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23/04/2024 | FRANCE | N°23/05473

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp fond, 23 avril 2024, 23/05473


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :
Me Stéphanie GUATIERI

Copie exécutoire délivrée
le :
à : Me Hela KACEM

Pôle civil de proximité


PCP JCP fond

N° RG 23/05473 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2HJ4

N° MINUTE :
5 JCP






JUGEMENT
rendu le mardi 23 avril 2024


DEMANDERESSE
SOCIETE D’ECONOMIE MIXTE ELOGIE-SIEMP, dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par Me Hela KACEM, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #A0220
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Madame [J] [Y], demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Stéphanie GUATIERI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #E0039


COMPOSITION DU TRIBUNAL
Morgane J...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :
Me Stéphanie GUATIERI

Copie exécutoire délivrée
le :
à : Me Hela KACEM

Pôle civil de proximité

PCP JCP fond

N° RG 23/05473 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2HJ4

N° MINUTE :
5 JCP

JUGEMENT
rendu le mardi 23 avril 2024

DEMANDERESSE
SOCIETE D’ECONOMIE MIXTE ELOGIE-SIEMP, dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par Me Hela KACEM, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #A0220

DÉFENDERESSE
Madame [J] [Y], demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Stéphanie GUATIERI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #E0039

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Morgane JUMEL, Vice-présidente, juge des contentieux de la protection assistée de Inès CELMA-BERNUZ, Greffier,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 01 février 2024

JUGEMENT
contradictoire, en premier ressort, prononcé par mise à disposition le 23 avril 2024 par Morgane JUMEL, Vice-présidente assistée de Inès CELMA-BERNUZ, Greffier

Décision du 23 avril 2024
PCP JCP fond - N° RG 23/05473 - N° Portalis 352J-W-B7H-C2HJ4

EXPOSE DU LITIGE

Suivant acte sous seing privé en date du 19 janvier 2011, la société ELOGIE SIEMP, a donné en location à Monsieur et Madame [K] et [J] [Y] un logement numéro 0004 sis [Adresse 1].

Monsieur [K] [Y] est décédé le 29 août 2012. Madame [J] [Y] est alors demeurée seule titulaire du bail.

Le 29 juillet 2022, un courrier de rappel du règlement intérieur de l’immeuble a été adressé à Madame [Y] [J] suite au comportement de l’un de ses fils envers la responsable de secteur et le gardien de l’immeuble lors d’une visite à domicile effectuée le 26 juillet 2022.

Une réunion a été organisée avec la responsable de l’agence et la directrice territoriale pour évoquer les agissements du fils de Madame [Y].

Dans un courrier daté du 24 mars 2023, la société ELOGIE SIEMP a informé Madame [Y] [J] qu’elle entendait engager une procédure de résiliation judiciaire de bail en raison de l’agression commise par l’un de ses fils envers le gardien de l’immeuble le 14 mars 2023.

Par acte d’huissier du 22 juin 2023, la société ELOGIE SIEMP a fait assigner Madame [Y] [J] devant le juge des contentieux du tribunal judiciaire de PARIS afin notamment que celui-ci :

Dise et juge que Madame [J] [Y] et ses fils n’ont pas respecté les obligations du bail et du règlement intérieur de l’immeuble et n’ont pas usé de la chose louée en « bon père de famille »,En conséquence, prononce la résiliation du bail consenti le 19 janvier 2011 à Madame [J] [Y] pour manquements graves aux obligations du bail et du règlement intérieur de l’immeuble et notamment à l’obligation de jouissance paisible des lieux loués,Ordonne l’expulsion de Madame [J] [Y] et celle de tous occupants de son chef, au besoin avec l’assistance du commissaire de police et de la force publique des lieux concernés,Dise que le sort des meubles trouvé dans les lieux sera régi par les dispositions des articles L. 433-1 et suivants du Code des procédures civiles d’exécution,Condamne Madame [J] [Y] à payer à la société ELOGIE SIEMP les loyers et charges devenus, le cas échéant, exigibles jusqu’à la résiliation du bail, sans préjudice des loyers et charges qui seraient dus à la date de l’audience,Fixe l’indemnité mensuelle d’occupation au montant de la quittance locative à compter de la résiliation du bail et jusqu’à la reprise effective des lieux et condamne Madame [J] [Y] à due concurrence,Condamne Madame [J] [Y] à payer à la demanderesse la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles, en application de l’article 700 du Code de procédure civile,Condamne Madame [J] [Y] en tous les dépens.
Lors de l’audience du 1er février 2024 devant le juge des contentieux de la protection, la société ELOGIE SIEMP, représentée par son avocat, a sollicité le bénéfice de son exploit introductif d’instance

Madame [Y] [J], représentée par son avocat, a pour sa part demandé au juge des contentieux de la protection de :
-juger que les manquements graves dénoncés par le bailleur ne sont ni fondés, ni justifiés,

En consequence,
-débouter la société ELOGIE SIEMP de l’ensemble de ses demandes,

A titre reconventionnel,
-juger que Madame [J] [Y] a subi un prejudice du fait des agissements du bailleur et de ses préposés,
-condamner la société ELOGIE SIEMP à verser à Madame [J] [Y] la somme de 1.500 euros à titre de réparation,
-condamner la société ELOGIE SIEMP à verser à Madame [J] [Y] la somme de 1.200 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procedure civile,
-la condamner aux entiers dépens.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions soutenues oralement lors de l'audience du 1er février 2024 pour l'exposé complet des prétentions respectives des parties et de leurs moyens.

MOTIFS DE LA DECISION

1. Sur la demande de résiliation du bail aux torts du locataire :

1.1 sur le bien-fondé de la demande de résiliation :

En vertu de l'article 7 b) de la loi du 6 juillet 1989, le locataire est obligé d'user paisiblement des locaux loués suivant la destination qui leur a été donnée par le contrat de location.

Le contrat de location stipule en son article 9 :
« Le locataire est tenu des obligations prévues à l’article 7 de la loi numéro 89-462 du 6 juillet 1989 et qui sont d’ordre public :
[…]
User paisiblement de la chose louée selon la destination qui leur a été donnée par le contrat de location. »

Le règlement intérieur de l’immeuble prévoit par ailleurs :
« Le locataire, tout occupant ou visiteur, ainsi que le personnel d’ELOGIE SIEMP se doivent mutuellement le respect en toutes circonstances. A noter que l’agression d’un gardien ou d’un gestionnaire d’immeubles dans l’exercice de ses fonctions est une circonstance aggravante (article 222-11 et 222-12 du Code pénal) pouvant entraîner la résiliation du bail ainsi que des poursuites pénales. Il en va de même vis-à-vis de tout collaborateur d’ELOGIE SIEMP. »

Il convient enfin de rappeler que les locataires sont tenus, conformément aux dispositions de l’article 1735 du Code civil, des agissements des enfants qu’ils hébergent même s’ils échappent de façon totale et définitive à leur autorité et même s’ils sont majeurs.

En l’espèce, au soutien de ses pretentions, la société ELOGIE SIEMP produit :
une déclaration de main courante établie par Madame [L] [I], responsible de secteur de logement social, dans laquelle celle-ci explique qu’elle avait rendez-vous avec Madame [Y] [J] afin d’évoquer des incivilités commises par ses deux fils ; qu’elle souligne que le bail n’est pas respecté car les fils de Madame [Y] ont ramené deux véhicules supplémentaires ; qu’elle précise que lors de l’entretien, l’un des fils de Madame [Y] [J] était present et a empêché tout échange tranquille avec sa mère ; qu’il a commencé à insulter Madame [I] ; qu’il était extrêmement agressif envers elle et gesticulait de façon très intense en sa direction ; que le fils de Madame [Y] s’est ensuite mis à insulter le gardien de l’immeuble, qui était également présent ;que le fils de Madame [Y] a notammen fait reference à son propre casier judiciaire en disant que celui-ci était “blindé” et qu’il pouvait tout faire ; qu’ils ont été contraints de quitter l’appartement de Madame [Y] devant les provocations du fils de la locataire ; que Madame [I] ajoute que ce n’est pas la première fois que le gardien de l’immeuble subit des menaces de la part des enfants de Madame [Y] puisqu’il a déjà deposé plainte en octobre 2021 pour des faits de violence avec arme blanche (plainte pour laquelle il n’a ensuite jamais eu de nouvelles) ; qu’elle ajoute pour finir que de son côté, elle a déjà fait des signalements auprès du commissaire de police et de la MPC du commissariat,une plainte du gardien de l’immeuble Monsieur [N] [M] en date du 20 mars 2023 dans laquelle celui-ci explique avoir été victime de violences de la part de Monsieur [Y] [H] le 14 mars 2023 ; que le gardien de l’immeuble affirme que lors de sa ronde dans l’immeuble, Monsieur [Y] l’a interpelé en lui reprochant d’avoir mis un mot sur son véhicule qui était garé sur un autre emplacement que le sien; que le gardien explique qu’il a alors essayé de sortir de l’immeuble, mais que Monsieur [Y] lui a alors attrapé le bras pour le tirer en arrière et lui a dit que s’il ne comprenait pas, “on allait s’expliquer autrement”. Le gardien précise pour finir que depuis, il ne se rend plus seul sur le site et qu’il est accompagné d’un agent de sécurité pour ses rondes.
Madame [Y], qui fait valoir que ses fils ont été victimes d’un harcèlement de la part du gardien et d’un comportement agressif de la part de la responsable de secteur, n’apporte pour sa part aucun élément au soutien de ses declarations. Elle ne produit pas non plus de justificatif quant au départ des lieux de ses fils de nature à permettre d’établir qu’il a été mis fin aux troubles.

Les éléments du dossier laissent ainsi apparaître que du fait du comportement de deux de ses fils envers les préposés de la société ELOGIE SIEMP, Madame [Y] a manqué à son obligation de jouissance paisible des lieux.

La plainte et la main-courante susvisés font en effet état de faits précis et circonstanciés de nature à démontrer l’existence de propos ou de comportements agressifs envers les préposés du bailleur, ce de façon répétée.

Ces éléments sont convergents quant au comportement reproché aux fils de Madame [Y] [J].

Au vu de ces éléments, la preuve de l’existence de troubles de jouissance récurrents causés par deux des enfants de Madame [J] [Y] est rapportée.

Cette circonstance constitue une atteinte grave aux obligations du locataire qui justifie la résiliation du contrat aux torts de Madame [Y] [J], ce à compter de la présente décision.

1.2 sur les conséquences de la résiliation du bail :

Il y a lieu, en conséquence, d’autoriser l'expulsion de Madame [Y] [J], ainsi que celle de tous occupants de son chef.

Jusqu’à la complète libération des lieux par le locataire, il est légitime, faute pour le bailleur de justifier d’un préjudice plus important que celui résultant de la seule perte du montant des loyers et charges, de fixer une indemnité d'occupation d’un montant équivalent à celui du dernier loyer, outre les charges, à compter de la résiliation du bail et jusqu’à la complète libération des lieux.

Aucun motif ne justifie de supprimer le délai de deux mois qui suit le commandement de quitter les lieux prévu par l'article L. 412-1 du Code des procédures civiles d'exécution.

2. Sur la demande reconventionnelle de dommages et intérêts :

Eu égard à l’issue du litige, la demande de dommages et intérêts présentée à titre reconventionnel sera rejetée.

3. Sur les demandes annexes :

L’équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile eu égard à la disparité économique des parties.

Madame [Y] [J], partie perdante, sera condamnée aux dépens.

Eu égard à l'ancienneté du litige, aucun motif ne justifie d’écarter l’exécution provisoire de droit de la présente decision.

PAR CES MOTIFS

Le juge des contentieux de la protection, statuant après débats en audience publique, par jugement contradictoire rendu en premier ressort et mis à disposition au greffe,

PRONONCE la résiliation du bail portant sur le logement sis numéro 0004 sis [Adresse 1], aux torts de Madame [Y] [J], ce à compter du présent jugement ;

ORDONNE, faute de départ volontaire de Madame [Y] [J], son expulsion, ainsi que celle de tout occupant de son chef, avec au besoin le concours de la force publique conformément aux dispositions des articles L.153-1 et L.153-2 du code des procédures civiles d'exécution ;

RAPPELLE que l’expulsion ne pourra être mise en œuvre qu’à l’expiration d’un délai de deux mois suivant le commandement d’avoir à quitter les lieux et dans les conditions prévues aux articles L.412-1 et L.412-2 du code des procédures civiles d'exécution ;

RAPPELLE, s’agissant des meubles et objets mobiliers laissés dans les lieux, qu’il devra être procédé conformément aux dispositions de l'article L.433-1 du code des procédures civiles d'exécution ;

CONDAMNE Madame [Y] [J] au paiement d’une indemnité mensuelle d’occupation d'un montant équivalent à celui du dernier loyer, outre les charges, à compter de la résiliation du bail et jusqu’à la complète libération des lieux ;

DEBOUTE Madame [Y] [J] de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts ;

DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNE Madame [Y] [J] aux entiers dépens ;

DIT n’y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire de droit de la présente décision ;

REJETTE le surplus des demandes.

AINSI jugé et mis à la disposition des parties les jour, mois et an précités.

LE GREFFIER LE JUGE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp fond
Numéro d'arrêt : 23/05473
Date de la décision : 23/04/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 29/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-23;23.05473 ?
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