TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1] Copies conformes délivrées
le : 29/04/2024
à : - Me J. BELLAICHE
- Me Y. ARDAILLOU
Copie exécutoire délivrée
le : 29/04/2024
à : - Me J. BELLAICHE
La Greffière,
Pôle civil de proximité
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PCP JCP référé
N° RG 24/01686 - N° Portalis 352J-W-B7I-C373Q
N° de MINUTE :
2/2024
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 29 avril 2024
DEMANDEURS
Madame [Y] [F], demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Jonathan BELLAICHE, Avocat au Barreau de PARIS, vestiaire : #K0103, substitué par Me Pierre CHENEVEZ, Avocat au Barreau de PARIS
Monsieur [M]-[C] [F], demeurant [Adresse 4]
représenté par Me Jonathan BELLAICHE, Avocat au Barreau de PARIS, vestiaire : #K0103, substitué par Me Pierre CHENEVEZ, Avocat au Barreau de PARIS
DÉFENDERESSE
La Société de droit irlandais AIRBNB IRELAND UNLIMITED COMPANY, dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Me Yves ARDAILLOU, Avocat au Barreau de PARIS, vestiaire : #R138
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Madame Clara SPITZ, Juge, Juge des contentieux de la protection
assistée de Madame Nathalie BERTRAND, Greffière
DATE DES DÉBATS
Audience publique du 21 mars 2024
Décision du 29 avril 2024
PCP JCP référé - N° RG 24/01686 - N° Portalis 352J-W-B7I-C373Q
ORDONNANCE
contradictoire et en premier ressort prononcée par mise à disposition au greffe le 29 avril 2024 par Madame Clara SPITZ, Juge, assistée de Madame Nathalie BERTRAND, Greffière.
EXPOSÉ DU LITIGE
Par acte sous seing privé du 23 juillet 2023, Monsieur [M] [F], aux droits duquel sont venus Madame [Y] [F] et Monsieur [M]-[C] [F], a donné à bail à Monsieur [O] [E] et à Madame [G] [E] un local d'habitation situé [Adresse 3].
Par acte de commissaire de justice en date du 30 janvier 2024, Madame [Y] [F] et Monsieur [M]-[C] [F] ont fait assigner la société AIRBNB IRELAND UNLIMITED COMPANY devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de PARIS, statuant en référé, aux fins d’obtenir sa condamnation à lui transmettre le relevé des transactions relatif à l'activité de sous-location de l'appartement dont ils sont propriétaires et à laquelle s'adonnent Monsieur [O] [E] et Madame [G] [E] via la plateforme AIRBNB et ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir. Ils sollicitent également la condamnation de la défenderesse aux dépens.
À l'appui de leur demande, ils exposent que le procès-verbal de constat internet dressé par commissaire de justice le 12 décembre 2023 établit que les locataires sous-louent leur appartement via la plateforme AIRBNB en violation des dispositions du contrat de bail qu'ils ont signé et soutiennent ainsi, au visa de l'article 145 du code de procédure civile, avoir motif légitime à obtenir le relevé de transactions afférentes à ces sous-locations dans le cadre du litige qui ne manquera pas de les opposer aux preneurs. Ils indiquent, en effet, n'avoir aucun autre moyen de connaître l'étendue du préjudice subi que de se voir communiquer ce relevé de transaction qui est en la seule possession de la société AIRBNB.
Lors de l'audience du 21 mars 2024 à laquelle l'affaire a été appelée, Madame [Y] [F] et Monsieur [M]-[C] [F], représentés par leur conseil, ont maintenu les demandes formées dans l'acte introductif d'instance.
La société AIRBNB IRELAND UNLIMITED COMPANY, représentée par son conseil, a déposé des conclusions qu'elle a soutenues oralement aux termes desquelles il est demandé :
- à titre principal, de débouter Madame [Y] [F] et Monsieur [M]-[C] [F] de leurs demandes,
- à titre subsidiaire,
. de lui donner acte qu'elle s'en remet à la justice s’agissant de leur demande,
. de débouter Madame [Y] [F] et Monsieur [M]-[C] [F] de leur demande de condamnation sous astreinte,
- en tout état de cause, de débouter Madame [Y] [F] et Monsieur [M]-[C] [F] de leur demande de condamnation aux dépens.
Elle fait valoir, au visa de l'article 145 du code de procédure civile que les demandeurs ne justifient pas d'un motif légitime à solliciter la production du relevé de transaction litigieux en ce qu'ils n'ont jamais adressé cette demande aux locataires qui pourtant en disposent. Ils ne s'opposent pas, à titre subsidiaire, à transmettre le relevé des transactions et font valoir qu'ils n'entendent opposer aucune résistance dans l'exécution de l'obligation qui pourrait leur être faite, de sorte qu'une astreinte n'apparaît pas nécessaire.
À l'issue des débats, la décision a été mise en délibéré à la date du 29 avril 2024, par mise à disposition des parties au greffe.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Il résulte de l'article 145 du code de procédure civile que s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé.
En l’espèce, il ressort des pièces versées aux débats, notamment du procès-verbal de constat internet du 12 décembre 2023 que Monsieur [O] [E] et Madame [G] [E] seraient susceptibles de mettre l’appartement loué en sous-location via la plateforme internet AIRBNB.
La sous-location sans l’accord du bailleur constitue un manquement aux obligations contractuelles résultant du bail qui peut justifier le prononcé de la résiliation de ce dernier. En outre, elle peut constituer un préjudice pour le bailleur, préjudice dont la réparation ne peut être chiffrée que par la détermination du nombre et le montant des transactions effectuées par le locataire.
Or, seules la société AIRBNB et la personne qui dispose d’un compte sur la plateforme AIRBNB, soit en l’espèce Monsieur [O] [E] et à Madame [G] [E], ont accès au relevé des transactions.
Ainsi, Madame [Y] [F] et Monsieur [M]-[C] [F], qui envisagent de diligenter une action en résiliation de bail et/ou en demande de dommages et intérêts, justifient de leur demande de communication du relevé de transactions AIRBNB, pièce utile à la solution d’un litige à venir.
Il convient de relever qu'aucune disposition légale n'impose aux requérants de justifier d'une demande préalable auprès des locataires directement, étant précisé que la responsabilité de la société AIRBNB est susceptible d'être également engagée dans le cas d'une instance future et qu'à ce titre, rien ne fait obstacle à ce que les bailleurs lui adressent en premier lieu la demande de communication du relevé de ces transactions.
En conséquence, il y a lieu d’enjoindre la société AIRBNB IRELAND UNLIMITED COMPANY à communiquer à Madame [Y] [F] et Monsieur [M]-[C] [F] le relevé des transactions effectuées par Monsieur [O] [E] et Madame [G] [E] concernant le logement situé au [Adresse 3].
En l’absence d’opposition manifestée à l’audience par la société défenderesse à une telle communication, la demande d’astreinte n’apparaît pas justifiée et sera donc rejetée.
En application de l’article 696 du code de procédure civile, la société AIRBNB IRELAND UNLIMITED COMPANY, partie qui succombe, supportera la charge des dépens de l’instance.
PAR CES MOTIFS,
Nous, juge des référés, statuant après débats en audience publique, par ordonnance mise à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,
ORDONNONS à la société AIRBNB IRELAND UNLIMITED COMPANY de communiquer à Madame [Y] [F] et Monsieur [M]-[C] [F] le relevé de transactions effectuées par Monsieur [O] [E] et Madame [G] [E] via la plateforme internet AIRBNB et relatives au logement situé au [Adresse 3].
DÉBOUTONS Madame [Y] [F] et Monsieur [M]-[C] [F] de leur demande d’astreinte,
CONDAMNONS la société AIRBNB IRELAND UNLIMITED COMPANY aux dépens de la présente instance,
RAPPELONS que la présente ordonnance est assortie de droit de l'exécution provisoire.
Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe les jour, mois et an susdits, et signé par la Juge et la Greffière susnommées.
La Greffière, La Juge,
Décision du 29 avril 2024
PCP JCP référé - N° RG 24/01686 - N° Portalis 352J-W-B7I-C373Q