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30/04/2024 | FRANCE | N°21/03664

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 8ème chambre 1ère section, 30 avril 2024, 21/03664


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le :
à Maître BOUILLIEZ et
Maître ASSOUS

Copie certifiée conforme
délivrée le :
à Maître NICOLAS












8ème chambre
1ère section


N° RG 21/03664
N° Portalis 352J-W-B7F-CT66I


N° MINUTE :


Assignation du :
03 Mars 2021








JUGEMENT
rendu le 30 Avril 2024

DEMANDEURS

S.C.I. THOINE
[Adresse 1]
[Adresse 1]

Monsieur [E

] [C] [F] [W]
[Adresse 1]
[Adresse 1]

tous deux représentés par Maître Béatrice NICOLAS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C1541


Décision du 30 Avril 2024
8ème chambre
1ère section
N° RG 21/03664 - N° Portalis 352J-W-B7F-CT66...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le :
à Maître BOUILLIEZ et
Maître ASSOUS

Copie certifiée conforme
délivrée le :
à Maître NICOLAS

8ème chambre
1ère section


N° RG 21/03664
N° Portalis 352J-W-B7F-CT66I

N° MINUTE :

Assignation du :
03 Mars 2021

JUGEMENT
rendu le 30 Avril 2024

DEMANDEURS

S.C.I. THOINE
[Adresse 1]
[Adresse 1]

Monsieur [E] [C] [F] [W]
[Adresse 1]
[Adresse 1]

tous deux représentés par Maître Béatrice NICOLAS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C1541

Décision du 30 Avril 2024
8ème chambre
1ère section
N° RG 21/03664 - N° Portalis 352J-W-B7F-CT66I

DÉFENDEURS

Syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] représenté par son syndic, la société ISM GESTION
[Adresse 3]
[Adresse 3]

représenté par Maître Virginie BOUILLIEZ, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E0607

Société ISM GESTION
[Adresse 3]
[Adresse 3]

représentée par Maîtree Emilie ASSOUS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #G0866

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Laure BERNARD, Vice-Présidente
Madame Muriel JOSSELIN-GALL, Vice-présidente
Madame Elyda MEY, Juge

assistées de Madame Lucie RAGOT, Greffière,

DÉBATS

A l’audience du 06 Décembre 2023 tenue en audience publique devant Madame Muriel JOSSELIN-GALL, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile.

JUGEMENT

Prononcé par mise à disposition au greffe
Contradictoire
en premier ressort

EXPOSÉ DU LITIGE

La SCI Thoine est notamment propriétaire des lots de copropriété n°110 et 212, consistant en un appartement et une cave, au sein de l'immeuble sis [Adresse 1], soumis au statut de la copropriété des immeubles bâtis, le cabinet ISM Gestion en est le syndic depuis le 17 octobre 2013.

Le 14 mai 2003, la SCI Thoine a donné à bail l'appartement (lot n°110) et la cave (lot n°212) dont elle est propriétaire à M. [W] pour une durée de six années à compter du 15 mai 2003.

Le 27 novembre 2012, M. [W] a procédé à une déclaration de sinistre de dégât des eaux à son assureur, la société Allianz.

Cette déclaration mentionnait des désordres d'origine inconnue, se manifestant par des infiltrations affectant le mur du séjour de son appartement, situé au 4ème étage. Ce mur constitue un pignon de l'immeuble [Adresse 1], auquel est accolé l'immeuble sis [Adresse 2].

Le syndic de l'immeuble en 2012, la société Immo de France, a chargé la société Chabanat d'une recherche de fuite. Les recherches de cette société ont conduit à plusieurs causes possibles, sans en privilégier aucune, à savoir :

- une infiltration provenant des parties privatives du bien immobilier situé au 3ème étage de la copropriété de l'immeuble voisin sis [Adresse 2], occupé par l'association le Foyer d'étudiantes [5] ;
- une infiltration s'écoulant entre les murs des deux bâtiments du [Adresse 1] et du [Adresse 2].

La société Allianz, assureur de M. [W] a procédé à une indemnisation amiable du sinistre.

Se plaignant néanmoins de désordres persistants sous forme d'infiltrations, la SCI Thoine et son locataire, M. [W] ont assigné par exploit d'huissier en date du 5 janvier 2017 le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 1] et la société ISM Gestion, son syndic, devant le président du tribunal de grande instance de Paris, aux fins notamment de les voir condamner à produire sous astreinte le rapport établi par la société Campana, plombier couvreur missionné en décembre 2013, et de voir ordonner au syndicat des copropriétaires la prise de toute mesure utile pour que soit établie la cause des désordres et qu'il y soit mis fin.

Par ordonnance de référé en date du 19 mai 2017, le président du tribunal de grande instance de Paris a dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes présentées, estimant au regard des pièces produites que la cause et l'origine des désordres pourrait être plurielle et provenir soit de la copropriété voisine, soit des parties communes de l'immeuble et notamment de la toiture, et qu'il existait en conséquence une contestation sérieuse quant à la responsabilité du syndicat des copropriétaires.

La SCI Thoine et M. [W] ont relevé appel de cette ordonnance.

Par arrêt en date du 31 janvier 2018, la cour d'appel de Paris a infirmé l'ordonnance entreprise, considérant qu'il incombait au syndicat des copropriétaires de rechercher l'origine des désordres et les moyens d'y mettre fin.

La cour a donc condamné sous astreinte le syndicat des copropriétaires, ainsi que le syndic, à faire procéder à une recherche contradictoire de la cause des désordres par un expert choisi par les parties, aux frais du syndicat des copropriétaires.

L'expert choisi par les parties, M. [R], a effectué une première visite le 12 mars 2018, il a constaté une peinture fortement cloquée sur le mur infiltré et un taux d'humidité proche de 50%.

Le 22 juin 2018, constatant un assèchement très notable du mur, l'expert a conclu qu'il n'existait plus aucune fuite active et, aux termes de son rapport déposé le 25 juin 2018, a exposé que l'origine des infiltrations constatées n'avait pu être déterminée et qu'il n'était pas nécessaire de prévoir des travaux autres que ceux d'entretien courant.

M. [W] constatant de nouvelles infiltrations en 2019, a sollicité son assurance professionnelle.

L'expert amiable de l'assureur, le cabinet Elex, a procédé à deux visites des locaux le 21 février 2019 et le 26 décembre 2019, en présence de M. [W].

Aux termes du rapport de ce cabinet, en date du 23 avril 2020, le ou les tiers responsables n'ont pas été identifiés, l'origine des infiltrations constatées n'a pu être déterminée.

Par courriel en date du 23 avril 2020 M. [W], attribuant les désordres constatés dans son appartement à un défaut d'étanchéité des murs extérieurs, a mis en demeure le syndic de procéder aux investigations nécessaires à l'identification de la cause des désordres dans son appartement ; il lui a également demandé de procéder à la réalisation des travaux susceptibles d'y mettre fin.

Par courriel en date du 4 mai 2020, M. [W] a réitéré sa demande et indiqué que, en cas d'inaction du syndic, il porterait sa demande en justice.

Le 14 mai 2020, la société Somsou Pons, mandatée par le syndic, a procédé à une recherche de fuite au domicile de M. [W]. Elle a constaté une humidité de 50 à 60 % en partie basse du mur pignon mitoyen dans la salle de séjour et demandé l'ouverture du conduit de cheminée en partie basse de l'appartement de M. [W], aux fins de vérifier l'état de la canalisation des eaux usées passant à l'intérieur.

Le 15 juin 2020, M. [D], architecte de la copropriété, a adressé un courriel au syndic rappelant que l'humidité n'ayant pas été constatée à tous les étages, mais simplement constatée dans l'appartement de la SCI Thoine, il préconisait en conséquence un passage caméra pour localiser la ou les fuites.

Le 30 juin 2020, la société Foussadier a procédé à l'inspection télévisée flash de la descente des eaux usées cheminant dans l'ancien conduit de cheminée.

Son rapport d'intervention ne caractérise pas de fuite avérée mais a fait ressortir la vétusté de certaines portions de la descente en fonte. L'entreprise Foussadier a alors proposé le remplacement du tronçon de descente ancien entre la mi-hauteur du 5ème étage et le haut du 3ème étage.

Le 21 septembre 2020, la société Foussadier a procédé au remplacement de la descente des eaux usées, nécessitant des travaux dans les appartements du 3ème, 4ème et 5ème étages, dont celui de la SCI Thoine au 4ème étage.

Les travaux de remise en état des gaines techniques des appartements du 5ème et du 3ème étage ont été confiés par le conseil syndical à la société MG entreprises, et réalisés le 23 novembre 2020. Ces travaux n'ont pas été effectués au 4ème étage, M. [W] ayant refusé l'accès à son appartement.

M. [W] a procédé aux travaux de remise en état de la gaine technique de son appartement par une entreprise choisie par ses soins, la société EMC.

Le 10 décembre 2020, s'est tenue une assemblée générale des copropriétaires organisée en visioconférence, en application des dispositions légales exceptionnelles de la période de pandémie covid. M. [W] a souligné avoir été empêché de voter car aucun formulaire de vote par correspondance n'avait été joint à la convocation.

Par mails adressés au syndic en date des 17 août 2020, 17 septembre 2020, 2 octobre 2020, 9 octobre 2020, 13 octobre 2020, 11 novembre 2020, M. [W] s'est plaint du dysfonctionnement de la porte de service.

Par exploit du 3 mars 2021 la SCI Thoine et M. [E] [W] ont assigné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 1] et son syndic, la société ISM Gestion devant le tribunal judiciaire de Paris aux fins notamment de voir :

- annuler l'assemblée générale des copropriétaires en date du 10 décembre 2020 et condamner le syndic à en organiser une nouvelle, à ses frais et sous astreinte ;
- condamner in solidum le syndic et le syndicat des copropriétaires à procéder aux réparations nécessaires pour assurer la réparation de la porte de service, sous astreinte ;
- condamner in solidum le syndic et le syndicat des copropriétaires à indemniser la SCI Thoine et M. [W] des dommages subis en raison du dégât des eaux.

Par leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 9 mai 2023, la SCI Thoine et M. [W] demandent au tribunal de :

"Annuler, à la requête de la SCI THOINE, l'assemblée générale du 10 décembre 2020.

- Condamner in solidum le syndic et le syndicat des copropriétaires à procéder aux réparations nécessaires pour assurer la bonne fermeture de la porte de service, à peine d'une astreinte provisoire de 50 € par jour de retard qui commencera à courir 15 jours après la signification du jugement.
- Condamner la société ISM GESTION à payer au concluant la somme de 100 € correspondant à des dommages intérêts au titre de l'exécution forcée de la décision du juge de l'exécution du 13 septembre 2018 réformée par la Cour d'Appel de PARIS.
- Condamner in solidum les défendeurs au paiement :
1- de dommages et intérêts liés au dégât des eaux :
pour la SCI concluante : 3.982,40 € HT (remise en état des lieux)
pour le concluant : 18.745,25 € (préjudice de jouissance)
2- de dommages et intérêts pour intention de nuire, résistance abusive et réparation du préjudice subi en raison des démarches et tracas liés aux désordres durant 7 années : 20.000€ correspondant au préjudice commun des concluants
3- des dépens
4- de la somme de 6.000 € en application de l'article 700 du CPC au titre des frais communs aux concluants
- Débouter les défendeurs de leurs prétentions".

Par ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 31 mars 2023, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 1] demande du tribunal de :

"Vu le règlement de copropriété et les pièces versées aux débats tant par les demandeurs que par les défendeurs,
Vu l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020,
Vu la loi du 10 juillet 1965 et notamment l'article 17-1 A de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, tel que modifié par l'article 211, II, de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018,
Vu l'arrêté du 2 juillet 2020,

ACCUEILLIR le Syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 1] en ses écritures ;

Y faisant droit,

Sur les demandes principales :

- JUGER que M. [W] ne démontre pas de préjudice ;

- DÉBOUTER la SCI THOINE et M. [W] de l'intégralité de leurs demandes y compris indemnitaires ;

- En conséquence DÉBOUTER la SCI THOINE de sa demande d'annulation de l'assemblée générale du 10 décembre 2020 et des résolutions qui ont été votées ;

Subsidiairement CONDAMNER solidairement ISM GESTION ainsi que la SCI THOINE et M. [W] à prendre en charge le coût de l'organisation et de la tenue d'une nouvelle assemblée générale

Sur les demandes reconventionnelles :

Vu l'article 1240 du Code civil,

- CONDAMNER solidairement la SCI THOINE et M. [W] à payer au Syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 1] une indemnité de 5000€ à titre de dommages-intérêts avec intérêts légaux à compter du jugement et capitalisation annuelle conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil ;

- CONDAMNER solidairement la SCI THOINE et M. [W] à payer la somme de 3500€ au titre l'article 700 du CPC, ainsi qu'aux dépens".

Par ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 31 juillet 2023, le cabinet ISM Gestion, syndic de l'immeuble sis [Adresse 1] demande du tribunal de :

"Vu les dispositions de la loi du 10 juillet 1965,
Vu l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020,
Vu les articles 6, 9, 15 et 16 du Code de procédure civile,
Vu le décret n° 67-223 du 17 mars 1967,
Vu les articles 1103, 1231-6, 1240 du Code civil,

Vu les pièces versées au débat,

A titre préalable, il est demandé au tribunal de :

Prendre acte que Monsieur [W] n'a aucun lien de droit avec le Cabinet ISM GESTION ;

- Le débouter de l'intégralité de ses demandes pour défaut d'intérêt à agir ;

-Juger prescrite la demande d'indemnisation calculée pour la période antérieure au 3 mars 2016.

En tout état de cause, il est demandé au tribunal de :

- Débouter Monsieur [W] et la SCI THOINE de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

- En particulier, débouter Monsieur [W] et la SCI THOINE de leur demande d'annulation de l'assemblée générale en date du 10 décembre 2020 et des résolutions qui ont été votées ;

- Débouter également Monsieur [W] et la SCI THOINE de leur demande de règlement de dommages et intérêts et indemnitaires ;

- Débouter également Monsieur [W] et la SCI THOINE de leur demande de règlement des dépens et au titre de l'article 700 du CPC.

Sur les demandes reconventionnelles :

- Condamner solidairement Monsieur [W] et la SCI THOINE à régler à la société ISM GESTION la somme de 8 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

- Condamner solidairement Monsieur [W] et la SCI THOINE à régler à la société ISM GESTION la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Condamner solidairement Monsieur [W] et la SCI THOINE au paiement des entiers dépens".

Pour un exposé plus détaillé des moyens et prétentions des parties, il convient de renvoyer aux termes de leurs dernières écritures susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'affaire a été close par ordonnance du 18 septembre 2023, et fixée à l'audience du 6 décembre 2023, puis mise en délibéré au 13 février 2024 (prorogé au 30 avril 2024), date à laquelle il a été mis à disposition au greffe.

MOTIFS

Aux termes de l'article 768 alinéa 3 du code de procédure civile : "Les parties doivent reprendre dans leurs dernières conclusions les prétentions et moyens présentés et invoqués dans leurs conclusions antérieures. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et le tribunal ne statue que sur les dernières conclusions déposées".

A titre liminaire, il sera rappelé que dans ses dernières conclusions, seule la SCI Thoine demande l'annulation de l'assemblée générale de l'assemblée des copropriétaires en date du 10 décembre 2020, en conséquence et en application de l'article susvisé, le grief d'irrecevabilité à agir de M. [W] s'agissant de cette demande d'annulation ne sera pas examiné par le tribunal.

Par ailleurs, si la société ISM Gestion évoque un débouté pour défaut d'intérêt à agir, le tribunal comprend ce moyen comme une irrecevabilité compte tenu du corps des écritures.

1- Sur l'intérêt à agir de M. [W]

ISM Gestion soutient que M. [W] n'a pas d'intérêt à agir car il n'est pas contractuellement lié au syndic, il ne dispose en outre d'aucun titre pour solliciter le versement de dommages et intérêts, car il ne démontre pas sa qualité de locataire de l'appartement dont la SCI Thoine est propriétaire.

En défense et sur le moyen d'irrecevabilité soulevé, la SCI Thoine et M. [W] exposent que le juge des référés et la cour d'appel ont déjà statué sur la recevabilité des demandes de M. [W] en cette qualité. Ils précisent que le bail initial s'est poursuivi par tacite reconduction.

***

L'article 31 du code de procédure civile dispose que "L'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé".

Sur ce

M. [W] demande en substance l'indemnisation d'un préjudice de jouissance consécutif à un dégât des eaux, il procède à une demande indemnitaire sur ce qu'il considère être une inaction fautive du syndic sur une longue période de temps, et il demande à ce qu'il soit contraint à procéder à la réparation d'une porte de service, partie commune.

Il est versé aux débats un bail portant sur les lots de la SCI Thoine dont M. [W] est signataire en tant que locataire.

Les nombreux mails et courriers échangés entre la copropriété, son syndic, et M. [W] depuis son entrée dans les lieux dans l'appartement du 4ème étage sis [Adresse 1], fournis aux débats, attestent qu'il y a séjourné. La SCI Thoine et M. [W] fournissent par ailleurs aux débats une attestation de l'expert-comptable de cette société, qui confirme que cette dernière a régulièrement encaissé les loyers dus au titre de l'appartement dont elle est propriétaire à Paris pour la période écoulée entre le 1er décembre 2013 et le 31 mars 2021, mais ne précise pas si ces sommes ont été réglées par M. [W]. Il ressort néanmoins des éléments du débat qu'il a occupé le bien pendant cette période.

En conséquence, M. [W] sera déclaré recevable à agir s'agissant de sa demande indemnitaire au titre du dégât des eaux, sa demande de dommages et intérêts pour inaction fautive et sa demande de réparation de la porte de service, partie commune de l'immeuble.

2- Sur les demandes indemnitaires de M. [W] et de la SCI Thoine au titre du dégât des eaux

La SCI Thoine sollicite, es qualité de propriétaire du lot, le remboursement des travaux de remise en état du mur de l'appartement du séjour, après le sinistre du dégât des eaux et la réfection de la gaine technique, ouverte pour procéder au remplacement du tronçon de la descente en fonte des eaux usées.
M. [W] demande quant à lui l'indemnisation de son trouble de jouissance en qualité d'occupant de locaux dégradés, voire insalubres depuis 2013 en raison de moisissures, ainsi que l'indemnisation de la perte de jouissance de l'appartement qu'il occupait pendant les travaux de remise en état.

Les demandeurs sollicitent l'indemnisation de ces préjudices sur le fondement de l'article 9. III de la loi du 10 juillet 1965, les travaux sur la descente des eaux usées ayant conduit à un trouble de jouissance et à une dégradation de la gaine la contenant, nécessitant une remise en état.

Ils soutiennent en outre que le syndicat des copropriétaires doit répondre des dommages causés aux copropriétaires car ils ont leur origine dans les parties communes, en application de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965.

Ils affirment également que le syndic et le syndicat des copropriétaires doivent répondre de leurs fautes en application des articles 1240 et 1241 du code civil dans la gestion du sinistre survenu en 2012, qui n'a pas été envisagé ni traité de manière diligente depuis 2013, soit depuis la prise de fonction du cabinet ISM gestion en qualité de syndic.

En défense, le syndicat des copropriétaires fait valoir que le point de départ du sinistre ne peut pas être fixé en 2012, date à laquelle s'est produit un sinistre différent et réparé, qui a donné lieu à l'expertise de M. [R], lequel a conclu à la disparition de l'origine du premier sinistre.

Il prétend que les désordres dont il est question dans la présente procédure proviennent d'un sinistre distinct et postérieur, dont le point de départ doit être fixé à la visite en date du 26 décembre 2019 du cabinet Elex, qui a constaté l'humidité des supports sur le mur du séjour.

Le syndicat des copropriétaires soutient que l'origine du sinistre n'a pu être déterminée, ainsi qu'a pu le constater l'expert de l'assurance des demandeurs, et qu'il convient de souligner que les constatations effectuées l'ont été sans que ni le syndicat des copropriétaires ni le syndic ne soient présents, ni même avertis. L'assureur de l'immeuble n'a pas non plus été présent ni représenté lors de ces visites.

Il expose que la SCI Thoine ne démontre aucun lien de causalité entre le dommage dont elle demande réparation et un quelconque fait générateur se situant exclusivement dans les parties communes.

Le syndicat des copropriétaires argue par ailleurs de l'attitude d'obstruction systématique de M. [W], mandataire de la SCI pour le suivi du sinistre, qui n'a pas réalisé les démarches demandées auprès de son assureur, refusant par ailleurs l'accès des entreprises mandatées par la copropriété à son appartement.

S'agissant du trouble de jouissance de M. [W], le syndicat des copropriétaires expose que le bien de la SCI Thoine n'est qu'une adresse de domiciliation pour les avocats de la société d'avocats Apollinaire, dont M. [W] est l'associé.

Il précise que si les locaux du [Adresse 1] sont utilisés à titre professionnel, ils ne le sont en outre que de manière occasionnelle, M. [W] étant en réalité domicilié à Caen où se situent ses activités principales, étant avocat au barreau de Caen, barreau dont il a été élu bâtonnier le 1er janvier 2013.

Il ajoute que les rapports de l'expert en assurance de la SCI Thoine témoignent de la constatation de ce que le sinistre ne pouvait pas empêcher M. [W] de continuer à utiliser l'appartement pour son usage professionnel, usage pour lequel il était assuré ;

il précise que ces rapports évaluent par ailleurs la perte d'usage pendant les travaux à 14 jours, indemnisée par la somme de 340 euros, qui a été réglée à M. [W].

Il conclut également que les stipulations contractuelles du bail interdisent à M. [W] de se prévaloir d'une perte de jouissance pour des travaux rendus nécessaires dans l'appartement qu'il occupe.

Le syndic affirme que la SCI Thoine n'est pas en mesure d'établir l'existence d'une quelconque faute imputable au syndic et encore moins son lien de causalité avec le dommage qu'elle estime avoir subi.

Il soutient que le rapport en date du 25 juin 2018 de l'expert [R] a dédouané le syndic de toute responsabilité, car situant l'origine des désordres dans l'immeuble voisin, comme le syndic l'a toujours soutenu.

Le cabinet ISM Gestion ajoute que dès sa prise de fonction en 2013, il a missionné diverses entreprises pour procéder à des recherches de fuite.

Il affirme que le sinistre survenu en 2020 et signalé au syndic le 23 avril est totalement distinct des infiltrations constatées en 2013, puisqu'il n'avait jamais été fait état avant le printemps 2020 de l'occurrence de la descente en fonte des eaux usées, insérée dans la gaine technique de la cheminée.

Il précise que l'indépendance des deux sinistres est confirmée par le rapport de l'expert de l'assureur de la SCI Thoine, daté du 25 février 2020, qui indique qu'il n'existe aucun élément factuel permettant d'associer les causes des deux sinistres.

Le cabinet ISM gestion souligne que la chronologie de la gestion du dégât des eaux survenu en 2020 atteste de ses diligences, puisque les entreprises qui se sont succédées pour procéder aux recherches de fuite, les sociétés Somsou Pons puis Foussadier, qu'il a mandatées, sont intervenues dès le 14 mai et à plusieurs reprises pour identifier l'origine des infiltrations ; ce qui a conduit au passage caméra dans la descente d'eau en fonte le 30 juin 2020 par l'entreprise Foussadier.

Il observe que le devis proposé par cette entreprise a été accepté par le conseil syndical le 7 juillet 2020, sans que soit établi avec certitude l'imputabilité des dommages dans l'appartement de la SCI Thoine à cette canalisation, certes vétuste, mais possiblement fuyarde seulement.

Il ajoute que l'intervention de l'entreprise Foussadier afin de procéder au remplacement de cette descente a finalement été programmée au 16 septembre 2020 pour tenir compte de la disponibilité de M. [W].

Le cabinet ISM Gestion observe enfin que si les travaux de réfection des gaines techniques ont été effectués dans les appartements des 3ème et 5ème étage et pris en charge par les assureurs respectifs de leurs propriétaires, et n'ont en revanche pas été réalisés au 4ème étage dans l'appartement de la SCI Thoine, la situation ne procède que de la responsabilité de M. [W] qui a refusé l'intervention de la société MG entreprise, pourtant retenue par le conseil syndical.

Le syndic expose que, en dépit du fait qu'il n'était nullement obligatoire pour la copropriété de prendre en charge les travaux de remise en état des désordres consécutifs au sinistre lui-même, puisqu'incombant aux assureurs des copropriétaires, la copropriété a accepté de le faire dans un souci d'apaisement des rapports par essence conflictuels avec M. [W] et la SCI Thoine.

Il rapporte que, en dépit de nombreuses relances du cabinet ISM Gestion, la SCI Thoine n'a fait procéder aux travaux de remise en état de la gaine technique qu'au mois de décembre 2020.

Il soutient qu'il ressort de l'historique du dossier que la SCI Thoine n'a jamais effectué les démarches auprès de son assureur afin d'obtenir réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi, que M. [W] a toujours refusé que la copropriété procède aux travaux lui incombant et qu'il a également refusé l'accès à l'appartement afin que le taux d'humidité soit vérifié ; en conséquence le lien de causalité entre une faute inexistante et le préjudice allégué n'est pas établi.

S'agissant du préjudice de jouissance dont M. [W] demande la réparation, le cabinet ISM Gestion estime qu'il n'apporte pas la preuve de la teneur de son préjudice, de sa durée ou de son quantum, dans la mesure où le point de départ du second sinistre demeure inconnu -les demandeurs n'ayant jamais transmis au syndic leur déclaration de sinistre - et que M. [W] n'a en outre jamais perdu la jouissance de cet appartement, consacré à un usage professionnel.

Le syndic fait par ailleurs valoir que la réfection du mur du logement ne nécessitait pas de procéder à une location touristique saisonnière d'un montant de 1.428, 25 euros, pour une durée de 18 jours, d'un appartement situé [Adresse 4] à hauteur de 74 euros la nuit, outre les frais de ménage et taxes diverses.

***

L'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 dispose : "La collectivité des copropriétaires est constituée en un syndicat qui a la personnalité civile. Le syndicat peut revêtir la forme d'un syndicat coopératif régi par les dispositions de la présente loi. Il établit, s'il y a lieu, et modifie le règlement de copropriété. Il a pour objet la conservation et l'amélioration de l'immeuble ainsi que l'administration des parties communes. Le syndicat est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers ayant leur origine dans les parties communes, sans préjudice de toutes actions récursoires".

La responsabilité qui pèse sur le syndicat des copropriétaires en application de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 est une responsabilité objective. Le demandeur doit cependant démontrer que le dommage a pour origine une partie commune. Le syndicat ne peut s'exonérer de cette responsabilité qu'en rapportant la preuve d'une force majeure ou d'une faute de la victime ou d'un tiers. Pour une exonération totale, la faute de la victime ou du tiers doit avoir causé l'entier dommage.

L'article 9-III alinéa 1 de la loi du 10 juillet 1965 dispose que : "Les copropriétaires qui subissent un préjudice par suite de l'exécution des travaux, en raison soit d'une diminution définitive de la valeur de leur lot, soit d'un trouble de jouissance grave, même s'il est temporaire, soit de dégradations, ont droit à une indemnité. En cas de privation totale temporaire de jouissance du lot, l'assemblée générale accorde au copropriétaire qui en fait la demande une indemnité provisionnelle à valoir sur le montant de l'indemnité définitive".

En application de ce texte, le syndicat est tenu d'indemniser le copropriétaire du préjudice causé par suite de travaux conduits par le syndicat qui affectent les parties privatives. (Civ. 3ème, 14 janv. 2015, n°13-28.030)

L'article 1240 du code civil dispose que "Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer".

L'article 1241 du code civil dispose que "Chacun est responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou son imprudence".

En application de ces dispositions, le demandeur à l'action en responsabilité civile doit établir un fait fautif imputable à son auteur, à l'origine de son dommage, ce qui suppose qu'il caractérise également un lien de causalité entre la faute et le dommage.

Aux termes de l'article 9 du code de procédure civile, "Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention".

Sur ce

2-1. Sur la matérialité des désordres

Les demandeurs font état de désordres se manifestant en continu, qu'ils font remonter à 2012.

Au soutien de leur démonstration, ils produisent aux débats :

- le rapport d'expertise de M. [R], clos le 25 juin 2018 ;
- les rapports d'expertise de l'expert amiable de son assurance professionnelle en date des 27 mars 2020 et 23 avril 2020 ;
- un mail en date du 18 mai 2020 de la société Somsou-Pons, qui relate avoir constaté une humidité de 50 à 60 % ;
- un procès-verbal de constat d'huissier en date du 19 novembre 2020 ;
- des photographies des lieux.

L'expert choisi par les parties a procédé au rappel des faits ayant mené à sa désignation, qu'il synthétise de la manière suivante :

"Des infiltrations affectent le mur du séjour de l'appartement loué par M. [W] à la SCI Thoine.

Ce mur constitue un pignon de l'immeuble du [Adresse 1] auquel est accolé l'immeuble situé [Adresse 2] (foyer d'étudiantes [5]) dont les installations sanitaires avaient été mises en cause à l'époque. Des travaux avaient été engagés par les propriétaires en 2009 et avaient mis fin aux désordres semble-t-il.
De nouvelles infiltrations au même endroit ont été constatées en novembre 2012, et le syndic de l'immeuble Immo de France a adressé en vain plusieurs courriers au foyer voisin pour qu'il remédie à ces désordres.
Fin 2013 un nouveau syndic ISM gestion a été désigné. Celui-ci a missionné un plombier couvreur l'entreprise Campana et l'entreprise Profil & Bâtiment pour rechercher l'origine des infiltrations.

Au cours de ces recherches plusieurs hypothèses ont été émises :

-défaut d'entretien des installations sanitaires du 3ème étage du foyer
-défaut d'étanchéité du solin en plâtre au-dessus de la bande porte solin de la terrasse du foyer,
-l'état de vétusté de la toiture de l'immeuble du [Adresse 1] et en particulier des enduits des souches".(p.12)

Les opérations d'expertise se sont déroulées entre le 7 février 2018 et le 25 juin 2018.

Le 12 mars 2018, l'expert constate "sur le mur pignon de l'immeuble (séjour de l'appartement) une peinture fortement cloquée sur 3 mètres à partir de la façade et sur 1,70 mètre de haut avec décollement de l'enduit et du feuil de peinture. Les mesures effectuées à l'humidimètre affichent des valeurs proches de 50% similaires à celles notées au procès-verbal de constat d'huissier du 29 mars 2017" (p.13)

Après l'examen de la toiture et constatation notamment de sa vétusté, il conclut "qu'il semble peu probable que ces défauts puissent être à l'origine des infiltrations car le 5ème et le dernier étage n'est pas affecté par des infiltrations à notre connaissance" (p.14)

Lors de l'examen de la terrasse du foyer voisin, il expose "qu'aucun défaut apparent n'affecte le solin en zinc protégeant le relevé d'étanchéité" ; après avoir inspecté les sanitaires situés à l'étage inférieur il affirme qu'ils "sont en bon état d'entretien et ne peuvent être à l'origine des infiltrations" (p.15)

Il a été procédé au grattage des peintures cloquées le 1er juin 2018 et l'expert a convoqué les parties le 22 juin 2018 pour le contrôle de la variation d'humidité.

Lors de la réunion du 22 juin 2018, l'expert constate que les mesures d'humidité "donnent des résultats très faibles montrant qu'aucune fuite active n'est présente compte tenu des violents orages qui ont affecté la région parisienne dans le courant du mois de juin" (p. 11 et p.16)

Il conclut que "l'origine des infiltrations constatées n'a pu être déterminée, les travaux entrepris par les propriétaires de l'immeuble voisin ayant très probablement mis fin au désordre, il n'apparaît pas nécessaire de prévoir de travaux autres que ceux d'entretien courant" (p.16)

Aux termes du dernier rapport de l'expert amiable de l'assureur de M. [W], en date du 23 avril 2020, qui indique annuler et remplacer les précédents rapports, il est fait état de deux visites de l'appartement en présence de M. [W], le 21 février 2019 et le 26 décembre 2019.

Lors de la visite du 26 décembre 2019, le relevé hygrométrique laisse apparaître des supports non asséchés (taux de 50%).

L'infiltration est de nouveau constatée le 14 mai 2020 par l'entreprise Somsou Pons qui fait état d'une "humidité de 50 à 60 % en partie basse du mur mitoyen (pignon) prenant des conduits de cheminée".

Il résulte des constatations des experts et plus précisément de l'expert judiciaire choisi communément par les parties, qui a procédé à des investigations contradictoires, que ni la SCI Thoine ni M. [W] ne contestent, que le 22 juin 2018 les supports du mur pignon de l'appartement étaient asséchés et qu'aucune fuite active n'était présente à cette date.

Il ressort également de ce rapport que le grattage et la réfection des supports ont été effectués au cours des opérations d'expertise par l'entreprise SR bâtiment, aux frais avancés par le syndicat des copropriétaires (p.11).

En conséquence le point de départ des désordres dont M. [W] et la SCI Thoine demandent réparation au tribunal doit être fixé à la première visite de l'expert amiable de la compagnie Allianz, soit le 26 décembre 2019, les demandeurs, à qui incombe la charge de la preuve de la matérialité de ces dommages, ne parvenant pas à établir une continuité des infiltrations entre les désordres originaires, dont il a été constaté contradictoirement la cessation et la remise en état par l'expert judiciaire en 2018, et les infiltrations constatées en 2019.

Le moyen relatif à la prescription de l'action en réparation pour la période antérieure au 3 mars 2016 ne sera en conséquence pas examiné par le tribunal.

2-2 Sur la responsabilité du syndicat des copropriétaires à l'égard de la SCI Thoine et de M. [W]

L'article 14 alinéa 5 de la loi du 10 juillet 1975 dispose de la responsabilité du syndicat des propriétaires lorsque le dommage causé a son origine dans les parties communes, en l'espèce le demandeur doit donc établir la causalité entre les infiltrations et la partie commune.

L'article 3.3.2 du règlement de copropriété de l'immeuble en date du 19 novembre 2002 inscrit les canalisations dans "les parties communes spéciales aux propriétaires d'un ou plusieurs lots privatifs (ou ceux issus de leur division ou de leur réunion) les locaux ou éléments techniques qui sont affectés à l'usage ou à l'utilité de l'ensemble de ces copropriétaires ou de plusieurs d'entre eux, sans que la présente énumération soit limitative, et seulement si les choses énumérées s'y trouvent, savoir :

(...) - l'ensemble des canalisations constituées par :

° les canalisations, conduites, prises d'air et réseaux de toute nature, avec leurs coffres, gaines et accessoires, les conduits de ventilation, y compris les parties y afférentes qui traversent les locaux privatifs, mais à l'exclusion des branchements particuliers à un seul local privatif,
° les canalisations et branchements d'eau et d'électricité, les canalisations d'eaux pluviales (gouttières), d'eaux usées et d'eaux vannes, le réseau d'assainissement avec ses accessoires, les descentes des water-closets, le tout à l'exclusion des branchements particuliers sur lesdites canalisations qui seront propriété privative".

Il ressort donc des stipulations du règlement de copropriété que le tronçon de la descente d'eau qui a été remplacée sur trois étages (3ème, 4ème et 5ème étage) est une partie commune spéciale au bâtiment concerné, à l'exclusion des branchements particuliers propres à chaque copropriétaire sur la canalisation commune, qui sont des parties privatives.

Dès lors, pour établir la responsabilité du syndicat des copropriétaires, la SCI Thoine et M. [W] doivent démontrer que l'origine du dégât des eaux, constaté dans l'appartement du 4ème étage, mais non dans ceux des 3ème et 5ème étage, procède d'un défaut d'entretien de la colonne et non d'un défaut d'entretien de son branchement particulier, partie privative, sur ladite colonne, partie commune.

Au soutien de sa démonstration, les demandeurs allèguent que les faits ont été reconnus par le syndicat et font état d'un courriel du syndic en date du 9 juin 2020, aux termes desquels il indique que "l'entreprise Somsou Pons a eu le mérite d'identifier la cause des infiltrations chez M. [W] et il revient maintenant à la copropriété de réaliser les travaux dans les délais les plus brefs afin de faire cesser les désordres".

Néanmoins, aucun des rapports d'expert fournis aux débats, que ce soit le rapport d'expert choisi par les parties après l'ordonnance de référé, comme les rapports de l'expert amiable de la compagnie Allianz, ont conclu à l'identification de l'origine des dommages constatés dans l'appartement de la SCI Thoine.

Le 22 juin 2018, M. [R] a conclu que l'origine des infiltrations constatées n'a pu être déterminée.

Le rapport définitif de l'expert amiable de la SAS Elex en date du 20 avril 2024, qui comporte en p.4 une partie sur "Analyse responsabilité" mentionne "le ou les tiers responsables n'ont pas été identifiés. Pas de recours, aucune responsabilité de tiers ne peut être recherchée".

Le rapport de visite de l'entreprise Somsou Pons, qui est en réalité un mail en date du 18 mai 2020 de cette société adressé au syndic et réexpédié à M. [W], ne contient aucune conclusion quant à l'origine du sinistre car il se conclut ainsi : "Pour poursuivre notre recherche de fuite, il faudrait ouvrir le conduit de cheminée en partie basse chez M. [W] au 4ème étage, pour vérifier l'état de canalisation des eaux usées passant à l'intérieur. De plus, lors de notre visite, il faudrait avoir accès au toit-terrasse de l'immeuble mitoyen pour vérifier l'état du mur pignon".

L'inspection télévisée flash de la descente cheminant dans l'ancien conduit de cheminée par la société Foussadier le 30 juin 2020 n'a pas non plus établi avec certitude l'origine de la fuite dans l'appartement de la SCI Thoine, se contentant de rapporter "la présence importante de ciment et de tartre" dans le raccordement des canalisations du propriétaire du 5ème étage à la colonne de l'immeuble "pouvant provoquer une fuite" et constatant "également que la descente en fonte est très rouillée sur sa partie verticale".

L'ensemble des pièces versées aux débats par les parties ne permet donc pas d'établir avec certitude que l'origine du dommage a son siège dans la colonne de descente des eaux usées, partie commune.

En conséquence, la SCI Thoine et M. [W], à qui appartiennent la charge de la preuve et qui succombent à l'établir, seront déboutés de leur demande en indemnisation sur le fondement de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965.

S'agissant du moyen fondé sur l'article 9-III alinéa 1 de la loi du 10 juillet 1965, M. [W] doit rapporter la preuve d'un trouble de jouissance grave, même s'il est temporaire.

Les photographies incluses dans l'assignation, intitulées "photographies du mur tel qu'il était endommagé depuis 2013", qui ne sont pas datées et dont l'origine n'est pas certaine, paraissent être extraites d'un procès-verbal d'huissier en date du 29 mars 2017 et ne sont en oute hypothèse pas de nature à établir la réalité d'un trouble de jouissance grave.

Par ailleurs, et pour la période correspondant au point de départ du préjudice qu'a retenue le tribunal, soit le 26 décembre 2019, le seul élément objectif susceptible d'être le support de l'évaluation de son quantum, en dehors des seules déclarations des demandeurs, est le rapport en date du 23 avril 2020, produit par l'assureur de M. [W].

Ce rapport indique : "Lors des opérations d'expertise, nous avons constaté que le bureau sinistré, au plafond et sur un pan de mur, continuait d'être utilisé à usage professionnel. Le sinistre n'empêche donc pas l'activité exercée par votre assuré et ce depuis le 06/06/2013. Toutefois, une perte d'usage pendant la durée des travaux semble nécessaire. Cette perte sera estimée pour une durée de 15 jours, pour un bureau de 20 m2 dans un logement de 55,78 m2, sur la base d'une valeur locative de 34 euros/m2/mensuels" (34 x 0,5 = 340 euros)

M. [W] ne produit aux débats aucun élément de preuve susceptible de fonder une occupation des lieux autre que professionnelle, le tribunal ne disposant que d'un contrat d'assurance professionnelle, et aucune taxe d'habitation à son nom n'est communiquée.

M. [W] a donc déjà été indemnisé pour sa perte de jouissance des lieux à titre professionnel par son assureur ; il ne parvient pas en outre à établir que cet appartement soit son domicile personnel principal, ni secondaire, et donc à justifier du trouble de jouissance grave requis comme condition d'application du texte susvisé.

En conséquence, M. [W], faute de justifier d'un préjudice indemnisable, sera débouté de son action en responsabilité sur le fondement de l'article 9-III alinéa 1 contre le syndicat des copropriétaires.

Sur le fondement de ce même texte, la SCI Thoine demande une indemnité, consécutive aux dégradations causées par les travaux dans l'appartement dont elle est propriétaire.

Néanmoins, elle ne justifie pas avoir subi un préjudice de jouissance grave au sein de son lot, d'une part, ni d'une perte de valeur de son lot, subséquente aux travaux dénoncés.

En outre, la SCI Thoine indique dans ses conclusions, qui détaillent les postes de ses préjudices, qu'il convient de retrancher l'indemnité de 800 euros HT, perçue en raison de la dégradation du parquet lors de l'intervention de l'entreprise ayant remplacé la chute d'eau en fonte.

En conséquence, la SCI Thoine, faute de justifier d'un préjudice indemnisable, sera déboutée de son action en responsabilité sur le fondement de l'article 9-III alinéa 1 contre le syndicat des copropriétaires

Sur la demande de la SCI Thoine et de M. [W] en responsabilité civile délictuelle pour inaction fautive du syndicat des copropriétaires et du syndic

La SCI Thoine et M. [W] sollicitent la condamnation du cabinet ISM Gestion en faisant valoir qu'il a engagé sa responsabilité délictuelle pour faute, s'opposant systématiquement aux demandes des concluants et en multipliant les prétextes pour échapper à leurs obligations, d'où s'évince une résistance abusive et une intention de nuire

En défense le syndicat des copropriétaires fait valoir qu'il a toujours pris en charge les diligences et frais des hommes de l'art qui sont intervenus dans l'appartement de la SCI Thoine, alors qu'il n'était parfois pas tenu de le faire.

Il fait état des nombreux mails agressifs et harcelants de M. [W] envers le syndic et le conseil syndical auxquels il attribue un caractère harcelant.

Il rapporte de nombreuses tentatives de médiation, ayant échoué.

Le syndicat des copropriétaires produit également des témoignages de copropriétaires qui font état des désagréments causés par l'attitude de M. [W], obstructive et non constructive.

La cabinet ISM Gestion expose que ni la SCI Thoine, ni M. [W], à qui incombent la charge de la preuve, ne démontrent de faute imputable au syndic, qui a accompli les diligences nécessaires en temps utile.

***

L'article 1240 du code civil dispose que "Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer".

L'article 1241 du code civil dispose que "Chacun est responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou son imprudence".

En application de ces dispositions, le syndic doit répondre de ses fautes de gestion à l'égard des tiers et le syndicat des copropriétaires peut engager sa responsabilité pour faute si l'on considère qu'il agit par l'intermédiaire de ses organes, en l'espèce le syndic.
Ces textes supposent que le demandeur à l'action en responsabilité civile établisse une faute, un préjudice personnel et un lien de causalité direct entre la faute du syndic et le préjudice.

Sur ce

Si le syndic engage sa responsabilité contractuelle à l'égard du syndicat des copropriétaires, les copropriétaires qui subissent un préjudice personnel et direct sont fondés à mettre en cause la responsabilité délictuelle du syndic sur le fondement de l'article 1240 du code civil.

Il ressort de l'historique du dossier que le syndicat des copropriétaires et le syndic ont toujours pris en compte les doléances de M. [W] et de la SCI Thoine, quand ils ont en eu connaissance.

Le sinistre dénoncé en 2013 a donné lieu à une expertise judiciaire contradictoire, l'origine des dommages n'a pu être identifiée mais ces derniers ont été indemnisés.

Les infiltrations constatées en 2019 par le cabinet Elex ont été dénoncées au syndic au mois d'avril 2020 par M. [W].

Le cabinet ISM gestion a donné des ordres de service pour procéder à des recherches de fuite à la société Somsou Pons au mois de mai 2020 et à la société Foussadier au mois de juin 2020.

La réception des travaux de remplacement de la descente a eu lieu le 23 septembre 2020.

Les travaux de remise en état dans les trois appartements ont fait l'objet de nombreux échanges de mails et les devis de la société MG entreprise ont été retenus par le conseil syndical courant octobre 2020.

Ces travaux ont été pris en charge par les assureurs des copropriétaires du 3ème et 5ème étage.

Le 14 octobre 2020, le cabinet ISM gestion a relancé M. [W], qui avait refusé l'intervention de l'entreprise choisie par le conseil syndical, pour qu'il communique un devis d'une entreprise de son choix.

Des relances du cabinet ISM Gestion à M.[W] ont été effectuées le 21 octobre et le 2 décembre 2020, ce dernier n'a pas donné suite aux propositions de remise en état de l'appartement de la SCI Thoine par la société MG entreprise.

Il ressort de la chronologie des faits que le cabinet ISM gestion a procédé aux diligences nécessaires pour la gestion du sinistre survenu au cours de l'hiver 2019 et dont il n'a été averti qu'en avril 2020.

Dès lors, aucune faute de négligence n'étant caractérisée à l'encontre du syndicat des copropriétaires ou du syndic dans la gestion des sinistres dénoncés par M. [W] et la SCI Thoine, ils seront déboutés de leur demande à ce titre.

Sur la demande de réparation de la porte de service

La SCI Thoine et M. [W] font état d'un mauvais fonctionnement du ferme-porte de la porte de service et soutiennent que le syndic n'a jamais fait procéder à sa remise en état ou son remplacement, ce qui expose la copropriété à un risque accru de vol.

Au soutien de sa demande il produit des échanges de mails et un constat d'huissier en date du 19 novembre 2020, qui fait état "d'un bruit de choc métallique fortement audible à chaque fermeture".

En défense le cabinet ISM Gestion produit les factures en date des 12 novembre 2020 et 30 avril 2021, attestant de l'entretien et de la réparation de la porte de service.

En conséquence, la SCI Thoine et M. [W] seront déboutés de leur demande, infondée.

Sur la demande de la SCI Thoine d'annulation de l'assemblée générale du 10 décembre 2020

La SCI Thoine, copropriétaire, soutient que l'assemblée générale en date du 10 décembre 2020 doit être annulée, faute pour le syndic d'avoir adressé aux copropriétaires convoqués à cette assemblée le formulaire leur permettant de voter par correspondance.

Il soutient que le syndic ayant fait le choix délibéré de s'opposer au vote par correspondance des copropriétaires empêchés, il doit être condamné à organiser dans un délai de trois mois une nouvelle assemblée générale dans des conditions régulières.

En défense, le syndicat des copropriétaires fait valoir que la SCI Thoine n'a contesté l'absence de formulaire de vote par correspondance que postérieurement à la tenue de l'assemblée générale,

par courriel émanant de M. [W].

Il soutient par ailleurs que les nombreux échanges entre le syndic et les demandeurs, avocats et professionnels du droit, relatifs à la tenue de cette assemblée et antérieurs à cette dernière, qui ne font nullement état d'une demande de vote par correspondance, établissent la renonciation à la revendication d'un tel vote.

Il précise qu'il était par ailleurs impossible de mettre en œuvre le vote par correspondance à la date où s'est tenue l'assemblée générale car aucun texte fixant le formulaire type de vote par correspondance n'avait été édicté.

Le cabinet ISM Gestion, syndic, rapporte qu'il pouvait valablement déroger temporairement aux dispositions de l'article 17-1 A de la loi du 17 juillet 1965, prévoyant que les copropriétaires participent à l'assemblée générale par présence physique, et organiser la tenue de l'assemblée générale par visioconférence, en application de l'ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020, votée en raison de la crise sanitaire pendant la pandémie de la covid 19.

Le syndic soutient que le vote par correspondance n'était nullement obligatoire dans la mesure où il était organisé une assemblée générale par visioconférence, le vote par correspondance n'étant rendu obligatoire que lorsque la visioconférence est impossible.

Le cabinet ISM Gestion souligne enfin que la SCI Thoine n'a jamais demandé au syndic la possibilité de procéder au vote par correspondance, ni fait valoir une quelconque difficulté afin de participer à l'assemblée querellée, ni adressé un pouvoir ou adressé ses instructions de vote à la personne de son choix.

***

L'article 7 du décret du 17 mars 1967 dispose que "Dans tout syndicat de copropriété, il est tenu, au moins une fois chaque année, une assemblée générale des copropriétaires. Sauf s'il en est disposé autrement dans la loi du 10 juillet 1965 ou le présent décret, l'assemblée générale est convoquée par le syndic (...)"

Aux termes de l'article 17-1 A de la loi du 10 juillet 1965, "Les copropriétaires peuvent participer à l'assemblée générale par présence physique, par visioconférence ou par tout autre moyen de communication électronique permettant leur identification.
Les copropriétaires peuvent, par ailleurs, voter par correspondance avant la tenue de l'assemblée générale, au moyen d'un formulaire établi conformément à un modèle fixé par arrêté. Si la résolution objet du vote par correspondance est amendée en cours d'assemblée générale, le votant ayant voté favorablement est assimilé à un copropriétaire défaillant pour cette résolution (...)"

En application de ce texte, le modèle de formulaire de vote par correspondance, à joindre à la convocation par la personne qui convoque l'assemblée générale, est fixé par l'arrêté du 2 juillet 2020, entré en vigueur le 4 juillet 2020.

L'ordonnance n°2023-304 du 25 mars 2020, applicable pendant la pandémie de la covid 19, période pendant laquelle s'est tenue l'assemblé générale querellée en date du 10 décembre 2020, a permis au syndic de faire choix des moyens techniques pour participer aux assemblées générales de copropriétaires en visioconférence. Aux termes de son article 22-2-I "Par dérogation aux dispositions du premier alinéa de l'article 17-1 A de la loi du 10 juillet 1965 susvisée, et jusqu'au 31 juillet 2022, le syndic peut prévoir que les copropriétaires ne participent pas à l'assemblée générale par présence physique.
Dans ce cas, les copropriétaires participent à l'assemblée générale par visioconférence ou par tout autre moyen de communication électronique permettant leur identification. Ils peuvent également voter par correspondance, avant la tenue de l'assemblée générale, dans les conditions édictées au deuxième alinéa de l'article 17-1 A de la loi du 10 juillet 1965 susvisée".

Selon les dispositions de l'article 9 du décret du 17 mars 1967, "La convocation contient l'indication des lieu, date et heure de la réunion, ainsi que l'ordre du jour qui précise chacune des questions soumises à la délibération de l'assemblée. A défaut de stipulation du règlement de copropriété ou de décision de l'assemblée générale, la personne qui convoque l'assemblée fixe le lieu et l'heure de la réunion. La convocation indique le lieu, le ou les jours et heures de consultation des pièces justificatives des charges. Le formulaire de vote par correspondance mentionné au deuxième alinéa de l'article 17-1 A est joint à la convocation"

L'article 42 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965 dispose que "Les actions en contestation des décisions d'assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants dans un délai de deux mois à compter de la notification du procès-verbal d'assemblée sans ses annexes. Cette notification est réalisée par le syndic dans le délai d'un mois à compter de la tenue de l'assemblée générale".

Sur ce

A titre liminaire, les défendeurs ne contestent pas ne pas avoir adressé de formulaire de vote par correspondance à la SCI Thoine, copropriétaire.

En application des textes susvisés, la SCI Thoine, qui a la qualité de copropriétaire défaillant et a agi dans les délais légaux est recevable à agir en annulation de l'assemblée générale en son entier.

Les dispositions susvisées, qui régissent les règles de forme de la convocation à l'assemblée générale du syndicat des copropriétaires sont impératives, et imposent qu'il soit adressé un formulaire de vote par correspondance aux copropriétaires convoqués. A ce titre, les moyens des défendeurs relatifs à une renonciation, qui serait en l'espèce au surplus implicite, à un droit dont ils n'ont pas la libre disposition, sont inopérants.

Sont également inopérants les moyens invoquant que le formulaire de vote par correspondance était inutile car l'assemblée se tenait en visioconférence, car si l'exercice d'un vote par correspondance procède du libre choix du copropriétaire, encore faut-il qu'il puisse l'exercer et en l'absence du formulaire, ce droit était devenu impossible à mettre en œuvre.

Seront également rejetés les moyens relatifs à la possibilité pour la SCI Thoine de donner un pouvoir à une personne de son choix, s'agissant d'une autre modalité de participation à l'assemblée générale des copropriétaires, qui ne se substitue pas au vote par correspondance.

L'ordonnance n°2023-304 du 25 mars 2020, qui vise expressément la possibilité de voter par correspondance lors des assemblées générales se déroulant pendant la pandémie, n'a en rien modifié le régime juridique applicable aux convocations en cette matière.

L'arrêté du 2 juillet 2020, fixant le modèle de formulaire de vote par correspondance aux assemblées générales de copropriétaires, mis en annexe de l'arrêté, a été publié au journal officiel de la république française du 3 juillet 2020 et est entré en vigueur le lendemain de sa publication, soit le 4 juillet 2020. Les moyens de défense relatifs à l'impossibilité pour le syndic de mettre en œuvre cette modalité de vote seront donc également rejetés.

En conséquence, le formulaire de vote par correspondance devait être joint à la convocation des copropriétaires pour l'assemblée générale du 10 décembre 2020 ; faute pour le cabinet ISM Gestion d'y avoir procédé, la SCI Thoine sera déclarée bien fondée en sa demande et l'assemblée générale des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 1] en date du 10 décembre 2020 sera annulée.

S'agissant de la demande de la SCI Thoine de condamnation sous astreinte du syndic à convoquer dans les trois mois une nouvelle assemblée générale à ses frais exclusifs, qui n'est fondée ni en droit ni en fait, sera rejetée.

Sur la demande d'indemnisation par le cabinet ISM Gestion des frais bancaires au titre de l'exécution forcée de la décision du juge de l'exécution du 13 septembre 2018, réformée par la cour d'appel de Paris le 19 novembre 2020

M. [W] demande le règlement de la somme de 100 euros à titre de dommages et intérêts, correspondant aux frais bancaires consécutifs au blocage de son compte postérieurement à une saisie-attribution du cabinet ISM Gestion sur ses comptes bancaires.

En défense, le cabinet ISM gestion soutient qu'il s'agit de frais de justice, dont il s'est intégralement acquitté et fournit le chèque.

Sous couvert d'une demande de dommage et intérêts M. [W] demande en réalité l'indemnisation de frais bancaires relatifs à une autre procédure, qui n'ont aucun lien avec l'objet du présent litige.

En conséquence M. [W] sera débouté de sa demande d'indemnisation.

Sur les demandes reconventionnelles du syndicat des copropriétaires et du cabinet ISM gestion, syndic, pour procédure abusive

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 1] soutient que la SCI Thoine et M. [W] développent sciemment des moyens non fondés pour déstabiliser le syndicat des copropriétaires et son syndic.

Il fait valoir que par leurs actions multiples, la SCI Thoine et M. [W] mettent en péril l'administration de la copropriété et alimentent en son sein un climat conflictuel ; ces nombreuses procédures, dont ils ne supportent pas le coût en raison de leur profession, démontrent une volonté de harcèlement judiciaire.

Le cabinet ISM Gestion souligne les propos injurieux et diffamatoires de la SCI Thoine et de M. [W] dans leurs écritures, l'attitude injurieuse et procédurière de M. [W] vis à vis des autres copropriétaires et la multiplication des instances judiciaires non fondées à son égard.

En défense, la SCI Thoine et M. [W] font valoir qu'ils ont fait appel à des avocats extérieurs au cabinet Apollinaire qui ont consacré du temps à leur défense, et dont ils ont assumé le paiement des honoraires, dans le cadre d'actions dont il n'est pas démontré le caractère infondé.

***

Aux termes de l'article 1240 du code civil, "tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à la réparer".
Sur ce fondement, il incombe à la partie demanderesse de rapporter la triple preuve de l'existence, d'une faute d'un préjudice et d'un lien causal entre les deux.

L'article 1241 du code civil dispose que "Chacun est responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou son imprudence".

En application de ces textes, l'exercice d'une action en justice, de même que la défense à une telle action, constitue en principe, un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages-intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol. (Civ. 1ere, 18 juill. 1995, n°93-14.485 ; Civ. 3ème, 10 oct. 2012, n°11-15.473)

Sur ce

Compte tenu du sens de la présente décision, la SCI Thoine n'a pas succombé s'agissant de l'intégralité de ses demandes, puisque sa demande en annulation de l'assemblée générale en son entier a été déclarée bien fondée.

Il ne ressort donc pas des circonstances de l'espèce que les demandeurs aient abusivement exercé leur droit d'agir, dans l'unique dessein de déstabiliser la copropriété, par une action qu'ils savaient pertinemment vouée à l'échec.

Le syndicat des copropriétaires ne rapporte pas non plus la preuve que cette procédure a été à l'origine de difficultés quelconques ou qu'elle aurait nécessité le vote d'appels de fonds exceptionnels pour pallier un manque temporaire de trésorerie.

Le syndicat des copropriétaires, qui succombe à rapporter la preuve de la faute dans l'exercice de leur droit d'agir en justice de la SCI Thoine et M. [W], qui lui incombe, sera en conséquence débouté de sa demande reconventionnelle en responsabilité civile à l'égard de cette société.

S'agissant des propos injurieux et diffamatoires des demandeurs dans leurs conclusions, allégués par le cabinet ISM Gestion, ils ne relèvent pas de la caractérisation d'un abus de droit d'agir en justice mais d'actions distinctes en responsabilité civile ou en diffamation.

En conséquence le cabinet ISM Gestion sera débouté de sa demande en condamnation pour procédure abusive à son encontre.

Sur les demandes accessoires

- Sur les dépens

Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

La SCI Thoine et M. [E] [W], parties succombant pour la majeure partie de leurs prétentions seront condamnés in solidum au paiement des entiers dépens de l'instance.

- Sur les frais non compris dans les dépens

En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a lieu à condamnation.

En équité, chacune des parties gardera à sa charge les frais irrépétibles engagés dans la présente procédure au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- Sur l'exécution provisoire

Aux termes des articles 514 et suivants du code de procédure civile, dans leur rédaction issue du décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019 et applicable aux instances introduites à compter du 1er janvier 2020, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

Le juge peut écarter l'exécution provisoire de droit, en tout ou partie, s'il estime qu'elle est incompatible avec la nature de l'affaire. Il statue, d'office ou à la demande d'une partie, par décision spécialement motivée.

En l'espèce, la nature des condamnations prononcées et l'ancienneté du litige justifient que l'exécution provisoire de droit ne soit pas écartée.

Les parties seront déboutées du surplus de leurs demandes formées au titre des frais irrépétibles ainsi que leurs autres demandes plus amples ou contraires.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par jugement contradictoire, rendu publiquement en premier ressort et par mise à disposition au greffe,

DECLARE RECEVABLE M. [W] en ses demandes ;

DEBOUTE M. [W] de sa demande d'indemnisation de son préjudice de jouissance au titre du dégât des eaux ;

DEBOUTE M. [W] de sa demande d'indemnisation de 100 euros au titre de remboursement de frais bancaires dans une autre procédure ;

DEBOUTE la SCI Thoine de sa demande en réparation de son préjudice matériel ;

DEBOUTE M. [W] et la SCI Thoine de leurs demandes de dommages et intérêts pour inaction fautive du syndic et du syndicat des copropriétaires ;

DEBOUTE M. [W] et la SCI Thoine de leur demande de réparation de la porte de service, partie commune de l'immeuble ;

ANNULE en son entier l'assemblée générale du syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 1] en date du 10 décembre 2020 ;

DEBOUTE la SCI Thoine de sa demande de condamnation du syndic à organiser une nouvelle assemblée générale à ses frais exclusifs ;

CONDAMNE in solidum la SCI Thoine et M. [E] [W] aux dépens ;

DEBOUTE la SCI Thoine et M. [E] [W] de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 1] de sa demande reconventionnelle en procédure abusive de la SCI Thoine et de M. [E] [W] ;

DEBOUTE le cabinet ISM Gestion de sa demande reconventionnelle en procédure abusive de la SCI Thoine et de M. [E] [W] ;

DEBOUTE le syndicat des copropriétaires de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE le cabinet ISM Gestion de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

RAPPELLE que l'exécution provisoire est de droit

Fait et jugé à Paris le 30 Avril 2024.

La GreffièreLa Présidente


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 8ème chambre 1ère section
Numéro d'arrêt : 21/03664
Date de la décision : 30/04/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 07/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-30;21.03664 ?
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