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11/04/2024 | FRANCE | N°23/59370

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Service des référés, 11 avril 2024, 23/59370


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS








N° RG 23/59370 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3ONL

N° : 14

Assignation du :
06 Décembre 2023

[1]

[1] 2 Copies exécutoires
délivrées le :


ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 11 avril 2024



par François VARICHON, Vice-président au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,

Assisté de Larissa FERELLOC, Greffier.
DEMANDEUR

Monsieur [E] [B]
[Adresse 1]
[Localité 4]

représenté par Maît

re Arnaud LACROIX DE CARIES DE SENILHES, avocat au barreau de PARIS - #C2338


DEFENDERESSE

La S.A.S. CINEFRANCE STUDIOS
[Adresse 2]
[Localité 3]

représentée par Maître Benoît GOULE...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS


N° RG 23/59370 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3ONL

N° : 14

Assignation du :
06 Décembre 2023

[1]

[1] 2 Copies exécutoires
délivrées le :

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 11 avril 2024

par François VARICHON, Vice-président au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,

Assisté de Larissa FERELLOC, Greffier.
DEMANDEUR

Monsieur [E] [B]
[Adresse 1]
[Localité 4]

représenté par Maître Arnaud LACROIX DE CARIES DE SENILHES, avocat au barreau de PARIS - #C2338

DEFENDERESSE

La S.A.S. CINEFRANCE STUDIOS
[Adresse 2]
[Localité 3]

représentée par Maître Benoît GOULESQUE MONAUX de la SELAS SELAS VALSAMIDIS AMSALLEM JONATH FLAICHER et ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS - #J0010

DÉBATS

A l’audience du 07 Mars 2024, tenue publiquement, présidée par François VARICHON, Vice-président, assisté de Larissa FERELLOC, Greffier,

Nous, Président,

Après avoir entendu les conseils des parties,

EXPOSE DU LITIGE

Selon acte du 6 décembre 2023, M. [E] [B] a fait assigner la société CINEFRANCE STUDIOS devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris aux fins de condamnation à lui payer une provision de 50.000 € en principal.

Lors de l’audience du 18 janvier 2024, le juge a décidé de faire convoquer les parties à une audience de règlement amiable en application des dispositions des articles 774-1 et suivants du code de procédure civile.

A défaut d’accord des parties devant le juge chargé de l'audience de règlement amiable, l’affaire a été rappelée devant le juge saisi du litige à l’audience du 7 mars 2024 lors de laquelle l’instance a été reprise.

Aux termes de ses conclusions déposées et développées oralement à l’audience, M. [E] [B] demande au juge de:

“- CONSTATER la validité et l’exigibilité de la créance de 50.000 euros de Monsieur [B] à l’encontre CINEFRANCE STUDIOS au bénéfice de Monsieur [E] [B] ;
- CONDAMNER en conséquence la société CINEFRANCE STUDIOS à payer à Monsieur [B] la somme de 50.000 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 23 mai 2023 ;
- FAIRE INJONCTION à la société CINEFRANCE STUDIOS d’avoir à verser la somme de 50 000 euros assortie d’intérêts au taux légal sous astreinte de 1000 euros par jour à compter de la signification de la décision à venir ;
- CONDAMNER la société CINEFRANCE STUDIOS au paiement de la somme de 10.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile et de la condamner aux entiers dépens.”

Aux termes de ses conclusions déposées et développées oralement à l’audience, la société CINEFRANCE STUDIOS demande au juge de:

“A titre principal,
Juger qu’il n’y a pas lieu à référé ;
Rejeter par conséquent l’ensemble des demandes de Monsieur [E] [B] ;
A titre subsidiaire,
Rejeter l’ensemble des demandes de Monsieur [E] [B] comme infondées ;
En tout état de cause :
Condamner Monsieur [E] [B] à verser à la société Cinéfrance Studios la somme de 10.000€ en application de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens avec distraction conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.”

Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé, pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, à l'assignation introductive d’instance et aux écritures déposées par les parties.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire, il convient de rappeler qu’une demande de “constater” ne constitue pas, sauf exception, la formulation d’une prétention au sens de l’article 30 du code de procédure civile. Il n’y a donc pas lieu pour le tribunal de statuer sur la demande en ce sens figurant dans le dispositif des conclusions de M. [E] [B].

Sur la demande de condamnation de la société CINEFRANCE STUDIOS au paiement d’une provision de 50.000 € en principal

A l’appui de sa demande fondée sur l’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile et sur l’article 1104 du code civil, M. [E] [B] expose:

- qu’il est scénariste et coproducteur; que la société CINEFRANCE STUDIOS exerce pour sa part une activité de production de courts et longs métrages et de séries télévisées;
- qu’en 2019, il a entamé une collaboration avec la société CINEFRANCE STUDIOS pour concevoir et développer des séries; que dans ce cadre, il devait être rémunéré à hauteur de 5.000 € par mois; qu’aucun contrat n’a été signé par les parties; qu’en avril 2021, la société CINEFRANCE STUDIOS a interrompu le versement des paiements qu’elle lui devait en raison de difficultés de trésorerie apparues pendant la pandémie de Covid-19; qu’il a toutefois continué à travailler avec elle sur les projets de séries, raison pour laquelle la société CINEFRANCE STUDIOS lui a remis le 21 février 2022 une attestation aux termes de laquelle elle reconnaissait lui devoir la somme de 50.000 € pour ses travaux antérieurs, cette somme devant être payée à partir du mois d’avril 2022 selon un échéancier à convenir;
- que la société CINEFRANCE STUDIOS a bien rédigé les projets de contrats évoqués dans l’attestation mais ne les a finalement jamais signés; que par ailleurs, elle ne lui a pas versé sa rémunération de 50.000 € malgré les deux mises en demeure qu’il lui a adressées les 23 mai et 30 juillet 2023;
- que l’argumentation qui lui est opposée par la société CINEFRANCE STUDIOS est mensongère et se heurte au libellé parfaitement clair de l’attestation, qui ne fait nullement état de la condition alléguée par la défenderesse.

La société CINEFRANCE STUDIOS réplique:

- que la demande de paiement de M. [E] [B] se heurte à une contestation sérieuse et est en tout état de cause mal fondée;
- qu’elle fait appel à M. [E] [B] pour des travaux d’écriture concernant deux projets de séries dénommées “Animal” et “HIV”, pour lesquels elle a rémunéré le demandeur;

- que par ailleurs, elle a accepté de négocier, en tant qu’intermédiaire, pour des projets de séries qui ne la concernaient pas mais impliquaient d’autres producteurs, à savoir les sociétés MAYANE FILMS et VISU-L, en vue d’une éventuelle reprise en coproduction de ces projets;
- que cette seconde activité est celle qui a généré la rémunération de 50.000 € évoquée dans l’attestation; que la société CINEFRANCE STUDIOS n’est toutefois pas la débitrice de cette somme; qu’en effet, elle ne souhaitait assumer cette dette qu’à la condition que les sociétés MAYANE FILMS et VISU-L acceptent qu’elle-même et la société de M. [E] [B] dénommée PAGE-27 deviennent co-producteurs des projets de séries;
- que finalement, les sociétés MAYANE FILMS et VISU-L n’ont pas souhaité finaliser une coproduction avec la société CINEFRANCE STUDIOS et la société PAGE-27 de sorte que les projets de contrats n’ont jamais été signés; qu’elle n’a donc aucune raison d’assumer une dette de 50.000 € qui n’est pas la sienne.

Aux termes de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

L’article 1104 du code civil énonce que les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.

En l’espèce, M. [E] [B] verse aux débats un acte sous signature privée dénommé “Attestation” daté du 21 février 2022. Ce document, établi sur un papier à en-tête de la société CINEFRANCE STUDIOS et signé par son président, est libellé comme suit:

“Notre société mène actuellement plusieurs projets de séries avec M. [E] [B] comme scénariste et coproducteur dont l’écriture est commandée par différents diffuseurs.

Cette activité donne lieu à des contrats d’auteurs actuellement en finalisation entre notre service juridique et ses conseils, et à une rémunération ad hoc pendant l’écriture, lors de la mise en production puis pendant l’exploitation.

Par ailleurs, nous avons développé une collaboration plus large avec M. M. [B] sur d’autres projets où il est intervenu comme directeur d’écriture ou conseil sur d’autres projets.

Cette activité a généré une rémunération de 50 000 euros dont le paiement sera effectué à partir du mois d’avril 2022 selon un échéancier à convenir”.

Les termes de cette attestation sont clairs et ne comportent en eux-mêmes aucune équivoque nécessitant une interprétation par le juge.

Il ressort de l’attestation qu’à la date de sa signature, le 21 février 2022, la collaboration entre M. [E] [B] et la société CINEFRANCE STUDIOS n’avait pas donné lieu à la conclusion d’un contrat, ce que confirment les déclarations des parties, concordantes sur ce point.
La rémunération de 50.000 € évoquée dans ce document concerne des prestations d’ores et déjà réalisées par M. [E] [B] (“Cette activité a généré...”).

Tel que libellé ci-dessus, l’engagement de payer cette somme est souscrit par l’auteur de l’attestation, la société CINEFRANCE STUDIOS. Par ailleurs, le paiement n’est subordonné à aucune condition explicite ou implicite (“le paiement sera effectué...”).

Il est notable que les sociétés MAYANE FILMS et VISU-L évoquées par la société CINEFRANCE STUDIOS ne sont nulle part mentionnées dans l’attestation.

M. [E] [B] produit par ailleurs un projet de convention entre, d’une part, la société CINEFRANCE STUDIOS, et, d’autre part, lui-même et la société PAGE 27 dont il est le gérant.

Ce document, dont la société CINEFRANCE STUDIOS ne conteste pas être l’auteur, apporte un éclairage sur la rémunération de 50.000 € visée dans l’attestation du 21 février 2022.

L’exposé préalable du projet de convention dresse une liste de “projets” auquel M. [E] [B] a collaboré. Puis, l’article 1er intitulé “rémunération fixe” stipule que “CINEFRANCE STUDIOS se reconnaît débitrice” d’une somme de 50.000 € “au titre des prestations passées et non rémunérées au jour des présentes de [E] [B]”. Il est par ailleurs prévu un échéancier de règlement de cette somme au bénéfice de M. [E] [B].

Il est notable que ce projet de convention rédigé par la société CINEFRANCE STUDIOS ne comporte aucune mention des sociétés MAYANE FILMS et VISU-L.

Par ailleurs, il résulte des courriels échangés du 23 novembre 2022 au 27 avril 2023 entre la société CINEFRANCE STUDIOS et le conseil de M. [E] [B] que le projet de convention élaboré par la société CINEFRANCE STUDIOS a été progressivement amendé par les parties en vue de sa signature sans que les deux sociétés précitées soient jamais évoquées dans ces correspondances, de même que la condition dont la société CINEFRANCE STUDIOS fait état dans ses conclusions.

Au vu de l’ensemble de ces éléments, il convient de dire que la société CINEFRANCE STUDIOS n’oppose pas de contestation sérieuse à la demande de paiement formée à son encontre par M. [E] [B].

Elle sera donc condamnée à lui payer à titre de provision la somme de 50.000 €, outre les intérêts au taux légal à compter du 25 mai 2023, date de la réception par la société CINEFRANCE STUDIOS de la mise en demeure de payer adressée par le conseil de M. [E] [B] par lettre recommandée avec accusé de réception du 23 mai 2023.

La nécessité d’une astreinte n’étant pas démontrée, M. [E] [B] sera débouté de sa demande de ce chef.

Sur les demandes accessoires

La société CINEFRANCE STUDIOS sera condamnée aux dépens de l’instance.

L’équité commande de la condamner à payer à M. [E] [B] la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant par ordonnance de référé, par mise à disposition au greffe le jour du délibéré, après débats en audience publique, par décision contradictoire et en premier ressort,

Condamnons la société CINEFRANCE STUDIOS à payer à M. [E] [B] la somme provisionnelle de 50.000 €, outre les intérêts au taux légal à compter du 25 mai 2023,

Déboutons M. [E] [B] de sa demande de prononcé d’une astreinte,

Condamnons la société CINEFRANCE STUDIOS à payer à M. [E] [B] la somme de 2.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamnons la société CINEFRANCE STUDIOS aux dépens de l’instance.

Fait à Paris le 11 avril 2024

Le Greffier, Le Président,

Larissa FERELLOC François VARICHON


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Service des référés
Numéro d'arrêt : 23/59370
Date de la décision : 11/04/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 17/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-11;23.59370 ?
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