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25/04/2024 | FRANCE | N°23/54737

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Service des référés, 25 avril 2024, 23/54737


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS








N° RG 23/54737 -
N° Portalis 352J-W-B7H-C2BVB

N° : 4-CB

Assignation du :
09 juin 2023

[1]

[1] 2 Copies exécutoires
délivrées le:


ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 25 avril 2024



par Emmanuelle DELERIS, Vice-présidente au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,

Assistée de Clémence BREUIL, Greffier.
DEMANDERESSE

Le syndicat des copropriétaires de l’immeuble situé [Adresse 1], pris

en la personne de Maître [K] [U], administrateur provisoire
[Adresse 4]
[Localité 5]

représenté par Maître Lionel BUSSON de la SELARL CABINET SABBAH & ASSOCIES, avocats au...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS


N° RG 23/54737 -
N° Portalis 352J-W-B7H-C2BVB

N° : 4-CB

Assignation du :
09 juin 2023

[1]

[1] 2 Copies exécutoires
délivrées le:

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 25 avril 2024

par Emmanuelle DELERIS, Vice-présidente au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,

Assistée de Clémence BREUIL, Greffier.
DEMANDERESSE

Le syndicat des copropriétaires de l’immeuble situé [Adresse 1], pris en la personne de Maître [K] [U], administrateur provisoire
[Adresse 4]
[Localité 5]

représenté par Maître Lionel BUSSON de la SELARL CABINET SABBAH & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS - #P0466

DEFENDEURS

Madame [W] [J] épouse [C]
[Adresse 2]
[Localité 3]

Monsieur [B] [C]
[Adresse 2]
[Localité 3]

représentés par Maître Frédéric-michel PICHON, avocat au barreau de PARIS - #E1397

DÉBATS

A l’audience du 14 Mars 2024, tenue publiquement, présidée par Emmanuelle DELERIS, Vice-présidente, assistée de Clémence BREUIL, Greffier,

Nous, Président,

Après avoir entendu les conseils des parties,

Monsieur [B] [C] et Madame [W] [J] épouse [C] (ci-après les époux [C]) sont copropriétaires de locaux commerciaux en rez-de-chaussée et d'une cave en sous-sol correspondant aux lots n°2 et 3 de l'immeuble situé [Adresse 1], soumis au statut de la copropriété.

Par exploit délivré le 9 juin 2023, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [Adresse 1], pris en la personne de son administrateur provisoire Maître [K] [U] (ci-après le syndicat des copropriétaires) a fait citer Monsieur [B] [C] et Madame [W] [J] épouse [C] devant le président du tribunal judiciaire de Paris, statuant en référé, aux fins de voir, au visa des articles 835 et 700 du code de procédure civile, 8 et 9 de la loi du 10 juillet 1965 :

-" Condamner in solidum Monsieur et Madame [C] à rétablir l'accès aux caves et au compteur d'eau situé en cave, sous astreinte de 500 euros par jour de retard dans un délai de 15 jours à compter de la signification du jugement à intervenir,

-Dire et juger que le Président du tribunal judiciaire de céans, statuant en matière de référé conservera compétence pour liquider l'astreinte,

-A titre subsidiaire, autoriser le syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [Adresse 1]), pris en la personne de Maître [K] [U], administrateur provisoire à rétablir l'accès aux caves par suppression du système de fermeture mise en place par Monsieur et Madame [C],

-En tout état de cause, condamner in solidum Monsieur et Madame [C] à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [Adresse 1]), pris en la personne de Maître [K] [U], administrateur provisoire, la somme de 5.000 euros conformément aux dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

-Les condamner aux entiers dépens de l'instance ".

L'affaire, appelée pour la première fois à l'audience, a fait l'objet de deux renvois à la demande des parties, qui ont reçu injonction de rencontrer un médiateur.

Les parties n'ayant pas souhaité entrer en médiation, l'affaire a été évoquée à l'audience du 14 mars 2024 au cours de laquelle elles ont oralement développé leurs conclusions.

Le syndicat des copropriétaires, représenté, demande au juge des référés de :
-Lui donner acte que la demande de rétablissement de l'accès aux caves et au compteur d'eau est désormais sans objet,

-Le déclarer recevable et bien fondé en l'ensemble de ses demandes,

-Condamner in solidum Monsieur [B] [C] et Madame [W] [J] épouse [C] à lui payer, à titre provisionnel, la somme de 1.635,16 euros, outre les intérêts au taux légal à compter de la signification de l'ordonnance à intervenir,

-Débouter Monsieur [B] [C] et Madame [W] [J] épouse [C] de l'ensemble de leurs demandes,

-condamner in solidum Monsieur et Madame [C] à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [Adresse 1]), pris en la personne de Maître [K] [U], administrateur provisoire, la somme de 6.200 euros conformément aux dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

-Les condamner in solidum aux entiers dépens de l'instance.

Monsieur [B] [C] et Madame [W] [J] épouse [C] demandent au juge des référés de :
-Dire n'y avoir lieu à référé,

-Condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [Adresse 1], pris en la personne de son administrateur provisoire Maître [K] [U] à leur verser la somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens, et celle de 3.000 euros sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile,

-Les dispenser de toute participation à la dépense commune de frais de procédure et de toute condamnation, lesquels seront répartis entre les autres copropriétaires.

Conformément à l'article 446-1 du code de procédure civile, pour plus ample informé de l'exposé et des prétentions des parties, il est renvoyé à l'assignation et aux notes d'audience.

La décision a été mise en délibéré au 25 avril 2024.

MOTIFS

A titre liminaire, il est rappelé que les " demandes " tendant à voir " constater ", " donner acte " ou " dire et juger " ne constituent pas des prétentions au sens des dispositions de l'article 4 du code de procédure civile et ne sont pas susceptibles de faire l'objet d'une exécution forcée. Ces demandes -qui n'en sont pas et constituent en fait un résumé des moyens- ne donneront pas lieu à mention au dispositif.

Sur la demande de remise en état

Aux termes de l'article 835, alinéa 1er, du code de procédure civile, le président peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Le trouble manifestement illicite résulte de toute perturbation résultant d'un fait qui directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit.

La seule méconnaissance d'une réglementation n'est pas suffisante pour caractériser l'illicéité d'un trouble.

Le juge des référés doit se placer, pour ordonner ou refuser des mesures conservatoires ou de remise en état, à la date à laquelle il prononce sa décision.

Aux termes de l'article 9 I de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965, chaque copropriétaire dispose des parties privatives comprises dans son lot ; il use et jouit librement des parties privatives et des parties communes sous la condition de ne porter atteinte ni aux droits des autres copropriétaires ni à la destination de l'immeuble.

Au cas présent, le requérant se prévalait de l'existence d'un trouble manifestement illicite au moment de la délivrance de l'assignation, en faisant valoir que les défendeurs empêchaient l'accès aux compteurs d'eau de l'immeuble, situés au niveau des caves, du fait du système de fermeture qu'ils auraient apposé sur la trappe permettant l'accès au sous-sol de l'immeuble, située dans le couloir du rez-de-chaussée, notamment en ôtant les poignées de cette trappe. Il dénonçait ainsi une appropriation des parties communes par les défendeurs.

Le syndicat des copropriétaires indique dans ses dernières écritures que le trouble a cessé, la société METAL SYSTEM étant intervenue le 10 novembre 2023 à sa demande pour installer un système d'ouverture de la trappe d'accès au sous-sol.

En conséquence, il y a lieu de constater que la demande de remise en état est devenue sans objet.

Sur la demande de provision

Aux termes de l'article 835, alinéa 2, du code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal peut accorder, en référé, une provision au créancier.

L'octroi d'une provision suppose le constat préalable par le juge de l'existence d'une obligation non sérieusement contestable au titre de laquelle la provision est demandée. Cette condition intervient à un double titre : elle ne peut être ordonnée que si l'obligation sur laquelle elle repose n'est pas sérieusement contestable et ne peut l'être qu'à hauteur du montant non sérieusement contestable de cette obligation, qui peut d'ailleurs correspondre à la totalité de l'obligation.

Cette condition est suffisante et la provision peut être octroyée, quelle que soit l'obligation en cause. La nature de l'obligation sur laquelle est fondée la demande de provision est indifférente, qui peut être contractuelle, quasi-délictuelle ou délictuelle.

L'existence d'une contestation sérieuse s'apprécie à la date de la décision du juge des référés et non à celle de sa saisine.
La contestation est dite sérieuse dès lors qu'elle implique, pour être tranchée, d'être discutée au fond du litige.

Au cas présent, le requérant sollicite la condamnation des défendeurs à lui verser la somme provisionnelle de 1.635,16 euros correspondant au coût d'installation des attaches sur la plaque métallique d'accès aux caves.

Il indique avoir formé cette demande avant la date de régularisation par les défendeurs de la vente de leur lot, et relève que l'acquéreur du lot n'a pas été subrogé dans les droits et obligations des époux [C], de sorte que sa demande est parfaitement recevable, la créance invoquée étant née avant la mutation de propriété du lot.

Les époux [C] exposent quant à eux qu'ils ont vendu leur lot le 20 décembre 2023, de sorte que toute action dirigée à leur encontre au titre d'une obligation de faire est désormais irrecevable.

L'acte authentique de vente du lot des époux [C], versé aux débats, mentionne en page 40 :
" Convention des parties sur la procédure en cours
Le vendeur déclare et l'acquéreur reconnaît avoir été informé qu'il existe actuellement des procédures en cours impliquant le vendeur.
En conséquence, l'acquéreur ne sera pas subrogé dans les droits du vendeur relativement à ces procédures lesquelles restent à la charge exclusive du vendeur tant dans la prise en charge qu'au niveau des conséquences financières ou juridiques.
Le vendeur prend à ses entiers frais toutes les dépenses et condamnations éventuelles relatives ou consécutives à ces procédures, voulant que l'acquéreur ne subisse aucune conséquence tant juridique que financière que l'existence de ces procédures ".

La précision selon laquelle cette absence de subrogation concerne " les procédures en cours impliquant le vendeur ", à la différence du paragraphe précédent, dans l'acte, prévoyant la subrogation de l'acquéreur dans les droits et obligations du vendeur dans la " procédure en cours à l'encontre d'autres propriétaires (…) aucunement liée à une faute du vendeur ", permet d'en déduire que la clause précitée d'exclusion de subrogation s'applique aux instances personnellement dirigées à l'encontre des époux [C], comme tel est le cas en l'espèce.

C'est donc à tort que les défendeurs, qui ont expressément exclu de subroger leur acquéreur dans leurs droits et obligations relatifs à la procédure contentieuse en cours, soutiennent que cette demande de provision serait irrecevable en tant que dirigée à leur encontre.

Le syndicat des copropriétaires produit notamment au soutien de sa demande :
-Le courriel de Monsieur [D] [T], autre copropriétaire de l'immeuble, daté du 14 décembre 2022, qui indique : " Mme [C] a supprimé les 2 poignées que j'avais installé sur la plaque métallique qui donne accès au compteur d'eau et donc à la fermeture de l'eau pour l'immeuble, escalier et pièce qui sont des parties communes " ;

-Le courrier adressé le 3 mars 20233 aux défendeurs par Maître [U], mentionnant : " Je reviens vers vous dans ce dossier et vous remercie de bien vouloir rétablir l'accès aux compteurs EAU qui auraient été condamnés par vos soins (..) " ;

-Le courrier recommandé avec accusé de réception adressé le 10 mars 2023 par le conseil du syndicat des copropriétaires aux défendeurs, indiquant : " Il m'est indiqué que la trappe d'accès aux compteur situé en cave, que vous vous êtes accaparée, tout comme le couloir commun d'accès, a été bloquée par vos soins. Vous vous êtes contentés de demander à Maître [U], es qualité, de lui préciser les coordonnées des services des eaux, alors que, s'agissant d'un accès à un élément d'équipement commun, ledit accès doit être libre et ne doit pas être subordonné à une intervention de votre part (…) " ;

-Le procès-verbal de constat établi par Maître [Y] le 13 septembre 2023, constatant que la plaque métallique d'accès à la cave est dépourvue de poignée, présente des traces de trous et de points de vis, montrant " à l'évidence que les vis ont été vissées par le dessous puisque les pointes des vis ressortent au-dessus de la plaque ", et relatant l'impossibilité d'ouvrir cette trappe, y compris en usant de divers instruments pour faire levier.

Ces éléments n'apparaissent cependant pas suffisamment probants pour établir, avec l'évidence requise devant le juge des référés, que l'obligation de paiement de la facture de réparation de cette trappe serait incontestablement à la charge des époux [C] comme étant les auteurs avérés du calfeutrement dénoncé.

Les termes du courriel de Monsieur [T] ne valent en effet pas attestation probante faute d'avoir été établie dans les formes prévues à l'article 202 du code de procédure civile, et l'alternance, dans les courriers précités, de formules tantôt rédigées au conditionnel évocatrices d'un certain doute, tantôt péremptoires en ce qu'elles affirment que les défendeurs se sont accaparés les parties communes, l'interprétation de la réponse apportée par Madame [C] lorsqu'elle a sollicité que lui soient communiquées les coordonnées du services des eaux, et enfin les termes du procès-verbal de constat, ne permettent pas de rapporter la preuve de l'identité de l'auteur de la condamnation de l'accès aux caves.

En conséquence, la demande de provision se heurtant à une contestation sérieuse, il n'y a pas lieu à référé de ce chef.

Sur la demande formée au titre de la procédure abusive

En application des articles 32-1 du code de procédure civile et 1240 du code civil, celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un montant maximal de 10 000 euros, ainsi qu'à verser des dommages et intérêts à la partie adverse qui justifie d'un préjudice. L'exercice d'une action en justice constitue en principe un droit qui ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équivalant au dol.

Il est rappelé que le juge des référés a le pouvoir de prononcer une condamnation à des dommages et intérêts pour procédure abusive.

Au cas présent, les défendeurs sollicitent la condamnation du requérant à leur verser la somme de 3.000 euros au motif que la présente instance a été poursuivie à leur encontre malgré la vente de leur lot intervenue en cours de procédure, que des travaux de remise en état sont intervenus, et que l'administrateur provisoire de l'immeuble est animé d'un sentiment de vindicte à leur encontre.

Cependant il n'est pas établi, à l'examen des demandes récurrentes et anciennes du syndicat des copropriétaires relativement à la trappe litigieuse, que le requérant ait abusé de son droit d'ester en justice.

En conséquence, la demande sera rejetée.

Sur la demande de dispense de participation à la dépense commune des frais de procédure

Le fondement juridique de cette demande n'est pas précisé par les époux [C], qui au surplus n'explicitent ni ne motivent cette demande.

En conséquence, elle sera rejetée.

Sur les demandes accessoires

Le syndicat des copropriétaires, qui succombe, sera condamné aux dépens en application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.

Il n'est par ailleurs pas inéquitable de le condamner à verser aux défendeurs la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant en référé, par remise au greffe le jour du délibéré, après débats en audience publique, par décision réputée contradictoire et en premier ressort,

Constatons que la demande de remise en état est devenue sans objet ;

Disons n'y avoir lieu à référé sur la demande de provision ;

Rejetons les demandes formées au titre de la procédure abusive et de la dispense de contribution aux frais de procédure ;

Condamnons Monsieur [B] [C] et Madame [W] [J] épouse [C] aux dépens ;

Condamnons le syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [Adresse 1], pris en la personne de son administrateur provisoire Maître [K] [U] à payer Monsieur [B] [C] et Madame [W] [J] épouse [C] à payer au la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rappelons que la présente décision est exécutoire à titre provisoire.

Fait à Paris le 25 avril 2024.

Le Greffier,Le Président,

Clémence BREUILEmmanuelle DELERIS


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Service des référés
Numéro d'arrêt : 23/54737
Date de la décision : 25/04/2024
Sens de l'arrêt : Dit n'y avoir lieu à prendre une mesure en raison du défaut de pouvoir

Origine de la décision
Date de l'import : 01/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-25;23.54737 ?
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