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23/04/2024 | FRANCE | N°21/06787

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 8ème chambre 1ère section, 23 avril 2024, 21/06787


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le:





8ème chambre
1ère section


N° RG 21/06787 -
N° Portalis 352J-W-B7F-CUN5O

N° MINUTE :


Assignation du :
06 Avril 2021




JUGEMENT
rendu le 23 avril 2024
DEMANDEURS

Monsieur [D] [J] [E] [O]
[Adresse 1]
[Localité 7]

Madame [G] [E] [B]
[Adresse 1]
[Localité 7]

représentés par Maître Florence ROSANO, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #B0390


DÉFENDEURSr>
S.A. LA BANQUE POSTALE ASSURANCES IARD
[Adresse 3]
[Localité 6]

représentée par Maître Benjamin VILTART, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0430


S.A. BPCE ASSURANCES
[Adresse 5]
[Locali...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le:

8ème chambre
1ère section


N° RG 21/06787 -
N° Portalis 352J-W-B7F-CUN5O

N° MINUTE :

Assignation du :
06 Avril 2021

JUGEMENT
rendu le 23 avril 2024
DEMANDEURS

Monsieur [D] [J] [E] [O]
[Adresse 1]
[Localité 7]

Madame [G] [E] [B]
[Adresse 1]
[Localité 7]

représentés par Maître Florence ROSANO, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #B0390

DÉFENDEURS

S.A. LA BANQUE POSTALE ASSURANCES IARD
[Adresse 3]
[Localité 6]

représentée par Maître Benjamin VILTART, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0430

S.A. BPCE ASSURANCES
[Adresse 5]
[Localité 4]

représentée par Maître Sophie DUGUEY, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #G0229

Décision du 23 avril 2024
8ème chambre 1ère section
N° RG 21/06787 - N° Portalis 352J-W-B7F-CUN5O

Monsieur [Y] [P]
[Adresse 2]
[Localité 7]

représenté par Maître Lionel COHEN, avocat au barreau de l’ESSONNE

Madame [V] [Z]
[Adresse 1]
[Localité 7]

non représentée

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Par application des articles R.212-9 du Code de l’Organisation Judiciaire et 812 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été attribuée au Juge unique.

Avis en a été donné aux avocats constitués qui ne s’y sont pas opposés.

Madame Elyda MEY, Juge, statuant en juge unique,

assistée de Madame Lucie RAGOT, Greffière lors des débats, et de Madame Justine EDIN, Greffière lors du prononcé.

DÉBATS

A l’audience du 24 janvier 2024
tenue en audience publique

JUGEMENT

Prononcé par mise à disposition au greffe
Réputé contradictoire
En premier ressort

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [D] [O] et Mme [G] [B] sont propriétaires occupants d'un appartement au 3ème étage du bâtiment A de l'immeuble sis [Adresse 1] soumis au statut de la copropriété des immeubles bâtis.

M. [Y] [P] est propriétaire non occupant de l'appartement situé au 4ème étage du même immeuble au-dessus de celui de M. [O] et de Mme [B] (" consorts [O] [B] "). Il a souscrit une assurance habitation auprès de la BPCE.

Décision du 23 avril 2024
8ème chambre 1ère section
N° RG 21/06787 - N° Portalis 352J-W-B7F-CUN5O

Le 6 janvier 2016, un dégât des eaux s'est produit dans l'appartement des consorts [O] [B] affectant le plafond et les murs du salon, de la salle à manger et de la cuisine. Un constat amiable a été dressé avec Mme [Z], locataire de M. [P] et assurée auprès de la Banque Postale Assurances IARD.

Missionnée par le syndicat des copropriétaires, la société CP Etoile a identifié le 8 janvier 2016 la cause des désordres comme étant un défaut d'étanchéité de la paroi de douche de l'appartement de M. [P]. Cependant, les désordres ont ensuite perduré.

Le 15 mars 2017, la société CP Etoile, mandatée par le syndicat des copropriétaires pour des travaux de plomberie, a procédé à la réfection des joints de silicone dans la douche de M.[P] et a constaté l'absence d'étanchéité de la canalisation d'évacuation de la machine à laver, l'absence de siphon de la vidange de ladite machine outre l'obstruction de la canalisation d'évacuation de la cuisine.

Le 3 juin 2017, la société JM l'Eau a constaté un défaut d'étanchéité du mitigeur et de la robinetterie de la douche de M. [P].

L'appartement de M. [P] était libre de tout occupation au mois de septembre 2017.

Soutenant qu'aucuns travaux n'avaient été réalisés pour mettre fin à leurs désordres, les consorts [O] [B] ont fait assigner en référé devant le tribunal judiciaire de Paris M. [P], le syndicat des copropriétaires, l'assureur de celui-ci Allianz, Mme [Z] et l'assureur de celle-ci, la Banque Postale Assurance aux fins de désignation d'un expert.

Par ordonnance de référé du 8 février 2018, M. [M] a été désigné en qualité d'expert judiciaire. Par ordonnances du 13 décembre 2018 et du 4 juin 2019, les opérations d'expertise étaient rendues communes à la société BPCE Assurances, assureur de M. [P] et à M. [T], l'acquéreur de l'appartement de M. [P].

L'expert a déposé son rapport définitif le 9 décembre 2019.

Par acte du 6 avril 2021 et du 10 mai 2021, les consorts [O] [B] ont fait assigner M. [Y] [P], la société BPCE Assurances, Mme [V] [Z] et la Banque Postale devant le tribunal de céans aux fins d'obtenir leur condamnation in solidum à les indemniser de leurs préjudices.

Aux termes de leurs dernières conclusions n°1 notifiées par voie électronique le 5 février 2022, les consorts [O] [B] sollicitent du tribunal de :
Vu l'article 1240 du code civil,
Vu l'article 544 du code civil,
Vu l'article L 124-3 du code des assurances,
- Juger que les installations sanitaires de l'appartement de M. [P] sont à l'origine des désordres ayant affecté l'appartement de Monsieur [O] et Madame [B];
- Juger que M. [P] engage sa responsabilité sur le fondement des articles 544 et 1240 du code civil ;
- Juger que la BPCE doit garantir son assuré, M. [P], de sa responsabilité envers les demandeurs ;
- Juger que Mme [Z] engage sa responsabilité sur le fondement des articles 544 et 1240 du code civil ;
- Juger que la Banque Postale doit garantir son assurée, Mme [Z], de sa responsabilité envers les demandeurs
En conséquence,
Vu l'article 514 du code de procédure civile,
- Condamner in solidum M. [P], son assureur la BPCE, Mme [Z], son assureur la Banque Postale à payer aux consorts [O] [B] :
- la somme de 7.171,65 euros au titre du préjudice matériel outre la somme de la somme de 1486,39€ au titre des frais de recherche de fuite et de mise en sécurité du ballon d'eau chaude.
- la somme de 14.006 euros au titre du préjudice de jouissance
avec intérêts au taux légal à compter de la présente assignation avec capitalisation des intérêts d'année en année en application des articles 1343-2 du code civil ;
- Condamner in solidum M. [P], son assureur la BPCE, Mme [Z], son assureur la Banque Postale à verser à la somme de 7 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance, les dépens de référé, les frais d'expertise, les frais de sondages, dont distraction au profit de Maître Florence Rosano conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions récapitulatives n°2 notifiées le 4 mai 2022, la société BPCE Assurances demande au tribunal de :
Vu les articles 1240 et 1242 alinéa 1er du code civil,
Vu le décret n°87-712 du 26 août 1987,
- DIRE ET JUGER que la responsabilité de Mme [V] [Z] est engagée à hauteur de 50% concernant les désordres ayant affecté l'appartement de M. [D] [O] et Mme [G] [B] ;
- FIXER les indemnités revenant à M. [D] [O] et à Mme [G] [B] et devant être prises en charge par la société BPCE Assurances ainsi qu'il suit :
o Préjudice matériel : 3.366,83 €
o Préjudice immatériel : 3.081,25 €
- DEBOUTER M. [D] [O] et Mme [G] [B] de leur demande afférente à la fixation du point de départ des intérêts au taux légal au jour de la délivrance de l'assignation au fond ;
- DEBOUTER M. [D] [O] et Mme [G] [B] du surplus de leurs demandes, fins et prétentions ;
- REDUIRE à de plus justes proportions le montant des indemnités éventuellement allouées à M. [D] [O] et à Mme [G] [B] au visa de l'article 700 du code de procédure civile ;
- STATUER ce que de droit sur les dépens d'instance.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 17 septembre 2021, la Banque Postale Assurances IARD demande au tribunal de :
A TITRE PRINCIPAL
DEBOUTER purement et simplement M. [D] [O] et Mme [G] [B] de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions dirigées à l'encontre de Mme [V] [Z] et de la BANQUE POSTALE ASSURANCES IARD ;
A TITRE SUBSIDIAIRE
LIMITER le préjudice matériel subi par M. [D] [O] et Mme [G] [B] à hauteur de la somme de 6.733,65 euros ;
ORDONNER un partage de responsabilité quant au préjudice matériel subi M. [D] [O] et Mme [G] [B] dont 5 % pour Mme [V] [Z] et 95 % pour M. [Y] [P] ;
LIMITER le préjudice immatériel subi par M. [D] [O] et Mme [G] [B] à hauteur de la somme de 6.162,50 euros ;
EXCLURE toute responsabilité de Mme [V] [Z] quant au préjudice matériel subi M. [D] [O] et Mme [G] [B] ;
EN TOUT ÉTAT DE CAUSE
RAMENER à plus juste proportion la demande présentée par M. [D] [O] et Mme [G] [B] au titre des frais irrépétibles ;
[Z] et la BANQUE POSTALE ASSURANCES IARD ne seront tenues qu'à hauteur de 5 % de la somme ainsi allouée à ce titre ;
CONDAMNER au besoin in solidum toutes parties succombant à verser à la BANQUE POSTALE ASSURANCES IARD la somme de 5.000,00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNER au besoin in solidum toutes parties succombant aux entiers dépens ;
REJETER toutes demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires.

M. [P] a constitué avocat mais n'a pas régularisé de conclusions. Mme [Z] n'a pas constitué avocat.

Pour un exposé plus détaillé des moyens et prétentions des parties, il convient de renvoyer aux termes de leurs dernières écritures susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'affaire a été close par ordonnance du 26 octobre 2022 et fixée à l'audience du 13 septembre 2023 puis à celle du 24 janvier 2024 à l'issue de laquelle, elle a été mise en délibéré au 23 avril 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur les demandes d'indemnisation des consorts [O] [B]

Sur les désordres, leurs origines et leurs causes
Lors des opérations d'expertise, M. [M] a constaté dans l'appartement des consorts [O] [B] la dégradation des revêtements peints dans l'angle du séjour, dans la cuisine et en plafond.
Les parties au demeurant ne contestent pas la matérialité des désordres lesquels par leur ampleur et leur récurrence constituent un trouble anormal de voisinage.

Sur les responsabilités
L'article 544 du code civil dispose que " La propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements. "

L'article 9 alinéa 1er de la loi du 10 juillet 1965 dispose en outre que "chaque copropriétaire dispose des parties privatives comprises dans son lot ; il use et jouit librement des parties privatives et des parties communes sous la condition de ne porter atteinte ni aux droits des autres copropriétaires ni à la destination de l'immeuble."

Un trouble anormal de voisinage est constitué dès lors qu'existe une nuisance excédant les inconvénients normaux de la cohabitation dans un immeuble collectif en fonction des circonstances et de la situation des lieux.

La responsabilité résultant de troubles qui dépassent les inconvénients normaux de voisinage, lesquels doivent être prouvés par celui qui les invoque, est établie objectivement, sans que la preuve d'une faute soit exigée, étant rappelé que tout voisin "occasionnel" occupant matériellement ou pas le fonds est présumé responsable.

En outre, l'article 1240 du même code prévoit que " Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. "

La mise en jeu de ce régime de responsabilité implique qu'elles démontrent une faute, un préjudice et un lien de causalité.

L'article L.124-3 du code des assurances dispose que le tiers lésé dispose d'un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable. L'assureur ne peut payer à un autre que le tiers lésé tout ou partie de la somme due par lui, tant que ce tiers n'a pas été désintéressé, jusqu'à concurrence de ladite somme, des conséquences pécuniaires du fait dommageable ayant entraîné la responsabilité de l'assuré.

*****

Les consorts [O] [B] recherchent la responsabilité de M. [P] sur le fondement de l'article 544 et 1240 du code civil en faisant valoir que les désordres avaient pour origine les installations défectueuses de l'appartement de M. [P], qu'en dépit des travaux réalisés, l'expert a pu retrouver la trace de manifestations de désordres à l'emplacement de la douche. Ils affirment que M. [P] est principalement sinon entièrement responsable de par sa volonté de cacher l'état défectueux de ses installations. Ils recherchent en outre la responsabilité de Mme [Z] en se fondant sur les conclusions de l'expert lequel a retenu une responsabilité de 50% de cette dernière en raison de l'utilisation d'installations sanitaires non conformes et non étanches entrainant des fuites à chaque utilisation de la douche et de la cuisine jusqu'en septembre 2017, date de son départ des lieux.

Pour sa part, la BPCE Assurances, assureur de M. [P], impute une partie des désordres à Mme [Z] en soutenant qu'elle ne procédait pas à l'entretien de ses canalisations en se fondant sur les comptes rendus de la société CP Etoile et en expliquant que l'expert a retenu la responsabilité du locataire pour 50% des conséquences matérielles des désordres. En outre, elle conteste les conclusions de l'expert tendant à imputer la responsabilité du préjudice de jouissance à M. [P] estimant que Mme [Z] a, par son défaut d'entretien, contribué à la moitié de ce préjudice.

Enfin, la Banque Postale, assureur de Mme [Z], s'oppose à la mise en cause de la responsabilité de son assurée en faisant valoir que la réfection des joints en silicone de la douche et le dégorgement de la vidange PVC de la cuisine effectuée le 15 mars 2017 par la société CP Etoile n'ont pas permis d'arrêter les infiltrations démontrant ainsi que ces éléments n'en sont pas la cause. Elle se fonde également sur le jugement du 19 janvier 2016 rendu par le tribunal d'instance de Charenton indiquant que l'appartement occupé par son assuré présentait notamment de l'humidité, une absence de ventilation et des revêtements dégradés, des mitigeurs d'évier et de chaudière fuyards, des revêtements d'étanchéité insuffisants dans la cuisine, une fuite importante au robinet de la cuisine, une fuite sur la canalisation d'eau du sanibroyeur et condamnant sous astreinte M. [P] à des travaux de réfection. Ainsi, au vu de l'état des installations sanitaires de l'appartement de M. [P], lesquelles ne relèvent pas des réparations locatives au sens de l'article 7 de la loi du 23 décembre 1986, seule la responsabilité de ce dernier doit être engagée. A titre subsidiaire, elle soutient que la responsabilité de son assurée ne saurait excéder 5%.

Sur ce,

Lors de la première réunion d'expertise le 18 juin 2018, l'expert a constaté que des travaux avaient été réalisés en avril 2018 conduisant à " supprimer les éléments de preuve nous permettant de nous prononcer sur la causalité des désordres ". Il observe toutefois que la localisation des désordres au 3ème étage correspond au receveur de douche et met en cause la responsabilité du propriétaire.

Il retient au titre des responsabilités, une cause initiale : au moins pour 50% des désordres, une origine de partie privative locative et la responsabilité du propriétaire pour 50% des conséquences matérielles et la totalité du préjudice de jouissance.

Il relève en outre que les travaux entrepris au 4ème étage ne sont pas conformes aux règles de l'art et présentent des malfaçons importantes généralisées telles que l'absence d'étanchéité dans les pièces humides, un carrelage disposé directement sur parquet très abîmé ou carrelage ancien et des réseaux d'alimentation plomberie réalisés sans soudure.

En outre, il ressort du compte-rendu de la société CP Etoile du 7 janvier 2016 que cette dernière a constaté dans l'appartement du 3ème étage un dégât des eaux sur plafond et mur mitoyen avec la cuisine semblant provenir de l'étage supérieur et dans l'appartement occupé par Mme [Z] l'absence d'étanchéité de la porte de douche occasionnant des infiltrations lors de chaque utilisation. Elle constate également dans un second compte rendu du 15 mars 2017 qu'après avoir procédé à la réfection des joints de la douche, aucune fuite n'était observée.
Décision du 23 avril 2024
8ème chambre 1ère section
N° RG 21/06787 - N° Portalis 352J-W-B7F-CUN5O

Toutefois, elle relève des anomalies dans la cuisine à savoir certains raccords en PVC ne sont pas collés, la vidange de la machine à laver ne dispose pas de siphon et la vidange en PVC générale est obstruée. Enfin, le rapport d'intervention de la société JM L'eau du 5 juin 2017 mettait en évidence des infiltrations persistantes liées à l'absence d'étanchéité des canalisations du mitigeur et de quelques joints de ciment dans la douche.

Au vu de ces éléments, il est établi que les désordres subis par les demandeurs ont été causés par les installations défectueuses des sanitaires de l'appartement de M. [P], par conséquent, la responsabilité de ce dernier en sa qualité de propriétaire doit être engagée sur le fondement du trouble anormal de voisinage.

En outre, il ressort également que les désordres résultent en partie de l'utilisation de ces installations par Mme [Z] ainsi que d'un manquement de cette dernière à son obligation d'entretien et de réparations locatives prévue à l’article 7 de la loi du 6 juillet 1989 au vu des défauts affectant notamment la vidange de la machine à laver et la vidange en PVC générale. Ce manquement caractérise une faute, laquelle a contribué aux désordres subis par les demandeurs engageant la responsabilité de Mme [Z] sur le fondement de l'article 1240 du code civil. La circonstance que les installations sanitaires de l'appartement mis en location par M. [P] présentait un état dégradé ne peut exonérer Mme [Z] de son obligation de procéder à des réparations locatives.

Par conséquent, il convient de déclarer M. [P] et Mme [Z] responsables in solidum des désordres des consorts [O] [B] chacun ayant tout deux concouru aux dommages et de rejeter la demande de partage de responsabilité sollicitée par la Banque Postale.

Si les sociétés BPCE Assurances et la Banque Postale Assurances s'opposent sur la responsabilité de leurs assurés respectifs, ils ne contestent pas la validité de leur garantie.

Par conséquent, ils seront condamnés in solidum avec leurs assurés respectifs en application de l'article L.124-3 du code des assurances.

Sur les préjudices
Les consorts [O] [B] sollicitent la condamnation in solidum de M. [P], de Mme [Z] et leurs assureurs respectifs à les indemniser des préjudices suivants :
- 7.171,65 euros au titre du préjudice matériel et 1.486,39 euros au titre des frais de recherche de fuite et de mise en sécurité du ballon d'eau chaude ;
- 14.006 euros au titre du préjudice de jouissance.

Ils font valoir que l'expert a validé les deux factures s'élevant à 7.171,65 euros et qu'ils ont assumé les frais de recherche de fuite de 640,26 euros et des frais de déplacement du ballon d'eau chaude pour leur mise en sécurité de 846,13 euros.

En outre, ils soutiennent que les désordres se sont particulièrement manifestés dans la cuisine et dans le salon. Ils contestent les conclusions de l'expert qui a distingué le préjudice de jouissance sur deux périodes à savoir de janvier 2016 à septembre 2017 puis de septembre 2017 à décembre 2019 puisqu'ils allèguent avoir vécu dans un appartement affecté de moisissures depuis le 6 janvier 2016 avec deux enfants en bas âge.
Ils demandent la fixation de leur préjudice à 20% de la valeur locative d'un montant de 1.490 euros sur une durée de 47 mois soit 298 euros par mois.

La BPCE Assurances propose de prendre en charge la moitié du préjudice matériel soit 3.366,83 euros conformément aux conclusions de l'expert. En revanche, elle souscrit à l'évaluation du préjudice immatériel développé par l'expert mais conteste la mise à sa charge exclusive de ce préjudice et sollicite le partage pour moitié avec Mme [Z].

Elle demande en outre que le point de départ des intérêts au taux légal soit fixé à la date de la signification de l'assignation au fond.

Enfin, la Banque Postale Assurances sollicite que soit mise à la charge de Mme [Z] la somme de 336, 68 euros correspondant à 5% du préjudice matériel qu'elle limite à 6.733,65 euros. En outre, elle souscrit à l'évaluation faite par l'expert du préjudice de jouissance et rappelle que ce dernier n'a été imputé par ce dernier exclusivement à M. [P].

Sur ce,

Aux termes du rapport d'expertise judiciaire, l'expert évalue les préjudices subis par les consorts [O] [B] de la manière suivante :
- un préjudice matériel d'un montant de 7.171,65 euros au titre des travaux de remise en état ;
- un préjudice de jouissance calculé sur une valeur locative fixée à 1.450 euros mensuel et sur deux périodes de janvier 2016 à septembre 2017 à hauteur de 15% puis de septembre 2017 à décembre 2019 à 5%. Il explique en effet que les infiltrations ayant cessé, les troubles ne sont pas identiques sur les deux périodes puisque les désordres n'ont pas permis une utilisation de la cuisine jusqu'à septembre 2017 puis ont causé une gêne uniquement esthétique par la suite.

S'agissant du préjudice matériel, les parties s'opposent sur la prise en compte de la facture de l'entreprise Gosselin d'un montant de 438 euros retenu par l'expert.

Cependant en l'absence de production de la facture et alors que les demandeurs n'expliquent pas la nature des travaux visés par cette dernière, ces frais de 438 euros ne seront pas retenus.

En outre, les consorts [O] [B] sollicitent le paiement des frais exposés dans le cadre de recherches de fuites et de déplacement du ballon d'eau chaude justifiées par trois factures d'un montant de 600 euros TTC, 40,26 TTC et 846,13 euros TTC. Bien que ces pièces pourtant datées des 27 avril 2016, 7 juin 2017 et 4 octobre 2017 n'ont pas été analysées ni retenues par l'expert, il apparait cependant qu'elles présentent un lien avec les dégâts des eaux susvisés. Par conséquent, ces frais seront retenus.

Ainsi, il convient de condamner in solidum M. [P] in solidum avec la société BPCE Assurances d'une part et Mme [Z] in solidum avec la société Banque Postale Assurance d'autre part à payer aux consorts [O] [B] la somme de 6.733,65 euros au titre du préjudice matériel ainsi que la somme de 1.486,39 euros au titre des frais de recherche de fuite et de mise en sécurité du ballon d'eau chaude.

Concernant le préjudice de jouissance, bien que les consorts [O] [B] arguent d'un préjudice s'élevant à 20 % de la valeur locative de leur logement qu'ils fixent à 1.490 euros notamment en raison de la gêne occasionnée dans l'utilisation de la cuisine et des inconvénients subis par la présence continuelle de moisissures durant la grossesse de Mme [B], il convient cependant de retenir la valeur locative de 1.450 euros ainsi que les pourcentages de préjudice retenus par l'expert.

En outre, les infiltrations ayant cessé à partir du départ de Mme [Z], le préjudice de jouissance des consorts [O] [B] sera calculé sur deux périodes distinctes :
- Sur la période du janvier 2016 à septembre 2017 soit 21 mois : le préjudice sera fixé à 4.567,50 euros (= 1.450 euros x 15% x 21 mois)
- Sur la période d'octobre 2017 à décembre 2019 soit 26 mois : le préjudice sera fixé à 1.885 euros (= 1.450 euros x 15% x 26 mois).

Si l’expert n’a mis à la charge exclusive du propriétaire le préjudice de jouissance des demandeurs, il apparaît pourtant que Mme [Z] a y concouru. Cependant, il n'est pas contesté que Mme [Z] a quitté les lieux en septembre 2017. Dès lors, elle ne saurait être tenue d'indemniser les demandeurs pour la période postérieure à son départ.

Par conséquent, M. [P] et Mme [Z] ayant tous les deux contribué au préjudice de jouissance des demandeurs de janvier 2016 à septembre 2017, seront condamnés in solidum avec leurs assureurs respectifs à les indemniser d'un montant de 4.567,50 euros.

En outre, M. [P] sera condamné in solidum avec son assureur la société BPCE Assurances à indemniser les consorts [O] [B] de leur préjudice de jouissance s'étendant d'octobre 2017 à décembre 2019 d'un montant de 1.885 euros.

Enfin, il convient de préciser que ces sommes seront assorties d'un intérêt au taux légal à compter de la délivrance de l'assignation au fond.

Sur les autres demandes

M. [P] in solidum avec la société BPCE Assurances d'une partie et Mme [Z] in solidum avec la société Banque Postale assurance d'autre part, parties succombantes, seront condamnés in solidum aux dépens de l'instance et de référé incluant les frais d'expertise et les frais de sondages dont distraction au profit de Maître Florence Rosano conformément à l'article 699 du code de procedure civile.

Ils seront également condamnés à payer la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile aux consorts [O] [B].

Conformément aux dispositions de l'article 514 du code de procédure civile, l'exécution provisoire est de droit et il n'y a pas lieu de l'écarter.

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL,

statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort, rendu par mise à disposition au greffe,

CONDAMNE in solidum d'une part, M. [Y] [P] in solidum avec la société BPCE Assurances et d'autre part, Mme [V] [Z] in solidum avec la société Banque Postale Assurances à payer à M. [D] [O] et Mme [G] [B] la somme de 6.733,65 euros au titre du préjudice matériel ainsi que la somme de 1.486,39 euros au titre des frais de recherche de fuite et de mise en sécurité du ballon d'eau chaude ;

CONDAMNE in solidum d'une part, M. [Y] [P] in solidum avec la société BPCE Assurances et d'autre part, Mme [V] [Z] in solidum avec la société Banque Postale Assurances à payer à M. [D] [O] et Mme [G] [B] la somme de 4.567,50 euros au titre du préjudice de jouissance pour la période de janvier 2016 à septembre 2017 ;

CONDAMNE in solidum M. [Y] [P] et la société BPCE Assurances à payer à M. [D] [O] et Mme [G] [B] la somme de 1.885 euros au titre du préjudice de jouissance pour la période d'octobre 2017 à décembre 2019 ;

DEBOUTE M. [D] [O] et Mme [G] [B] du surplus de leurs demandes indemnitaires ;

DIT que les sommes précitées porteront intérêt au taux légal à compter de la délivrance de l'assignation au fond ;

ORDONNE la capitalisation des intérêts dus pour une année entière,

CONDAMNE in solidum d'une part, M. [Y] [P] in solidum avec la société BPCE Assurances et d'autre part, Mme [V] [Z] in solidum avec la société Banque Postale Assurances aux dépens de l'instance et aux dépens de référé, incluant les frais d'expertise et de sondages avec distraction au profit de Maître Florence Rosano, dans les conditions prévues à l'article 699 du code de procedure civile ;

CONDAMNE in solidum d'une part, M. [Y] [P] in solidum avec la société BPCE Assurances et d'autre part, Mme [V] [Z] in solidum avec la société Banque Postale Assurances à payer à M. [D] [O] et Mme [G] [B] la somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procedure civile ;

RAPPELLE que l'exécution provisoire est de droit ;

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes formées au titre des dépens et des frais irrépétibles ainsi que de leurs autres demandes.

Fait et jugé à Paris le 23 avril 2024.

Le GreffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 8ème chambre 1ère section
Numéro d'arrêt : 21/06787
Date de la décision : 23/04/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 29/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-23;21.06787 ?
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