conduit à d'autres générations et corrections d'horizontalité par ajouts successifs de matière. Les différentes corrections d'horizontalité conduisent avec le temps à un fléchissement cumulatif irréversible.
Ceci explique le fléchissement constaté dans le plancher, qui n'est pas un phénomène nouveau, mais qui s'est constitué depuis la construction d'origine du plancher. (…)

La cause du sinistre est imputable à la vétusté naturelle de l'immeuble et à ses transformations anciennes, sans lien avec l'action des parties. (...) ".

Il s'évince ainsi de ces éléments que les désordres dénoncés par Mme [Z] ont été causés par des rechargements successifs des planchers, au fil des années, de plâtre sans curer les anciens plâtres existants, entraînant un fléchissement général dudit plancher.

Or si elle le prétend, Mme [Z] succombe à démontrer que ces planchers et rechargement successifs de plâtre constituent des parties communes, condition d'engagement de la responsabilité du syndicat des copropriétaires au visa de l'article 14 de loi du 10 juillet 1965.

Quant au phénomène de vétusté naturelle de l'immeuble, il ne saurait suffire à engager la responsabilité dudit syndicat dès lors que, compte tenu de son caractère extérieur et non-maîtrisable, il doit être considéré comme une situation de force majeure exonératoire.

Par conséquent, faute pour Mme [Z] de rapporter la preuve qui lui incombe des conditions d'engagement de la responsabilité du syndicat des copropriétaires au visa de l'article 14 de loi du 10 juillet 1965, sera déboutée de ses demandes indemnitaires.

La demande de garantie formée à titre subsidiaire par le syndicat des copropriétaires à l'encontre de son assureur devient sans objet et ne sera donc pas examinée.

Sur les demandes accessoires

Succombant au litige, Mme [Z] doit être condamnée aux dépens, incluant les frais d'expertise judiciaire et dont distraction au profit de Me [O], ainsi qu'à verser au syndicat des copropriétaires une somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il n'y a pas lieu, en équité, d'accorder une indemnité pour frais irrépétibles à la société Axa, qui sera déboutée de sa demande de ce chef.

Compte-tenu de la solution du litige, Mme [Z] sera déboutée de sa demande de dispense de contribution aux frais exposés par le syndicat des copropriétaires pour la présente procédure.

En application de l'article 514 modifié par le décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019, applicable aux instances introduites à compter du 1er janvier 2020, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

Il n'y a pas lieu en l'espèce d'écarter l'exécution provisoire de droit.

Les parties seront déboutées du surplus de leurs demandes formées au titre des dépens et des frais irrépétibles ainsi que de leurs autres demandes plus amples ou contraires.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par jugement contradictoire, mis à disposition au greffe et en premier ressort,

DEBOUTE Mme [F] [Z] de l'ensemble de ses prétentions,

CONDAMNE Mme [F] [Z] à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 1], représenté par son syndic en exercice, une somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

REJETTE la demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile par la SA Axa France Iard,

CONDAMNE Mme [F] [Z] aux dépens, dont distraction au profit de Me [Y] [O],

RAPPELLE que l'exécution provisoire de la présente décision est de droit,

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes formées au titre des dépens et des frais irrépétibles ainsi que de leurs autres demandes,

Fait et jugé à Paris le 30 Avril 2024.

Le GreffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 8ème chambre 1ère section
Numéro d'arrêt : 21/08496
Date de la décision : 30/04/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 07/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-30;21.08496 ?
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