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04/04/2024 | FRANCE | N°23/10172

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp acr fond, 04 avril 2024, 23/10172


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :

à : Madame [R] [T]


Copie exécutoire délivrée
le :

à : Maître Catherine HENNEQUIN

Pôle civil de proximité


PCP JCP ACR fond

N° RG 23/10172 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3UMK

N° MINUTE : 9







JUGEMENT
rendu le 04 avril 2024


DEMANDERESSE

S.A. REGIE IMMOBIILIERE DE LA VILLE DE [Localité 3],
[Adresse 1]

représentée par Maître Catherine HENNEQUIN de la SELAS LHUMEAU GIORGETTI HENN

EQUIN & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS,

DÉFENDERESSE

Madame [R] [T],
[Adresse 2]

comparante en personne

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Romain BRIEC, Juge, juge des contentieux de...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :

à : Madame [R] [T]

Copie exécutoire délivrée
le :

à : Maître Catherine HENNEQUIN

Pôle civil de proximité

PCP JCP ACR fond

N° RG 23/10172 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3UMK

N° MINUTE : 9

JUGEMENT
rendu le 04 avril 2024

DEMANDERESSE

S.A. REGIE IMMOBIILIERE DE LA VILLE DE [Localité 3],
[Adresse 1]

représentée par Maître Catherine HENNEQUIN de la SELAS LHUMEAU GIORGETTI HENNEQUIN & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS,

DÉFENDERESSE

Madame [R] [T],
[Adresse 2]

comparante en personne

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Romain BRIEC, Juge, juge des contentieux de la protection assisté de Aurélia DENIS, Greffier,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 09 février 2024

JUGEMENT
contradictoire et en premier ressort prononcé par mise à disposition le 04 avril 2024 par Romain BRIEC, juge des contentieux de la protection assisté de Aurélia DENIS, Greffier

Décision du 04 avril 2024
PCP JCP ACR fond - N° RG 23/10172 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3UMK

EXPOSE DU LITIGE

Par contrat sous seing privé en date du 25 février 2013, la SA REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE [Localité 3] (RIVP) a donné à bail à Madame [R] [T] un appartement à usage d’habitation situé au [Adresse 2], pour un loyer mensuel de 652,58 euros outre 185 euros de provision sur charges.

Des loyers étant demeurés impayés, la RIVP a fait signifier par acte de commissaire de justice un commandement de payer la somme de 4052,72 euros, à titre principal, correspondant à l’arriéré locatif, terme de juin 2023 inclus et visant la clause résolutoire contractuelle, le 24 juillet 2023.

Par acte de commissaire de justice en date du 11 octobre 2023, la RIVP a fait assigner Madame [R] [T] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris aux fins de voir, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :
- constater le jeu de la clause résolutoire insérée au contrat de bail liant les parties sur le fondement de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989 et subsidiairement prononcer la résiliation judiciaire du bail aux torts du preneur,
- ordonner l'expulsion du preneur et de tout occupant de son chef avec le concours de la force publique et d'un serrurier si besoin est,
- ordonner le transport et la séquestration des meubles en tel lieu qu'il lui plaira, aux frais et aux risques du défendeur,
- condamner Madame [R] [T] à lui payer les loyers et charges impayés au 27 septembre 2023, soit la somme de 4683,10 euros, sous réserve des loyers à échoir, avec intérêts légaux à compter du commandement de payer, ainsi qu'une indemnité d'occupation jusqu'à libération effective des lieux d'un montant mensuel égal au montant du loyer et des charges si le bail s'était poursuivi,
- condamner Madame [R] [T] à lui payer la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens en ce compris le coût du commandement de payer.

Au soutien de ses prétentions, la RIVP expose que plusieurs échéances de loyers sont demeurées impayées malgré un commandement de payer visant la clause résolutoire insérée au contrat de bail délivré le 24 juillet 2023, et ce pendant plus de deux mois.

L’affaire a été appelée et retenue à l'audience du 9 février 2024.

A cette audience, la RIVP, représentée par son conseil, a sollicité le bénéfice de son acte introductif d'instance, et a actualisé sa créance à la somme de 7206,93 euros, selon décompte en date du 1er février 2024. Elle a indiqué que le dernier réglement de la totalité du loyer date de novembre 2023. Ayant connaissance de la situation particulière de la défenderesse, elle ne s’est pas opposée à l’octroi de délais de paiement venant suspendre les effets de la clause résolutoire.

Madame [R] [T] a comparu en personne et a reconnu le montant de la dette locative, mais a demandé à pouvoir se maintenir dans les lieux en reprenant le paiement du loyer courant, outre la somme de 100 euros par mois pendant 12 mois puis 250 euros par mois pendant 24 mois, en règlement de l'arriéré. Elle a expliqué sa dette locative par d’importants problèmes de santé ayant engendré une hospitalisation longue. Durant cette période, elle a exposé avoir eu de nombreuses amendes de stationnement. En conséquence, elle fait l’objet de saisies en paiement des amendes si bien que les prélèvements relatifs au loyer sont depuis régulièrement rejetés. Elle a en outre indiqué vivre seule et percevoir une pension d’invalidité de 880 euros ainsi que 220 euros d’AAH. Elle a enfin fait état que ses enfants majeurs l’aident à apurer sa situation financière.

La décision a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 4 avril 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité de l'action

Une copie de l’assignation a été notifiée à la préfecture de [Localité 3] par la voie électronique le 12 octobre 2023, soit plus de six semaines avant l’audience du 9 février 2024, conformément aux dispositions de l’article 24 III de la loi n°89-462 du 06 juillet 1989.

Par ailleurs, la RIVP justifie avoir saisi la commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives (CCAPEX) également par la voie électronique le 25 juillet 2023, soit deux mois au moins avant la délivrance de l’assignation le 11 octobre 2023, conformément aux dispositions de l’article 24 II de la loi n°89-462 du 06 juillet 1989.

L’action est donc recevable.

Sur le bien-fondé de la résiliation du bail

L'une des obligations essentielles du preneur d'un contrat de bail est celle du paiement des loyers aux termes convenus en application de l'article 7 de la loi n°89-462 du 06 juillet 1989.

Aux termes de l'article 1224 du code civil, la résolution d'un contrat résulte soit de l'application d'une clause résolutoire soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice. L'article 1229 du même code précise que lorsque les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l'exécution réciproque du contrat, il n'y a pas lieu à restitution pour la période antérieure à la dernière prestation n'ayant pas reçu sa contrepartie et que, dans ce cas, la résolution est qualifiée de résiliation.

En matière de bail, l'article 24 I de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 dispose que toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux.

En l'espèce, le bail conclu le 25 février 2013 contient une clause résolutoire et un commandement de payer visant cette clause a été signifié le 24 juillet 2023, pour la somme en principal de 4052,72 euros. Ce commandement rappelle la mention que le locataire dispose d'un délai de deux mois pour payer sa dette, comporte le décompte de la dette et l'avertissement qu'à défaut de paiement ou d'avoir sollicité des délais de paiement, le locataire s'expose à une procédure judiciaire de résiliation de son bail et d'expulsion, outre la mention de la possibilité pour le locataire de saisir le fonds de solidarité pour le logement de son département aux fins de solliciter une aide financière et de saisir, à tout moment, la juridiction compétente aux fins de demander un délai de grâce sur le fondement de l'article 1343-5 du code civil. Il est ainsi régulier en sa forme.

Il correspond par ailleurs bien à une dette justifiée à hauteur du montant des loyers échus et impayés (voir ci-après au titre de la demande en paiement) et est ainsi valable.

Ce commandement est enfin demeuré infructueux pendant plus de deux mois, de sorte qu’il y a lieu de constater que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire contenue dans le bail étaient réunies à la date du 24 septembre 2023.

Sur la demande en paiement au titre de l'arriéré locatif

Madame [R] [T] est redevable des loyers impayés en application des articles 1103 du code civil et 7 de la loi du 6 juillet 1989.

La RIVP produit un décompte démontrant que Madame [R] [T] reste lui devoir la somme de 7206,93 euros à la date du 1er février 2024.

Pour la somme au principal, Madame [R] [T] n’apporte aucun élément de nature à contester le principe ni le montant de la dette, qu’elle reconnaît d’ailleurs à l’audience. Elle sera donc condamnée au paiement de la somme de 7206,93 euros, avec les intérêts au taux légal sur la somme de 4052,72 euros à compter de la délivrance du commandement de payer, et à compter de la présente décision pour le surplus conformément aux dispositions de l'article 1231-6 du code civil.

Sur les délais de paiement

Les articles 24 V et VII de la loi du 6 juillet 1989 disposent que le juge peut, même d'office, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, au locataire en situation de régler sa dette locative et qui aurait repris le paiement du loyer courant. Cette dernière condition peut cependant être écartée à la demande du locataire ou du bailleur. Pendant le cours des délais ainsi accordés, les effets de la clause de résiliation de plein droit sont suspendus. Si le locataire se libère dans le délai et selon les modalités fixés par le juge, la clause de résiliation de plein droit est réputée ne pas avoir joué ; dans le cas contraire, elle reprend son plein effet.

En l'espèce, Madame [R] [T] a fait état à l’audience de ses ressoures mensuelles (pension d’invalidité et AAH) et a indiqué qu’elle est soutenue financièrement par ses enfants majeurs pour le paiement des loyers et de sa dette locative. Elle a également exposé avec force détails les causes de sa dette locative, indépendantes de sa volonté, de même que les démarches initiées pour retrouver une situation financière saine mais qui n’ont pas encore abouties. La bailleresse a accepté enfin que les effets de la clause résolutoire soient suspendus en cas d’octroi de délais de paiement.

Compte tenu de ces éléments et des propositions de règlements formulées à l’audience, Madame [R] [T] sera autorisée à se libérer du montant de sa dette selon les modalités qui seront rappelées au dispositif.

Il convient néanmoins de prévoir, en particulier au vu de la situation financière dégradée de Madame [R] [T], que tout défaut de paiement des loyers et charges courants d’une part, des délais de paiement d’autre part, justifiera la condamnation de Madame [R] [T] au paiement d’une indemnité mensuelle d’occupation égale au montant du loyer et charges si le bail s'était poursuivi.

Sur les demandes accessoires

Madame [R] [T], partie perdante, supportera la charge des dépens en application de l'article 696 du code de procédure civile, qui comprendront notamment le coût du commandement de payer.

Il serait inéquitable de laisser à la charge du bailleur les frais exposés par lui dans la présente instance et non compris dans les dépens. La somme de 300 euros lui sera donc allouée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La présente décision est exécutoire à titre provisoire, conformément à l'article 514 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le juge des contentieux de la protection statuant publiquement, après débats en audience publique, par jugement mis à disposition au greffe contradictoire et en premier ressort,

CONSTATE que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire figurant au bail conclu le 25 février 2013 entre la SA REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE [Localité 3] (RIVP) et Madame [R] [T] concernant l’appartement à usage d’habitation situé au [Adresse 2] sont réunies à la date du 24 septembre 2023 ;

CONDAMNE Madame [R] [T] à verser à la RIVP la somme de 7206,93 euros (décompte arrêté au 1er février 2024, incluant la mensualité de janvier 2024), avec les intérêts au taux légal à compter du 24 juillet 2023 sur la somme de 4052,72 euros et à compter de la présente décision pour le surplus ;

AUTORISE Madame [R] [T] à s’acquitter de cette somme, outre le loyer et les charges courants, en 12 mensualités de 100 euros chacune puis 23 mensualités de 250 euros chacune et enfin et une 36ème mensualité qui soldera la dette en principal et intérêts ;

PRECISE que chaque mensualité devra intervenir avant le 10 de chaque mois jusqu'à extinction de la dette et pour la première fois le 10 du mois suivant la signification du présent jugement ;

SUSPEND les effets de la clause résolutoire pendant l’exécution des délais accordés ;

DIT que si les délais accordés sont entièrement respectés, la clause résolutoire sera réputée n’avoir jamais été acquise ;

RAPPELLE qu'en application de l'article R. 824-29 du code de la construction et de l'habitation, sous réserve du respect de ce plan d'apurement, l'aide personnelle au logement est maintenue ou rétablie dans les conditions prévues à l'article R. 824-26 ;

RAPPELLE qu’en revanche, toute mensualité, qu'elle soit due au titre du loyer et des charges courants ou de l’arriéré, restée impayée sept jours après l'envoi d'une mise en demeure par lettre recommandée avec avis de réception justifiera :
* que la clause résolutoire retrouve son plein effet ;
* que le solde de la dette devienne immédiatement exigible ;
* qu'à défaut pour Madame [R] [T] d’avoir volontairement libéré les lieux dans les deux mois de la délivrance d’un commandement de quitter les lieux, la RIVP puisse faire procéder à son expulsion ainsi qu’à celle de tous les occupants de son chef, conformément à l'article L.412-1 du code des procédures civiles d'exécution, avec le concours d’un serrurier et de la force publique si besoin est, étant rappelé que le sort du mobilier garnissant le logement est prévu par les articles L.433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution ;
* que Madame [R] [T] soit condamnée à verser à la RIVP une indemnité mensuelle d’occupation égale au montant du loyer et des charges qui auraient été dus en l’absence de résiliation du bail à compter du 2 février 2024, jusqu’à la date de la libération effective et définitive des lieux caractérisée par la remise des clés à la RIVP ou à son mandataire ;

CONDAMNE Madame [R] [T] à verser à la RIVP une somme de 300 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE le surplus des demandes ;

CONDAMNE Madame [R] [T] aux dépens, qui comprendront notamment le coût du commandement de payer ;

RAPPELLE que le présent jugement est exécutoire de plein droit à titre provisoire.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition les jour, mois et an susdits par le juge des contentieux de la protection et le greffier susnommés.

Le greffier, Le juge des contentieux de la protection


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp acr fond
Numéro d'arrêt : 23/10172
Date de la décision : 04/04/2024
Sens de l'arrêt : Expulsion "conditionnelle" ordonnée au fond avec suspension des effets de la clause résolutoire

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-04;23.10172 ?
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