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12/04/2024 | FRANCE | N°24/00700

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp référé, 12 avril 2024, 24/00700


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copies conformes délivrées
le : 12/04/2024
à : - Me M. ROUX
- Me I. QUENAULT
- Me L. MIMOUN

Copie exécutoire délivrée
le : 12/04/2024
à : - Me M. ROUX

La Greffière,

Pôle civil de proximité


PCP JCP référé

N° RG 24/00700 - N° Portalis 352J-W-B7I-C3Y5G

N° de MINUTE :
3/2024






ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 12 avril 2024


DEMANDEURS
Monsieur [D] [B], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Mélanie ROUX, Av

ocate au Barreau de PARIS, vestiaire : P0295
Madame [V] [C] épouse [B], demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Mélanie ROUX, Avocate au Barreau de PARIS, vestiaire : P0295


DÉFEND...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copies conformes délivrées
le : 12/04/2024
à : - Me M. ROUX
- Me I. QUENAULT
- Me L. MIMOUN

Copie exécutoire délivrée
le : 12/04/2024
à : - Me M. ROUX

La Greffière,

Pôle civil de proximité

PCP JCP référé

N° RG 24/00700 - N° Portalis 352J-W-B7I-C3Y5G

N° de MINUTE :
3/2024

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 12 avril 2024

DEMANDEURS
Monsieur [D] [B], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Mélanie ROUX, Avocate au Barreau de PARIS, vestiaire : P0295
Madame [V] [C] épouse [B], demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Mélanie ROUX, Avocate au Barreau de PARIS, vestiaire : P0295

DÉFENDEURS
La S.E.L.A.R.L. FIDES, prise en la personne de Maître Bernard CORRE, mandataire judiciaire de la Société à Responsabilité Limitée CENTRE NATIONAL D’ETUDE SOLAIRE, dont le siège social est sis [Adresse 3]
représentée par Me Isilde QUENAULT, Avocate au Barreau de PARIS, vestiaire : #C1515
Monsieur [N] [X] [L], demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Lionel MIMOUN, Avocat au Barreau de PARIS, vestiaire : #C1450, substitué par Me Hourya MAMOUNI, Avocate au Barreau de PARIS

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Madame Clara SPITZ, Juge, Juge des contentieux de la protection
assistée de Madame Nathalie BERTRAND, Greffière

Décision du 12 avril 2024
PCP JCP référé - N° RG 24/00700 - N° Portalis 352J-W-B7I-C3Y5G

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 5 mars 2024

ORDONNANCE
contradictoire et en premier ressort prononcée par mise à disposition au greffe le 12 avril 2024 par Madame Clara SPITZ, Juge, assistée de Madame Nathalie BERTRAND, Greffière.

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 23 janvier 2023, Monsieur [D] [B] et Madame [V] [C], épouse [B] (ci-après, « les époux [B]) ont donné à bail d’habitation à la SARL CENTRE NATIONAL D'ÉTUDE SOLAIRE, représentée par son gérant Monsieur [Z] [H], un appartement situé [Adresse 1] pour permettre à Monsieur [N] [X] [L], présenté comme le directeur régional de la société, de bénéficier d’un logement de fonction à compter du 06 février 2023.

Par jugement du 16 février 2023, le tribunal de commerce de PARIS a prononcé l'ouverture de la liquidation judiciaire de la SARL CENTRE NATIONAL D'ÉTUDE SOLAIRE et a désigné la SELARL FIDES en la personne de Maître [J] [I] en qualité de mandataire-liquidateur.

Le 18 octobre 2023, le mandataire-liquidateur a notifié aux époux [B] la résiliation du bail avec effet à cette date, mais les clés de l'appartement n'ont pas été restituées.

Les époux [B] ont fait délivrer à Monsieur [N] [X] [L] une sommation de quitter les lieux par commissaire de justice le 10 novembre 2023.

Par acte de commissaire de justice en date du 27 décembre 2023, ils ont fait assigner la SELARL FIDES, prise en la personne de Maître [J] [I], en qualité de mandataire-liquidateur judiciaire de la SARL CENTRE NATIONAL D'ÉTUDE SOLAIRE, ainsi que Monsieur [N] [X] [L], devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de PARIS, statuant en référé, aux fins de voir :
- constater que le bail est résilié depuis le 18 octobre 2023,
- ordonner l'expulsion de la SARL CENTRE NATIONAL D'ÉTUDE SOLAIRE, ainsi que celle de Monsieur [N] [X] [L], et de tous occupants de leur chef des lieux litigieux,
- supprimer les délais prévus aux articles L 412-1 et L 412-6 du code des procédures civiles d'exécution,
- condamner la SELARL FIDES à régler la somme de 5.779,35 euros sur les fonds disponibles de la liquidation au titre des loyers impayés,
- fixer le montant de l'indemnité d'occupation à la somme de 2 310 euros par mois jusqu'à la libération effective des lieux,
- condamner in solidum la SELARL FIDES et Monsieur [N]

[X] [L] à verser cette indemnité d'occupation aux époux [B],
- condamner in solidum la SELARL FIDES et Monsieur [N] [X] [L] à verser aux époux [B] la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

À l'audience du 05 mars 2024 à laquelle l'affaire a été retenue, les époux [B], représentés par leur conseil, ont déposé des conclusions soutenues oralement aux termes desquelles ils ont sollicité, outre les demandes formées dans l'acte introductif d'instance, le débouté de la SELARL FIDES de l'intégralité de ses demandes.

Ils font valoir que la SARL CENTRE NATIONAL D'ÉTUDE SOLAIRE a été placée en liquidation judiciaire le 16 février 2023, que la SELARL FIDES, en sa qualité de mandataire-liquidateur judiciaire, a résilié le bail à compter du 18 octobre 2023, mais qu'elle ne lui a pas restitué les clés, et que les locaux sont toujours occupés par Monsieur [N] [X] [L], au profit duquel, en tant que directeur régional de la SARL CENTRE NATIONAL D'ÉTUDE SOLAIRE, le bail avait été consenti. Dès lors, ils affirment que cette occupation sans droit ni titre est constitutive d'un trouble manifestement illicite et se disent bien-fondés, au visa de l'article 835 du code de procédure civile, à demander l'expulsion de Monsieur [N] [X] [L] et de la SARL CENTRE NATIONAL D'ÉTUDE SOLAIRE ainsi que la suppression des délais légaux prévus par les articles L 412-1 et L 412-6 du code des procédures civiles d'exécution, compte tenu des manœuvres de la part du dirigeant de la SARL CENTRE NATIONAL D'ÉTUDE SOLAIRE et de Monsieur [N] [X] [L] dont ils estiment avoir été victime.
Ils avancent, en outre, que les loyers impayés des mois d' août 2023 à octobre 2023, constituent une créance privilégiée sur le fondement des articles L 622-16, L 641,12 et et L 641-13 du code de commerce, en ce que le bail a été conclu pour les besoins de l'activité de l'entreprise et réclament ainsi la condamnation in solidum des défendeurs au paiement de cet arriéré à hauteur de 5.779,35 euros sur les fonds disponibles de la liquidation, ainsi qu'au versement d'une indemnité d'occupation de 2310 euros par mois représentant le montant du loyer majoré de 10 % et des charges.

La SELARL FIDES, prise en la personne de Maître [I], ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL CENTRE NATIONAL D'ÉTUDE SOLAIRE, représentée par son conseil à l'audience, a déposé des conclusions soutenues oralement. Elle indique ne pas s'opposer à la demande d'expulsion et a formé les demandes suivantes :
- déclarer irrecevable toute demande de condamnation en paiement la concernant,
- dire n'y avoir lieu à référé concernant toute demande de fixation au passif qui pourrait être formulée,
- débouter les époux [B] de leurs demandes à son encontre,
- condamner les époux [B] à lui verser la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle ne s'oppose pas au prononcé de l'expulsion en exposant qu'elle a

effectivement résilié le bail le 18 octobre 2023 sur le fondement de l'article L 641-12 1° du code de commerce sans être en mesure de restituer les clés, qui sont en la possession de Monsieur [N] [X] [L], au sujet duquel elle affirme toutefois qu'il n'entretient aucun lien avec la SARL CENTRE NATIONAL D'ÉTUDE SOLAIRE.
Elle conteste, cependant, au visa de l'article L 641-13 du code de commerce, le caractère privilégié de la créance des époux [B] au titre de l'arriéré de loyers et rappelle que, s'agissant d'une simple créance postérieure au jugement d'ouverture de la procédure collective, elle doit suivre le même traitement que les créances antérieures dont le paiement ne peut être réclamé et dont la fixation du montant ne peut être déterminée par le juge des référés. Enfin, elle soutient qu'elle ne saurait être redevable de l'indemnité d'occupation réclamée par les requérants puisque, d'une part, la SARL CENTRE NATIONAL D'ÉTUDE SOLAIRE n'occupe pas effectivement les lieux et que, d'autre part, cette demande se heurte à une irrecevabilité s'agissant d'une créance postérieure au jugement d’ouverture exclue d'un champ d'application de l'article L 641-13 du code de commerce.

Monsieur [N] [X] [L], représenté par son conseil le jour de de l'audience, a déposé des conclusions soutenues oralement aux termes desquelles il demande au juge des référés de :
à titre principal :
- se déclarer incompétent au profit du conseil des prud'hommes,
- déclarer irrecevables les demandes de condamnations en paiement et d’expulsion à son encontre,
- dire n'y avoir lieu à référé concernant les demandes de fixation au passif qui seraient formulées à son encontre,
à titre subsidiaire :
- renvoyer les parties devant le juge commissaire à la liquidation judiciaire de la SARL CENTRE NATIONAL D'ÉTUDE SOLAIRE,
en tout état de cause,
- débouter les époux [B] de toutes leurs demandes à son encontre,
les condamner à lui payer la somme de 3.000 euros, outre les entiers dépens.

Il soutient que le contrat de bail a été signé pour le loger en tant que directeur régional de la SARL CENTRE NATIONAL D'ÉTUDE SOLAIRE et que, dès lors, seul le conseil des prud'hommes est compétent pour statuer sur les demandes formées par les époux [B]. En outre, il rappelle les dispositions des articles L 622-21 et L 622-22 du code de commerce et fait valoir que le juge des référés n'a pas compétence pour statuer sur la fixation du montant d'une créance au passif d'une société en liquidation judiciaire.

À l'issue des débats, la décision a été mise en délibéré au 12 avril 2024 par mise à disposition des parties au greffe du tribunal.

MOTIFS

Sur l'incompétence du juge du juge des contentieux de la protection

L'article L 213-4-4 du code de l'organisation judiciaire dispose que le

juge des contentieux de la protection connaît des actions dont un contrat de louage d'immeubles à usage d'habitation ou un contrat portant sur l'occupation d'un logement est l'objet, la cause ou l'occasion, ainsi que des actions relatives à l'application de la loi n° 48-1360 du 1er septembre 1948 portant modification et codification de la législation relative aux rapports des bailleurs et locataires ou occupants de locaux d'habitation ou à usage professionnel et instituant des allocations de logement.

Il s'agit d'une compétence exclusive du juge des contentieux de la protection.

En l'espèce, il n'est pas contesté que le bail signé le 23 janvier 2023 est un bail d'habitation soumis aux dispositions du code civil. Dès lors, le juge des contentieux de la protection est compétent pour statuer sur toute demande en découlant.

Ainsi, la compétence du juge des contentieux de la protection sera confirmée.

Sur la demande d'expulsion

En application de l'article 835 du code de procédure civile, le juge du contentieux de la protection peut, dans les limites de sa compétence, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Le trouble manifestement illicite est la perturbation résultant d'un fait matériel ou juridique qui, directement ou indirectement, constitue une violation évidente de la règle de droit.

Il résulte de L. 641-12 1° du code de commerce que, sans préjudice de l'application du I et du II de l'article L. 641-11-1 du même code, la résiliation du bail des immeubles utilisés pour l'activité de l'entreprise intervient notamment au jour où le bailleur est informé de la décision du liquidateur de ne pas continuer le bail.

En l'espèce, il n'est pas contesté que la SELARL FIDES, ès qualités de mandataire-liquidateur judiciaire de la SARL CENTRE NATIONAL D'ÉTUDE SOLAIRE, a adressé un courrier aux bailleurs le 18 octobre 2023 aux termes duquel il leur a notifié la résiliation du bail consenti à cette société à compter de la date du courrier.

Dès lors, le bail consenti le 23 janvier 2023 à la SARL CENTRE NATIONAL D'ÉTUDE SOLAIRE est résilié de manière non sérieusement contestable depuis le 18 octobre 2023 et cette dernière ne dispose plus d'aucun droit ni titre pour se maintenir dans les lieux à compter de cette date.

Or, aux termes de ce même courrier, le mandataire-liquidateur judiciaire informe les bailleurs qu'il n'est pas en mesure de restituer les clés du local, « en raison de la non-coopération du dirigeant de la société. ».

Il est donc établi que les clés n'ont pas été restituées par la preneuse et que les lieux sont occupés, de manière non contestée, par Monsieur [N] [X] [L] en dépit de la sommation de quitter les lieux qui lui a été signifiée par commissaire de justice le 10 novembre 2023.

Ainsi, la SARL CENTRE NATIONAL D'ÉTUDE SOLAIRE et Monsieur [N] [X] [L] sont occupants sans droit ni titre de l’appartement dont les époux [B] sont propriétaires. Ils convient d'ordonner leur expulsion, ainsi que celle de tous occupants de leur chef, selon les modalités fixées au dispositif de la présente ordonnance.

Il sera rappelé que le sort du mobilier garnissant le logement est prévu par les articles L.433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution dont l’application relève, en cas de difficulté -laquelle n'est à ce stade que purement hypothétique-, de la compétence du juge de l’exécution et non de la présente juridiction.

Sur la suppression des délais prévus aux articles L 412-1 et L 412-6 du code des procédures civiles d'exécution

Il résulte de l'article L 412-1 du code des procédures civiles d'exécution que le délai obligatoire de deux mois entre la délivrance du commandement de quitter les lieux et l’expulsion d'une personne occupant un local aux fins d'habitation ne s'applique pas lorsque le juge qui ordonne l'expulsion constate la mauvaise foi de la personne expulsée ou que les personnes dont l'expulsion a été ordonnée sont entrées dans les locaux à l'aide de manœuvres, de menaces, de voies de fait ou de contrainte.

Par ailleurs, l'article L 412-6 du code des procédures civiles d’exécution prévoit également que le juge peut supprimer ou réduire le bénéfice du sursis à expulsion prévu entre le 1er novembre de chaque année jusqu'au 31 mars de chaque année lorsque la mesure d'expulsion a été prononcée en raison d'une introduction sans droit ni titre dans le domicile d'autrui à l'aide de manœuvres, de menaces, de voies de fait ou de contrainte.

En l'espèce, les requérants soutiennent qu'ils sont victimes d'une manœuvre organisée par Monsieur [N] [X] [L] et le gérant de la SARL CENTRE NATIONAL D'ÉTUDE SOLAIRE, Monsieur [Z] [H], puisque cette société a été placée en liquidation judiciaire moins d'un mois après la signature du bail, qu'en dépit de leurs demandes répétées en ce sens ils n'ont pas obtenu la communication du contrat de travail de Monsieur [N] [X] [L], que les loyers n'ont jamais été versés par la SARL CENTRE NATIONAL D'ÉTUDE SOLAIRE mais par une autre société, que l'occupant effectif des lieux n'a vraisemblablement jamais été salarié de ladite société.

Toutefois, si la SELARL FIDES affirme effectivement que Monsieur [N] [X] [L] n'entretient aucun lien avec cette société, il résulte du jugement d'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de la SARL CENTRE NATIONAL D'ÉTUDE SOLAIRE que le nombre de salariés de cette société est inconnu.

Dès lors, les demandeurs ne rapportent pas la preuve avec l’évidence requise en référé que la SARL CENTRE NATIONAL D'ÉTUDE SOLAIRE et Monsieur [N] [X] [L] sont entrés dans les locaux à l'aide de manœuvres, de menaces, de voies de fait ou de contrainte.

Par conséquent, la demande tendant à la suppression du délai de deux mois prévus à l'article L 412-1 du code des procédures civiles d’exécution et au bénéfice de la trêve hivernale sera rejetée.

Sur la demande en paiement au titre de l'arriéré locatif

Selon l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

En application de l'article 1728 du code civil, le preneur est tenu de de payer le prix du bail aux termes convenus.

L'article L 641-3 du code de commerce dispose que le jugement qui ouvre la liquidation judiciaire a les mêmes effets que ceux qui sont prévus en cas de sauvegarde par les premier et troisième alinéas du I et par le III de l'article L. 622-7 du même code, par les articles L. 622-21 et L. 622-22 du même code, par la première phrase de l'article L. 622-28 du même code et par l'article L. 622-30 du code de commerce.

Les articles L. 622-21 et L. 622-21 du code de commerce disposent ainsi que le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17 du même code et tendant notamment à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent. Les instances en cours sont interrompues jusqu'à ce que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de sa créance. Elles sont alors reprises de plein droit, le mandataire judiciaire et, le cas échéant, l'administrateur ou le commissaire à l'exécution du plan nommé en application de l'article L. 626-25 dûment appelés, mais tendent uniquement à la constatation des créances et à la fixation de leur montant.

S'agissant plus spécifiquement de la liquidation judiciaire, l'article L. 641-13 du code de commerce dispose que sont en revanche payées à leur échéance les créances nées régulièrement après le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire :
- si elles sont nées pour les besoins du déroulement de la procédure ou du maintien provisoire de l'activité autorisé en application de l'article L. 641-10 du code de commerce ;
- si elles sont nées en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant le maintien de l'activité ou en exécution d'un contrat en cours régulièrement décidée après le jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire, s'il y a lieu, et après le jugement d'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire,

- si elles sont nées pour assurer la mise en sécurité des installations classées pour la protection de l'environnement en application des articles L. 512-6-1, L. 512-7-6 ou L. 512-12-1 du code de l'environnement ;
ou si elles sont nées des besoins de la vie courante du débiteur, personne physique.
(…) Sont également payées à leur échéance, les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire mentionnées au I de l'article L. 622-17 du code de commerce à savoir, celles qui sont nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période.

Les créances nées postérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective mais qui n'entrent pas dans le champ d'application de l'article L 622-17 du code de commerce sont, par application de l'article L 622-24 du même code, soumises au même régime que les créances nées antérieurement.

En l'espèce, la SELARL FIDES conteste le caractère privilégié de la créance des époux [B] qui est incontestablement née après l'ouverture de la procédure collective, puisque l'arriéré de loyers, selon les demandeurs, est né à compter du mois d'août 2023 et que le jugement d'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire a été prononcé le 16 février 2023.

En soutenant que la créance d’arriéré de loyers que lui réclame le bailleur n’est pas éligible au traitement préférentiel des créances postérieures à l'ouverture d'une procédure collective visées par l’article L. 641-13 du code de commerce, le liquidateur judiciaire fait valoir une contestation sérieuse que le juge des référés ne peut trancher. En effet, il n’appartient pas au juge des référés de procéder à la qualification de la créance litigieuse ni de déterminer si elle entre dans le champ de l'article L. 641-13 du code de commerce, cela dépassant les pouvoirs qui lui sont conférés.

Il ne saurait donc y avoir lieu à référé s'agissant de cette demande, étant relevé, en tout état de cause que le montant de l'arriéré locatif dont le paiement est demandé à titre provisionnel n'est justifié par la production d'aucun décompte locatif.

Par conséquent, les époux [B] seront déboutés de leur demande de condamnation au paiement de la somme de 5.779,35 euros au titre de l'arriéré locatif.

Sur la demande en paiement au titre de l'indemnité d'occupation

Le maintien dans les lieux postérieurement à la date d’expiration du bail constitue une faute civile de nature quasi-délictuelle ouvrant droit à réparation en ce qu'elle cause un préjudice certain pour le propriétaire dont l'occupation indue de son bien l'a privé de sa jouissance. Au-delà de cet aspect indemnitaire, l’indemnité d’occupation, qui est également de nature compensatoire, constitue une dette de jouissance

correspondant à la valeur équitable des locaux et dont la fixation du montant par le juge dépend de son appréciation souveraine.

Cette demande en ce qu'elle est dirigée, in solidum, à l'encontre de la SELARL FIDES ès qualités de mandataire-liquidateur de la SARL CENTRE NATIONAL D'ÉTUDE SOLAIRE ne saurait non plus prospérer en référé, pour le même motif qu'elle se heurte à une contestation sérieuse formée par le défendeur relative au caractère privilégié ou non de cette créance née postérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective.

Par conséquent, les époux [B] seront déboutés de leur demande de condamnation au paiement d'une indemnité provisionnelle d'occupation en ce qu'elle est dirigée à l'encontre de la SELARL FIDES.
En revanche, il n'est pas contesté que Monsieur [N] [X] [L] se maintient dans les lieux depuis le 18 octobre 2023, date de résiliation du bail, et que la demande de condamnation au paiement d'une indemnité d'occupation est formée à son encontre en tant qu'occupant effectif des lieux et en son nom propre.

Dès lors, afin de préserver les intérêts des époux [B], il convient de dire que celui-ci sera redevable, à leur égard, d'une indemnité d'occupation qui, s'agissant d'une procédure de référé, ne peut être fixée qu'à titre provisionnel, d'un montant égal au loyer et aux charges acquittés par la locataire soit la somme mensuelle de 2110 euros (1800 euros de loyer + 300 euros de charges), rien ne justifiant la majoration de 10 % du loyer sollicitée, en l'absence de preuve de l'arriéré locatif que les demandeurs disent déplorer notamment.

Elle sera due à compter du 18 octobre 2023, date de la résiliation du bail d’habitation, et ce, jusqu'à l'expulsion et à la restitution des clés de l’appartement.

Sur les demandes accessoires

Monsieur [N] [X] [L], partie perdante, sera condamné aux dépens en application de l'article 696 du code de procédure civile.

Il serait inéquitable de laisser à la charge des époux [B] les frais exposés par eux dans la présente instance et non compris dans les dépens. Monsieur [N] [X] [L] sera ainsi condamné à leur régler la somme de 1 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il n'y a pas lieu de faire application de cette disposition au profit de la SELARL FIDES.

La présente décision est exécutoire à titre provisoire et ne peut être écartée, conformément à l'article 514-1 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Nous, juge des contentieux de la protection statuant en référé,

après débats en audience publique, par ordonnance contradictoire mise à disposition au greffe en premier ressort,

Au principal, RENVOYONS les parties à se pourvoir ainsi qu'elles aviseront mais, dès à présent, vu l'absence de contestation sérieuse,

NOUS DÉCLARONS compétent pour statuer sur les demandes formées par Monsieur [D] [B] et Madame [V] [C], épouse [B],

CONSTATONS que la SARL CENTRE NATIONAL D'ÉTUDE SOLAIRE et Monsieur [N] [X] [L] sont occupants sans droit ni tire du logement situé [Adresse 1],

ORDONNONS, en conséquence, à la SARL CENTRE NATIONAL D'ÉTUDE SOLAIRE et à Monsieur [N] [X] [L] de libérer les lieux et de restituer les clés dans un délai de quinze jours à compter de la signification de la présente ordonnance,

DISONS qu'à défaut pour la SARL CENTRE NATIONAL D'ÉTUDE SOLAIRE et Monsieur [N] [X] [L] de libérer les lieux et de restituer les clés dans ce délai, Monsieur [D] [B] et Madame [V] [C], épouse [B] pourront, deux mois après la signification d'un commandement de quitter les lieux, faire procéder à leur expulsion ainsi qu'à celle de tous occupants de leur chef, y compris, le cas échéant, avec le concours d'un serrurier et de la force publique,

DÉBOUTONS Monsieur [D] [B] et Madame [V] [C], épouse [B], de leur demande de suppression des délais légaux prévus aux articles L 412-1 et L 412-6 du code des procédures civiles d'exécution,

DISONS n'y avoir lieu à ordonner l'enlèvement, le transport et la séquestration des meubles éventuellement laissés sur place et rappelle que le sort du mobilier garnissant le logement est prévu par les articles L 433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution,

DISONS n'y avoir lieu à référé concernant la demande provisionnelle en paiement formée par Monsieur [D] [B] et Madame [V] [C], épouse [B] à l'encontre de la SELARL FIDES, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL CENTRE NATIONAL D'ÉTUDE SOLAIRE, au titre de l'arriéré locatif,

DISONS n'y avoir lieu à référé concernant la demande provisionnelle en paiement d'une indemnité d’occupation mensuelle formée par Monsieur [D] [B] et Madame [V] [C], épouse [B], en ce qu'elle est dirigée à l'encontre de la SELARL FIDES ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL CENTRE NATIONAL D'ÉTUDE SOLAIRE,

CONDAMNONS Monsieur [N] [X] [L] au paiement d'une indemnité provisionnelle d'occupation d'un montant de 2.210 euros mensuel à compter du 18 octobre 2023 et jusqu'à la libération des lieux et la remise des clés,

CONDAMNONS Monsieur [N] [X] [L] à payer à Monsieur [D] [B] et Madame [V] [C], épouse [B], une somme de 1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

DISONS n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la SELARL FIDES prise en la personne de Maître [J] [I] en qualité de mandataire-liquidateur de la SARL CENTRE NATIONAL D'ÉTUDE SOLAIRE,

CONDAMNONS Monsieur [N] [X] [L] aux dépens de l'instance,

RAPPELONS que la présente ordonnance est de plein droit exécutoire à titre provisoire.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe les jour, mois et an susdits, et signé par la Juge et la Greffière susnommées.

La Greffière, La Juge,
Décision du 12 avril 2024
PCP JCP référé - N° RG 24/00700 - N° Portalis 352J-W-B7I-C3Y5G


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp référé
Numéro d'arrêt : 24/00700
Date de la décision : 12/04/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-12;24.00700 ?
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