TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le :
Me Marc BORNHAUSER
DGFIP
■
9ème chambre 1ère section
N° RG 21/12282 -
N° Portalis 352J-W-B7F-CVHUP
N° MINUTE : 6
Assignation du :
01 Octobre 2021
JUGEMENT
rendu le 22 Avril 2024
DEMANDEUR
Monsieur [K] [I]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représenté par Maître Marc BORNHAUSER de la SELARL CABINET BORNHAUSER, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #C1522
DÉFENDERESSE
DIRECTEUR RÉGIONAL DES FINANCES PUBLIQUES D’ILE DE FRANCE
[Adresse 1]
[Localité 4]
représenté par son Inspecteur
Décision du 22 Avril 2024
9ème chambre 1ère section
N° RG 21/12282 - N° Portalis 352J-W-B7F-CVHUP
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Anne-Cécile SOULARD, Vice-présidente
Marine PARNAUDEAU, Vice-présidente
Patrick NAVARRI, Vice-Président
assistés de Pierre-Louis MICHALAK, Greffier lors de l’audience et de Chloé DOS SANTOS, Greffière lors de la mise à disposition.
DÉBATS
A l’audience du 12 Février 2024 tenue en audience publique devant Marine PARNAUDEAU, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile. Avis a été donné que la décision sera rendue par mise à disposition au greffe le 22 avril 2024.
JUGEMENT
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort
EXPOSE DU LITIGE
Le procureur de la République de [Localité 5], en exécution d'une demande d'entraide judiciaire faite par les autorités suisses, a fait procéder le 20 janvier 2009 à une perquisition au domicile de monsieur [O] [M], qui était soupçonné d'avoir soustrait à son ancien employeur, la banque suisse HSBC Private Bank, divers fichiers informatiques, d'où ressortaient les noms de détenteurs de comptes de cet établissement.
Le 9 juillet 2009, le procureur de la République de [Localité 5] a transmis à l'administration fiscale les fichiers recueillis sur perquisition, en application de l'article L.101 du livre des procédures fiscales, qui lui ont été remis aux termes de deux procès-verbaux des 2 septembre 2009 et 12 janvier 2010.
Le 11 octobre 2011, l'administration fiscale déposait plainte à l'encontre de M. [K] [I].
Ce dépôt de plainte faisait suite à la communication, par le procureur de la République de [Localité 5], conformément à l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, d'un ensemble de données informatiques dont l'examen laissait supposer que M. [K] [I] serait présumé détenir, par l'intermédiaire de deux sociétés (la société BLOOMDALE SA et la société ARCADES 22) situées au Panama, des avoirs en Suisse dans les livres de la banque HSBC Private Bank, filiale suisse de la banque HSBC.
Le procureur de la République autorisait la consultation et la prise de copies par l'administration fiscale dans le cadre de la procédure pénale initiée contre M. [K] [I], ce droit de communication ayant été exercé le 16 juin 2016.
S'agissant des droits d'enregistrement, suivant lettre modèle n° 3907-SD en date du 13 octobre 2016, l'administration fiscale adressait à M. [K] [I] une demande d'informations ou de justifications concernant des avoirs détenus ou utilisés à l'étranger et non déclarés en application de l'article L. 23C du livre des procédures fiscales.
Au regard de l'insuffisance de la réponse apportée par M. [K] [I], l'administration fiscale lui adressait une mise en demeure.
Ayant estimé comme insuffisante la justification par l'intéressé de l'origine des avoirs litigieux, l'administration fiscale notifiait, le 19 décembre 2017, à M. [K] [I] une proposition de rectification au titre des droits d'enregistrement d'un montant de 870.325 euros au titre de l'année 2017, en vertu des dispositions combinées des articles L. 23C et L. 71 du livre des procédures fiscales prévoyant une taxation d'office dans les conditions prévues par l'article 755 du code général des impôts.
Le rappel était calculé sur la base de la valeur la plus élevée des avoirs figurant sur les comptes détenus à l'étranger au cours des dix années précédant l'envoi de la demande d'information à savoir les avoirs détenus sur les divers comptes par l'intermédiaire des sociétés BLOOMDALE SA et ARCADES 22.
Le rappel de droits était mis en recouvrement le 25 avril 2018.
La contestation formulée par M. [K] [I] par courrier en date du 5 juin 2018, faisait l'objet d'une décision de rejet de l'administration fiscale le 30 juillet 2021.
C'est dans ces conditions que par acte d'huissier de justice en date du 1er octobre 2021, M. [K] [I] a fait assigner l'administration fiscale devant ce tribunal en sollicitant l'annulation de la décision de rejet et la décharge des impositions supplémentaires.
Dans ses dernières conclusions récapitulatives communiquées par le biais du RPVA le 17 mars 2023 et signifiées le 16 mars 2023, M. [K] [I] demande au tribunal, au visa de l'article L 23 C du livre des procédures fiscales, des articles 755 et 1649 A du code général des impôts, de l'article 700 du code de procédure civile et de l'article 267 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de :
“- Prononcer la décharge des droits mis à la charge de Monsieur [K] [I] pour un montant total 870 325 euros ;
A titre subsidiaire :
- Saisir la Cour de justice de l'Union européenne des questions préjudicielles suivantes :
o Les articles L 23 C du LPF et 755 du CGI, qui instituent un mécanisme obligeant les contribuables ayant manqué à leur obligation de déclaration de comptes ou assurances-vie à l'étranger, à justifier de l'origine des avoirs détenus sur ces comptes indépendamment de la date de perception de ces avoirs et alors même qu'ils ne disposeraient que d'une procuration sur les comptes, portent-t-ils une atteinte disproportionnée à la liberté de circulation des capitaux garantie par les articles 63 du TFUE et 40 de l'accord EEE.
o L'article 755 du CGI, qui institue une présomption de perception à titre gratuit des avoirs détenus sur des comptes à l'étranger à l'expiration des délais de la demande de l'administration fondée sur l'article L 23 C du LPF, retardant ainsi le fait générateur de l'imposition, porte-t-il une atteinte disproportionnée à la liberté de circulation des capitaux garantie par les articles 63 du TFUE et 40 de l'accord EEE.
A titre infiniment subsidiaire :
- Prononcer la décharge des droits mis à la charge de Monsieur [K] [I] au titre du comptes ARCADES 22 pour un montant total de 15 442 euros ;
A titre plus subsidiaire :
- Prononcer la décharge des droits mis à la charge de Monsieur [K] [I] au titre du compte BLOOMDALE à hauteur de 341 953 euros ;
En tout état de cause :
- Mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner l'Etat aux dépens.
Dans ses dernières conclusions signifiées le 21 juin 2023, l'administration fiscale demande au tribunal de :
“- débouter M. [K] [I] de ses demandes ;
- confirmer la décision de rejet du 30 juillet 2021 ;
- le condamner en outre à tous les dépens de l'instance et dire qu'en toute hypothèse, les frais entraînés par la constitution d'un avocat qui n'est pas obligatoire en matière fiscale resteront à sa charge ;
- rejeter sa demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile”.
L'ordonnance de clôture était rendue le 16 octobre 2023.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est fait expressément référence aux écritures des parties visées ci-dessus quant à l'exposé complet de leurs moyens.
EXPOSE DES MOTIFS
Sur l'irrégularité de la procédure prévue par l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales et de l'article 755 du code général des impôts
L'article L. 23 C du livre des procédures fiscales dispose que lorsque l'obligation prévue au deuxième alinéa de l'article 1649 A ou à l' article 1649 AA du code général des impôts n'a pas été respectée au moins une fois au titre des dix années précédentes, l'administration peut demander, indépendamment d'une procédure d'examen de situation fiscale personnelle, à la personne physique soumise à cette obligation de fournir dans un délai de soixante jours toutes informations ou justifications sur l'origine et les modalités d'acquisition des avoirs figurant sur le compte ou le contrat d'assurance-vie.
Lorsque la personne a répondu de façon insuffisante aux demandes d'informations ou de justifications, l'administration lui adresse une mise en demeure d'avoir à compléter sa réponse dans un délai de trente jours, en précisant les compléments de réponse qu'elle souhaite.
L'article 755 du code général des impôts dispose que les avoirs figurant sur un compte ou un contrat d'assurance-vie étranger et dont l'origine et les modalités d'acquisition n'ont pas été justifiées dans le cadre de la procédure prévue à l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales sont réputés constituer, jusqu'à preuve contraire, un patrimoine acquis à titre gratuit assujetti, à la date d'expiration des délais prévus au même article L. 23 C, aux droits de mutation à titre gratuit au taux le plus élevé mentionné au tableau III de l'article 777.
Ces droits sont calculés sur la valeur la plus élevée connue de l'administration des avoirs figurant sur le compte ou le contrat d'assurance-vie au cours des dix années précédant l'envoi de la demande d'informations ou de justifications prévue à l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales, diminuée de la valeur des avoirs dont l'origine et les modalités d'acquisition ont été justifiées.
L'article 344 A de l'annexe III du même code dispose que "les personnes physiques joignent la déclaration de compte à la déclaration annuelle de leurs revenus. Chaque compte à usage privé, professionnel ou à usage privé et professionnel doit être mentionné distinctement " ; que "la déclaration de compte mentionnée au II porte sur le ou les comptes ouverts, utilisés ou clos, au cours de l'année ou de l'exercice par le déclarant, l'un des membres de son foyer fiscal ou une personne rattachée à ce foyer" ; qu'"un compte est réputé avoir été utilisé par l'une des personnes visées au premier alinéa dès lors que celle-ci a effectué au moins une opération de crédit ou de débit pendant la période visée par la déclaration, qu'elle soit titulaire du compte ou qu'elle ait agi par procuration, soit pour elle-même, soit au profit d'une personne ayant la qualité de résident."
Aux termes de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.
Sur le grief tiré de l'atteinte injustifiée à la liberté de circulation des capitaux et au caractère irréfragable de la présomption légale
M. [I] se prévaut du principe de libre circulation des capitaux prévu à l'article 63 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) et qui prohibe les restrictions aux mouvements de capitaux est applicable entre les Etats membres et les pays tiers.
Il souligne que l'obligation de déclarer les comptes bancaires détenus hors de France par des résidents fiscaux français et les sanctions attachées à la méconnaissance de cette obligation consistant à la taxation des avoirs concernés au taux de 60%, qui ne connaissent pas d'équivalent en ce qui concerne les comptes bancaires situés en France, instituent une différence de traitement entre les résidents français selon le lieu de localisation de leurs avoirs.
Il indique que les dispositions des articles L. 23C du livre des procédures fiscales et 755 du code général des impôts instituent une présomption selon laquelle les avoirs détenus sur des comptes bancaires étrangers non déclarés constituent des libéralités soumises aux droits de mutation à titre gratuit au taux de 60% qui ne peut être renversée qu'à condition d'en justifier l'origine et les modalités d'acquisition alors même que ces avoirs auraient été obtenus au cours d'exercices fiscaux au titre desquels le contribuable n'était pas assujetti à l'impôt en France.
Il affirme que de telles dispositions permettent à l'administration fiscale, sans limitation dans le temps, de procéder à l'imposition de sommes correspondant à la valeur des biens ou des droits situés à l'étranger et non déclarés sans tenir compte de l'exercice ou de l'année au titre desquels l'imposition des sommes correspondantes était normalement due.
Il en conclut que le dispositif français de taxation prévu aux articles L23C du LPF et 755 du CGI, comme celui espagnol en cause dans l'affaire du 27 janvier 2022, en ce qu'il prévoit que l'inexécution ou le respect imparfait ou tardif de l'obligation d'information relative aux biens et aux droits situés à l'étranger entraîne l'imposition des revenus non déclarés correspondant à la valeur de ces avoirs en tant que " gains patrimoniaux non justifiés ", sans possibilité, en pratique, de bénéficier de la prescription, méconnaît l'article 63 TFUE.
L'administration fiscale fait valoir que les dispositions de l'article L. 23C du livre des procédure fiscale et l'article 755 du code général des impôts ne méconnaît pas les dispositions relatives à la liberté de circulation des capitaux dans la mesure où elles permettent seulement de taxer aux droits de mutation à titre gratuit des avoirs figurant sur un compte étranger et dont l'origine et les modalités d'acquisition n'ont pas été justifiés, sans pour autant sanctionner le fait de disposer d'avoirs dans d'autres Etats membres de l'Union européenne.
Elle souligne aussi qu'il s'agit d'une présomption simple que le contribuable peut renverser par tous moyens. Elle ajoute que le manquement aux obligations légales prévues aux articles 1649 A, 1649 AA et 1649 AB du CGI ne constitue pas une sanction.
Sur ce,
L'article 63 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne dispose que :
"1. Dans le cadre des dispositions du présent chapitre, toutes les restrictions aux mouvements de capitaux entre les États membres et entre les États membres et les pays tiers sont interdites”.
L'article 65 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne dispose que :
"L'article 63 ne porte pas atteinte au droit qu'ont les États membres :
a) d'appliquer les dispositions pertinentes de leur législation fiscale qui établissent une distinction entre les contribuables qui ne se trouvent pas dans la même situation en ce qui concerne leur résidence ou le lieu où leurs capitaux sont investis ;
b) de prendre toutes les mesures indispensables pour faire échec aux infractions à leurs lois et règlements, notamment en matière fiscale ou en matière de contrôle prudentiel des établissements financiers, de prévoir des procédures de déclaration des mouvements de capitaux à des fins d'information administrative ou statistique ou de prendre des mesures justifiées par des motifs liés à l'ordre public ou à la sécurité publique".
Il en résulte que l'article 63 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne prévoit que des dérogations à la libre circulation des capitaux peuvent être opérées, si les contribuables sont dans des situations objectivement différentes, ou encore si la dérogation est fondée sur un objectif légitime avec une restriction disproportionnée.
Pour déclarer conformes à la Constitution les dispositions contestées (à savoir l'article L.23 C du livre des procédures fiscales et l'article 755 du code général des impôts), le Conseil constitutionnel a retenu, en premier lieu, qu'en adoptant les dispositions contestées, le législateur a entendu assurer l'effectivité du contrôle des avoirs détenus à l'étranger par les personnes physiques fiscalement domiciliées en France. Il a ainsi poursuivi l'objectif de valeur constitutionnelle de lutte contre la fraude et l'évasion fiscales.
En deuxième lieu, en permettant à l'administration de présumer que de tels avoirs constituent des sommes acquises à titre gratuit lorsque l'obligation de déclaration n'a pas été respectée et que l'origine et les modalités d'acquisition de ces avoirs n'ont pas été justifiées, le législateur a retenu des critères objectifs et rationnels au regard du but poursuivi. Par ailleurs, la procédure de contrôle prévue par les dispositions contestées ne confère pas à l'administration fiscale le pouvoir de choisir, parmi les contribuables, ceux qui seront effectivement soumis à l'impôt.
En dernier lieu, ces dispositions, qui réservent au contribuable la possibilité d'apporter la preuve de l'origine et des modalités d'acquisition des avoirs, n'ont ni pour objet ni pour effet d'instituer une présomption irréfragable d'acquisition à titre gratuit, pas plus qu'une présomption irréfragable de possession. Elles n'ont pas non plus pour objet d'imposer des personnes sur des sommes dont elles n'auraient jamais eu la disposition (décision n° 2021-939 QPC du 15 octobre 2021).
De plus, il résulte des dispositions des articles 1649 A et 23 C précitées que leur application répond à la mise en œuvre de modalités destinées à établir l'assiette de l'imposition en l'absence ou à défaut de réponse suffisante du contribuable. Ces dispositions s'inscrivent dans le cadre d'un objectif de lutte contre la fraude fiscale, et d'incitation des contribuables à respecter leurs obligations. Cet objectif d'intérêt général a été reconnu par le Conseil constitutionnel qui l'a validé.
Par ailleurs, force est d'observer que les dispositions querellées permettent seulement de taxer aux droits de mutation à titre gratuit des avoirs figurant sur un compte étranger et dont l'origine et les modalités d'acquisition n'ont pas été justifiés, sans pour autant sanctionner le fait de disposer d'avoirs dans d'autres Etats membres de l'Union européenne. Aucune atteinte n'est donc portée à la liberté de circulation des capitaux.
De surcroît, si une obligation déclarative portant sur la détention d'un compte bancaire et sur l'origine des avoirs figurant sur ce compte ne pèse sur le contribuable français que dans l'hypothèse où ce compte bancaire est ouvert dans les livres d'une banque étrangère, force est de relever que cette différence de traitement fondée sur la localisation des avoirs s'inscrit dans la lutte contre les schémas d'optimisation fiscale. Ces dispositions légales qui ont pour objet spécifique de faire obstacle à des comportements consistant à créer des montages purement artificiels, dépourvus de réalité économique, dans le but de contourner la loi fiscale française, ne contreviennent pas à la liberté de circulation des capitaux.
Au surplus, la procédure prévue à l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales, qui consiste pour l'administration à demander, indépendamment d'une procédure d'examen de situation fiscale personnelle, à la personne physique soumise à l'obligation de déclaration des avoirs détenus à l'étranger, de fournir dans un délai de soixante jours toutes informations ou justifications sur l'origine des fonds et les modalités d'acquisition des avoirs figurant sur le compte ou le contrat d'assurance-vie détenus à l'étranger puis à considérer, à défaut d'informations suffisantes fournies par le contribuable après mise en demeure, que ces avoirs constituent des mutations à titre gratuit devant être imposés comme les mutations à titre gratuit opérées entre parents au-delà du 4ème degré et entre personnes non parentes, ne constitue pas l'application d'une sanction ayant le caractère d'une punition au sens de la Convention européenne des droits de l'Homme et des libertés fondamentales.
En effet, les dispositions des articles L. 23 C du livre des procédures fiscales et 755 du code général des impôts sont destinées, comme le soutient l'administration fiscale, à permettre l'établissement de l'assiette de l'impôt et la fixation d'un taux d'imposition, en l'absence d'information suffisante donnée par M. [K] [I] sur la nature et la provenance des avoirs non déclarés.
Le dispositif légal français se justifie par une raison impérieuse d'intérêt général tout en étant propre à garantir la réalisation de l'objectif poursuivi, sans aller au-delà de ce qui est nécessaire pour l'atteindre, le contribuable ayant la possibilité d'apporter une réponse complète à la demande d'informations et de justification que lui a adressée l'administration fiscale et donc de renverser la présomption simple querellée.
L'article L.23 C du livre des procédures fiscales et l'article 755 du code général des impôts poursuivent ainsi un but légitime en conformité avec les dispositions de l'article 63 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne
Ce moyen sera donc écarté.
Sur le grief tiré de la prétendue absence de prescription et de l'absence d'infraction à l'article 1649 A du code général des impôts
M. [K] [I] fait valoir que l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales ne limite pas dans le temps les informations ou justifications requises sur l'origine et les modalités d'acquisition des avoirs.
Toutefois, et contrairement à ce que le contribuable affirme, l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales n'est applicable que lorsque l'obligation prévue au deuxième alinéa de l'article 1649 A ou à l'article 1649 AA du code général des impôts n'a pas été respectée au moins une fois au titre des dix années précédentes.
Au demeurant, l'article 755 du code général des impôts mentionne que les droits sont calculés sur la valeur la plus élevée connue de l'administration des avoirs figurant sur le compte ou le contrat d'assurance-vie au cours des dix années précédant l'envoi de la demande d'informations ou de justifications prévue à l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales.
Par ailleurs, il n'est pas contesté que le solde des comptes litigieux a évolué chaque année tel qu'il ressort de la synthèse des fichiers de la banque. Il en découle une utilisation des fonds litigieux.
C'est donc sans se méprendre que l'administration fiscale a pu reprendre les droits à l'impôt de solidarité sur la fortune concernant les années 2007 à 2009, au titre des avoirs litigieux non déclarés, la preuve de la clôture desdits comptes pour ces années n'étant pas rapportée.
Le moyen subsidiaire tiré de l'absence d'applicabilité de l'article 1649 A du code général des impôts et de l'application du délai de reprise de l'article L. 181-0 A du livre des procédures fiscales sera écarté.
Dès lors, ce moyen est rejeté.
Sur le grief tiré de l'absence de force probante des pièces de l'administration fiscale
S'il n'invoque pas l'origine illicite des informations utilisées par l'administration fiscale, M. [K] [I] conteste la force probante des fichiers et des traitements opérés et affirme qu'ils ne sauraient fonder la rectification en cause. Il souligne qu'il existe des doutes sérieux sur la probité de cette base de données et sur les traitements dont elle a pu faire l'objet tant avant qu'après sa saisie par les autorités judiciaires. Il en conclut que les informations contenues dans la fiche client issue des fichiers HSBC peuvent donc avoir un caractère erroné.
L'administration fiscale relève qu'elle fonde son rehaussement d'imposition, sur des éléments recueillis dans le cadre de l'exercice de son droit de communication, consécutivement à une demande d'entraide judiciaire en matière pénale présentée par les autorités suisses en janvier 2009, conformément à l'article L. 101 du livre des procédures fiscales.
Elle déclare également que l'enquête pénale a permis de confirmer l'intégrité des fichiers HSBC. Elle précise qu'elle s'est bornée à rapprocher et à retranscrire des données informatiques dans des fiches de synthèse pour en matérialiser fidèlement le contenu. Elle ajoute que la commission des finances de l'Assemblée nationale a dans son rapport du 10 juillet 2013 conclu à l'absence de manipulation de la liste HSBC par l'administration fiscale et à sa fiabilité.
Sur ce,
L'article L. 101 du livre des procédures fiscales, dans sa version alors en vigueur, dispose que l'autorité judiciaire doit communiquer à l'administration des finances toute indication qu'elle peut recueillir, de nature à faire présumer une fraude commise en matière fiscale ou une manœuvre quelconque ayant eu pour objet ou ayant eu pour résultat de frauder ou de compromettre un impôt, qu'il s'agisse d'une instance civile ou commerciale ou d'une information criminelle ou correctionnelle même terminée par un non-lieu.
Toutefois, il ne résulte pas de ce texte que le législateur ait entendu en limiter le champ d'application aux seules instances civiles ou commerciales et non aux instances pénales, qu'il n'énonce pas, ou aux seules informations judiciaires ouvertes menées par un juge d'instruction ayant permis la révélation d'éléments de nature à faire présumer une fraude fiscale, et non aux enquêtes préliminaires ou de flagrance, la volonté du législateur devant au contraire être interprétée dans le sens d'une application générale de cette obligation de transmission, même lorsque les éléments susceptibles d'intéresser l'administration fiscale sont révélés à l'occasion d'enquêtes pénales ou par des informations judiciaires terminées par un non-lieu.
Si ce texte a été modifié par la loi n° 2015-1786 du 29 décembre 2015 et prévoit désormais que l'autorité judiciaire doit communiquer à l'administration des finances toute indication qu'elle recueille, à l'occasion de toute procédure judiciaire, de nature à faire présumer une fraude commise en matière fiscale ou une manœuvre quelconque ayant eu pour objet ou pour résultat de frauder ou de compromettre un impôt, il ne résulte pas de l'exposé des motifs de cette loi que cette modification ait eu pour but de corriger une insuffisance du texte initial de nature à exclure la transmission de ces données dans le cadre d'enquêtes pénales non confiées à un juge d'instruction.
Ainsi, l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, dans sa version en vigueur au moment de la transmission des données litigieuses, prévoyait la nécessité pour l'autorité judiciaire de transmettre les éléments de nature à faire présumer une fraude, qu'ils aient été recueillis dans le cadre d'une instance judiciaire quelle que soit sa nature, en cours ou ayant donné lieu à un jugement, ou dans le cadre d'une enquête pénale, conduite sous l'autorité du procureur de la République ou confiée à un juge d'instruction, et dans cette dernière hypothèse, qu'elle soit en cours ou terminée par un non-lieu.
Ainsi, la transmission par le procureur de la République de [Localité 5], dans le cadre de l'enquête préliminaire ouverte par ce dernier à la suite de la saisie de documents au domicile de M. [O] [M] effectuée sur demande des autorités suisses, n'est pas entachée d'irrégularité.
De surcroît, les données du fichier HSBC Private Bank concernant M. [K] [I] ont été largement recoupées par les investigations des agents de la brigade nationale de répression de la délinquance fiscale, confirmant ainsi la fiabilité et l'authenticité des données issues du fichier en cause.
Les informations extraites du fichier informatique de la banque HSBC Private Bank ont donc force probante.
Ce moyen est donc rejeté.
Décision du 22 Avril 2024
9ème chambre 1ère section
N° RG 21/12282 - N° Portalis 352J-W-B7F-CVHUP
Sur le bien-fondé des impositions
L'article 1649 A deuxième alinéa du code général des impôts dispose que les personnes physiques, les associations, les sociétés n'ayant pas la forme commerciale, domiciliées ou établies en France, sont tenues de déclarer, en même temps que leur déclaration de revenus ou de résultats, les références des comptes ouverts, utilisés ou clos à l'étranger.
Les sommes, titres ou valeurs transférés à l'étranger ou en provenance de l'étranger par l'intermédiaire de comptes non déclarés dans les conditions prévues au deuxième alinéa constituent, sauf preuve contraire, des revenus imposables.
C'est à ce titre que M. [K] [I] a fait l'objet de l'imposition d'office prévue à l'article 755 du code général des impôts et selon la procédure de l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales.
M. [K] [I] fait valoir que l'administration fiscale ne rapporte pas la preuve qu'il ait possédé des avoirs à l'étranger dans les livres de la filiale suisse de la banque HSBC, la seule synthèse individuelle "BUP" étant insuffisante en l'absence d'autres éléments probants.
L'administration fiscale fait valoir qu'en application des articles L.193 et R*193 du livre des procédures fiscales, le contribuable peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition mise à sa charge en démontrant son caractère exagéré. La charge de la preuve lui incombe.
L'administration fiscale indique que M. [K] [I] n'a jamais donné de réponse satisfaisante à la demande d'information alors qu'il existait une présomption concernant la détention d'avoirs non déclarés à l'étranger. Elle fait valoir que l'intéressé aurait pu solliciter de la banque HSBC une confirmation qu'il n'y détenait aucun compte.
Il résulte de la proposition de rectification du 19 décembre 2017 que pour fonder son redressement l'administration fiscale s'est d'une part fondée sur une fiche de synthèse individuelle (dont un extrait était annexé à la demande d'informations et de justifications sur des avoirs détenus ou utilisés à l'étranger et non déclarés) et d'autre part, sur les éléments de l'enquête pénale obtenus à l'occasion de l'exercice de son droit de communication auprès du parquet et du juge d'instruction (les procès-verbaux d'audition n° 11-00153/010 du 13 août 2013, n° 11-000153/014 du 19 août 2013, n° 2011/000153/040 du 17 janvier 2014 et n° 2014/0000360/061 du 24 avril 2015 retranscrits partiellement dans la demande d'informations et de justifications sur des avoirs détenus ou utilisés à l'étranger et non déclarés et dans la proposition de rectification).
De plus, il n'est pas contesté que dans les divers courriers adressés au justiciable, ainsi que dans la proposition de rehaussement d'impôt, l'administration fiscale a rappelé les éléments qui lui ont été transmis par l'autorité judiciaire selon le cadre juridique évoqué plus haut, et a joint, dans le cadre de la présente instance judiciaire, le document de synthèse individuel concernant M. [K] [I].
L'administration fiscale a transmis à M. [K] [I] les éléments le concernant compilés dans cette fiche de synthèse individuelle. En effet, et comme il a été rappelé plus haut, ce document de synthèse a été établi, ainsi que cela a été retenu par la commission parlementaire, par un simple travail de mise en relation de données brutes figurant sur les divers fichiers volés à la société HSBC Private Bank. L'administration fiscale s'est donc contentée de retranscrire les informations y figurant pour les mettre en lien avec les identités des clients. Ainsi a-t-elle suffisamment motivé sa proposition de rectification ainsi que l'article L. 76 du livre des procédures fiscales lui impose, de surcroît sur des informations émanant de la société HSBC. Il ne peut donc lui être reproché d'avoir procédé par simple affirmation.
La synthèse individuelle code BUP, produite par l'administration fiscale, mentionne que sont liés à M. [K] [I] :
- un profil client correspondant à une personne morale située au Panama (ARCADES 22) associé à quatre comptes bancaires ;
- un profil client correspondant à une personne morale située au Panama (BLOOMDALE SA) associé à dix comptes bancaires.
Si M. [I] produit les courriers échangés entre [J] [I] et la banque HSBC, il apparaît que ce dernier avait connaissance de l'existence de ses droits sur les comptes litigieux dès lors qu'il justifie les mentions des fichiers en invoquant sa qualité de membre du conseil de famille constitué par Monsieur [J] [I] et chargé de l'administrer en cas de décès ou d'incapacité juridique de ce dernier avant le vingt-cinquième anniversaire de son fils.
Or, cette qualité ne peut s'entendre qu'au regard d'une justification de sa constitution en application du régime se rattachant aux dispositions du code civil. En dépit de l'absence de réalité juridique de sa qualité de mandataire dans le cadre du conseil de famille allégué sans autre objet qu'une interposition, M. [K] [I] n'apporte aucun éclaircissement sur sa situation permettant d'établir qu'il ne détenait aucun pouvoir sur les comptes litigieux ou à tout le moins établissant avec certitude qu'un autre que lui était bénéficiaire des comptes litigieux. La correspondance entre la banque HSBC Private Bank et M. [J] [I] n'établit pas, en effet, que ce dernier était seul bénéficiaire desdits comptes litigieux.
De même, le fait que M. [K] [I] ne soit pas intervenu de manière effective dans la gestion desdits fonds - son frère n'étant ni décédé ni affecté d'une incapacité juridique -, est indifférent.
Ainsi, M. [K] [I] se contentant de souscrire à des déclarations d'impôt sur la fortune portant la mention " néant " et d'alléguer une qualité sans réalité juridique, échoue à démontrer suffisamment qu'il n'était pas co-titulaire des comptes ou à tout le moins détenteur de droits sur ceux-ci alors que les fiches " BUP " reprennent ses informations personnelles à l'égal des autres clients de la banque, outre qu'il apparaissait comme tel dans les fichiers.
En outre, il ressort des éléments de la procédure pénale que les fonds transférés de Suisse sur le compte ouvert dans les livres de la Société Générale, bien qu'ouvert au nom de M. [J] [I], a continué de bénéficier à M. [K] [I] à des fins personnelles, notamment pour régler les dépenses de la vie courante.
Les numéros d'identification des comptes querellés sont les mêmes que ceux figurant dans la proposition de rectification. Il en découle que M. [K] [I] avait parfaitement connaissance des faits qui lui étaient reprochés.
Il ressort de ce document de synthèse individuelle BUP 5090133548 (personne physique) que M. [K] [I] avait la disposition de 14 comptes bancaires détenus auprès de la banque suisse HSBC PRIVATE BANK indirectement par l'interposition des sociétés ARCADES 22 et BLOOMDALE SA d'une part, et qu'il y a eu des mouvements sur ces comptes bancaires d'autre part. La simple variation numérique qui n'est pas spécialement contestée, suffit à démontrer qu'ont été portées au débit ou au crédit de chacun des comptes querellés, une ou plusieurs écritures.
L'assiette de l'imposition querellée correspondant à la valeur la plus élevée des avoirs figurant sur les comptes détenus à l'étranger. La procédure prévue par l'article L. 23C du livre des procédures fiscales ne requiert pas qu'il soit procédé à la valorisation des sociétés titulaires des comptes querellés. Ainsi, le moyen afférent à la valeur réelle de chaque société sera rejeté.
Par ailleurs, s'il est établi que le document de synthèse individuelle BUP querellé porte sur les années 2005 à 2007, aucun élément objectif ne démontre la clôture de ces comptes pour les années postérieures. Le moyen tiré de l'absence de preuve de la détention desdits comptes pour les années 2007 à 2009, sera donc écarté.
Les comptes figurant dans cette synthèse sont des comptes pour lesquels M. [K] [I] avait soit la qualité de mandataire soit celle de bénéficiaire économique.
Ce document fait mention d'un certain nombre d'éléments d'état civil relatifs à l'identité de M. [K] [I], comme ses nom, prénom, date et lieu de naissance et profession. L'ensemble de ces informations correspond parfaitement à la situation personnelle de M. [K] [I]. Ce dernier n'apporte aucun indice de nature à établir que cette identité n'aurait pas été la sienne ou qu'elle aurait été usurpée.
Il ressort également de la fiche de synthèse individuelle que le profil client correspondant aux éléments d'identité de M. [K] [I] existait au sein des livres de la société HSBC PRIVATE BANK depuis le 2 février 1997.
Ce document de synthèse individuelle BUP, associé aux procès-verbaux mentionnés ci-dessus, mentionne également que ces deux sociétés comptent trois co-indivisaires (M. [I] apparaissant comme " beneficial owner " sur le profil BLOOMDALE SA et comme " attorney A " sur le profil ARCADES 22), entraînant respectivement l'application d'une présomption simple d'une détention d'avoirs à l'étranger à parts égales entre chaque ayant-droit, correspondant à un tiers. M. [I] est ainsi mal fondé à arguer du défaut de force probante de la fiche de synthèse ou de son imprécision, notamment quant à sa quote-part sur les fonds litigieux, alors qu'il lui incombe de faire la preuve de n'être pas titulaire du compte ou d'une procuration sur ce compte ou celle de n'être propriétaire que d'une partie des sommes y déposées ou celle de l'existence d'autres coindivisaires - preuve qui n'est pas rapportée en l'espèce -, étant précisé que l'article 753 du code général des impôts expose que "tous les titres, sommes ou valeurs existant chez les dépositaires agréés...faisant l'objet de comptes indivis ou collectifs avec solidarité sont considérés, pour la perception des droits de mutation par décès, comme appartenant conjointement aux déposants et dépendant de la succession de chacun d'eux, pour une part virile, sauf preuve contraire réservée tant à l'administration qu'aux redevables, et résultant pour ces derniers soit des énonciations du contrat de dépôt, soit des titres prévus par le 2° de l'article 773".
C'est donc par une juste application des textes précités que l'administration a mis en œuvre la procédure de taxation d'office dans les conditions de l'article 755 du code général des impôts, en calculant les droits de mutation à titre gratuit sur les avoirs figurant sur les comptes étrangers au taux le plus élevé et en écartant l'application des dispositions de l'article 753 du code général des impôts.
L'ensemble de ces éléments corroborent les informations contenues dans la synthèse individuelle code-BUP et les procès-verbaux annexés à la proposition de rectification, documents dont la teneur laissait présumer la détention par M. [K] [I] d'avoirs non déclarés en Suisse.
Ainsi, les éléments de preuve rapportés par l'administration fiscale de la détention de comptes bancaires à l'étranger par M. [K] [I] non déclarés ne sont, en l'espèce, concrètement combattus par aucun élément susceptible de remettre en cause les informations ainsi consignées dans sa fiche de synthèse individuelle.
De surcroît, comme le relève l'administration fiscale, il n'était pas impossible à M. [K] [I] de démontrer qu'il n'était pas titulaire de comptes ouverts dans les livres de cette banque ou d'une procuration sur ceux-ci, celle-ci pouvant le cas échéant en attester.
Dès lors, M. [K] [I] n'apparaît pas fondé à contester la preuve apportée par l'administration fiscale de sa détention d'avoirs à l'étranger.
C'est donc par une juste application des textes précités que l'administration a mis en œuvre la procédure de taxation d'office dans les conditions de l'article 755 du code général des impôts, en calculant les droits de mutation à titre gratuit sur les avoirs figurant sur les comptes étrangers au taux le plus élevé.
M. [K] [I] sera par conséquent débouté de l'intégralité de ses demandes.
Sur la demande subsidiaire de saisine de la Cour de justice de l'Union européenne de questions préjudicielles
L'article 19 paragraphe 3 b) du Traité sur l'Union européenne dispose que la Cour de justice de l'Union européenne statue conformément aux traités, à titre préjudiciel, à la demande des juridictions nationales, sur l'interprétation du droit de l'Union ou sur la validité d'actes adoptés par les institutions.
Aux termes de l'article 267 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), la Cour de justice de l'Union européenne est compétente pour statuer, à titre préjudiciel :
a) sur l'interprétation des traités,
b) sur la validité et l'interprétation des actes pris par les institutions, organes ou organismes de l'Union.
Lorsqu'une telle question est soulevée devant une juridiction d'un des Etats membres, cette juridiction peut, si elle estime qu'une décision sur ce point est nécessaire pour rendre son jugement, demander à la Cour de statuer sur cette question.
Lorsqu'une telle question est soulevée dans une affaire pendante devant une juridiction nationale dont les décisions ne sont pas susceptibles d'un recours juridictionnel de droit interne, cette juridiction est tenue de saisir la Cour.
Si une telle question est soulevée dans une affaire pendante devant une juridiction nationale concernant une personne détenue, la Cour statue dans les plus brefs délais.
Il résulte de ces textes que les juridictions autres que celles dont les décisions ne sont susceptibles d'aucun recours juridictionnel de droit interne ne sont pas tenues de saisir la Cour de justice de l'Union européenne mais disposent de la faculté d'utiliser ou non la procédure de renvoi préjudiciel prévue par l'article 267 précité.
Compte tenu des développements précédents et de la solution apportée au présent litige, il y a lieu de rejeter la demande subsidiaire formée par M. [K] [I].
Sur les demandes accessoires
Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. Toutefois, aux termes de l'article L. 207 du livre des procédures fiscales, lorsqu'une réclamation contentieuse est admise en totalité ou en partie, le contribuable ne peut prétendre à des dommages-intérêts ou à des indemnités quelconques, à l'exception des intérêts moratoires prévus par l'article L. 208.
Aux termes de l'article R.* 207-1, alinéa premier, du même livre, lorsqu'une réclamation contentieuse est admise en totalité ou en partie, les frais de signification ainsi que, le cas échéant, les frais d'enregistrement du mandat sont remboursés.
M. [K] [I] succombant, il est condamné aux dépens.
La demande présentée par M. [K] [I] au titre des frais irrépétibles sera rejetée.
PAR CES MOTIFS
Le Tribunal, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort
DÉBOUTE M. [K] [I] de l'ensemble de ses demandes ;
DÉBOUTE M. [K] [I] de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE M. [K] [I] aux dépens.
Fait et jugé à Paris le 22 Avril 2024.
LA GREFFIERELA PRÉSIDENTE